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qui paraissait, à bon titre, leur complice, et un grand nombre d'individus, tant nobles que gens du commun de l'un et de l'autre sexe, soupçonnés d'avoir participé à ce crime ou de l'avoir connu, souffrirent la torture; quelques-uns furent noyés, d'autres mis à mort secrètement. >>

L'autre fait se passa au seizième siècle, et fut une réaction du puritanisme protestant contre les mœurs relâchées des catholiques.

« En 4563, dit de Thou, on rendit, à Orléans (alors au pouvoir des réformés), un jugement qu'on peut dire n'être pas de ce siècle, et être bien contraire aux mœurs de la France, dont Jean le Fevre, célèbre jurisconsulte, a autrefois écrit qu'on n'y condamnait point l'adultère. Des Landes, sieur du Moulin, ayant été atteint et convaincu d'avoir débauché Godarde, femme de Jean Godin, pendant que son mari était à l'armée, fut condamné à mort; et l'un et l'autre furent pendus dans la place publique. Ce fut Puygreffier, que le prince de Condé avait nommé prévôt de la ville, homme du vieux temps et juge sévère, qui fit rendre cette sentence, soutenant que, dans un temps où le vice faisait tant de progrès, l'on avait besoin d'un pareil exemple. Le jugement fut si mal reçu par les courtisans, que la plupart eurent l'imprudence de dire tout haut qu'ils seraient toujours très-opposés aux protestants, et qu'ils ne prendraient jamais pour leurs maîtres des gens qui, par une sévérité nouvelle et jusqu'alors inouïe parmi nous, avaient puni de mort l'adultère 1. »

- 1 L. xxxv, traduct. française, in-4, t. rv, p. 531. -«M. Jehan Faber, en ses commentaires sur le code, dit qu'au royaume de France n'a jamais esté veu que pour adultère quelcun ait esté puny, et que l'adultère y est si peu estimé, que presques on ne le tient pour péché, mais plustôt pour

Malgré ces deux exemples de justice impitoyable, on peut dire qu'en général, en France, l'adultère était puni par une peine plus infamante que rigoureuse. Suivant la coutume de Saint-André, près Avignon (année 1292), les adultères étaient fustigés nus par la ville. La femme seule était quelque peu vêtue (pudibundis coopertis). Les choses se passaient un peu moins pudiquement dans la vicomté de Turenne la femme et l'homme couraient nus; el ce dernier était traîné per genitalia1.

Des lettres royales, données en février 1337, en faveur des habitants de Villefranche, en Périgord, portent que les adultères surpris en flagrant délit ou convaincus de ce crime seront punis d'une amende, ou contraints de courir nus par la ville 2.

- Dans des lettres de rémission de l'année 1479, citées par du Cange, au mot ADULTERIUM, on trouve le passage suivant: «Le suppliant par joyeuseté et esbatement commença à dire à Nicolas le Blanc qu'il estoit marié en son pays, et que néanmoins il avoit esté trouvé avec une femme, en la ville d'Eu, et avoit eu sa compaignie; pourquoy il falloit qu'il fust emplumé, ainsi que estoient les autres qui aloient avec autres femmes que les leurs. >> L'emplumement (qu'on me passe le mot) paraît avoir été très-commun au moyen âge. Dans le règlement qu'en 1189 Richard Coeur-de-Lion, partant pour la Terre-Sainte, promulgua pour le maintien de la discipline, à bord de sa flotte, on trouve l'article suivant : « Si quelqu'un est

une audace ou gentillesse.» Practique judiciaire ès causes criminelles, par messire Josse de Damhoudère, chevalier, Anvers, 1564, in-4, fig. Ouvrage curieux.

Du Cange, yo Approbatus.

2 Voy. encore dom Vaissète, Histoire de Languedoc, t. IV, p. 17, 205, 208.

convaincu de vol, on lui versera sur la tête de la poix bouillante, et on y secouera de la plume d'oreiller, afin qu'on puisse le reconnaître. Il sera ensuite abandonné sur la première terre où le vaisseau touchera 1. >>

En 1198, une religieuse ayant été maltraitée, enduite de miel, roulée dans des plumes, et promenée à rebours sur un cheval, Philippe-Auguste fit noyer dans une cuve d'eau bouillante les individus coupables de cette mauvaise plaisanterie dont on trouve de nombreux exemples.

Dans un fabliau, une femme, ayant à se venger d'un curé, d'un prévôt et d'un garde forestier, qui étaient amoureux d'elle, les mande chez elle successivement, et trouve le moyen de les enfermer tout nus dans un tonneau rempli de plumes, d'où ils sont, à la fin, chassés par le mari, qui met aux trousses de ces corps emplumés tous les habitants et tous les chiens du village 2.

