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qu'il fût possible de l'empêcher. « Or est à juger, écrit Alain Chartier dans le saisissant tableau qu'il a tracé de la situation en 1422, or est à juger l'estat et l'infelicité des princes qui, pour acquerir seigneurie, ou pour demourer seigneurs de celles qui leur appartiennent, sont faiz serfs et subgetz à gens de diverses affections et contraires voulentez, et à pourveoir et avoir l'ueil à choses repugnans, et aux cas qui soubdainement leur surviennent, soit à leur avantage quant bien en veulent user, ou en leur prejudice se obvier n'y sçavent. Dont se puet ensuivre clerement que se le plus saige prince que oncques Dieu mist sur terre estoit environné des pesans affaires et des cuisans poinctures qui pour relever ceste seigneurie opprimée surviennent un chascun jour, dur luy seroit à y pourveoir au bien de la chose publicque et aux divers appetitz des hommes 1. >>

Ce passage peut servir de conclusion à notre aperçu de l'administration du Dauphin, et en même temps au tableau que nous avons essayé de présenter de cette période de la régence de Charles, si imparfaitement connue.

peuple. » Quadrilogue invectif, p. 443. - Et il ajoute plus loin (p. 445-46) : « Que diray-je doncques de nous, ne quelle esperance pourray-je prendre en noz entreprinses et armées, se discipline de chevalerie et droicturière justice d'armes n'y sont gardées? Autre chose ne se puet dire, lors que, en ce cas, nous allons comme la nef sans gouvernail et comme le cheval sans frein. >>

1. Quadrilogue invectif, p. 438–39.

PIÈCES JUSTIFICATIVES

I

Le comte de Ponthieu à la Chambre des Comptes

23 septembre 1415.

A noz tres chiers et bons amis les conseillers et gens des comptes de Monseigneur le Roy à Paris.

DE PAR CHARLES, FILZ DU ROY DE FRANCE ET CONTE DE PONTIEU.

Tres chiers et bons amis, il a pleu à Monseigneur le Roy, pour aucunes causes qui à ce l'ont meu, mesmes par l'advis et deliberacion de mon tres redoubté seigneur Monseigneur de Guienne, nous commettre et ordonner garde et capitaine de son chastel du Bois de Vincennes, ainsi que plus applain vous est peu apparoir par les lettres que mon dit seigneur nous a sur ce octroyées, lesquelles, affin d'estre par vous verifiez, vous ont esté de par nous presentées par nostre amé et feal chevalier et chambellan Messire Pean de Maillé et nostre chier et bien amé escuier d'escuierie Jehan Rouvreau 1; quelz pour ceste cause, et mesmement pour recevoir et prendre pour nous et en nostre nom la possession et saisine du dit chastel et des biens et autres choses appartenans à icellui, avons par dela envoiez. Si nous ont iceulx noz chevalier et escuier, depuis leur partement de nous, fait savoir comment ilz n'ont encores peu envers vous obtenir verificacion de nos dictes lettres, ne aucune expedicion en ceste partie, mais a esté et est la besoigne par vous tenue en delay et surseance, ne scavons à quel fin, disans que si promptement ne puet estre expediée, tant par la grant charge d'autres affaires qu'avez entre mains, comme pour ce que encore n'estoit aucune certaineté de la mort du Borne Fouquault, et que

1. Rouveau et Roussart, dans d'autres documents.

plusieurs tenoient qu'il estoit encores en vie, ce qu'à Dieu plaise! Lesquelles choses congnoissons bien estre toutes couleurs de vrayes dilacions en la matiere, ce qui nous semble que ne devriez aucunement faire, mesmement à nous, filz de mon dit seigneur. Et pour ce, tres chiers et bons amis, sommes nous meuz de vous presentement escripre, en vous priant bien acertes que, ces choses par vous considerées et bien pensées, vueillez liberalment verifier les lettres de l'octroy qu'il a pleu à mon dit seigneur nous faire tou- . chant la garde et capitainerie du chastel du dit Bois, et au surplus faire et donner à nos dictes gens en ceste partie, au regard de ce qu'il vous touchera et appartendra, tele et si bonne et prompte expedicion que nous ayons cause d'y congnoistre le desir et bonne voulenté que tenons vous avoir à nous complaire, et aussi d'appercevoir que vostre entencion et vouloir ne sont de mettre ne tenir nos besoignes ou rent, ne en teles et si longues expedicions et delaiz comme les autres mains privilegiez. Et ce faictes par tel maniere qu'il ne nous soit plus besoing d'en rescripre ne envoier devers vous, ne aussi d'en parler à mon dit seigneur, pour nous y pourvoir en vostre difficulté par autre voye. Et en verité, en ces choses faisant, nous ferez si tres agreable plaisir que bien en arons souvenance se le cas y eschiet, ou temps qui vendra. Et affin que mieulx vous appare le contenu en cestes proceder de nostre propre vouloir et puissez congnoistre l'affection que nous y avons, nous avons voulu de nostre main escripre nostre non (sic) en icelles. Ce scet Nostre Seigneur, qui vous ait en sa saincte garde. Escript à Verdnom, le xxie jour de novembre.

CHARLES.

II

CAMPION 1.

Jean Carlo Visconti à la vicomtesse d'Armagnac

9 juillet 1416.

A ma chiere suer et cousine la viscontesse d'Armaignac 2.

