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4o Sous l'épiscopat de Martin Ier (1094-1101), dont Pélage fut le coadjuteur, puis sous l'épiscopat de Pélage (11011129), d'autres événements sollicitèrent l'attention d'Oviedo. Les conciles cherchent à montrer qu'à l'époque des rois asturiens l'évêque d'Oviedo ne jouissait pas seulement des prérogatives métropolitaines; ils cherchent à montrer aussi que ledit évêque avait été une sorte de primat 2, autour duquel gravitaient tous les évêques du royaume, — et même quelques autres encore 3. L'allusion est transparente; mais, par

phrase du diplôme apocryphe du 27 mars 832, pour Lugo, où il est dit : « et ipsam sedem Ovetensem fecimus eam et confirmamus pro ⚫ sede Britoniensi, quae ab Hismaelitis est destructa et inhabitabilis ‹ facta. » Il aurait fallu rapprocher de cette phrase le passage suivant du concile de Lugo de 569: « Ad sedem Britanorum, ecclesias quae sunt intro Britones, una cum Monasterio Maximi, et Asturias » (Esp. Sagr., XL, p. 343). Il aurait fallu signaler également que, par cette double mention, les faussaires voulaient prouver qu'Oviedo aurait été suffragante de Lugo, Britonia ayant elle-même été suffragante de Braga; pour parer le coup, les faussaires asturiens se sont bien gardés d'oublier Britonia; le premier concile la nomme parmi les églises suffragantes d'Oviedo (c. 5); au second concile assiste l'évêque « Theodesindus Britoniensis » (Sampiro, ch. 9); enfin, l'acte portant assignation de rentes cite lui aussi l'évêque de Britonia (Esp. Sagr., XIV, p. 401). Disons qu'au surplus toute l'histoire du différend entre Lugo et Oviedo serait à étudier de très près.

1. D'après un acte cité par Risco, Esp. Sagr., XXXVIII, p. 95, Pélage aurait été coadjuteur de Martin dès le 24 août 1097; mais Pélage, d'autre part, n'aurait été consacré en qualité d'évêque que le 29 décembre 1098; cf. la note du Liber Chronicorum, publiée par Risco, Esp. Sagr., XXXVIII, p. 371 : « Pelagius Ovetensis ecclesiae « episcopus fuit consecratus sub era MCXXXVI, IV kalendas ia<< nuarii. >> C'est par erreur que, reproduisant cette note dans la Revue Hispanique, XLVI (1919), p. 366, nous avons imprimé : « era « MCXXXVIII, III kalendas ianuarii. »

2. Fita, dans Bol. de la R. Acad. de la Hist., XXXVIII (1901), p. 122.

3. Un évêque de Saragosse, Eleca, semble avoir résidé un certain temps auprès d'Alphonse III; cf., outre divers documents douteux ou apocryphes (Cat., nos 54, 55, 56, 59, 65), l'inscription du monastère de Val de Dios de 893 (Hübner, Inscr. Hisp. Christ., p. 84, no 261)

surcroît, tels passages du premier concile ont manifestement pour objet de rehausser l'église d'Oviedo aux dépens de celle de Tolède. «< Propter peccata retroacta cecidit Toletus et elegit << Asturias Dominus », est-il dit au canon 7; Tolède, est-il dit au même endroit, «< in ambitu habet quinque vel sex millia « passuum »>, tandis que le territoire des Asturies «< vix viginti « (var. decem) dierum spatio valet circui ». Tolède, est-il proclamé au canon 9, « totius Hispaniae antea caput extitit; << nunc vero Dei judicio cecidit, cujus loco Ovetum sur« rexit. Or, Tolède, qu'Oviedo aurait ainsi éclipsée au IXe siècle, se trouvait à la fin du xie dans une situation singulièrement différente. En 1088, Urbain II avait accordé la primatie à l'archevêque Bernard et enjoint à tous autres archevêques et évêques de reconnaître l'autorité du nouveau chef de l'église d'Espagne 1; bien plus, le 4 mai 1099, le même pape soumettait en termes exprès à l'église de Tolède celles d'Oviedo, Leon et Palencia 2. Du jour où Bernard devint primat, il semble que toutes les églises se soient efforcées d'obtenir le privilège de l'exemption; Compostelle y réussit dès 1095; Burgos, dès 1096 3. Oviedo ne pouvait manquer