« L'usage d'ouvrir une veine et de tirer du sang aux soldats qu'on veut frapper d'une peine infamante remonte à la plus haute antiquité, dit Aulu-Gelle. Je n'en trouve pas la raison dans les anciens écrits que j'ai pu me procurer, mais je pense que ce fut d'abord moins un châtiment qu'un remède employé envers les soldats dont l'intelligence était troublée et l'activité engourdie. Dans la suite, la saignée devint un châtiment ; et on prit l'habitude de punir ainsi différentes fautes, sans doute dans l'idée que celui qui commet une faute est malade 3. >>>>

1 Mathieu Paris, année 1189. Nous reviendrons, dans un autre volume, sur ce règlement curieux.

2 Recueil de Legrand d'Aussy, in-18, t. IV, p. 226 et suiv. Le texte de ce fabliau a été publié dans le second volume du recueil de Barbazan. -On connaît l'imprudence qui rendit Scarron impotent.

3 Nuits attiques, 1. x, ch. 8, collect. Dubochet, p. 501.

Parmi les peines infamantes, qui ont été très-nombreuses, citons encore les suivantes:

On appelait harmiscara une amende honorable qui se faisait de la manière suivante : Les hommes qui y étaient condamnés devaient marcher tête, pieds et jambes nus, pendant un certain temps, et le plus souvent à la suite d'une procession, en portant une selle ou un chien sur leurs épaules. (Voy. du Cange, verb. HARMISCARA et CANEM FERRE.)

« Tout homme libre, qui, malgré la défense de l'empereur, dit un capitulaire de l'an 800, cachera un malfaiteur dans le palais, sera tenu de porter le criminel sur ses épaules jusqu'à la place publique, et là il sera attaché au même poteau que lui. »>

« On attachera au faux témoin sur la poitrine deux langues de drap rouge, longues d'une palme et demie, et larges de trois doigts; on lui en attachera deux autres par derrière, entre les épaules, avec ordre de les porter toujours.» (Voy. du Cange, Iv, 225.)

Au moyen âge, et dans la plupart des pays de l'Europe, la femme qui avait battu son mari devait monter à rebours sur un âne, et parcourir la ville ou le village en tenant l'àne par la queue.

En 1593, le bailli de Hombourg décida que la femme qui aurait battu son mari devait, suivant l'ancien usage, monter sur un âne, et que l'homme qui se serait laissé battre conduirait l'âne par la bride 1. La même peine était souvent infligée au mari, « comme yceulx conjoins

1 Voy. Michelet, p. 385. On faisait quelquefois subir ces promenades ignominieuses aux condamnés à mort. Pierre Sunnanwader, évêque de Vesteras, et un autre prélat nommé Canut, ayant conspiré contre Gustave Wasa, furent condamnés à mort en 4526. « Les malheureux, dit l'historien suédois Geyer, furent traînés dans les rues de Stockholm revê

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eussent eu n'a guères débat et riote l'un à l'autre, et tant eussent procédé en paroles que ladite femme féry, ba et villena sondit mari. Pour cause et occasion duquel fait et bateure, lesdiz juif et juive se doubtant que par la rigueur et coustume du pais de nostre dite ville de Senliz, ilz ne soient contrains et condempnez à chevauchier un asne, le visage pardevers la queue dudit asne, ou en autres villenies et détestable amende, etc. » (Lettres de rémission de l'année 1375, citées par du Cange, vo ASINUS. )

Dans quelques localités, c'était le plus proche voisin du mari battu qui le remplaçait, mais probablement cas d'absence, ou quand celui-ci s'y refusait. On trouve en effet le passage suivant dans des lettres de rémission de l'année 1383.

<< Icelui Martin commença à dire que Jehanne, femme de Guillaume du Jardin, de la paroisse de Sainte-Marie des Champs, près Vernon sur Saines, avoit batu sondit mary, et qu'il convenoit que ledit Vincent, qui estoit le plus prouchain voisin d'icelluy mary batu, chevauchast un asne parmi la ville, et feist pénitence au lieu dudit batu... Ledit Martin... de fait prist un asne qui estoit en la maison dudit Vincent, et ledit asne chevauchast parmi la ville, tourné le visaige pardevers le cul dudit asne, en disant et criant à haulte voix, que c'estoit pour ledit mary que sa femme avoit batu. » (Du Cange, ibid.)

Dans quelques pays les maris qui battaient leurs femmes étaient exposés au même châtiment qu'on leur

tus de chapes déchirées, assis à rebours sur des rosses, l'un avec une couronne de paille, l'autre avec une mitre d'écorce sur la tête. Des hommes travestis en pasquins circulaient autour d'eux en criant: « Voici le seigneur Pierre Sunnanwader, le nouveau roi! Pour les promenades en tom

bereau, voy. du Cange, vo TUMBRellum.

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