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l'avertissoit que des traîtres l'épioient ; que hicardo avoit eu un entretien, à Londres, avec le roi Charles, et à Paris, avec la duchesse d'Orléans qui l'avoit exhorté à un assassinat, chose difficile à croire d'une princesse si aimmable, et tout occupée de ses plaisirs. Les magistrats de Berne firent dire à Ludlow de quitter Vevay, où il étoit trop exposé; il n'en voulut rien faire: son camarade Lile, s'étant retiré à Lausanne, fut assassiné d'un coup de pistolet par un inconnu, qui sur-le-champ monta à cheval, en criant vive le roi, et prit la route de Morges. La Hollande et la France; ayant déclaré la guerre aux Anglais, offrirent de l'emploi à Ludlow : il eut la sagesse de refuser. Il disoit que cette brouillerie entre la France et l'Angleterre seroit de peu de durée: il ne se trompa point ».

Après quelques jours d'une promenade charmante, dont Blanche est enchantée, nous sommes revenus à Genève dans notre manoir. Au sujet de cette ville, j'ai entre les mains la copie d'une lettre italienne du célèbre naturaliste Vitalio Donati je te l'envoie, tu la feras lire à madame de Saint-Omer qui aime beaucoup cette langue.

« Oh! la bella cita! che è quella (Ginevra ),

>> mi pare di mirare un pezzo di Venezia: ella » è situata sull lago Lemano, è viene divisa del >> fiume Rodano, è sull'uno e su l'altro bellissi» mi edifizi fabricati vi sono, per i lavori di >> pannì, di cuoji ed altro : le strade son belle, » le case, ò palazzi, chiese sono magnifiche : in » quella cita non v'e ozio, è il commercio, è >> le arti fioriscino a mariviglia : parte della cita >> è in collina è parte alla pianura; tutta » equale, con grandi stradoni d'alberi, con fiori » è piante di bella vista, con sedili di legno di→ » pinti, è quivi ne' giorni festivi concorrono >>> tutte le done di qualunque condizione al grande >> passegio.La publica libreria è abundantissima » e benissimo tenuta: ritrovai li Genevrini di >> temperamento più tosto melancolico che al» legro, e moltò sostenuti trattando col fo→

>> restieri ».

En voilà assez pour aujourd'hui: je t'embrasse.

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LETTRE

XVII,

DE BLANCHE A Mde DE SAINT-OMER.

Elle lui confie ses inquiétudes. Anecdote.

De Genève.

DANs le sein de qui puis-je mieux verser mes inquiétudes que dans celui d'une tante si bonne, si aimable? « Vous avez donc des chagrins, me direz-vous ? — Oui, je commence à comprendre qu'un bonheur pur et constant est le rêve de la philosophie ; c'est chercher un climat sans nuages. Je ne' puis délivrer mon cœur des remords de ma faute ; je vois toujours devant mes yeux un père irrité; je me rappelle ses premières bontés, ses soins paternels, ses tendres caresses; et oppressée de ma douleur et de mes regrets, je tombe à ses pieds, je mouille sa main de mes larmes. Ajoutez à ces tristes souvenirs une existence en pays étranger, séparée de vous, de ma patrie, de mes parens >> !

Dieu fit du repentir la vertu des mortels,

a dit Voltaire.

Cette réflexion me rend quelquefois un peu de tranquillité; mais une aventure arrivée à Gênes, que l'on m'a contée hier soir, m'a fait voir qu'il existoit des ames pures et privilégiées qui prouvent que la vertu donne des forces, quand on veut écouter sa voix.

Luchino Vivaldo, noble de Gênes, conçut une vive passion pour Thérésine, femme d'un plébéïen, qui subsistoit d'un emploi très-modique. Vivaldo parla de son amour sans succès; ses offres, ses présens furent repoussés. Superbe de son rang, fier de sa noblesse, il menaça Thérésine du poids de sa vengeance. Ses menaces échouérent; la vertu de cette femme s'éleva audessus de la crainte : la colère succéda à l'amour. Mais cet homme orgueilleux aimoit-il ? punit-on ce qu'on aime, de sa sagesse ? Il fit perdre son emploi à son mari, et bientôt sa liberté. Ce couple vertueux tomba dans la misère; plus de pain, et des enfans à nourrir. Thérésine, désespérée, mais forte de sa vertu, projette un dernier effort pour sauver sa famille. Elle se présente avec ses enfans, revêtus de lambeaux, au palais de son persécuteur; elle tombe à ses pieds, et lui dit : « L'indigence nous accable; nous allons mourir de faim, et nos malheurs sont votre ouvrage. Punissez la mère de sa ré

sistance; mais que vous ont fait mon époux et mes enfans »? En même temps ces petits malheureux se prosternoient à terre avec leur mère, qui, les yeux baignés de larmes, élevoit une main vers le ciel, et de l'autre pressoit ses enfans contre son sein. Vivaldo, frappé de ce tableau touchant, sentit enfin la pointe du remords: il oublie son amour insensé, et ne voit dans Thérésine qu'un être céleste. Il la relève, la rassure, lui promet de réparer son crime, et lui dit : «Attendez - moi, je reviens dans l'instant ». Il court dans l'appartement de sa femme, et s'élevant au-dessus de lui-même et de la honte, il lui confesse son penchant 'criminel, sa barbarie, les malheurs d'une famille respectable, et la prie de prendre sous sa protection une femme innocente, la victime d'une passion effrénée. Cet aveu et la rare vertu de Thérésine émurent l'ame sensible de cette dame; elle court chercher sa rivale, lui prodigue ses soins et ses bienfaits. L'époux sortit de prison; et l'on ajoute que Vivaldo, pour relever la gloire de cette famille, fit un aven public de sa faute. Quelle leçon pour moi! je suis bien loin de la constance et de la vertu de cette Thérésine ! Mais j'ai bien d'autres motifs de chagrin je contrarie Delmont, et il

me

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