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on fait entendre une r, & vous n'avez pas dit qu'il en fallût deux.

L'ABBÉ.

J'ai dit que l'r qui caractérise l'infinitif ne pouvoit être fuivie tout au plus que d'un e muet. Or l'r qu'on fait entendre dans ce mot eft fuivie d'un i; il en faut donc néceffairement une autre, quoique la prononciation ne l'exige pas toujours: je veux mourir, & non je veux mouri. Pour la même raifon on écrit je veux éclairer, je veux montrer, je veux attirer, & non je veux éclairé, montré, attiré, &c. nonobftant l'r qui commence la derniere fyllabe, parce qu'elle n'eft pas fuivie d'un e muct, mais d'un é aigu.

comme

Nous ferons, relativement à l'infinitif, deux claffes ou conjugaifons de verbes: la première renfermera tous ceux dont l'infinitif eft terminé par er, aimer, donner, parler, &c. & tous les autres feront compris dans la feconde conjugaifon : vouloir, battre, rire, venir, croire, &c.

LE COMTE.

Eft-ce que vous ne comptez pas quatre conjugaifons?

L'ABBÉ.

Si on examinoit tout ce qui eft propre à chaque verbe, on en trouveroit bien davantage; mais, en n'admettant que ces deux claffes, toutes les autres peuvent être regardées comme de fimples divifions.

Chacune de ces claffes ou conjugaifons détermine, à quelques exceptions près, toutes les inflexions des verbes qui y font compris. Nous en ferons premièrement l'application à la phrafe indicative, qui eft l'expreffion la plus fimple de nos penfées, & celle qui fe préfente le plus naturellement. Nous établirons d'abord des règles pour le temps préfent; & nous obferverons que, dans les verbes de la première conjugaison, c'est-à-dire, ceux dont

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l'infinitif eft terminé par er, les trois perfonnes du fingulier fe forment en retranchant l'r finale de l'infinitif, & ajoutant une s à la feconde perfonne felon la règle générale que nous avons déjà établie

Verbe AI MER. J'aime, tu aimes, il aime ou elle aime.
PRIER. Je prie, tu pries, il prie ou elle prie.
DECORER. Je décore, tu décores, il décore ou elle décore.

Dans la feconde conjugaifon, qui, comme nous venons de le dire, renferme tous les verbes dont l'infinitif n'eft point terminé par er, les deux premières perfonnes du fingulier finiffent par s ou par , & la troifième par t, d ou c. Cette dernière terminaifon n'a lieu que dans les verbes vaincre &

convaincre.

Verbe FINIR. Je finis, tu finis, il finit ou elle finit. PRENDRE. Je prends, tu prends, il ou elle prend. VALOIR. Je vaux, tu vaux, il vaut ou elle vaut. CONVAINCRE. Je convaincs, tu convaincs, il convainc on elle convainc.

LA MARQUISE.

Je fuis bien aife de connoître cette règle, car il y a beaucoup d'occafions où je ne fais fi le verbe doit finir par une ou par une s. C'eft donc quand l'infinitif finit par er, que les trois perfonnes du fingulier finiffent par e, en y ajoutant une s à la feconde?

L'ABBÉ.

Oui, Madame; mais prenez garde que nous ne parlons que du préfent, & feulement dans le mode indicatif, dans le mode qui indique fimplement nos penfées les autres temps & les autres modes ont fouvent des loix toutes différentes.

SOPHIE.

Je ne crois pas qu'il me foit jamais poffible d'entendre, toutes ces règles-là.

L'A BB É.

Ne vous découragez pas, Mademoiselle; la conjugaison des verbes eft la partie la plus conféquente de l'orthographe. La phrafe indicative offré plus de difficultés que les autres, & fur-tout au temps préfent; mais quand vous aurez furmonté ces premiers obftacles, le refte ne vous coûtera prefque aucun effort.

Pour plus de clarté comparons deux verbes différents dont le fingulier préfent fe prononce de la

même manierc.

