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NOTES

SUR L'ÉLOGE

DU DUC DE SULLY.

(1) Page 83.

Maximilien de Béthune, baron de Rosni, duc. de Sully, maréchal de France, et principal ministre sous Henri IV, naquit à Rosni, le 13 décembre 1560, de François de Béthune, baron de Rosni et de Charlotte Dauvet, fille d'un président de la chambre des comptes de Paris. La maison de Béthune était illustrée et connue dès le dixième siècle. L'histoire en fait une mention honorable dans les guerres 'des Croisades. Elle s'allia dans la suite avec différents princes de la maison de France, avec les empereurs de Constantinople, les comtes de Flandre, les ducs de Lorraine, les rois de Jérusalem, les rois de Castille, les rois d'Écosse, les rois d'Angleterre, avec la maison d'Autriche, avec les maisons de Courtenay, de Châtillon, de Montmorenci, de Melun, de Horn, etc. On peut dire du duc de Sully, qu'il soutint un si grand nom, ce qui est sans doute la première gloire après celle de le créer.

(2) Ibid.

Henri, roi de Navarre, qui, avec le secours de Sully, devait faire tant de bien à la France, était plus âgé que lui de

sept ans. Né le 13 décembre 1553 à Pau en Béarn, il fut élevé dans un château, parmi les rochers et dans les montagnes. Là, il était habillé et nourri comme les autres enfants du pays. On l'accoutumait à courir et à monter sur les rochers. Sa nourriture ordinaire était du pain bis, du fromage et du bœuf. Souvent même on le faisait marcher nu-pieds et nu-tête. Cette éducation mâle contribua sans doute à lui donner cette trempe d'ame vigoureuse et forte, qui en fit dans la suite un si grand homme. Il serait à souhaiter que nos mœurs nous permissent d'imiter de pareils exemples. La mollesse, vice ordinaire de notre éducation moderne, en affaiblissant les organes, détruit le principe des grandes choses, et fait, pour ainsi dire, mourir l'ame avant qu'elle

soit née.

(3) Page 84.

Pendant l'enfance de Sully, il y eut quatre batailles livrées entre les protestants et les catholiques: celle de Dreux en 1562, celle de Saint-Denis en 1567, celles de Jarnac et de Montcontour en 1569, enfin la Saint Barthélemi, plus meurtrière que dix batailles, en 1572. Sully était alors âgé de douze ans, et avait été élevé dans la religion protestante. Il faisait ses études au collége de Bourgogne, mais il n'y demeurait pas. Sur les trois heures après minuit, le son de toutes les cloches et les cris confus de la populace, le réveillèrent. Il ne tarda point à être instruit de la cause du tumulte. Aussitôt il résolut d'aller gagner le collége de Bourgogne. Il prend sa robe d'écolier, et met sous son bras un gros livre d'église à l'usage des catholiques. En cet état il sort. En entrant dans la rue, il la voit inondée de sang; il voit des troupes de furieux qui couraient de toute part, enfonçaient les maisons, et criaient à haute voix : Tue, tue; aux Huguenots, aux Huguenots. Ce spectacle,

ces cris, tout augmente sa frayeur, et précipite ses pas. Trois corps-de-garde l'arrêtèrent successivement; chaque fois le livre d'heures qu'il portait le sauva. Arrivé enfin au collége de Bourgogne, il y trouva de nouveaux périls. Le portier lui refusa deux fois l'entrée, et le laissa dans la rue à la merci des assassins. Heureusement le principal du collége sut son danger. C'était un homme de bien, et qui ne croyait point qu'un assassinat fût un acte de religion. Il mena le jeune Sully dans son appartement: mais, en y entrant, Sully trouva encore deux prêtres, qui voulurent se jeter sur lui pour le mettre en pièces, citant les Vêpres Siciliennes, et disant que l'ordre était de tuer jusqu'aux enfants à la mamelle. Le principal l'arracha avec peine de leurs mains, et le fit conduire secrètement dans un cabinet, où il l'enferma sous clef. A quoi tient le sort des États! Peu s'en fallut que Henri ne fut tué le même jour. Le prêtre charitable qui conserva la vie à Sully, en sauvant un jeune enfant de douze ans, ne pensait point alors qu'il était le bienfaiteur de la France.

