qu'ayant esté adverty hier au soir seullemant qu'en ladicte de l'évêque pour aller rejoindre sa mère, et en passant sur le pont qui conduit au faubourg Saint-Pallais, où était situé le nouveau couvent, elle entra dans une chapelle dédiée à Notre-Dame. Lå, elle se coupa les cheveux et fit vœu de n'avoir jamais d'autre époux que Jésus-Christ. L'évêque et son neveu, doyen de la cathédrale, la suivirent bientôt, et n'oublièrent rien pour la ramener, mais, leur ayant montré sa tête rasée, elle leur dit : « Voyez, mes on»cles, cette tête n'est plus propre pour le monde, auquel je renonce de toute » mon affection; elle n'est propre que pour un voile, que j'ai résolu de pren» dre, et de n'avoir jamais d'autre époux que mon seigneur Jésus-Christ; lais>> sez-moi jouir des douceurs célestes qu'il fait goûter aux âmes qui lui sont en» tièrement dévouées. » Ces paroles touchèrent l'évêque et son doyen; ils se retirerent. C'étoit une fille de quinze ans ; ils espérèrent que le temps ralentiroit sa ferveur, mais ils se trompèrent. Madame de Dreux reçut une réponse favorable du général de l'ordre de Saint-François, datée de Rome à Ara cœli, le 11 février 1628. Elle étoit accompagnée d'une autre lettre adressée au P. provincial des récollets. C'étoit le P. Marcelin Montozon. Il lui ordonnoit de visiter le lieu et voir si les conditions nécessaires se trouvoient pour ce nouvel établissement, surtout le consentement de l'évêque du lieu, lesquelles étant remplies, il lui donnoit le pouvoir de les agréger et recevoir sous sa juridiction. La plus grande difficulté étoit d'obtenir le consentement de l'évêque. Il n'y avoit pas lieu de l'espérer après tout ce qui s'étoit passé : mais c'étoit un préla: plein de piété; il aimoit sa nièce; et parce qu'il reconnut dans toutes ses démarches beaucoup de droiture, il consentit à tout ce qu'elle voulut; il renonça même à sa juridiction sur le monastère, sauf le droit et le règlement du concile de Trente. Les récollets les acceptèrent dans leur chapitre tenu à Limoges, le 2 décembre 1628. Le P. Marcelin Montozon fut nommé directeur; il sortoit d'être provincial. On fit venir des religieuses du couvent de Tulle pour instruire et former les novices. Il s'agissoit de donner l'habit à trois ou quatre postulantes qui l'attendoient avec impatience, surtout made noiselle de Dreux. Ses oncles vinrent encore s'y opposer; ils firent emporter le saint sacrement, le tabernacle et les autres ornemens qu'on avoit préparés pour la cérémonie. Cette généreuse fille ayant protesté de tous les événemens de sa vie, si on donnoit atteinte à sa vocation et au vœu qu'elle avoit fait d'être religieuse, ils se retirèrent, et elle prit l'habit sous le nom de sœur Françoise de Jésus. Sa mère, madame de Cérizay de Dreux, le prit aussi sous le nom de sœur Françoise du Saint-Esprit et elle fit profession sept ans après. On ne peut s'empêcher d'admirer la prudence de cette pieuse fondatrice. Elle avoit d'abord projeté cet établissement de concert avec une veuve nommée Marie Sanson Laîné, qui l'abandonna dans l'exécution; elle eut à vaincre toutes les oppositions de sa parenté; on lui fit des procès; les ouvriers manquèrent de bonne foi. Elle eut à supporter tou maison ledict père ou autre de son ordre estoient en volunté de donner l'abit de relligieuze de l'ordre de Sainte-Claire à damoizelle Françoize Dreux, sa niepce, et à plusieurs autres filles, jaçoit que ladicte maison ne soit convantuelle pour n'avoir esté en icelle institué aucune congrégation relligieuze, avoir ny mesme y pour le présent en icelle dicte maison aulcunes relligieuzes professes dudit ordre pour la conduitté et instruction de celles quy dezirent suivre cette reigle, de plus que ladite maison n'est dottée d'aucung fond ou reveneu asseuré, outre que ladite Françoize Dreux n'a jamais esté et n'est encores en estat de pouvoir dire avecq liberté et franchize sy son intention est d'embrasser la vie relligieuze, d'autant qu'elle est en la puissance et soubz l'authorité de sadicte mère, pour à laquelle