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l'achète à Cléry sur le pied de 50 à 60 francs. La différence, comme on le voit, est énorme, et la publicité de ce mémoire rendra son auteur digne de la reconnaissance publique. Dans tous les cas, les prés doivent être fumés de trois ans en trois ans, et partout. où ils ne sont pas fécondés par les rivières, et où les eaux ne peuvent entraîner les engrais.

Un grand agronome, M. de Dombasle, a été trop absolu lorsqu'il a dit que mieux valait mettre un terrain en culture que de le mettre en pré, si le pré ne pouvait être arrosé à volonté. Nous concevons cette préférence lorsqu'il s'agit d'un terrain affermé vingt et trente francs l'arpent; mais dans un terrain de Sologne, où le revenu n'est que de trois ou quatre francs l'arpent, une telle préférence serait contraire aux plus simples règles de l'économie agricole, d'autant plus que les terrains humides que nous indiquons pour faire des prés seraient peu propres aux céréales.

Mille fois heureux sont pourtant les propriétaires quí peuvent déverser l'eau sur leurs prés naturels toutes les fois que la température en réclame l'emploi. L'expé. rience nous en a depuis long-temps démontré les bons effets; mais les irrigations exigent souvent des retenues d'eau et des coupures de terrain parfois gênantes, surtout pour les voisins qui ne partagent pas vos idées, et dès lors un obstacle invincible se rencontre dans le moyen le plus simple et le plus puissant.

Quoi qu'il en soit, il est en Sologne beaucoup de propriétés particulières qui pourraient jouir du bienfait de l'irrigation. Des ruisseaux, des sources, de misérables étangs don nant beaucoup plus d'embarras que de profits, peuvent fournir des eaux en assez grande abondance pour l'exécuter en temps opportun. Le tout est de savoir les ménager convenablement en les conservant au besoin dans des réservoirs que des accidens de terrain peuvent souvent former, à l'aide de bâtardeaux peu dispendieux. Au surplus, on concevra facilement que nous ne saurions poser des règles dans unę

matière où la possibilité de faire dépend nécessairement des positions et des localités.

Ce que nous ne pouvons trop recommander dans l'intérêt de tous, c'est de mettre à profit l'irrigation; elle triplerait au moins les revenus de la Sologne par l'augmentation dès fourrages que nous croyons possible d'obtenir; ce qui peut un jour nous affranchir du tribut que nous payons aux étrangers dont les bestiaux garnissent nos marchés.

Profondément convaincu des immenses avantages qu'on en obtiendrait, nous avons examiné, dès le mois de février 1835, s'il ne serait pas possible de faire une prise d'eau dans la Loire, sur un point assez élevé, à l'est de la Sologne, pour former un canal susceptible d'arroser une grande partie de cette province; nous avons communiqué nos observations à l'un de nos honorables députés. Depuis, un projet de loi a été présenté par le gouvernement; il avait pour objet des concessions de prises d'eau dans les rivières navigables; nous pouvions espérer l'accomplissement de nos vœux. Malheureusement, comme nous ne voyons pas tous par les mêmes yeux, et que dans les chambres les agriculteurs ne sont pas dominans, le projet n'a pas été goûté; ses avantages, qui seront appréciés plus tard, ont été méconnus, et le projet a été rejeté.

Il nous reste un mot à dire des mauvais prés bordant en Sologne les petites rivières et les ruisseaux qui la traversent. Généralement ces prés sont souvent submergés, soit par les retenues d'eau que font les usines établies sur ces petits cours d'eau, soit par leur défaut de curage et d'entretien. Dans cet état, les bestiaux qu'on y envoie au pacage les défoncent, et l'herbe qu'on en obtient est nécessairement grossière, aqueuse et peu nutritive. Une partie même de ces prés, reposant sur une espèce de lit de tourbe, est constamment mouvante et très peu productive, à cause des eaux froides qui les baignent saus cesse. Que faire d'un sol aussi ingrat, surtout s'il n'y a pas de moyens coërcitifs pour faire nettoyer

convenablement les rivières et ruisseaux dans lesquels doit s'opérer l'écoulement de ces eaux superflues et si nuisibles? multiplier les fossés d'assainissement, et en rejeter les terres sur le pré, où elles renouvelleront l'herbe sans frais,

S. II.

Des arbres résineux,

Les arbres résineux, si avantageusement introduits dans notre département, doivent, suivant nous, occuper tous les terrains secs et arides de la Sologne. La mauvaise culture en billons, qui forment autant de ruisseaux, et occasionnent l'entraînement du peu d'humus que renferme la couche végétale, l'usage qu'ont les fermiers de chaumiller ou plutôt d'arracher le chaume, et mille autres vices de pratique vainement reprochés, ont épuisé ces terres au point que ce serait une folie de prétendre les ramener à un état de production capable d'indemniser de la dépense qu'il faudrait faire pour y parvenir. Nous n'hésitons donc pas à dire qu'il vaudrait mieux les abandonner au déplorable système que nous signalons, s'il n'existait pas un autre moyen d'en tirer parti. Mais ce moyen existe, il est fondé sur le motif qui nous a déterminé à y placer exclusivement les bois résineux, c'est-à-dire sur l'expérience généralement acquise de la parfaite réussite de ces arbres, surtout le pin maritime, dans les mauvaises terres.