Je lie des bouquets, tu lies des bouquets, il lie ou elle lie des bouquets.

Je lis la bible, tu lis la bible, il lit ou elle lit la bible.

SOPHIE.

i

Je vois qu'il y a quelques différences dans l'orthographe de ces verbes, mais je ne faurois en comprendre la cause.

L'ABBÉ.

Examinez quels font les infinitifs des verbes que je viens de citer. Par exemple, quel eft celui du premier je lie des bouquets?

SOPHIE.

Il faut donc dire je veux?

L'ABBÉ.

Oui, Mademoiselle.

SOPHIE.

Je veux lier des bouquets. Je vois que l'infinitif de cette phrafe eft lier, qu'on prononce lié, comme s'il n'y avoit point d'r.

L'ABBÉ.

T.

Préfentement vous n'avez qu'à retrancher l'r de cet infinitif lier, & vous aurez les trois perfonnes du fingulier: il faudra feulement ajouter une s à la feconde, fuivant la règle générale.

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SOPHIE.

J'y fuis préfentement. Voilà comme je dois écrire : Je lie des bouquets, tu lies des bouquets, il ou elle lie des bouquets.

L'ABBÉ.

Ce verbe eft de la première conjugaifon, parce que fon infinitif lier eft terminé par er tous les verbes de cette conjugaifon, qui font en très-grand nombre, finiflent comme celui-là, au fingulier préfent par e, es, e. Pafions au verbe fuivant: je lis la bible. Dites pareillement je veux.

SOPHIE.

Je veux lire la bible. C'est donc lire, qui eft l'infinitif de ce verbe-là ?

L'ABBÉ.

Oui, Mademoiselle; & comme cet infinitif n'eft pas terminé par er, il eft compris dans la feconde conjugaifon par conféquent il faut que les deux premieres perfonnes du fingulier préfent indicatif finiffent par s, & la troifième par un t

Je lis la bible, tu lis la bible, il ou elle lit la bible.

SOPHIE.

J'entends bien ceci préfentement. Je veux lier un bo quet, je lie un bouquet; je veux lire la bible je lis la bible, &c.

T

LA MARQUISE.

Mais vous dites que les verbes de la feconde conjugaifon peuvent aufi finir par x aux deux premieres perfonnes du fingulier préfent, & à la troifieme par d ou par c.

L'ABBÉ

Oui, Madame; mais ce font des cas particuliers: nous en parlerons bientôt. Alors l'x fait la fonction d'une s, ce qui arrive en bien d'autres circonftan

ces; & led ou le c remplace le t final de la troifième perfonne.

LA MARQUIS E.

Ces règles pour le préfent fingulier me paroiffent fort aifées à fuivre, quand les verbes font feuls; mais s'ils étoient mêlés avec d'autres mots, pourrois jamais les diftinguer, ni favoir à quelle conjugaifon ils fe rapportent.

L'ABBÉ.

Cela n'exige qu'un peu plus d'attention. Examinons ces phrafes, qui font au fingulier de l'indicatif préfent.

Le Ciel m'envoie des biens que je ne prévois pas.

Quand on part pour l'armée, tu te pares comme un Adonis.

LA MARQUISE

Je crois reconnoître les verbes dans ces phrases: ce font, fi je ne me trompe, les mots m'envoic, je ne prévois, on part, tu te pares; car pour parler au futur, il faudroit changer ces mots, & dire :

Le ciel m'enverra des biens que je ne prévoirai pas. Quand on partira pour l'armée, tu te pareras comme un Adonis.

L'ABBÉ.

Le refte ne fera pas plus difficile. Voyez quels font les infinitifs de ces verbes.

LA MARQUISE.

Il faut donc dire aufli, moi, je veux.. ?
L' AB B É.

Employez ce verbe à la perfonne qui eft indiquée par le fens du difcours. Dites, par exemple, à la troifième, le ciel veut.

LA MARQUISE.

J'y fuis. Le ciel veut m'envoyer des biens que je ne veux pas prévoir. Quand on veut part ir pour

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