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Jacq.de Favanne inv. et Sculp

Telemaque va joindre Mentor au milieu des Alliez. Nestor le reconnoist Telemaque l'embrasse, et sa presence engage les Alliez a accepter la paix.

LIVRE ONZIEM E.

CEPEN EPENDANT Télémaque, impatient, se dérobe à la multitude qui l'environne; il court à la porte par où Mentor étoit sorti; il se la fait ouvrir avec autorité. Bientôt Idoménée, qui le croit à ses côtés, s'étonne de le voir qui court au milieu de la campagne, et qui est déja auprès de Nestor. Nestor le reconnoît, et se hâte, mais d'un pas pesant et tardif, de l'aller recevoir. Télémaque saute à son cou, et le tient serré entre ses bras sans parler. Enfin il s'écrie: Ô mon pere! je ne crains pas de vous nommer ainsi; le malheur de ne point retrouver mon véritable pere, et les bontés que vous m'avez fait sentir, me donnent le droit de me servir d'un nom si tendre: mon pere! mon cher pere! je vous revois: ainsi puissé-je revoir Ulysse! Si quelque chose pouvoit me consoler d'en être privé, ce seroit de trouver en vous un autre lui-même.

A ces paroles, Nestor ne put retenir ses larmes; il fut touché d'une secrete joie, voyant celles qui couloient avec une merveilleuse grace sur les joues de Télémaque. La beauté, la douceur et la noble assurance de ce jeune inconnu, qui traversoit sans précaution tant de troupes ennemies, étonnerent

tous les alliés. N'est-ce pas, disoient-ils, le fils de ce vieillard qui est venu parler à Nestor? Sans doute; c'est la même sagesse dans les deux âges les plus opposés de la vie. Dans l'un elle ne fait encore que fleurir; dans l'autre elle porte avec abondance les fruits les plus mûrs.

Mentor, qui avoit pris plaisir à voir la tendresse avec laquelle Nestor venoit de recevoir Télémaque, profita de cette heureuse disposition. Voilà, dit-il, le fils d'Ulysse si cher à toute la Grece, et si cher à vous-même, ô sage Nestor! le voilà, je vous le livre comme un ôtage et comme le gage le plus précieux qu'on puisse vous donner de la fidélité des promesses d'Idoménée. Vous jugez bien que je ne voudrois pas que la perte du fils suivît celle du pere, et que la malheureuse Pénélope pût reprocher à Mentor qu'il a sacrifié son fils à l'ambition du nouveau roi de Salente. Avec ce gage, qui est venu de lui-même s'offrir, et que les dieux amateurs de la paix vous envoient, je commence, ô peuples assemblés de tant de nations, à vous faire des propositions pour établir à jamais une paix solide.

A ce nom de paix, on entend un bruit confus de rang en rang. Toutes ces différentes nations frémissoient de courroux, et croyoient perdre tout le temps où l'on retardoit le combat; elles s'imaginoient qu'on

ne faisoit tous ces discours que pour ralentir leur fureur et pour faire échapper leur proie. Sur-tout les Manduriens souffroient impatiemment qu'Idoménée espérât de les tromper encore une fois. Souvent ils entreprirent d'interrompre Mentor; car ils craignoient que ses discours pleins de sagesse ne détachassent leurs alliés. Ils commençoient à se défier de tous les Grecs qui étoient dans l'assemblée. Mentor, qui l'apperçut, se hâta d'augmenter cette défiance pour jeter la division dans les esprits de tous ces peuples.

J'avoue, disoit-il, que les Manduriens ont sujet de se plaindre et de demander quelque réparation des torts qu'ils ont soufferts: mais il n'est pas juste aussi que les Grecs qui font sur cette côte des colonies soient suspects et odieux aux anciens peuples du pays. Au contraire, les Grecs doivent être unis entre eux, et se faire bien traiter par les autres; il faut seulement qu'ils soient modérés et qu'ils n'entreprennent jamais d'usurper les terres de leurs voisins. Je sais qu'Idoménée a eu le malheur de vous donner des ombrages; mais il est aisé de guérir toutes vos défiances. Télémaque et moi nous vous offrons à être des ôtages qui vous répondent de la bonne foi d'Idoménée : nous demeurerons entre vos mains jus

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