obéir plus tost que suivre son inclination, elle se porte à prandre l'habit et de suyvre une vie relligieuze; à quoy ledict de Cerizay ni autres parans de ladicte Dreux ne veullent néanmoings contrarier ny l'empescher de suivre la vocation de Dieu en une vie relligieuze, sy tant est qu'elle y soit appellée, mais seullement pour empescher que par inconsidération ou légéreté elle ne se porte à embrasser ung desseing qu'elle ne puisse accomplir, et ayant congnu que par plusieurs artifices elle y a esté induitte, à raison de quoy y a desja instance formée et pendante pardevant nosseigneurs du parlement de Paris, où messieurs maistres Pierre Dreux, conseiller au grand conseil du roy, Jehan Dreux, chanoine en l'églize NotreDame de Paris, et autres parans paternels de ladicte Françoise Dreux, ont demandé qu'elle soit sequestrée, ledict sieur de Cerisay [déclare] qu'il s'oppose par ses présentes, tes les rigueurs d'une horrible famine. Les religieuses de Tulle se retirèrent; elle supporta toutes les dépenses. Tous ces obstacles nous font connaître la grandeur de son âme; aussi Dieu bénit-il son ouvrage. Sa communauté a toujours été des plus régulières, et tout le diocèse de Saintes l'a toujours respectée comme une maison d'exemple, de ferveur et de piété. » pour les raisons cy dessus et autres qu'il desduira en temps et lieu, à ce que ledict père Marcellin ne autre récollet ayent à passer outre à donner le voille bénist à ladicte Dreux, sa niepce, protestant à faulte de ce faire de se pourveoir ainsy et comme il verra bon estre; et pour le regard des autres filles, a ledict sieur de Cerisay prié ledict père Marcellin de prandre garde à elles pour ne les mettre pas en une maison quy pour le présent ne peut estre prinze pour maison relligieuze et de prévoir que de cela il peut arriver plusieurs grands et signallés inconvénians; et sur ce que ledict père Marcellin, le père gardien du couvent des récollés de cette ville dudit Xainctes, et autres relligieux dudict ordre, ont dit que ce qu'ilz faisoient estoit avecq l'authoritté et consantemant de mondict seigneur l'évesque de Xainctes quy leur en avoit donné pouvoir, a icelluy sieur de Cerisay requis et sommé tant ledict père Marcellin, gardien et autres, de luy faire veoir le pouvoir qu'ilz en avoient dudict seigneur évesque; lesquelz ont dit l'avoir et qu'en vertu d'icelluy ilz ne laisseroient de passer oultre, nonobstant ladicte présente oppozition, sans toutesfois avoir voullu faire paroistre de leurdict prétandu pouvoir, dont ledict sieur de Cerisay m'en a requis acte à moy ledict notaire, que luy ay octroyé, ensemble de sa protestation qu'il a fait devant nous de se pourveoir soit par appellation comme d'abus ou autres moyens que de raison, et oultre a déclaré que pour esviter scandalle il se retiroit. Et à l'instant a ledict sieur de Cerisay fait les mesmes protestation et oppozition à ladicte damoizelle Françoise de Cerizay, sa sœur, et luy a déclaré qu'elle demeuroit chargée de sa filhe pour la représenter toutesfois et quantes que par justice seroit ordonné, attandu mesme le bas aage de sadicte filhe quy ne peut avoir plus de treize à quatorze ans ; à quoy ladicte de Cerizay n'a respondu sy non qu'on se pourveust ainsy qu'on verroit estre à faire. Ensuitte de quoy ledict sicur de Cerizay s'estant voullu addresser à Marie Sanson, vefve du feu sieur Lesné, laquelle n'a jamais fait profession de mener une vie relligieuze, sy non despuis huict jours en ça, et néanmoins prétand, sans avoir fait aucungs veux ny profession de ladicte vie relligieuze, estre supérieure de ladicte maison, ladicte Sanson luy a fait dire qu'elle se treuvoit mal et n'estre pour lors en estat de parler à luy, et...... a icelluy dict sieur de Cerizay fait les mesmes protestation et déclaration à une filhe nommée Michelle, domesticque de ladicte Sanson; laquelle Michelle estant allée pour le raporter à ladicte Sanson, elle ne l'a voulleu escoutter et seullemant fait dire qu'on ne parloit point à elle; dont et de tout ce que dessus ledict sieur