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civil où tous les droits sont fixés par une loi.

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Mais qu'est-ce donc enfin qu'une loi?.... Tant que l'on se contentera de n'attacher à ce mot que des idées métaphysiques, on continuera de raisonner sans s'entendre (a), et quand on aura dit ce que c'est qu'une loi de la nature, on n'en saura pas mieux ce que c'est qu'une loi de l'État. 5)

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«J'ai déja dit, qu'il n'y avait point de volonté générale sur un objet particulier. En effet un objet particulier est dans l'État ou hors de l'État. S'il est hors de l'État, une volonté qui lui est étrangère n'est point générale par rapport à lui; et si cet objet est dans l'État, il

(a) Pourquoi est-il si difficile d'entendre ce que Rousseau a voulu dire dans le passage ci-dessus transcrit, si ce n'est par la raison qu'il en suggère lui-même; voilà ce que son raisonnement prouve de plus clair. Comme il n'a employé dans toute la suite de ce même raisonnement que la métaphysique la plus embrouillée et la plus obscure', il parle sans que personne puisse l'entendre. On peut seulement présumer qu'il n'a rien voulu exprimer, si ce n'est que la loi doit être générale et obligatoire pour tous, ce qui est en effet de principe, comme nous l'établirons par lá suite, et comme nous l'avons déja vu dans la re Τ 'part., vol. 1, pag. 243 et 347.'

en fait partie. Alors se forme entre le tout et la partie une relation qui en fait deux êtres séparées, dont la partie est l'un, et le tout moins cette même partie est l'autre. Mais le tout moins une partie n'est point le tout, et tant que ce rapport subsiste, il n'y a plus de tout, mais deux parties inégales; d'où il suit que la volonté de l'une n'est point non plus générale par rapport à l'autre.

<< Mais quand le peuple statue sur tout le peuple, il ne considère que lui-même, et s'il se forme alors un rapport, c'est de l'objet entier sous un point de vue à l'objet entier sous un autre point de vue, sans aucune division du tout. Alors la matière sur laquelle on statue est générale comme la volonté qui statue. C'est cet acte que j'appelle loi» (a) (2).

(a) Comment Jean-Jacques a-t-il pu dire « que cet acte est ce qu'il appelle loi», quand il n'est aucunement question d'acte dans toutes les phrases qui précèdent celle où il emploie ce mot; mais seulement de rapport, d'objet, de division, de tout, de matière, etc; on pourrait facilement passer sur cette incorrection grammaticale, si elle eût servi à le rendre plus intelligible et plus clair; mais elle le rend au contraire plus obscur encore. A-t-il voulų dire

D'autres enfin ont dit plus simplement «que la loi est une règle qui, étant établie par autorité divine ou humaine, oblige les hommes à certaines choses, ou leur en défend d'autres. >> Mais il sera facile de ramener la définition de la Loi par rapport au Gouvernement qui la donne, et à la Société qui la reçoit, à une expression plus simple encore, et pourtant plus utile, si l'on se rappelle la définition que nous avons donnée du Gouvernement, dans le paragraphe qui précède. En effet, si

simplement, comme nons l'avons conjecturé dans la note précédente, que la loi doit toujours statuer d'une manière générale, sans application individuelle, ou plutôt sans acception de personnes, c'est-à-dire, qu'elle doit être égale et obligatoire pour tous. Sa pensée serait juste, car tel doit bien être en effet le caractère de la loi; mais un imbroglio semblable à celui que l'on vient de lire, n'était pas propre à rendre plus évidente une vérité d'ailleurs si simple, et si facile sur-tout à exprimer nettement.

Nous aurions voulu démontrer le vide, l'inexactitude, l'incohérence de la plupart des phrases renfermées dans cet écrit si célèbre du citoyen de Genève; mais le plan même en est tellement imparfait, diffus et vicieux, qu'il faudrait, pour le réfuter, entreprendre un livre beaucoup plus long que le sien : D'ailleurs nous osons penser que, pour quiconque achevera la lecture de celui-ci, cette réfutation serait entièrement superflue.

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l'on conçoit bien que pour agir, il faut d'abord une volonté qui détermine l'action, il sera facile de concevoir aussi que la Loi n'est autre chose que la Règle primitive et fondamentale, qui doit déterminer la conduite de tous les membres d'une société, dans quelques cas et sur quelques matières que ce soit. S'il est vrai de dire: «que le Gouvernement est << le corps ou l'autorité qui règle et détermine << pour la société toute entière la volonté d'agir (a)», il sera vrai aussi de dire que la Loi est la volonté du Gouvernement, ou, si l'on veut, l'expression, la manifestation de cette volonté(b).

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(a) Voy. ci-dessus, § 1, pag. 26 et 27.

(b) Cette définition est celle qui avait été adoptée par

l'assemblée constituante.

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Jean-Jacques a dit aussi en quelques passages que la loi est l'expression de la volonté générale : » ce qui n'aurait toutefois d'exactitude rigoureuse et parfaite que dans un gouvernement purement démocratique, s'il pouvait exister. (Voy, ci-après, chap. 11, tit, 1.)

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« Les volontés de la société s'expriment par des lois, dit l'auteur du Systême social. » (Voy. 2° part., chap. 1.) Mais l'auteur du commentaire sur l'Esprit, des lois, M. le comte Destutt de Tracy, dit encore mieux : « Que la loi est une règle prescrite à nos actions par une autorité à qui nous reconnaissons le droit de la faire. » (Voy. chap. 1,

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Voilà ce qu'il faut nécessairement entendre par la Loi en général considérée par rapport au Gouvernement et à la Société, par la Loi envisagée dans un sens générique, et non dans une acception particulière, restreinte et limitée sur un seul ou plusieurs objets, comme lors. qu'on dit les lois civiles, les lois pénales, les lois de police, de discipline, d'administration,

etc., etc.

Il faut donc tenir désormais pour constant que la Loi en général est la règle de conduite que le Gouvernement prescrit à la Société, et à laquelle chacun de ses membres doit se conformer, lorsqu'elle ne renverse pas les sentimens naturels et les principes fondamentaux de la morale et du droit (3); ou mieux encore, la manifestation de la volonté qui doit déterminer cette conduite.

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Blackstone rend un hommage non équivoque à cette vérité, lorsqu'il s'exprime ainsi; «J'observe que, puisque le pouvoir de faire

pag. 1 et chap. xIII, pag. 259)

(Voy. aussi Félice sur

Burlamaqui, Principe du Droit naturel, tom. 1, ch. vIII,

Sш, rem. 35.)

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