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qu'à Cléopâtre. Cependant, malgré les vices du gouvernement, il paraît que l'Égypte continua de prospérer, si l'on en juge par les richesses qu'elle renfermait au temps de cette princesse, dont la magnificence étonna César et Antoine, accoutumés au faste de l'Asie, Robertson assure, d'après l'évaluation de Pline, que les deux perles qui ornaient les oreilles de Cléopâtre avaient coûté plus de cent soixante mille livres sterlings.

La reine d'Égypte, qui avait su plaire à César et subjuguer Antoine, ne doutait pas de l'effet que ses charmes produiraient sur Octave; mais ayant été trompée dans ses espérances, elle préféra la mort à la honte d'òrner le char du vainqueur, et avec elle finit la dynastie des Ptolémées; l'Égypte fut réduite en province romaine. Ce fut avec les trésors qu'Octave en rapporta, qu'il trouva les moyens de récompenser ses soldats, de remettre tout ce qui était dû au trésor public, de donner des spectacles et de faire d'immenses largesses au peuple.

On estime que le revenu des derniers Ptolémées s'élevait au-dessus de soixante millions tournois; il suivit depuis les progrès du commerce et s'accrut considérablement sous l'administration romaine.

L'Égypte soumise, comme la majeure partie de l'univers connu, au pouvoir des Romains, ne joue plus le même rôle dans l'histoire ; cependant on peut

juger de l'importance qu'on attachait à sa fertilité par le passage suivant de Tacite :

>> Sous le consulat de M. Silanus et L. Norbanus, » Germanicus alla en Égypte pour en connaître les » antiquités. Il prétextait les intérêts de cette pro» vince, où il fit baisser le prix des grains, en faisant » ouvrir les greniers; il se concilia une grande popu»larité en se présentant sans gardes, les pieds décou» verts et vêtu à la manière des Grecs, à l'exemple » de Scipion, qui n'avait pas craint de paraître ainsi >> en Sicile pendant la guerre punique: Tibère reprit >> avec douceur Germanicus sur le costume et les ma>> nières qu'il avait en Egypte, mais il le blâma » sévèrement de ce qu'il avait, au mépris des lois » d'Auguste, été à Alexandrie sans la permission >> de l'Empereur. En effet, Auguste, parmi d'autres >> précautions de gouvernement, avait défendu qu'au>> cun sénateur ou aucun homme marquant de » l'ordre des chevaliers, n'entrât en Égypte » permission, de peur qu'il ne coupât les subsistances » à l'Italie ; quiconque était maître de l'Égypte et >>des abords de terre et de mer, pouvait, avec » de faibles moyens, s'y défendre contre d'immenses >> forces >>.

sans

Cette opinion de l'importance de l'Égypte sous le rapport militaire, est encore constatée par Tacite qui, en parlant de l'élection de Vespasien par les

légions de l'Inde, ajoute qu'il fut presqu'en même temps proclamé par celles d'Égypte, et qu'il ne perdit pas un moment pour faire cccuper les points prinpaux de cette province.

Sous le règne fortuné des Antonins, la prospérité et les richesses de l'Égypte ne firent que s'accroître. Alexandrie, qui ne le cédait qu'à la capitale du Monde en magnificence, était restée le centre du commerce. Par un vent favorable, les vaisseaux partis de l'embouchure du Nil se rendaient en vingt jours à Scio, et portaient en Italie non-seulement une partie des blés nécessaires à sa subsistance, mais des marchandises de toute espèce et du plns grand prix de la soie dont une livre s'echangeait contre une livre d'or, des diamans, des perles alors autant estimées que les diamans, et des aromates destinés aux cérémonies du culte ou aux pompes des funérailles. Ces objets précieux étaient apportés de la Perse, de l'Arabie et de l'Inde à Alexandrie, d'où ils se répandaient ensuite sur les bords du Pont-Euxin ou de la Méditerranée.

Ce n'était pas seulement sous le rapport du commerce que la capitale de l'Égypte fixait ses regards; elle continuait d'être le centre des lumières et le rendez-vous des savans et des philosophes. C'est dans le Musée que prit naissance le syncrétisme, dont le but était de concilier les anciennes sectes de la Grèce,

et plus tard, depuis l'établissement de la religion chrétienne, l'éclectisme, qui tendait moins à concilier les opinions des philosophes qu'à choisir les meilleures pour en former un code de morale et d'instruction, projet utile, s'il n'était devenu, dans la suite, la source des querelles religieuses qui désolèrent le monde !

Mais lorsque l'Empire fut tombé entre les mains de princes féroces ou imbécilles, ce vaste colosse fut ébranlé de toutes parts; l'autorité, faible comme ceux qui en étaient dépositaires, ne fut plus capable de maintenir l'observation des lois, et l'anarchie désola successivement les différentes provinces de la domination romaine. L'Égypte fut une des premières à ressentir ce fléau. Sous Gallius, vers l'an 260, Alexandrie, dont la population était de 300,000 hommes libres et d'autant d'esclaves, devint le théâtre d'une guerre civile qui ( à quelques trèves .près) dura l'espace de douze ans. Toute communication fut coupée entre les différens quartiers de cette malheureuse cité, chaque rue fut inondée de sang, chaque bâtiment un peu considérable fut converti en citadelle; enfin ces horribles désordres ne s'apaisèrent qu'après qu'une portion considérable de la ville eut été détruite, et la majeure partie de ses habitans massacrés ou moissonnés par la famine et la peste, qui, à cette époque, emportèrent en huit

ans, suivant le calcul de Gibbon, la moitié de l'espèce humaine dans l'ancien hémisphère.

L'Égypte, alors soumise aux Empereurs de Constantinople, paraît avoir échappé aux invasions des Barbares qui inondèrent l'empire romain. Dans le même temps que les Goths et les Huns faisaient des incursions en Italie, et que les Vandales s'établissaient en Afrique, l'Égypte jouissait encore de la paix, ou du moins n'était troublée que par de misé rables questions de religion, qui annonçaient la chute d'un gouvernement qui en faisait sa principale occupation.

C'est une chose assez remarquable, que ce pays, que l'on regarde avec justice comme la première patrie des sciences, ait été aussi celle des ordres monastiques. Saint Antoine, emporté par une imagination ardente, se livra le premier à la vie ascétique, et peupla la Thébaïde, la Libye et plusieurs parties de l'Égypte de plus de 50 mille de ses disciples. Saint Athanase, pendant son exil à Rome, y porta ces nouvelles institutions qui se répandirent rapidement dans toute la chrétienté.

C'est à l'époque du patriarcat de Saint Athanase, que s'éleva la grande querelle avec Arius, né à Alexandrie, et chef de la secte à laquelle il donna son nom. Vinrent ensuite celles de saint Cyrille et Nestorius, et une multitude d'autres qui, pendant

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