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La question des écoles du Manitoba.

LES AMIS DE L'ELECTEUR AU

MANITOBA

13 août 1889.

Si nous étions l'Electeur, comme nous profiterions de ce qui se passe actuellement au Manitoba pour injurier M. Laurier et son parti!

En effet le ministère libéral de Winnipeg, acclamé à sa naissance et porté aux nues sans cesse par notre presse grite-rouge, menace en ce moment les intérêts les plus vitaux de l'élément catholique et français au Manitoba.

Le lieutenant de M. Greenway, le procureur-général Martin, a prononcé à Brandon, en l'honneur de M. Dalton McCarthy, un discours fanatique et digne en tous points de la ligue des droits égaux.

Nous reproduisons du Manitoba, dans notre numéro de ce jour, une analyse de ses déclarations.

Voilà donc le procureur-général du gouvernement libéral du Manitoba qui pousse le cri de guerre contre les écoles séparées et la langue française. Que pense de cela l'Electeur? Va-t-il essayer de faire croire à son monde que M. Martin est un tory déguisé ?

Il paraît de plus en plus évident que ce ministère

Greenway, cher à l'Electeur, est à préparer une campagne anticatholique et antifrançaise, qui va mettre le feu au Manitoba.

Nous croyons qu'il va trouver dans la constitution un obstacle invincible à ses projets.

Il est vraiment singulier que l'Electeur n'ait pas encore lancé ses foudres contre ses amis de Winnipeg. Dénoncer M. McCarthy, c'est très bien. Mais dire leurs vérités à MM. Smart, Martin, Charlton, ce serait encore plus méritoire.

Allons, un bon mouvement!

LA CRISE AU MANITOBA

16 août 1889.

L'Electeur d'hier matin avait un grand article pour établir que le gouvernement libéral du Manitoba est innocent de tous les mauvais desseins qu'on lui a attribués......

Hélas! au moment même où, tout à fait rassuré, il donnait cours à son optimisme, une dépêche imprimée à sa quatrième page, annonçait la démission de l'honorable James Prendergast et la crise ministérielle du Manitoba.

La signification de cet événement est éclatante. M. Prendergast ne remet pas son portefeuille sans raison grave. L'Electeur disait dans l'article que nous venons de mentionner: " M. Prendergast s'est empressé lui "aussi de déclarer qu'il donnerait sa démission s'ils

persistaient à faire cause commune avec l'agitateur tory." Eh bien, il vient de donner sa démission. Donc ses collègues sont décidés à faire cause commune avec les fanatiques. Il n'y a pas à sortir de là.

Et cependant ce fameux cabinet manitobain, c'est un cabinet grit, une administration chère à l'Electeur et à tout le parti libéral. Greenway et ses collègues ne sont certainement pas des bleus-tories-orangistes; et les voilà bras dessus bras dessous avec M. Dalton McCarthy!

Mais l'Electeur n'entend que d'une oreille, et il est tellement désireux de frapper sur le parti conservateur qu'il trouve moyen de mettre en cause, dans la crise du Manitoba, le cabinet fédéral et de faire rentrer discrètement dans la coulisse le cabinet Greenway.

31 octobre 1889.

Il y a quelques jours, le procureur-général Martin, de Winnipeg, annonçait pompeusement que le gouvernement Greenway allait marcher résolument dans la voie des réformes, quant à la langue française et à la loi d'éducation.

Cela signifiait que les ministreaux du Manitoba veulent abolir là-bas l'usage officiel de notre langue et les écoles séparées.

Or ces fanfarons du fanatisme oublient une chose. C'est que sur leur chemin se dresse un invincible obstacle la constitution du pays.

La constitution du Canada, et en particulier la constitution du Manitoba, interdisent au gouvernement de

Winnipeg toute tentative abolitionniste, du genre de celle qui est annoncée par M. Martin le brouillon.

On l'a affirmé plusieurs fois. Mais il ne suffit pas de l'affirmer, il faut le prouver. Nous allons le faire de manière à enlever tout doute aux plus fanatiques.

Le gouvernement de la province du Manitoba a été constitué par une loi (33 Vict., chapitre III) du Parlement canadien, sanctionnée le 12 mai 1870. C'est cette loi qui forme la constitution du Manitoba.

Or que dit-elle au sujet des écoles:

"22. Dans la province, la législature pourra exclusivement décréter les lois relatives à l'éducation, sujettes et conformes aux dispositions suivantes :

"1o Rien dans ces lois ne devra préjudicier à aucun droit ou privilège conféré, lors de l'Union, par la loi ou par la coutume, à aucune classe particulière de personnes dans la province, relativement aux écoles séparées (denominational schools).

"2o Il pourra être interjeté appel au gouverneurgénéral en conseil de tout acte ou décision de la législature de la province ou de toute autorité provinciale affectant quelqu'un des droits ou privilèges de la minorité protestante ou catholique romaine des sujets de Sa Majesté relativement à l'éducation."

On remarquera ici que cette clause est beaucoup plus satisfaisante que la clause analogue de l'acte constitutionnel de 1867. En effet la clause 93 de celui-ci décrète que rien dans les lois des provinces sur l'éducation "ne devra préjudicier à aucun droit ou privilège conféré, lors de l'union, par la loi, à aucune classe particulière de personnes dans la province, relativement aux écoles séparées." Ce sont ces mots par la loi, qui ont fait naf

tre la fameuse question des écoles du Nouveau-Brunswick. Avant la confédération nos coreligionnaires du Nouveau-Brunswick jouissaient des avantages des écoles séparées, mais non en vertu d'une loi. Lorsque la législature leur enleva ces avantages, ils réclamèrent en s'appuyant sur la clause 93 de l'acte de l'Amérique Britannique du Nord. Mais leurs adversaires soutinrent que cette clause ne pouvait être invoquée dans ce cas, parce que les écoles séparées n'étaient pas établies par la loi au Nouveau-Brunswick, à l'époque de l'union fédérale.

Il n'en est pas de même du Manitoba. L'acte constitutionnel de 1870 dit: " par la loi ou par la coutume." De sorte qu'il n'y a pas d'échappatoire possible. Nos coreligionnaires de la Rivière-Rouge avaient, en vertu de la coutume, des écoles à eux, des écoles catholiques, au moment de leur entrée dans la Confédération. Donc la législature du Manitoba ne peut porter préjudice à leurs droits quant aux écoles séparées.

Cette clause 22, relative à l'éducation, de l'acte de 1870, a d'autant plus d'importance et de portée, qu'elle a subi l'épreuve de la discussion et du vote, dans le débat sur le bill constituant la province du Manitoba. On lit à la page 1546 des Dominion parliamentary debates de 1870:

"M. Oliver propose que la clause concernant l'édu

cation soit biffée.

"L'honorable M. Chauveau espère que l'amendement ne sera pas adopté. Il est désirable de protéger la minorité au Manitoba contre le grand danger des dissensions religieuses relativement à l'éducation. Il ne saurait y avoir de meilleur modèle à suivre, en ce cas, que l'Acte

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