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blesses de la femme, jusqu'à sa vanité, sa légèreté, sa versatilité dans les idées et son engouement instinctif pour la gloriole militaire. »

Il y a du reste, en général, entre les tempéraments, soit des peuples, soit des individus, et leurs climats respectifs, une corrélation naturelle, que la raison conçoit aisément et que les anciens déjà avaient remarquée. Hippocrate, dans son traité des Airs, des Eaux et des Lieux, s'étend beaucoup sur ce sujet.

LE CARACTÈRE.

Si, comme je crois l'avoir indiqué suffisamment, on peut, dans le style d'un écrivain véritable, reconnaître sa complexion et son tempérament, à plus forte raison y verra-t-on son caractère, qui tient de fort près à l'une et à l'autre, s'il n'en est pas la conséquence. Ici se trouve, en quelque sorte, la frontière vague et indécise entre le domaine physiologique et le domaine moral.

Descartes lui-même, à ce sujet, s'exprime ainsi : L'esprit dépend si fort du tempérament et de la disposition des organes du corps, que, s'il est possible de trouver quelque moyen qui rende communément les hommes plus sages et plus habiles qu'ils n'ont été jusqu'ici, je crois que c'est dans la médecine qu'on doit le chercher. » Paroles bien remarquables, à tous égards, mais surtout de la part de ce philosophe ultra-spiritualiste.

Tout en étant convaincu que le principe qui pense est d'une autre nature que la matière étendue, il n'en croit pas moins (écoutez encore ces expressions) que la plupart de nos sentiments et de nos pensées «proviennent et dépendent de l'union et comme du mélange de l'esprit avec le corps; » et il exige du philosophe la connaissance de la constitution et des fonctions des organes, pour comprendre et expliquer les opérations de l'esprit1.

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Il dit encore, dans le Discours de la Méthode : « Je suis conjoint à mon corps très-étroitement, et tellement confondu et mêlé, que je compose comme un seul tout avec lui. » C'est presque le mot de Bossuet: «Un tout naturel. Descartes seulement n'est pas aussi affirmatif, il atténue un peu son assertion par le mot comme, signifiant en quelque sorte, pour être conséquent avec son dualisme, qui parle toujours du corps comme d'une chose en dehors du moi : « Je suis conjoint à mon corps, etc.

Quoi qu'il en soit, il faut bien qu'il convienne de cette union et de ce mélange, et de ce tout.

Cette complexité est telle, qu'en voulant étudier particulièrement les influences physiologiques, il ne se peut faire que nous n'y mêlions çà et là l'étude du moral. L'homme n'est deux que par hypothèse; mais, réellement, il est un.

Le caractère donc, comme le tempérament, se montre partout dans les écrits, même où on l'at

1. Voyez l'intéressant chapitre sur Descartes médecin, dans le livre de M. Albert Lemoine intitulé: l'Ame et le Corps.

:

tendrait le moins. Prenons Corneille, non dans ses tragédies là il serait par trop facile de retrouver sa fierté, sa noblesse. Mais il est piquant de les retrouver même dans ces charmantes petites Stances, qu'il adresse à une jeune coquette, trop peu soucieuse d'être distinguée par l'auteur du Cid, de Cinna et de Polyeucte:

Marquise, si mon visage

A quelques traits un peu vieux,
Souvenez-vous qu'à mon âge
Vous ne vaudrez guère mieux.

Le temps aux plus belles choses
Se plaît à faire un affront,
Et saura faner vos roses
Comme il a ridé mon front.

Le même cours des planètes
Règle nos jours et nos nuits :
On m'a vu ce que vous êtes,
Vous serez ce que je suis.

Cependant j'ai quelques charmes
Qui sont assez éclatants
Pour n'avoir pas trop d'alarmes
De ces ravages du temps.

Vous en avez qu'on adore;
Mais ceux que vous méprisez
Pourraient bien durer encore
Quand ceux-là seront usés.

Ils pourront sauver la gloire
Des yeux qui me semblent doux,
Et, dans mille ans, faire croire
Ce qu'il me plaira de vous.

Chez cette race nouvelle,

Où j'aurai quelque crédit,

Vous ne passerez pour belle
Qu'autant que je l'aurai dit.

Pensez-y, belle Marquise :
Quoiqu'un grison fasse effroi,
Il vaut bien qu'on le courtise
Quand il est fait comme moi.

Le sujet est léger, le rhythme court; mais on y retrouve la fierté de l'homme, et aussi l'ampleur du tragique.

Oui, c'est bien là le vieux Corneille, dit M. SainteBeuve, « le vieux Corneille un peu amoureux, mais encore plus glorieux et grondeur.... Que dites-vous de ce ton? Comme il est héroïque encore!... Don Diègue, s'il avait affaire à une coquette, ne parlerait pas autrement. »

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