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Après les croisades, on vit encore des chrétiens affronter les dangers qu'offraient de nouveau les contrées soumises aux infidèles; mais, à partir du dix-septième siècle, la plupart doivent plutôt être considérés comme des voyageurs que comme des pèlerins. Nous citerons toutefois les pèlerinages de deux femmes. L'une, Gabrielle Brémond, de Marseille, parcourut la haute et basse Egypte, la Palestine, le mont Sinaï, le mont Liban et presque toute la Syrie. La relation de ce voyage fut traduite du français en italien, Rome, 1673, in-4. L'autre femme, nommée Anne Chéron, alla visiter Jérusalem, à l'âge de quatre-vingts ans. Le récit de ce pèlerinage fut publié à in-12.

Paris, 1771,

Si, malgré les dangers qu'ils offraient, les pèlerinages en Terre-Sainte étaient aussi fréquents, on devine aisément quelle devait être l'affluence des pèlerins qui allaient visiter les lieux de sainteté, situés en Europe, comme Rome et Saint-Jacques de Compostelle 1. La capitale du monde chrétien surtout attirait dans ses murs une foule de voyageurs de toutes les nations. Ainsi Brunon, qui, en 1049, devint pape sous le nom de Léon IX, n'étant encore qu'évêque de Toul, faisait tous les ans, à Rome, un voyage où il était quelquefois accompagné de plus de cinq cents personnes. Et pour parler d'une époque plus rapprochée de nous, lors du jubilé de 1600, l'hospice des pèlerins, fondé dans cette ville par saint Philippe de Néri, au milieu du seizième siècle, donna l'hospitalité, pendant trois jours, à 445,000 hommes et à 25,000 femmes.

1. M. Victor Leclerc a composé, sur les pèlerinages à Saint-Jacques de Compostelle, un mémoire qu'il a lu à l'Académie des inscriptions et belles lettres, en 1843.

On donnait, en France, le nom de Romée ou Romieu aux pèlerins qui avaient visité Rome; de là vient que ces noms, surtout le dernier, sont assez commuus dans quelques provinces.

DE QUELQUES ANCIENS RITES CHRÉTIENS

On sait que l'on nommait catéchumènes, dans les premiers siècles du christianisme, les nouveaux convertis que l'on instruisait avant de leur donner le baptême. Le temps de l'instruction durait en général deux ans. Ceux qui demandaient le baptême ou qui en étaient jugés dignes, étaient, au commencement du carême, inscrits sur la liste des compétents ou illuminés. On les baptisait solennellement par trois immersions, la veille de Pâques ou de la Pentecôte, et on leur donnait en même temps la confirmation. On n'administrait le baptême par aspersion que dans les cas de nécessité absolue, comme celui de maladie, et le peuple nommait cliniques (du grec xλɩvn, lit) ceux qui avaient été baptisés dans leur lit.

Le baptême était accompagné de cérémonies symboliques. Áinsi on faisait manger aux nouveaux baptisés du lait et du miel, pour marquer leur entrée dans la vraie terre promise et leur enfance spirituelle; car le lait et le miel étaient la première nourriture des enfants sevrés.

Pendant longtemps, comme nous venons de le dire, le baptême se donna par trois immersions, en l'honneur des trois personnes de la Trinité. Mais les ariens ayant trouvé

dans cette cérémonie un argument pour soutenir qu'il y avait en Dieu distinction et pluralité de natures, le pape saint Grégoire, par une lettre adressée à saint Léandre, de Séville, ordonna qu'en Espagne, où les ariens étaient nombreux, on se contenterait d'une seule immersion, prescription qui fut renouvelée par le 6o canon du concile de Tolède, en 633.

En Irlande, au douzième siècle, l'enfant nouveau-né était baptisé par son père, ou le premier venu, qui le plongeait trois fois soit dans l'eau, soit dans du lait. Cette coutume fut abolie en 1172, par le concile de Cashel.

En Afrique, ceux qui devaient être baptisés la veille de Pâques avaient soin de se baigner le jeudi saint, « afin, dit le P. Richard, d'éviter l'indécence qu'il y aurait à se présenter aux fonts sacrés, le corps couvert de la crasse contractée par l'observation du carême 1. » Dans plusieurs contrées de l'Occident, comme à Milan et dans les Gaules, l'évêque et les clercs lavaient eux-mêmes les pieds des nouveaux baptisés, ce qui, pour l'Espagne, avait été défendu par le 48° canon du concile d'Elvire, en 303.

