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BULLETIN

DU

Bouquiniste

PUBLIÉ PAR AUGUSTE AUBRY

Avec la collaboration de Bibliophiles et d'Erudits
Paraissant le 1er et le 15 de chaque mois.

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CHEZ AUG. AUBRY, ÉDITEUR

LIBRAIRE DE LA SOCIÉTÉ DES BIBLIOPHILES FRANÇOIS
Rue Séguier, 18

Et chez les principaux libraires de la France et de l'Etranger.

1873

NORMANDIE, 5647-5696. ROMANTIQUES, 5697-3746. OUVRAGES DIVERS, 5747-5844.

EN DISTRIBUTION :

CATALOGUE de bons Livres sur les sciences, les arts, les beauxarts, la littérature et l'histoire, Manuel du Libraire, dernière édition, en grand papier, OEUVRES DE MUSSET, gr. papier, etc., 10 vol., provenant des Bibliothèques de M. JDE LASSALLE, bibliophile, et de M. E. L., artiste, dont la vente aura lieu, rue des Bons-Enfants, les 20, 21, 23 et 24 mai. - Mc GIRARD, commissaire-priseur. A, AUBRY, expert.

CATALOGUE de Livres bien reliés, provenant de la Bibliothèque de M. L. B., jurisprudence, littérature et histoire, etc.

Vente le 29 mai, rue des Bons-Enfants.

M. DELBERGUE-CORMONT, commissaire-priseur. A. AUBRY, expert.

CATALOGUE des Livres de littérature et d'histoire, ouvrages figures, L'IMITATION DE JÉSUS-CHRIST, édition Curmer; ANTIQUITÉ EXPLIQUÉE, de Montfaucon; collection du MERCURE DE FRANCE, aux armes de Mgr de Beaumont, archev. de Paris, et partie à celles de la comtesse de Verrue, etc., etc.; composant la Bibliothèque de Madame la marquise DE BOISSY.

Vente en son hôtel, rue Saint-Lazare, cité de Londres, le 28 mai. Me DUBOURG, commissaire priseur, A. AUBRY, expert.

CATALOGUE de bons Livres, provenant de la Bibliothèque de feu M. L'H..., composée de classiques latins, ouvrages de philosophie, théâtre, histoire et littérature contemporaine. Belle collection de LIVRES ANGLAIS.

Vente, rue des Bons-Enfants, le 31 mai.

M DELBERGUE-CORMONT, commissaire-priseur. A. AUBRY, expert.

SOUS PRESSE:

CATALOGUE de Livres anciens, rares et curieux, classiques grecs et latins, incunables, reliures du XVIe siècle, un Grolier, etc.; de la Bibliothèque de M. P..., ancien magistrat.

Vente prochainement, rue des Bons-Enfants.

M. AVRIL, commissaire-priseur. A. AUBRY, expert.

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Paris, 183, Didier, éditeur, et chez Aug. Aubry. Prix, 3 fr. 50

A quoi rêvent les jeunes filles? Qui ne se rappelle ce titre d'une admirable comédie intime d'un de nos plus vrais poetes? Plus on lit les œuvres d'Alfred de Musset, plus on écoute ses vers et sa prose, au théâtre ou dans sa tête, plus on se trouve enchanté de les relire et de les écouter encore. C'était, sans doute, l'esprit le plus élevé, le plus large, le plus correct dans sa facilité, le plus sûr et le plus juste dans sa souplesse merveilleuse de tous les esprits littéraires de notre époque. Ce que j'admire en lui, je ne dirai pas au-dessus, mais à côté de toutes ses qualités, c'est l'exactitude de la formule de ses pensées. Qu'on lise au hasard une comédie ou une nouvelle, un conte ou un proverbe, on trouve toujours cette phrase fière, calme et. libre dans ses allures, juste et complète dans ses limites.

Aussi je regrette de tout mon cœur qu'après avoir si bien dit à quoi rêvent les filles, il ne nous ait pas dit à quoi rêvent les jeunes femmes.