Quant aux avantages qu'ils présentent, ils seront nécessairement relatifs à la position des lieux; car plus les débouchés seront faciles, plus les bénéfices seront grands; les dépressages produisent beaucoup auprès d'un pays populeux, tandis que l'éloignement les réduit presque à zéro. Mais les propriétaires éloignés n'en commettraient pas moins une erreur profonde s'ils renonçaient aux semis d'arbres résineux. En effet, les propriétés situées auprès des villes ou d'un

grand vignoble produisent 500 fr. par hectare de pins exploités à dix ans, ce qui donne 50 fr. par an. Si l'exploitation n'est faite qu'à quarante ans, les dépressages jusque-là donneront. 3,000 fr.

Et 500 pieds d'arbres, qui doivent rester, à 8 fr. chaque...

Le produit d'un hectare en quarante ans

serait donc de

....

c'est-à-dire de 175 fr. par année.

...

4,000

7,000 fr.

En descendant les prix aussi bas que la raison le permet, par rapport aux propriétés éloignées des débouchés, nous supposons, ce qui est le plus probable, qu'on ne fasse exploiter qu'à quarante ans, et qu'au lieu de 3,000 fr. on évalue les dépressages seulement à 320 fr. Ce produit paiera au moins le fermage sur le pied de 8 fr. par an ; et si on évalue les 500 arbres qui doivent toujours se trouver à la fin à raison de 3 fr. l'un, on aura encore un bénéfice de 1,500 fr. par hectare des plus mauvaises terres.

Au surplus notre calcul peut être justifié par le témoignage des propriétaires qui ont déjà de l'expérience sur ce point.

Qu'on remarque bien encore 1o que cette augmentation de produits s'obtient on peut dire sans frais, tant l'ensemencement d'un hectare de pins est peu coûteux; 2o qu'après le premier, et surtout après le second dépressage, les pinières deviennent des pacages pour tous les bestiaux, meilleurs que ceux qu'ils ont aujourd'hui ; 3° que les jeunes branches de pins remplaceront les feuillards que les fermiers coupent sur de misérables têtards qu'on doit proscrire; 4° enfin que les pins offrent l'espérance de grands bénéfices par la résine qu'ils doivent produire.

Ce sont tous ces avantages qui nous font placer la culture des bois résineux parmi les importantes améliorations de la Sologne. Ils sont tels, à notre avis, qu'il n'est pas de moyens plus sûrs, plus positifs et plus faciles d'augmenter la valeur des propriétés qu'on y possède,

En vain on nous dira que la grande quantité en fera diminuer le prix ; ces craintes ne nous touchent pas. Bien d'autres genres de produits devaient être anéantis alors qu'il s'agissait d'en introduire d'analogues; les prairies artificielles, par exemple, devaient rendre nulles les prairies naturelles. Qu'est-il arrivé? que les foins naturels se sont toujours trèsbien vendus, bien que les prairies artificielles se soient très-multipliées; la raison en est simple, c'est qu'à côté d'un nouveau moyen de production est toujours un nouveau moyen de consommation. Daus tous les cas, le plus bas prix des bois résineux donnera cinq à six fois le produit qu'on retire actuellement des mauvaises terres où nous les plaçons, et conséquemment nous ne pouvons trop engager à ce genre de culture, dussent les trois quarts de la Sologne, d'ici à cinquante ans, former une vaste forêt; nous le désirons dans l'intérêt des propriétaires comme dans l'intérêt public. Enfin on doit encore recommander la culture des pins, dans la prévoyance que la loi, dont nous parlerons plus loin, qui s'oppose au libre défrichement des bois, cessera bientôt d'être en vigueur. Alors, en effet, beaucoup de propriétaires, qui reconnaîtront un avantage à mettre en terre arable ce qui est en bois, ne manqueront pas de défricher. Les bois deviendront nécessairement plus rares, et les pins en acquerront d'autant plus de valeur.

§. III.

Du défrichement des bruyères et des mauvais bois.

La moitié ou à peu près de la Sologne est encore en bruyères, broussailles, genièvres, chardons et mauvais bois ne produisant guère que les frais de garde.

Leur défrichement serait-il une amélioration réelle pour le pays?

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