(4) Page 85.

La guerre civile qu'on avait crue éteinte par les massacres de la Saint Barthélemi, recommença en 1574. Mais le roi de Navarre ne recouvra sa liberté qu'en 1576. Rosni l'accompagna dans sa fuite. Il entra d'abord dans l'infanterie comme simple volontaire, et fit ses premières armes aux environs de Tours. Il se signala dans plusieurs détachements. Le roi de Navarre ayant appris qu'il se comportait avec plus de témérité que de prudence, le fit appeler, et lui dit : Rosni, ce n'est pas là où je veux que vous hasardiez votre vie. Je loue votre courage, mais je désire vous le faire employer en une meilleure occasion. » La même année,

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M. Lavardin son parent, lui fit prendre l'enseigne de sa compagnie Colonelle. Il est nommé pour défendre Périgueux, et ensuite Villeneuve en Agenois. A la prise de Réole, il commande cinquante hommes. Au siége de Villefranche en Périgord, montant à l'assaut avec son drapeau, il est renversé par le choc des piques et des hallebardes, dans un fossé profond où il pensa périr. Au siége de Marmande, commandant un corps d'arquebusiers, il est sur le point d'être accablé par un nombre supérieur. Le roi de Navarre couvert d'une simple cuirasse, vole à son secours, et lui donne le temps de s'emparer du poste qu'il attaquait.

(5) Page 85.

Les économies du jeune Rosni, jointes aux profits militaires qu'il avait faits dans cette campagne, le mirent en état d'entretenir à sa solde plusieurs gentilshommes, avec lesquels il ne s'attacha plus qu'à la personne du roi. Quoiqu'il n'eût encore que seize ans, il mit un ordre si réglé dans son domestique, qu'il vint à bout de soutenir un état qui paraissait au-dessus de sa fortune. Le roi de Navarre le remarqua, et conçut dès ce moment pour lui une trèsgrande estime. Il n'appartient pas à tout le monde de deviner les grands caractères par les petites choses. C'est ce que fit alors le roi de Navarre. Peut-être dans ce jeune officier, il vit déjà le ministre et le surintendant des finances.

(6) Ibid.

Le roi ayant surpris Eause, ville d'Armagnac, y entra à la tête de quinze ou seize hommes qui le suivaient de près. Comme on abattit sur-le-champ la herse du pont, le reste de son armée ne put le suivre, et demeura hors de la ville. Aussitôt les habitants sonnèrent le tocsin, et vinrent

attaquer cette petite troupe. On entendit plusieurs voix qui criaient : « Tirez à cette jupe écarlate, à ce panache blanc; « c'est le roi de Navarre. » Ce prince fondit, le pistolet à la. main, sur plusieurs pelotons, et les dissipa: mais le nombre des ennemis augmenta, et le danger devint extrême. Le roi, adossé contre le portail d'une église, combattit assez long-temps, pour que son armée eût le temps d'enfoncer les portes, et de venir à son secours. Rosni, dans ce péril, partagea l'honneur de défendre son maître, et de le conserver à la France.

(7) Page 86.

Devant Mirande, Rosni et le jeune Béthune son cousin, se virent enveloppés d'ennemis. Ils combattirent long-temps sans autre espérance que celle de venger leur mort: déjà ils ne pouvaient plus soutenir leurs armes, lorsque le roi de Navarre envoya à leur secours. Devant Nérac, ce prince repoussa presque seul un gros de cavalerie qui s'était avancé pour le surprendre. Rosni, à son exemple, alla le même jour, avec douze ou quinze hommes, faire le coup de pistolet jusqu'à la portée de l'armée catholique. Le roi qui le remarqua, dit à Béthune : « Allez à votre cousin le baron << de Rosni; il est étourdi comme un hanneton; retirez-le « de là et les autres aussi, car ils seront tous pris ou tués. » Rosni obéit, et le roi qui vit son cheval blessé à l'épaule, lui reprocha sa témérité avec la colère de l'amitié.

(8) Ibid.

Siége de Cahors en 1580. Il fut tel qu'on le peint ici; et l'on n'a rien exagéré. Rosni y fut renversé d'une grosse pierre qui avait été lancée d'une fenêtre. Peu de temps après, il fut blessé à la cuisse gauche. Le combat, dans

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