A quoi rêvent-elles, lorsque assises, pendant de longues heures, au coin d'une cheminée ou près d'une fenêtre, elles font courir les fines aiguilles dans les souples tissus? J'en connais une qui faisait alors un singulier rêve, qui conduisait sa pensée à travers de bien étonnants projets. Veuve à vingt ans, jolie etriche, elle pensait qu'il

est des êtres misérables dont chacun s'éloigne, des êtres qui sont les lépreux de notre époque, et qu'il devait lui convenir de passer sa vie au milieu d'eux. Ces êtres, ce sont ces pauvres malheureux atteints d'horribles maux incurables, de cancers, de plaies malignes, d'ulcères rongeants, que la science est impuissante à guérir. Elle rêva si bien à son projet, qu'un beau jour elle trouva le moyen de fonder un hospice où l'on n'admet que ces infortunées victimes de maladies hideuses et rebelles à tout traitement. Elle trouva des compagnes pour les soigner, des compagnes veuves comme elle, qui, libres de tout lien monastique ou clérical, esclaves de leur étonnant amour des misères humaines, passent chaque jours d'admirables heures à panser les plaies infectes de ces repoussants malades. Cet hospice a reçu un nom bien mérité et bien pittoresque aussi : Hospice des Dames du Calvaire.

On trouve de tout dans le cœur des femmes, et si des inconstances coupables, des insouciances ou des hypocrisies malsaines nous révoltent souvent, souvent aussi de merveilleux dévouements, d'audacieux élans, de persévérants sacrifices nous imposent l'admiration et la reconnaissance. On est tenté de remercier les gens qui font le bien parce qu'ils nous réconcilient avec l'humanité.

Si je me laisse ainsi aller à parler de tout cela, c'est que je viens de lire une remarquable étude de l'abbé Chaffanjon, sur les veuves et la charité, et que lorsque je découvre des beautés dans un livre, imitant la manie de La Fontaine, il faut malgré moi que je les signale à tout le monde.

La pensée est souvent bien difficile à guider; j'avais pris la plume en main avec l'intention arrêtée de dire mon opinion sur un charmant livre nouveau, les Féeries du travail, et puis j'ai parlé de Musset et de l'abbé Chaffanjon, mais je n'ai pas dit un mot du livre en question. C'est que ce livre est fait par une femme, et qu'en le lisant j'ai pensé aux femmes, aux séductions de leur cœur et de leur esprit, et au poète qui a su si bien les traduire et les peindre. Tout s'explique.

Celle-là aussi rêvait en tirant son aiguille; elle rêvait aux misères de l'esprit, aux cancers de l'intelligence, et surtout à la sotte ignorance; aussi a-t-elle étudié. Tout sujet d'étude est bon, et toute étude est féconde. Elle a voulu connaître l'histoire et les origines de

ces charmants travaux que savent si þien exécuter les gracieux doigts des femmes; elle a fait des recherches et des observations, et, instruite elle-même, elle a bien voulu nous instruire à son tour. Le résultat de son travail compose un joli volume, un assez gros livre dont la lecture est des plus attachantes.

L'auteur nous fait d'abord l'histoire des tapis et de la tapisserie, depuis les essais informes de leur origine jusqu'aux productions parfaites des Gobelins, en passant par les périodes de tâtonnements et d'hésitations; puis il nous raconte celle de la broderie, des dentelles et de leurs nombreuses variétés; dentelles de Malines, Valenciennes, Lille, point d'Alençon, point d'Angleterre, toutes sont indiquées et analysées avec un joli luxe de détails. Les femmes ne s'intéresseront pas seules à ce chapitre-là, les hommes seront bien aises de l'étudier aussi, ne fut ce que pour donner plus de saveur à leur admiration des élégantes toilettes, par une appréciation sûrement motivée. Les dilettanti de toilette arrivent, à la vue des parures, à des jouissances comparables à celles que les dilettanti de l'art éprouvent à l'audition de la bonne musique ou à la contemplation des tableaux de maîtres. Ce que je dis pour la question des dentelles peut s'appliquer à celles des étoffes de soie, des fleurs artificielles, de la joaillerie, des diamants, des perles, du corail et vraiment de la parfumerie aussi. Tous les ouvrages de femmes sont passés en revue, et l'auteur n'a même pas oublié les meubles qui servent à les renfermer, non plus que les objets élégants qui sont la parure de nos salons, les boites, les coffrets, l'acajou dont on les fait, les porcelaines, les vases du Japon et de la Chine.

Cette étude, faite pour intéresser tout le monde, a été rendue fort attrayante par la façon dont elle est présentée. Qu'on en juge, voici la mise en scène : un vieux professeur, bon et naïf comme un savant pratique, les savants spéculatifs sont souvent féroces, deux jolies jeunes filles et leur mère, sont réunies chaque soir dans un petit salon; le professeur parle, les jeunes filles écoutent et interrogent; les questions et les réponses se mêlent et s'entrecroisent; on jouit du charme de la conversation tout en profitant du bénéfice de la leçon scientifique. L'auteur a suivi le précepte d'Horace; nous devons le féliciter d'avoir su aussi bien joindre l'utile à l'agréable.

Dr PICCINATUS.

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