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et le diplôme authentique du 29 janvier ou 2 février 895 (Cat., no 50). Ce fait a été largement exploité par les faussaires d'Oviedo. 1o Jouant sur les mots Aucensis et Oscensis, à propos de l'évêque Juan, ils ont fait assister aux conciles (voir aussi Cat., no 56), un évêque d'Oca ou de Huesca, ad libitum suivant les variantes ; cf. Ramon de Huesca, Teatro histórico de las iglesias del reyno de Aragon, V (Pamplona, 1792, pet. in-4o), PP. 377-389; 2o affichant les prétentions primatiales d'Oviedo, ils ont nommé dans l'acte d'assignation de rentes les évêques de Calahorra et de Tarragone; 3° pour corroborer le tout, ils ont introduit dans plusieurs diplômes refaits des évêques de Calahorra (Cat., nos 10 et 11) et de Huesca (Cat., no 25), sans d'ailleurs oublier Eleca, l'évêque de Saragosse (Cat., no 65).

1. Jaffé-Wattenbach, Reg. pont. rom., nos 5366 et 5370; cf. 5367 et 5371.

2. Ibid., no 5801. II (1877), pp. 220-221.

Ewald a publié cette bulle dans Neues Archiv,

3. Jaffé-Wattenbach, op. cit., no 5601 et 5653.

d'y travailler, et point n'est besoin d'en dire davantage pour comprendre la valeur polémique du ou des conciles. On rappellera simplement qu'Oviedo fit triompher ses revendications le 30 septembre 1105, Pascal II lui conférait l'exemption tant désirée et que Leon, de son côté, avait obtenue quelques mois auparavant, le 15 avril 2.

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5o Si nous connaissions mieux l'histoire ecclésiastique de la fin du XIe siècle et du commencement du XIIe, peut-être parviendrions-nous à élucider quelques points qui demeurent obscurs par exemple, Oviedo, qui combattit Lugo et Tolède, ne se rapprocha-t-elle pas de Braga, à un moment donné ? Sans un rapprochement de ce genre, le passage, cité plus haut, de l'acte d'assignation de rentes est inexplicable. Pareillement, quels furent, au temps de Pélage, les rapports d'Oviedo et de Compostelle ? Ce n'est pas sans motif que les faussaires ont établi un lien, quelque vague qu'il nous paraisse, entre la dédicace de l'église de Saint-Jacques et la tenue des conciles d'Oviedo 3. D'autre part, si nous pou

1. Jaffé-Wattenbach, no 6039. Texte dans Risco, Esp. Sagr., XXXVIII, PP. 340-341. Dans cette affaire, le Liber Itacii avait été certainement invoqué; il porte que Lugo desAsturies «< auctoritate romana permanet « libera et numquam fuit subdita ulli metropoli » (Esp. Sagr., IV, p. 217; Blázquez, La Hitación de Wamba, p. 80) ; or, Pascal II dit d'Oviedo : « ipsa quippe cum inter caeteras Hispaniae « civitates clara locuplexque polluerit, nulli unquam legitur subja« cuisse metropoli. »

2. Voir Jaffé-Wattenbach, no 6058 et mieux Risco, Esp. Sagr., XXXV, p. 145 et XXXVII, pp. 242-243. Les arguments invoqués par Leon, qui fit peut-être cause commune avec Oviedo, devaient être tirés eux aussi de la Division de Wamba remaniée, où il est stipulé que Leon « per romanum papam gaudet perpetua libertate >> et que « alicui metropoli numquam fuit subdita» (Esp. Sagr., IV, p. 227; Blázquez, op. cit., p. 81).

