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«Les parricides et les fratricides, dit le concile de Worms en 868 (canon 30), seront un an à prier devant la porte de l'église, et un an parmi les auditeurs. Ils pourront ensuite communier; mais ils ne mangeront point de chair, et ils jeûneront jusqu'à none pendant toute leur vie, excepté les jours de fête et les dimanches. Ils s'abstiendront de vin trois jours de la semaine, ne porteront point d'armes, si ce n'est contre les païens, et feront tous leurs voyages à pied. L'évêque pourra augmenter ou diminuer cette pénitence. »

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La pénitence de celui qui aura tué un prêtre est prescrite de cette manière : « Il ne mangera point de chair, et ne boira pas de vin pendant le reste de sa vie. Iljeûnera tous les jours jusqu'au soir, excepté les dimanches et les fêtes; il ne portera point les armes, et fera tous ses voyages pied. L'entrée de l'église lui sera interdite pendant cinq ans; durant la messe et les autres offices, il demeurera à la porte, priant Dieu de l'absoudre d'un si grand crime. Les sept années suivantes, il entrera dans l'église, sans y recevoir la communion, et prendra place parmi les auditeurs. Après douze ans de pénitence, on lui accordera la communion, et alors il ne fera plus sa pénitence que trois fois par semaine. » (Concile de Mayence en 888, canon 16. Ce canon est identique avec le 5o du concile de Tribur, en 895.)

Le maître qui aura tué son serf, de son autorité privée, fera deux ans de pénitence. La maîtresse qui aura battu sa servante, de telle sorte que celle-ci ait succombé trois jours après, fera sept ans de pénitence, si elle l'a fait avec préméditation. Dans le cas contraire, elle ne fera que cinq ans de pénitence. (Canons 58 et 39 du concile de Worms, en 868.)

Le 31° canon du concile de Cognac (vers 1260) défend aux femmes, sous peine d'excommunication, de coucher leurs petits enfants avec elles. « Si quelque enfant vient à périr dans cette circonstance, ceux ou celles qui auront occasionné sa mort par leur négligence seront renvoyés à l'évêque ou au confesseur de l'évêque, pour avoir l'absolution de leur faute.»>

Les prescriptions relatives à l'adultère sont aussi nombreuses que celles qui concernent les homicides. Citons seulement les suivantes.

Le 12o canon du concile de Nantes, en 658, autorise le mari à chasser, pour cause d'adultère, sa femme, qui sera mise en pénitence pendant sept ans. Il lui permet aussi de se réconcilier avec elle, sous la clause fort singulière qu'il fera la même pénitence que sa femme.

Le 35° canon du concile de Trèves, en 1238, ordonnait de faire faire pénitence publique aux adultères. Les femmes coupables de ce crime devaient porter une coupe sur leur robe et un bâton à la main.

On trouve dans l'histoire d'assez nombreux exemples de prélats déposés et soumis à la pénitence. Ainsi, au concile de Mâcon, assemblé en 585, par ordre du roi Gontran, on excommunia Ursicin, évêque de Cahors, qui reconnut avoir favorisé Gondovald. « Il se soumit, dit Grégoire de Tours, à faire pénitence pendant trois ans, et durant ce temps à ne couper ni sa barbe ni ses cheveux, à s'abstenir de vin et de viande. Il lui fut aussi défendu de célébrer la messe, d'ordonner des clercs, de bénir des églises ou les saintes huiles, et de distribuer des eulogies. Cependant on lui permit d'administrer, comme à l'ordinaire, les affaires de l'église soumise à sa juridiction 1. » 1 Liv. VIII, ch. 20.

Il se passa, en 656, au concile de Tolède, un fait probablement unique dans l'histoire de l'Eglise. Les évêques étaient encore assemblés, lorsqu'on leur présenta un écrit par lequel Potamius, évêque de Brague, se reconnaissait coupable d'un commerce charnel avec une femme. On le fit appeler; il protesta alors avec serment de la vérité de cette confession, et déclara, en fondant en larmes, qu'il avait, depuis environ neuf mois, quitté volontairement le gouvernement de son église, pour se rendre en prison et y faire pénitence. Les prélats déclarèrent que, suivant les anciens canons, le coupable devait être déposé de l'épiscopat; mais que, touchés de son repentir, ils lui conservaient le nom et le rang d'évêque, à condition néanmoins qu'il ferait pénitence toute sa vie.

