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ensuivant, vinrent audit lieu de Paris la plus grand' partie des capitaines de Picardie, atout (avec) leurs gens d'armes; c'est à savoir, messire Jean de Luxembourg, le sire de Fosseux et ses frères, messire Jennet de Poix, le sire de Cohen, et moult d'autres, espérant qu'audit lieu de Paris trouveroient bon gagnage; mais la plus grand' partie trouvèrent le contraire de ce qu'ils avoient empensé, et fallut qu'ils payassent leurs dépens.

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En outre, les dessusdits morts de la partie dudit connétable, furent le bourrel de Paris, sur une charrette, menés hors de la ville, et enfouis aux champs, et les autres dudit parti desdits Parisiens furent notablement ensevelis, et mis en terre sainte.

Et adonc, par toute la ville de Paris, on portoit communément l'enseigne du duc de Bourgogne ; c'est à savoir la croix Saint-Andrieu, laquelle par grand' espace avoit été fort déboutée dedans ladite ville.

Le samedi ensuivant, ceux de la bastille, voyant qu'ils perdoient leurs temps de la tenir, firent traité au sire de l'Ile-Adam, et autres seigneurs étant à Paris, par si qu'ils s'en iroient saufs leurs corps et leurs biens, en rendant ladite bastille : et sur ce leur fut baillé sauf-conduit, et se départirent, comme dit est. A laquelle bastille fut commis à être capitaine, de par le roi et le duc de Bourgogne, le seigneur de Chauny, qui toujours avoit été léans prisonnier, depuis sa revenue de l'am

bassade par lui faite à Amiens, à la personne du duc de Bourgogne, dont en autre lieu par avant est faite mention.

CHAPITRE CXCVI.

Comment, après ladite prise de Paris, plusieurs villes et forteresses se rendirent en l'obéissance du duc de Bourgogne et autres matières.

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EN ces jours furent envoyés, atout (avec) un mandement du roi, Hector et Philippe de Saveuse, le seigneur de Crevecœur, et leurs gens vers Compiégne, et autres villes et forteresses sur les marches. Lesquels, venus audit lieu de Compiègne, firent traité avec ceux de la ville, par condition que tous ceux tenants la partie du comte d'Armagnac s'en iroient, saufs leurs bagues; et aussi que tous les habitants de ladite ville, et autres veuillants faire serment de tenir le parti du roi et du duc de Bourgogne, demeureroient paisibles. Et après qu'ils eurent promis ce à entretenir, ils furent mis dedans. Et pareillement se rendirent à eux la ville et châtel de Creil, Pont-Saint-Maxen ce, Moussy, le Pereux, le Pont-à-Choisy, et aucunes autres places; dedans lesquels mirent de leurs gens pour les entretenir. Et aussi se rendit en l'obéissance du roi et du duc de Bourgogne, la

ville de Noyon, par le moyen du seigneur de Genlis, et pareillement le Pleissier, par messire Jean de Roye, et moult d'autres villes et forteresses comme Laon, Corbeil, Soissons, Chauny-sur-Oise, Gisors, et aucunes autres.

En la ville de Creil fut mis un gentilhomme nommé le Bugle de Grouches, pour la garder, et entra en icelle ville atout (avec) huit hommes tant seulement. Si étoient dedans la forteresse le comte de Ventadour, le seigneur de Château-Morant, et messire Charles de Saint-Sauflieu, atout (avec) certain nombre de gens d'armes, lesquels tenoient le parti du comte d'Armagnac. Lesquels furent, par moyen du dessusdit Bugle de Grouches et de la communauté d'icelle ville, contraints à rendre ladite forteresse, par condition qu'ils s'en allèrent saufs leurs corps et leurs biens ; et en demeura icelui Bugle capitaine certain espace de temps.

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En outre, quant est à parler de l'état et gouvernement de Perrinet Leclerc et ses complices, qui avoient livré la ville de Paris, comme vous avez ouï ci-dessus, commencèrent à lever et tenir très grand état ; et eurent par aucun peu de temps grand' autorité; mais en la fin demeurèrent aussi pauvres et méchants que par avant ils avoient été.

En après, ceux de la ville de Péronne, qui avoient toujours tenu et encore tenoient la partie du roi, de son fils le dauphin et du comte d'Armagnac, quand ils ouïrent les nouvelles de la prise de Paris et la reddition de plusieurs autres bonnes villes, fu

rent fort émerveillés, et eurent grand doute, attendu qu'ils étoient près des pays et puissance du duc de Bourgogne, d'être pris d'assaut, ou du moins assiégés. Si se mirent ensemble, et conclurent d'envoyer devers le comte de Charrolois et son conseil, afin qu'ils pussent être reçus à eux mettre en l'obéissance du roi et du duc de Bourgogne ; et sur ce envoyèrent leurs ambassadeurs devers ledit Charrolois, ja-soit-ce que messire Thomas de Hersies, bailli de Vermandois les exhortât fort à tenir le parti du dauphin. Lesquels ambassadeurs, c'est à savoir maître Oudard Cuperiel, un chanoine de Saint-Foursy, et aucuns autres, traitèrent tant devers les dessusdits comte de Charrolois et son conseil, qu'icelle ville se rendit en son obéissance; et nonobstant que les gouverneurs et habitants d'icelle ville eussent promis de non faire traité au préjudice dudit messire Thomas, néanmoins il fut pris et mené à Laon, et là décapité; et pareillement furent exécutés Jean de Brunencourt son lieutenant, et Alard de Vertigneul.

CHAPITRE CXCVII.

Comment les communes de Paris se mirent sus en grand' multitude, et occirent piteusement tous les prisonniers qui avoient été pris audit lieu de Paris.

EN après toutes ces besognes, le douzième jour de juin ensuivant, s'assemblèrent les communes gens de Paris de petit état, jusques à soixante mille ou plus, environ quatre heures après midi, et tous armés, doutant, comme ils disoient, que les prisonniers qui étoient détenus ne fussent mis à délivrance, nonobstant le désenhortement du nouvel prévôt de Paris, et plusieurs autres seigneurs, embâtonnés de viels maillets, haches, cognées, massues, et moult d'autres bâtons dissolus, en faisant grand bruit, criant: Vive le roi et le duc de Bourgogne ! s'en allèrent à toutes les prisons de Paris, c'est à savoir au Palais, à Saint-Magloire, à Saint-Martin-des-Champs, au grand Châtelet, au Temple, et autres lieux où étoient les prisonniers ; rompirent lesdites prisons, tuèrent chepier (geôlier) et chepière (geôlière), et tous ceux qu'ils y trouvèrent, jusques au nombre de seize cents ou environ. Desquels furent les principaux le comte d'Armagnac, connétable de France, maître Henri de Marle, chancelier du roi, les évêques de CouCHRONIQUES DE MONSTRELET. T. IV.

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