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tique. Burton dit en effet : « Notum est illud Francisci Accursii quoties ad Homeri versus a Justiniano citatos pervenit græcum est, inquit, non potest legi. De iisdem temporibus intelligendus Claudius Espencæus.... cum ait Græcum aliquid nosse fuisse suspectum, Ebraice autem prope Hæreticum. »Voilà donc encore un de ces mots historiques qu'il faut se résigner à oublier (').

Pendant que le jurisconsulte Accurse de Florence enseignait à Bologne, cette cité avait l'honneur de posséder parmi ses enfants le dominicain Bonaccurse. Il s'était de bonne heure appliqué à l'étude et surtout à celle du grec. Il fut donc, vers l'année 1230, envoyé en Orient afin d'y éteindre le schisme de Photius. En prêchant la parole de Dieu soit à Candie, soit à Négrepont, ou même dans Constantinople, il se rendit la langue grecque si familière qu'il composa en grec et en latin plusieurs ouvrages utiles aux missionnaires. Entre ces ouvrages, il faut citer le Thesaurus veritatis fidei.

L'an 1320 un dominicain du nom d'André Dotto trouva ce traité dans les manuscrits du couvent de l'île de Négrepont. C'est probablement le même ouvrage qui est cité par Lequien dans la préface de son édition de Saint Jean-Damascène. Il dit qu'en feuilletant les manuscrits de la Bibliothèque de Colbert, il mit la main sur un ou deux qui contenaient une collection de morceaux extraits des écrivains ecclésiastiques et surtout des ouvrages des Pères grecs que Bonaccurse avait traduits du latin en grec (3).

Crémone revendique la gloire d'avoir eu dans ce siècle quatre hellénistes. Ferdinand Bresciani qui vivait en

(1) P. 98.

(2) P. 100. « Qui collectionem latino-græcam continet variarum Laciniarum et Patrum Scriptorum, et Ecclesiasticorum, ac præsertim Græcorum operibus congestarum, quos Bon-Accursius ord. præd. alumnus sæculo XIII, medio ex idiomate latino in græcum transtulerat ut nostris usui essent adversus schismaticos. >

l'an 1226, Girolamo Salinerto, médecin fort célèbre vers l'an 1230, Valère Stradiverto à peu près à la même époque, et Rodolfino Cavalliero à la fin du XIIIe siècle. Le savant Arisi, dans sa Cremona Letteraria (), cite deux volumes de lettres rédigées en grec qui appartiennent au premier; il dit du second qu'il fut au courant du grec « litterarum et vocum græcarum non expers; » du troisième qu'il se distingua non-seulement par la finesse de ses pensées et la force de ses raisonnements, mais encore par la connaissance des langues latine, grecque et hébraïque; sur le quatrième enfin il rapporte cette inscription qui se lit, dit-il, dans l'Église du SaintSépulcre : Rudolfinus Cavallerius Phys. clariss. Philos. et astronomus eruditissimus, Græcæ et hebraicæ linguæ doctissimus in hoc tumulo jacet, qui obiit IX. Kal. octobris anno ab incarnatione Domini MCCLXXXXVII (2). »

Jean Babbi vers l'an 1286 a illustré Gênes, sa patrie, et l'Ordre des Frères Prêcheurs par son profond savoir. On peut lire dans Bayle les éloges qu'il lui donne. Il n'était pas étranger à la langue grecque, on peut le conclure de ce qu'il dit au début de son Theologicon, qui se conserve en manuscrit à la bibliothèque du Vatican: hoc difficile est scire et maxime mihi non bene scienti linguam græcam (3). » Son Catholicon ou Lexicon prouve qu'il savait plus de grec qu'il ne le dit par un sentiment de modestie. On a prétendu qu'il n'avait fait que copier les lexiques de Papia et d'Huguccione; quoi qu'il en soit de cette allégation, on ne peut pas croire qu'il ait été totalement étranger à la connaissance du grec. Ce lexique a mérité de Fabricius () l'éloge que

(1) T. I. p. 106 etc. Parme 1702.

(2) P. 103.

(3) Echard, T. I, Scriptor. Ord. Prædic. p. 462.

(4) T. I, p. 162. Bibl. Media et infimæ latinit. edit. Patarina.

voici Catholicon vel Lexicon, minime est pro illa ætate contemnendum. » La première édition est de 1450 (Mayence). Il a été très-souvent réimprimé, et traduit en français; il servait encore en 1759 dans les écoles de Paris (1).

Pierre Appone ou d'Abano, nommé encore Petrus Paduanus, avait étudié la philosophie, la médecine et l'astrologie (1298). On peut croire que, suivant le dicton populaire en France, il s'était persuadé que « médecin sans grec est prestre sans latin. » La médecine, en effet, tirait un si grand profit des livres grecs, ou des livres arabes traduits en grec qu'il semble probable que Pierre d'Abano ne dut point ignorer cette langue. Ces conjectures sont confirmées par le témoignage de Jacques Philippe de Bergame, contemporain et presque compatriote du savant qui nous occupe. Il dit de lui qu'il ajouta beaucoup aux problèmes d'Aristote et qu'il traduisit plusieurs ouvrages de Galien (2). On a dit que Pierre d'Abano avait été ou à Constantinople ou à Athènes ou dans quelque île grecque. Il est difficile de le prouver; mais on ne saurait lui refuser l'honneur de terminer cette liste des neuf italiens hellénistes au XIII° siècle (3).