Le 2o canon du concile tenu à Tolède, en 694, portait que, depuis le commencement du carême jusqu'au jeudi saint, le baptistère serait fermé et scellé du sceau de l'évêque. Le concile de Reding (Angleterre), en 1279, ordonna que l'on baptiserait solennellement, à Pâques et à la Pentecôte, les enfants nés pendant la semaine qui précéderait ces deux fêtes.

Au onzième siècle, dans le diocèse de Rouen, les nouveaux baptisés devaient aller à l'église avec des habits blancs et des cierges allumés. Ces cierges et le linge qui

1 Analyse des conciles. C'est par erreur que l'on a imprimé plus haut (note de la page 73) Ricard, au lieu de Richard.

couvrait leur tête devenaient la propriété de l'église. (Conc. de Rouen, 1050, can. 17 et 19.)

Du temps de Grégoire de Nazianze, le nouveau baptisé donnait ordinairement un repas à l'évêque et à ceux qui avaient aidé le prélat dans la célébration du baptême. Cette sorte de redevance volontaire fut plus tard payée en argent, comme on le voit par le 48 canon du concile d'Elvire, en 303, qui défend de mettre de l'argent dans les fonts, «afin, y est-il dit, que l'évêque ne semble pas vendre ce qu'il a reçu gratuitement. » Toutefois cette prescription ne fut pas plus observée au moyen âge qu'elle ne l'est aujourd'hui.

C'était autrefois l'usage, dans plusieurs églises de France, que les prêtres ne baptisassent qu'à jeun et à l'heure de nones (trois heures après midi), en mémoire de l'heure à laquelle Jésus-Christ mourut. Mais on fut bientôt obligé de se relâcher de cette règle trop rigoureuse, et de permettre de baptiser le matin. Toutefois le 5e canon du concile de Rouen, en 1072, recommandait encore aux prêtres de ne baptiser qu'à jeun, à moins d'absolue nécessité.

D'après un concile provincial d'Ecosse, tenu en 1225 (canon 55°), le baptistère devait être de pierre ou de bois. L'eau avec laquelle on avait baptisé un enfant hors de l'église devait être jetée au feu ou portée au baptistère, et le vase qui avait servi à la cérémonie devait être brûlé ou employé pour l'église.

Les liens qui unissaient le parrain à son filleul semblent avoir été très-puissants aux époques de barbarie où les autres liens étaient peu respectés. Thierry Ier, roi de Metz, ayant envoyé à son fils Théodebert l'ordre de faire mourir un de ses parents nommé Giwald, Théodebe.

refusa d'exécuter cet ordre, «parce que, dit Grégoire de Tours, il avait tenu Giwald sur les fonts de baptême. »

Le même chroniqueur raconte que Prétextat, évêque de Rouen, accusé par Chilpéric d'avoir enlevé quelque chose d'un dépôt qui lui avait été confié, se défendit en disant: « Je regardais comme à moi ce qui appartenait à mon fils Mérovée que j'ai tenu sur les fonts baptismaux.>> Le 4o canon du concile d'York, en 1196, défendait d'admettre plus de trois personnes pour tenir un enfant sur les fonts, savoir deux hommes et une femme pour un garçon, et deux femmes et un homme pour une fille.

Peu à peu il était passé en usage que les parrains fissent des présents considérables, non-seulement aux enfants qu'ils tenaient sur les fonts, mais à leur mère. Il en résultait que l'on trouvait difficilement des parrains, et que bon nombre d'enfants mouraient sans baptême. Ce fut pour remédier à cet abus que le 17° canon du concile tenu à l'Isle (Provence), en 1288, ordonna que désormais on ne donnerait aux enfants baptisés rien autre chose qu'un habit blanc. Raoul Glaber, au sujet de ces présents, rapporte l'histoire suivante qui, d'après lui, se passa à Troyes.

« Des voleurs emmenaient des bœufs qu'ils avaient dérobés. Se voyant poursuivis, ils les mirent sous la garde d'un vieillard qu'ils ne connaissaient pas, et réussirent ainsi à s'évader. Cependant on trouve les bœufs, on saisit le vieillard, on l'entraine, on le frappe, on le garrotte comme un criminel; enfin on le conduit au prince de la ville, le comte Héribert, devant lequel il veut s'expliquer. On ne l'écoute point; et malgré sa vieillesse, on le condamne au gibet. La sentence est exécutée sans aucun délai. Mais le malheureux eut à peine subi son arrêt,

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