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dit seigneur de Berry lui fist hommage de la duchié de Normendie, qui baillée lui avoit esté pour sondit appanage1. Et, cedit jour, fut ladicte ville de Paris fort gardée; et fist on armer tous les archers et les arbalestriers d'icelle et autres, pour garder les portes de ladicte ville, jusques à ce que le roy feust retourné en icelle de devers lesdiz princes où il s'en estoit ainsi simplement alé. Et delibera le roy, ce mesme jour, de coucher la nuit audit lieu du boys, et envoya querir son lit à Paris2. Mais le prevost des marchans et eschevins de ladicte ville lui envoierent message exprès lui humblement prier et requerir qu'il n'y couchast point pour moult de causes, ce qu'il leur accorda, et s'en retourna au giste audit lieu de Paris3.

Et, le jeudi ensuivant [31 octobre], monseigneur

1. Les lettres d'hommage, datées de Vincennes, le 30 octobre 1465, sont imprimées dans Lenglet, II, 532.

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2. Interpolations et variantes, § XXX.

3. Craignant pour la sécurité du roi, Henri de Livres, prévôt des marchands, et les quatre échevins firent secrètement armer les archers, arbalétriers, canonniers, coule vriniers, bourgeois et gens de métier, jusqu'au nombre de 22,000 hommes. Louis XI quitta Paris à dix heures du matin avec plusieurs gentilshommes, suivi de sa garde, composée de 200 lances et de 300 archers, et de 12,000 hommes, l'élite des troupes parisiennes. Le reste demeura pour garder les murailles de Paris. Le roi pénétra au château de Vincennes avec les seigneurs de son hôtel, tandis que son escorte occupait Montreuil, Charonne, Bagnolet et Nogent-sur-Marne. Les Parisiens s'établirent autour du parc de Vincennes. Ce déploiement de forces fit craindre un moment aux princes que le roi ne voulut leur faire « quelque deplaisir; » mais la journée se passa tranquillement. Vers onze heures du matin, Charles de France fit hommage à son frère pour le duché de Normandie (cf. Mélanges historiques, II, 437 et suiv.). Le roi soupa à Vincennes et rentra à Paris vers dix heures du soir (Maupoint, Journal, p. 88 et suiv.).

de Berry, monseigneur de Charrolois et autres se departirent de devant Paris et s'en alerent en divers lieux c'est assavoir mondit seigneur Charles s'en ala en Normendie, et le convoia le roy bien loing sur le chemin de Pontoise, et puis s'en tira lui et ledit de Charrolois vers Villers le Bel, où ilz furent deux ou trois jours1. Et puis s'en ala ledit de Charrolois ou pays de Picardie, et de là s'en ala faire guerre aux Liegois.

Et, le jeudi ensuivant, messire Robert d'Estouteville, chevalier, seigneur de Beyne, qui avoit esté prevost de Paris du temps du feu roy Charles, et à qui le roy l'avoit ostée et baillée à Jaques de Villers, seigneur de l'Isle Adam, fut remis et restitué oudit office de prevost de Paris 3. Et, ce mesmes jour, fut en l'ostel de ladicte ville pour les affaires du roy, et là lui fut baillé le nom de la nuit comme à prevost de Paris.

Et, le mardi ensuivant [5 novembre], le roy souppa en l'ostel d'icelle ville, où il y ot moult beau service de char et poisson. Et y soupperent avecques lui plusieurs gens de grant façon, invitez et mandez avecques leurs femmes. Et, avant ledit soupper, le roy

1. Jeudi 31 octobre, à huit heures du matin, Louis XI s'en fut à Carrières sous Charenton, et Charolais vint à sa rencontre «en grant reverence. » Les deux princes se mirent aussitôt en route « très joyeulx » et s'en furent au gîte à Villiers-le-Bel, où ils passèrent ensemble la Toussaint. Le roi rentra à Paris le 3 novembre (Maupoint, Journal, p. 90. Cf. Lenglet, II, 185; du Clercq, IV, 237, et Commynes, éd. Dupont, I, 105).

2. Lisez lundi (4 novembre).

3. « A plus grans gages et proffis que il n'avoit onques esté » (Maupoint, Journal, p. 95).

4. Interpolations et variantes, § XXXI.

proposa à aucuns quarteniers et dixeniers pour ce aussi mandez, disant qu'il les mercioit tous en general et particulier de la grant feaulté et loyauté qu'il avoit trouvée en eulx, et que, pour eulx, il estoit du tout disposé de faire tout ce que possible lui seroit, et que, pour ce que durant la guerre et division qui avoit esté devant ladicte ville, il avoit donnez et conferez à icelle aucuns privileges, et que aucuns pourroient avoir ymaginacion qu'il auroit ce fait pour la necessité où il s'estoit trouvé d'avoir d'eulx secours, et que, après ladicte paix ou accord, les leur pourroit oster, il leur declaira pour ceste cause dès lors pour maintenant, et dès maintenant pour lors à tousjours, il les leur avoit donnez et laissez, sans jamais avoir esperance de les rappeller ne venir contre, et que, se mieulx vouloient avoir de lui, qu'ilz le demandassent, et il le leur octroieroit1. Et leur dist encores qu'il laissoit en ladicte ville le seigneur de Beyne comme prevost de Paris, auquel il vouloit qu'ilz obeïssent comme à lui, et leur dist qu'il l'avoit moult bien servy à la journée de Montlehery, et pour autres causes qu'il declaira ausdiz prevost des marchans et eschevins de Paris, en les priant de tousjours estre bons et loyaulx envers lui et à la couronne de France, sans ce que aucune parcialité soit trouvée en ladicte ville. —