(1) P. 105.

(2) Bibliotheca Latina, D. Marci, p. 213. «Patria Patavinus... eruditissimus vir imprimis ad Aristotelis problemata multa addidit... librum quoque Galeni de Collera nigra de regimine sanitatis... cum aliis multis ipse transtulit. A la bibliothèque Saint-Marc de Venise parmi les restes des manuscrits que Pétrarque avait donnés à l'Eglise du même nom on lit : « explicit liber G. Galeni Terapeutice methodi, et per consequens explicit, quam deficiebat hic prius de translatione Ugotionis VIII. Libri Terapeutice facultatis complete translatus per Magistrum Petrum Paduanum. » P. 107. (3) P. 108

XXIX.

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En 1311, au début du XIVe siècle, un concile général était assemblé à Vienne, en France; le principal objet de ses délibérations était la réunion des deux Eglises de l'Orient et de l'Occident. Il parut aux évêques qui composaient cette assemblée qu'on ne pouvait espérer d'obtenir la réunion des deux Eglises, et de la maintenir, si une fois elle était opérée, qu'à la condition d'une connaissance suffisante de la langue grecque de la part des théologiens de l'Occident. Il fut donc décrété qu'on ouvrirait des écoles publiques destinées à l'enseignement des langues orientales dans un grand nombre de cités importantes de l'Italie, comme à Bologne, à Rome et partout où la Curie romaine pourrait résider. Il devait y avoir dans chacune de ces villes deux maîtres chargés d'enseigner la langue grecque, et de travailler à traduire en latin les livres écrits dans la langue de Constantinople. S'il est vrai de dire que le texte imprimé des décrétales ne fait mention que des langues hébraïque, chaldaïque et arabe, il faut savoir que la langue grecque est désignée dans le texte manuscrit du décret (Rome 1751). C'est ce qu'affirme Joseph Caraffa, dans un ouvrage intitulé de Professoribus Gymnasii Romani (1).

Au Concile général de Lyon, rassemblé pour le même objet que celui de Vienne, Humbert de Romans, cin

(1) P. 117. « In antiquioribus codicibus Græca lingua additur Hebraicæ, Chaldaicæque, et quidem congruenter ad optimum pontificis consilium de hisce studiis instituendis. Duo enim Clementem (V) patresque Viennenses ad hanc orientalium linguarum notitiam commendandam potissimum impulere. Quorum unum est, ut divinæ litteræ, quæ Hebræo, Græcove scriptæ fuerunt sermone, et in Arabicum, Syriacum, Chaldaicum translatæ, melius faciliusque intelligerentur, ac explanarentur; alterum ut Orientales a Catholicis dissidentes facilius commodiusque ad unitatem perducerentur. »

quième maître général de l'ordre des prédicateurs croyait que la connaissance du grec était la plus nécessaire des choses pour procurer la réunion des deux Eglises. Il regrettait que dans la Cour Romaine il y eût si peu d'hommes au courant de la langue grecque, et qu'on fùt obligé d'avoir recours à des interprètes toujours suspects « de quibus nescitur utrum intelligant aut decipiantur (1) »

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Pour répondre aux voeux du Concile de Vienne, Clément V ouvrit à Rome une école de grec. Burton reconnaît que cette institution eut les plus heureux effets. Ils ne restèrent pas enfermés dans l'Italie, ils se firent sentir même à l'Angleterre, car cet historien attribue à l'institution de cette école les progrès qu'on vit se produire en grec dans la Grande-Bretagne (2).

On peut dire à la gloire des Dominicains en général qu'ils ont été pleins de zèle à répandre le grec, et parmi eux on signale Dominique Cavalca qui traduisit en latin beaucoup de livres grecs (3).

L'Ordre de Saint-François produisit dans ce siècle quelques Frères instruits dans les langues de l'Orient. Un d'eux, contemporain de Cavalca, fut le frère Angelo Del Cingolo. On vantait en lui le savoir et l'éloquence; on l'admirait surtout pour ses connaissances en grec. Il traduisit l'ouvrage de Jean Climaque, le Dialogue de Macaire, et un traité de Saint Jean-Chrysostome. C'est ce qui résulte d'une notice écrite par le Jésuite Rader (Radero) dans la première édition de Paris de Jean Climaque. Après cela, il n'y a pas à s'arrêter au

(1) P. 118.

(2) P. 118. « Maxime vero floruerunt apud nos ista doctarum linguarum studia ex quo Clementis quinti constitutione in Concilio Viennensi apud nos cum paucis aliis Academiis instituta sunt atque commendata. Hinc tanquam ex equo trojano provenerunt viri præstantissimi atque harum litterarum studiis longe celebres. »

(2) P. 121.

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