de Cerizay m'en a aussy requis le présent acte, que lui ay octroyé pour luy servir et valloir en temps et lieu que de raison. Fait en présance de messieurs maistres Bertrand de Suberville, prestre, docteur en théologie, chanoine et maistre escolle de ladicte église cathédralle Saint-Pierre dudict Xainctes, Estienne Brigard, aussy prestre, docteur en la faculté de Sorbonne, aussy chanoine dudict Xainctes, et Philippe Aubert, aussy prestre, prieur de Marsilly et promoteur de la cour co..... de l'évesché dudict Xainctes, tesmoings requis. C. DE CERISAY. E. BRIGARD. P. AUBERT. B. DE SUBERVILLE, pour avoir esté présent à tout ce qui a esté dict avant l'arrivée dudict père gardien seulement. M. LIMOUZIN, notaire royal à Xainctes. IV. 1629, 11 mars. Charles de Cerisay somme Louis Mauchen, chanoine et secrétaire de l'évêché de Saintes, de lui faire connaître si les registres du secrétariat renferment quelque autorisation pour l'érection d'un monastère de l'ordre de Sainte-Claire, au faubourg Saint-Pallais. Même provenance. Aujourdhuy onziesme de mars mil six cens vingt et neuf, après midy, pardevant le notaire royal et tesmoings bas nommés, c'est présenté en sa personne vénérable et discret. monsieur maistre Charles de Cerisay, prestre, chanoine, grand archidiacre de Xainctonge et vicquaire général de monseigneur l'evesque dudict Xainctes, lequel parlant à la personne de vénérable et discret monsieur maistre Louis Mauchen, 1 aussy chanoine et secrétaire dudict seigneur évesque, lequel a requis..... sommé et interpellé par ses présentes de dire et déclarer présentement sy dans ses registres du secrétariat il y a quelque permission donnée par ledict seigneur évesque à damoizelle Françoise de Cerisay, sa sœur, Marie Sanson, vefve du feu sieur Lesné, 2 1. Il devait être fils d'autre Louis Mauchen, sieur de Méré et de La Sérye, et de Marie Fouyne, lesquels, par acte du 21 janvier 1611, et au prix de 7,600 livres, achètent la métairie de La Boucaudrie en Chaniers, de Fronton de La Roche, écuyer, sieur de Quéry, conseiller au parlement de Bordeaux, et de Jehanne de Mestivier, son épouse, ledit sieur de La Roche agissant du consentement de damoiselle Marguerite Couraudin, son aïeule, dame de Guimps et de La Rigaudière, le contrat passé au château de Guimps, par Bertauld, notaire royal à Saintes. Louis Mauchen avait, en 1637, deux frères, René et Jacques, aussi chanoines de Saint-Pierre de Saintes; et en 1620, il se qualifie curé de Sainte-Eulalie de Préguillac. En 1618, Marie Fouyne et son mari, Louis Mauchen, sieur de La Boucaudrie, et secrétaire de l'évêque de Saintes, vivaient encore. Marie Fouyne, au nom de son mari, vend alors les biens seigneuriaux de Mons et de La Faurie, sis paroisse de Cromières, près de La Flèche, en Anjou, appartenant audit sieur Mauchen par partage avec ses frères et sœurs de la succession de Mathieu Mauchen et Marie Potier, ses père et mère, ce qui semble indiquer que les Mauchen tiraient leur origine de ce pays-là. 2. Marie Sanson a été avec Mme de Cérizay, la fondatrice du couvent de l'ordre de Sainte-Claire à Saintes; et c'est sans doute en cette qualité qu'elle fait suivre sa signature d'une croix. Voir Briand, Hist. de l'église Santone, II, 282. Les deux pièces suivantes donnent les noms du fils et de la fille de Marie Sanson. On observera qu'en 1648 (Voir la piéce qui suit), aussi bien qu'en 1632, elle avait conservé sa demeure particulière. C'est que Marie Sanson n'avait pas fait profession, et avait «< abandonné l'entreprise ». Mais alors, pourquoi signer avec une croix? En 1642, elle habitait la rue Juive, en la maison de Joachim du Bourg, et se qualifiait veuve de François Laisné, marchand. Voir Bulletin de la société des archives, t. Ier, page 80. 1632, 27 septembre. Damoizelle Marie Sanson, veuve de François Laisné, demeurant à Xainctes, donne procuration pour mettre en pension François Laisné, son fils, chez un marchand, en la ville de La Rochelle, pour un an ou deux, et en passer contrat pardevant notaire, pour que son dit |