Images de page
PDF
ePub

ferme Politique, il ne réuffit pas moins dans l'Administration des Finances. Il méconnut, il eft vrai, le bénéfice des Manufactures de Luxe; il chargea le Commerce de quelques droits intérieurs : mais on ne peut lui refufer la gloire d'avoir mieux conçu que tous ceux qui l'ont fuivi la néceffité d'envifager l'Agriculture du côté du Commerce, de faire entrer l'argent des Etrangers dans les Campagnes, & de diminuer en même tems, le fardeau des Laboureurs. Le germe des plus grandes vues de Police intérieure, étoit dans fa tête: on en peut juger par les divers Projets dont la mort déplorable du Roi arrêta l'exécution. Il aimoit les Peuples, parcequ'il aimoit le Roi, & il fut toujours l'interprète de leurs befoins auprès du Thrône. Quoique fa hauteur ne fe mon trât jamais qu'à ceux qui lui difputoient ce qu'il fe fentoit dû; le reproche qu'elle lui a attiré, nous apprend que les hommes publics doivent être hommes le moins qu'il leur eft poffible. Les Mémoires enfin qu'a laiffés cet excellent Génie, furent peut-être l'Ecole des Richelieu & des Colbert.

Henri IV demandoit, un jour, à Sully s'il n'étoit pas bien malheureux après avoir effuyé durant fa jeuneffe plus de malheurs lui feul que tous les Rois de France enfemble n'en avoient jamais éprouvés, de ne

pouvoir jouir paifiblement d'aucun plaifir durant le cours de fa profpérité ? de ne point pofféder le cœur de fa femme? de le voi pour ennemis la plupart de ceux qu'il avoit comblés de fes bienfaits? &c. Tous ces malheurs ne feroient rien, (lui dit Sully,) fi V. M. n'y ajoutoit pas celui d'y être trop fenfible.»

33

Sully, à la journée d'Ivry, eut deux Chevaux tués fous lui, reçut fept bleffures, & resta pour mort. Revenu à lui, il fe fit tranfporter à Rofni, où étoit le Roi, qui, du plus loin qu'il l'apperçut, courut au-de- · vant de lui, en s'écriant: « brave Soldat, « & vaillant Chevalier ! j'avois toujours «< eu bonne opinion de votre courage, & «conçu de bonnes efpérances de vos ver«tus! Mais vos actions fignalées, & vo« tre modeftie ont furpaffé mon attente!.. » Et partant, en préfence de ces Princes, Capitaines & grands Chevaliers qui font «ici près de moi, je vous veux embras«fer des deux bras. »

c

Eft-il aucun Français qui ne partageât l'atendriffement de l'Auteur des Vers ciffous, à l'afpect du Château de Villebon, où ce grand-homme retiré depuis 30 ans, finit, en paix, fa glorieufe car

rière ?

BEAUX lieux, je fens à votre afpect,

Que mon âme s'éleve, & qu'elle eft attendrie !.... Tout infpire ici le Respect:

Tout rappelle à mon cœur l'amour de la Patrie, Le meilleur des Sujets, le plus grand des Mortels, A qui la France auroit dû des Autels,

Hélas! l'affreufe Jaloufie

Le força de venir habiter ce féjour.
Il y gémit des erreurs de la Cour.

Il vit avec douleur que la cruelle Envie
Y détruifoit le fruit de fes Talens.

11 regretta, pendant trente ans, Le bien qu'il auroit fait le refte de sa vie!

Par CHENEVIERES,

Ci-devant Ier Commis de la Guer

DE LOUIS XV.*

Louis vient de descendre au Tombeau de fes

Peres:

Au Vainqueur de la Flandre, à l'ami de la paix, Nous donnons des larmes finceres.

Mais au milieu de tes regrets,

France, leve la tête, & vois ton Maître Augufte, Qui s'annonce par des bienfaits,

Et jure entre tes mains, d'être économe & jufte.

Par M. SAURIN,

de l'Académie Françoife.

* Né le 15 Fév. 1710, mort le 10 Mai 1774. Son règne, qui a duré 9 ans, fera remarquable dans nos Faftes par le nombre de fes victoires, par l'acquifition de la Lorraine, par l'établissement de l'Ecole Militaire, par plufieurs Edifices confacrés à la Religion, par une grande quantité de Monumens publics, par des Routes ouvertes dans tout le Royaume pour la facilité du Commerce; enfin la Protection accordée aux Sciences & aux Arts.

par

A l'égard de fes Vertus perfonnelles; à travers un grand nombre de traits qui caractérisent la bonté de fon cœur & la fenfibilité

fenfibilité de fon âme, on fait combien de fois l'on a entendu dire à fes Serviteurs à fes Familiers, & à fes Miniftres:,, Que « le Roi n'est-il né parmi nous ! il feroit le « Particulier le plus aimable, le meilleur Mari, le meilleur Pere, le plus honnête homme de fon Royaume. »

Un Brigadier de fes Armées qui n'étoit pas riche, étant venu de l'Armée lui rendre compte d'une Action dans laquelle il s'étoit diftingué; Louis, tirant de fon doigt un Diamant, & le lui préfentant, lui dit que c'étoit une bague de famille,

qu'il portoit depuis long-tems.» A quoi l'Officier qui avoit plus befoin d'argent que de Bijoux, lui ayant répondu, que quelque eftime qu'il fit du préfent de S. M. il la fupplioit de permettre qu'il n'acceptât point celui-ci, attendu qu'il lui feroit impoffible de le gardér plus de 24 heures. Le Roi, qui comprit ce que cela vouloit dire, lui fit compter le lendeinain une fomme plus confidérable que la valeur du Diamant.

Un Dauphinois, nommé Dupré, avoit inventé un Feu fi rapide & fi dévorant, qu'on ne pouvoit ni l'éviter ni l'éteindre. Ôn en avoit fait des expériences publiques, dont avoient frémi nos Militaires les plus intrépides.

Tome 11.

N

« PrécédentContinuer »