Chiere suer et cousine, je me recommande à vous tant comme je puis, desirant de savoir de vostre bon estat et santé, lesquielx Dieu

1. Original sur papier, trace de sceau plaqué en cire rouge. Ms. fr. 20437 (Gaignières, 313), f. 7. Adresse au verso. Au haut, on lit : « Présenté par messire Pean de Maillé, xxvie de novembre CCCCXV. >>

2. Blanche de Bretagne, mariée par contrat du 30 juillet 1406 à Jean d'Armagnac, vicomte de Lomagne, fils de Bernard, comte d'Arinagnac, connétable de France. Elle était alors âgée d'environ vingt et un ans.

doint par sa sainte grace qu'ils soient tels comme vostre noble cuer le desire. Et se du mien vous plaist à savoir, à la facon de ceste j'estoie sain et en bon point, graces à Nostre Seigneur, qui [le semblable] vous attroit. Chiere suer et cousine, il est vray que je suis venu à Paris de par l'empereur en ambassade, avecques le grant conte1, accompagné de plusieurs chevaliers et escuiers estans avec luy et pour traitier la paix d'entre les deux Roys, c'est assavoir de France et d'Angleterre, et est bien vray que, quand je parti d'Angleterre, je laissay la Royne d'Angleterre vostre mere 2 en tres bon point et bonne santé, et aussi fis-je monseigneur de Richemont vostre frere, et tieng, selon ce que je puis appercevoir, que la delivrance de tous les seigneurs qui sont par dela se fera bien brief. Si vous supplie, chiere suer et cousine, que vous ne vous vueilliés point donner de mal temps, ne vous marrir en cuer, pour le sauvement de vostre ame, ce que je pense que vous sarés bien faire, car vous estes assés sages pour dissimuler courroux. Autre chose, chiere suer et cousine, ne vous saroie plus que rescripre, fors que je vous prie qu'il vous plaise ci moy recommander à mon tres chier frere et cousin le visconte vostre marri, et à ma chiere suer et cousine la viscontesse de Nerbonne 3, en vous priant qu'il vous plaise à moy rescripre de vostre estat. Je prie le benoist fils de Dieu qu'il vous ait en sa sainte garde, lequel vous doint bonne vie et longue.

Escript à Paris, le neufiesme jour de juillet.

Jehan CharlES, VISCONTES de Milain 1.

III

Le Dauphin aux habitants de Tournai

16 septembre 1417.

A noz chiers et bien amez les Prevosts, Maires, Eschevins
et Eswardeurs de la ville de Tournay.

DE PAR LE DAULPHIN DE VIENNOIZ, DUC DE TOURAINE, DE BERRY
ET CONTE DE POICTOU.

Chiers et bien amez, combien que Monseigneur et nous aions

1. Nicolas de Gara, comte palatin de Hongrie.

2. Jeanne de Navarre, qui, après la mort de Jean V, duc de Bretagne, avait épousé en 1401 Henri IV, roi d'Angleterre.

3. Marguerite d'Armagnac, sœur du connétable.

4. Il était fils de Carlo Visconti et de Béatrix d'Armagnac, surnommée la gaye Armagnageoise. Cette lettre se trouve en copie moderne dans la collection Doat, vol. IX, f. 295.

tousjours tenu toutes raisonnables manieres et mis Dieu et raison de nostre part, à nostre povoir, en ce qui touche le debat contre le Roy d'Angleterre, ancien adversaire de mon dit seigneur, neantmoins le dessus dit adversaire se est mis sus en armes et en puissance, et venu mettre siege devant la ville de Caen, pour grever la seigneurie de mon dit seigneur et ses loiaulx subgiez. A laquelle entreprise mon dit seigneur et nous, voulans resister de tout nostre povoir, avons en entencion de nous mettre sus en armes sur les champs en noz personnes, et assembler avecques nous le plus grant nombre des subgiez, vassaulx, alliez et bienvueillans de mon dit seigneur et de nous. Si vous prions et neantmoins mandons que incontinent el sans delay vous mettez sus toute telle compaignie de gens que vous avez acoustumé d'envoier vers mon dit seigneur quant il chevauche sus en armes, armez, ordonnez et abillez souffisamment, et ainsi qu'il vous escript. Et en ce ne mettez aucune dilacion, si chier que vous desirez faire plaisir à mon dit seigneur et à nous, et que vous doublez nous desplaire. Chiers et bien amez, Nostre Seigneur soit garde de vous.

Escript à Paris, le xvre jour de septembre.

CHARLES.

IV

ALAIN 1.

Le Dauphin à Jean de Mareuil

26 janvier 1418.

A nostre amé et feal conseillier et maistre de la Chambre des comptes de nostre pays du Dauphiné, maistre Jehan de Marueil.

DE PAR LE DAULPHIN DE VIENNOIS, DUC DE TOURAINE ET DE Berry ET CONTE DE POITOU.

Nostre amé et feal, nous avons sceu que les monnoyes de nostre pays du Dauphiné ne sont pas de tel prouffit et revenue comme ilz souloient, dont nous nous donnons grant merveille et n'en sommes pas bien contens, attendu que les monnoyes de Monseigneur par deça ont besoingné tres fort, et lui en vient tres grant prouffit. Pourquoy nous vous mandons et expressement enjoignons que sur

1. Original sur papier, fragment de sceau en cire rouge. Archives de Tournai. — Communiqué par M. Armand d'Herbomez.

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