1. A la date du 9 novembre 1465, Louis XI confirma aux Parisiens l'exemption de ban et d'arrière-ban, à la condition de se tenir en état de participer à la défense de leur ville (Ordonnances, XVI, 434 et suiv.). Quelques jours plus tôt, il leur confirmait une franchise dont ils avaient joui de temps immémorial, mais qui, vu les circonstances, avait été peu respectée dans les derniers temps, celle de l'exemption du logement des gens d'armes (Ibid., XVI, 425).

Et ilec ce jour fut fiancée la fille naturelle du roy1 à mons. le bastard de Bourbon; et, après souper, y furent faictes plusieurs joyeusetez, dances et autres plaisances, et là mondit seigneur le bastard y dança et y fist grande et bonne chere2.

Et, le jeudi ensuivant, vire jour de novembre, oudit an IIII LXV, ledit messire Robert d'Estouteville fut amené ou Chastellet de Paris par messire Charles de Meleun et maistre Jehan Dauvet, premier president du parlement de Thoulouze. Auquel president le roy mandoit qu'il avoit receu le serement dudit d'Estouteville à prevost de Paris ou lieu de Jaques de Villers, seigneur de l'Isle Adam, auquel il avoit donné ladicte prevosté à son joyeulx advenement, et qu'il le mist et instituast en possession et saisine dudit office de prevost de Paris. Et, après que les lectres de don dudit office furent leues au grant parc de Chastellet, icellui d'Estouteville fut mis et institué en possession dudit office, sans prejudice de la cause d'appel dudit de Villers.

Et, tantost après ces choses ainsi faictes, le roy manda venir à lui les presidens de sa court de Parlement, ausquelz il dist telles ou semblables paroles : « Il est vray que, après que je vins à mon joyeux

1. Interpolations et variantes, § XXXII.

2. Louis, fils bâtard de Charles Ier, duc de Bourbon, et de Jeanne de Bournon, comte de Roussillon, etc., avait été légitimé par patentes royales datées de Pontoise, au mois de septembre 1463 (Ordonnances, XVI, 80). Son contrat de mariage avec Jeanne, fille naturelle du roi, porte la date du jeudi 7 novembre 1465; il est imprimé dans Lenglet, II, 544. Cette union scella la réconciliation entre le roi et la maison de Bourbon (La Mure, Hist. des ducs de Bourbon, etc., ed. Chantelauze, t. II, p. 224, n. 2).

advenement à la couronne, je fis le premier president en ma court de Parlement messire Helye de Thoretes1, qui tantost après ala de vie à trespas. Et, à l'eure que je le fis, j'avoye mon affection singuliere de y mettre en son lieu maistre Jehan Dauvet, nostre premier president à Thoulouse, qui cy est present; mais, tant par importunité de requerans que aussi à la priere et requeste de messire Jehan Bureau, nous y meismes le president de Nanterre, qui depuis y a esté jusques à la venue devant nostre ville de Paris d'aucuns seigneurs de nostre sang, qui nous firent dire et remonstrer que en nostre royaume avoient esté faictes plusieurs grans injustices et mesmement en nostre court de Parlement. Pour quoy et autres causes qui nous meuvent, declairons que ledit de Nanterre ne sera plus nostre premier president en nostredicte court de Parlement, et que pour et en son lieu y avons mis et creons ledit maistre Jehan Dauvet pour y estre et demourer. >

Et, le samedi ensuivant, Ixe jour dudit moys de novembre, messire Pierre de Morviller, chevalier, qui

1. Élie de Torrettes ou de Tourrettes, conseiller du roi et lieutenant du sénéchal de Saintonge, fut l'un des commissaires chargés d'instruire et de juger le procès de Jacques Cœur (1451). Plus tard, en 1458, on le voit siéger, en qualité de président au Parlement de Paris, parmi les juges du duc d'Alençon. Il prêta serment le 11 septembre 1461, en qualité de premier président, office auquel il avait été nommé le 3 du même mois (Ordonnances, XV, p. 12, note).

2. Mathieu de Nanterre, fils de Simon, aussi président au Parlement de Paris, fut transféré à Toulouse, puis rappelé à Paris, où il tint la place de second président. Il mourut en 1487 (voy. Blanchard, Éloges des premiers présidents du Parlement de Paris, 1647, in-fol.). Il avait épousé Guillemette Le Clerc.

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