3. Nous rappellerons que l'acte de consécration de l'église de Compostelle (Cat., no 56), conservé à Oviedo sous forme d'« original » (cf. Études sur les actes des rois asturiens, p. 70), avait été transcrit dans l'Ovetensis (cf. Revue des Bibliothèques, XXIV, p. 215). Nous

vions dater avec certitude tous les documents apocryphes qui nous sont parvenus 1, l'enchaînement des faits apparaîtrait plus nettement, et les contradictions de détail qu'il serait facile de relever dans la documentation existante tomberaient sans doute d'elles-mêmes. Résignons-nous à ignorer beaucoup; mais renonçons aussi, et très fermement, à considérer comme réhabilités les textes étudiés ci-dessus 2.

rappellerons également que Pélage paraît s'être inspiré de ce document pour rédiger le texte qui forme le ch. 9 de Sampiro, et pour rédiger aussi une notice qui figure en tête du Liber Chronicorum (Études, p. 71; Revue Hispanique, XLVI, p. 366). A signaler encore un autre rapprochement. De même que, d'après les actes sortis du scriptorium de Pélage, les évêques du royaume auraient cherché un refuge à Oviedo et reçu, en terre asturienne, des semblants de bénéfices, de même, d'après un diplôme apocryphe d'Ordoño II pour Compostelle, 29 janvier 915 (López Ferreiro, Hist. de la iglesia de Santiago, II, app. no XXXVII, pp. 82-85), divers évêques se seraient réfugiés, lors de l'invasion, sur le diocèse d'Iria et ils y auraient reçu « decaneas • unde tolerationem habuissent, quousque Dominus... restituisset eis << hereditatem avorum et proavorum suorum » (loc. cit., p. 82).

1. Il importerait de collationner avec le plus grand soin tous les textes communs à l'Ovetensis, au Libro gótico et au Liber Chronicorum. En l'état actuel, nous ne possédons qu'un indice chronologique ; le premier concile d'Oviedo, celui de 821, est cité dans la bulle d'Urbain II du 4 avril 1099, où on lit, d'après l'édition du P. Fita (Bol. de la R. Acad. de la Hist., XXIV, p. 550) : « sicut etiam Alfonsi regis << temporibus, era videlicet octingentesima quinquagessima nona [Matritensis 1513, fol. 70 r: noningentesima nona], in episcoporum « concilio definitum et eiusdem regis cirografo roboratum vetera « Ovetensis ecclesie monimenta significant. >>

2. Dom H. Leclercq, dans sa traduction de Hefele, Histoire des Conciles, IV, 2e partie (Paris, 1911, in-8o), p. 1360, s'est un peu trop pressé de tenir pour acquises les affirmations de Dozy et les suggestions du P. Fita.

DEUXIÈME PARTIE

LES FAITS

CHAPITRE PREMIER

LA FONDATION DU ROYAUME ASTURIEN (718-757)

Sept ans après l'entrée des Arabes en Espagne et la chute de la monarchie wisigothique, un royaume chrétien naissait dans les Asturies auprès d'une bourgade, Cangas de Onis. Moins d'un demi-siècle plus tard, les rois asturiens dominaient tout le pays compris entre la mer et les monts Cantabriques; de plus, ils occupaient à l'Ouest la Galice septentrionale, à l'Est l'Alava, la Bureba, la Rioja, et ils s'étaient provisoirement avancés au Sud jusqu'au Duero. Dans quelles conditions cet état avait-il été fondé ? Pourquoi se développa-t-il si vite?

I. LA CONQUÊTE DE LA « GALICE » PAR LES ARABES.

Inaugurée le 19 juillet 711, la conquête de l'Espagne se poursuivit pendant quatre années consécutives 1. Ayant cul

1. Dans le très bref résumé qu'on va lire, nous suivrons moins la doctrine ingénieuse, mais fragile à l'extrême, de M. E. Saavedra, Estudio sobre la invasión de los Árabes en España (Madrid, 1892, in-8°), que les récits de Dozy, Hist. des Musulmans d'Espagne, II, pp. 32-38, Fournel, Les Berbers, I (Paris, 1875, in-4o), pp. 241-255

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