C'est au onzième siècle que commença le relâchement de la discipline ecclésiastique, relativement à la pénitence. Longtemps auparavant, les conciles avaient dù s'élever contre des abus fort graves.

Le 27° canon du concile de Cloveshow (Angleterre), en 747, condamne les personnes qui croyaient s'acquitter des pénitences qu'on leur avait imposées, en les faisant accomplir par d'autres. « S'il était permis d'agir ainsi, y est-il dit, les riches se sauveraient plus aisément que les pauvres, malgré la parole expresse de l'Evangile : Il est plus difficile à un riche d'entrer dans le royaume du ciel, que de faire passer un chameau (lisez câble) par le trou d'une aiguille. >>

Le concile de Rouen, en 1050, signale un autre abus qui probablement existait depuis longtemps. Des prêtres augmentant ou diminuant les pénitences à proportion de l'argent qu'ils tiraient de leurs pénitents, on leur défen

dit une pareille conduite sous peine de déposition. Les conciles des siècles suivants contiennent, à cet égard, des dispositions analogues. « Les archidiacres et les autres prélats qui commueront la peine canonique imposée pour les péchés en une amende pécuniaire, ou qui prendront de l'argent pour remettre les peines, seront contraints par l'évêque d'employer en œuvres pies le double de ce qu'ils auront reçu.» (Concile de Londres en 1268, canon 20.)

« Les confesseurs qui imposeront pour pénitence aux personnes obligées à quelques restitutions de bâtir des chapelles, des églises ou des monastères, encourront l'excommunication. La même peine sera appliquée à ceux qui diront eux-mêmes les messes qu'ils auront ordonné de faire dire pour pénitence.» (Concile de Cologne, en 1291, canon 8.)

« Il est défendu aux archidiacres, doyens et archiprêtres, d'imposer une peine pécuniaire pour la punition des crimes énormes, tels que l'adultère, l'inceste, etc. (Concile de Saumur, en 1294, canon 3.)

L'usage d'imposer des pèlerinages en expiation de différents crimes affaiblit peu à peu l'influence des pénitences canoniques, jusqu'au moment où le concile de Clermont, en 1095, lui porta un coup mortel en déclarant par son 3 canon « que la croisade tiendrait lieu de pénitence aux croisés qui feraient le voyage de Jérusalem dans un but de dévotion, et avec l'intention de contribuer à arracher les saints lieux au pouvoir des infidèles. >> « Il fut bien doux à cette noblesse, qui ne savait que chasser et se battre, dit Fleury,

1 Voy. plus haut, p. 176.

de voir changer en un voyage de guerre les pénitences laborieuses qui consistaient en jeûnes et en prières, et surtout, en ces temps-là, à s'abstenir de l'usage des armes et des chevaux. La pénitence devint un plaisir, car la fatigue du voyage était peu considérable pour des gens accoutumés à celles de la guerre, et le changement de lieux et d'objets est un divertissement. Il n'y avait guère de peine sensible que de quitter, pour longtemps, son pays et sa famille. Il ne sembla pas juste de priver de l'indulgence les femmes et les autres personnes que leur âge ou leur condition mettait hors d'état de porter les armes; on la leur communiqua quand ils faisaient des aumônes pour subvenir aux frais de la guerre. Les aumônes appliquées à d'autres œuvres pies parurent aussi propres à racheter les péchés..... Ainsi, les satisfactions devinrent presque arbitraires. Les canons pénitentiaux, n'étant plus pratiqués, furent bientôt oubliés, et la confession fut la plus grande difficulté de la pénitence. * »>

1 Les mêmes indulgences furent accordées à ceux qui allaient combattre, soit les hérétiques comme les Albigeois, soit les Sarrasins d'Espagne ou d'Afrique, les païens du nord de l'Europe, etc. Le 15o canon du concile de Clermont, en 1130, excommunie les incendiaires, et leur impose pour pénitence un an de service militaire en Terre-Sainte ou en Espagne.

2 Fleury, ouvrage cité, ive partie, ch. 10.

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