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c'est qu'antérieurement aux ouvrages composés par les naturalistes anciens, il existait pour les Pères de l'Église chrétienne une zoologie, une minéralogie, une botanique sacrées (1); c'est que les disciples du Christ pouvaient bien emprunter quelques détails scientifiques aux livres profanes, mais à condition qu'ils les subordonneraient à ceux qui se trouvaient déjà consignés dans le livre par excellence, celui duquel relèvent les sciences humaines, et qui doit servir à toutes de point de départ et de contrôle.

Or, voici quels sont les objets de la nature qui, dans l'Ancien et le Nouveau Testament, servent le plus souvent de texte aux considérations religieuses, ou à l'enseignement des vérités morales :

Parmi les animaux nous trouvons mentionnés : le chameau, le cheval, l'âne, le mulet, l'éléphant, le bœuf, la brebis, la chèvre, l'agneau, le chien, le porc, le lion, le léopard, le tigre, le lynx, la panthère, l'ours, le loup, l'hyène, le renard,

(1) Nous devons à Samuel Bochart (né à Rouen en 1599, mort à Caen en 1667) une description des animaux mentionnés dans l'Écriture-Sainte, ou Hierozoïcon (réimprimé à Leipsick en 3 vol. in-4°. de 1793 à 1796), qui, avec la Geographia sacra, est sans contredit un des plus savants ouvrages dont puisse s'honorer la France. Il est fâcheux qu'il n'ait pu composer de même le Hierobotanicon, ainsi qu'il en avait eu l'intention. Cette tâche a été remplie avec une érudition bien inférieure à la sienne par Olaus Celsius.

le chat, l'onagre, le cerf, l'urus, le sanglier, le singe, le lièvre, le rat, la taupe, le hérisson, le crocodile, le caméléon, la colombe, la tourterelle, l'hirondelle, la grue, la perdrix, le coq, le paon, le passereau, l'aigle, le milan, le vautour, le corbeau, l'autruchè, le hibou, la huppe, le pélican, la vipère, l'aspic, le basilic, l'hydre, le dragon, la céraste, la sang-sue, la sauterelle, la mouche, la fourmi, l'araignée, la grenouille, la baleine (léviathan), l'hippopotame (béhémot), l'oryx.

Parmi les végétaux, les noms que l'on rencontre le plus souvent dans l'Écriture-Sainte, sont ceux du cèdre, du palmier, du grenadier, du figuier, du myrte, de l'olivier, du sapin, de l'orme, du buis, du cyprès, du roseau, de l'hysope, etc.; et parmi les fleurs ceux du lys, de la rose, de la violette, etc.

Il est question, dans le xxvIII. chapitre de l'Exode, de douze pierres précieuses qui devaient être placées sur chacun des carrés dont se composait le Rational ou vêtement sacré qui couvrait la poitrine du grand pontife. Sur chacune d'elles était gravé le nom d'une des douze tribus d'Israël (1).

(1) C'est le sujet d'un petit poème d'Hildebert de Tours: De duodecim Patriarchis allegorice per lapides rationarii summi Pontificis designatis (VENERABILIS HILDEBERTI CARMINA MISCELLANEA, p. 1361).

Ces pierres, qui, à quelques différences près, sont les mêmes que celles qui doivent, d'après l'Apocalypse, servir de fondement à la Cité céleste, sont le sardius (ou grenat), la topaze, l'émeraude, l'escarboucle (ou rubis), le saphir, le jáspe, le ligurius, l'agathe, l'améthyste, la chrysolite, le béril et l'onyx.

Les animaux, les végétaux, les pierres, dont nous présentons ici la liste, sont précisément ceux qui, après avoir été employés comme figures ou comme exemples par les docteurs de l'Église, se retrouvent dans les Bestiaires, les Volucraires et les Lapidaires du moyen âge; ce sont ceux qui, comme nous le verrons par la suite, sont le plus fréquemment l'objet des méditations et des allusions des écrivains et des poètes; ce sont ceux enfin dont les représentations, se multipliant à A l'infini sous le pinceau ou le ciseau des artistes, couvriront les vitraux et les murs de nos édifices religieux.

Ce n'était pas toujours d'une manière fort exacte qu'avaient été traduits en grec et en latin les noms qui se rencontrent dans le texte des livres hébreux. Souvent, par des méprises dues à de fausses analogies ou à la similitude des noms l'on confondit les animaux appartenant à un genre avec d'autres faisant partie d'un genre tout différent; souvent aussi les descriptions, acceptées

avec trop de confiance, de certains êtres fantastiques dont la crédule antiquité avait admis l'existence, et que l'on avait cru retrouver parmi les animaux dont il est question dans l'Écriture (1), furent choisies par les écrivains sacrés pour servir de motif à leurs instructions religieuses ou à leurs leçons morales. Mais n'oublions pas que les Pères de l'Église se préoccupèrent toujours beaucoup plus de la pureté des doctrines qu'ils avaient à développer, que de l'exactitude scientifique des notions sur lesquelles ils les appuyaient.

(1) On a cru retrouver dans les livres saints le Tragélaphe, le Griffon, le Phénix, les Syrènes, les Onocentaures, le Monocéros, et d'autres animaux évidemment fabuleux. Bochart a démontré, à l'aide d'une érudition aussi solide qu'ingénieuse, que quelquesuns de ces êtres fantastiques y figurent à titre d'images poétiques, et non comme ayant une existence réelle, et que d'autres n'y sont mentionnés que par suite de méprises faites par les traducteurs. Il fait observer, par exemple (Hierozoïcon, Præfatio ad lectorem), que si Tertullien et saint Épiphane, en citant le psaume XCI, v. 13: Justus ut Phænix florebit, semblent reconnaître que l'Écriture admettait l'existence de l'oiseau symbolique appelé Phénix, c'était par suite de l'erreur causée par le double sens du mot Thamar qui dans ce passage signifie palmier: « Le sage fleurira comme le palmier. » Dans le livre de Job, le mot Chul traduit par Phénix, signifie, selon Bochart, sable, arena, de sorte qu'au lieu de traduire : Sicut Phænix multiplicabo dies, il aurait fallu dire (ce qui est bien différent): Sicut arenam multiplicabo dies. Même observation pour le Monocéros (la licorne du moyen âge). Les Grecs attribuent au Monocéros, animal fabuleux, quelques-unes des propriétés que les Hébreux reconnaissent dans un animal véritable qu'ils désignent sous le nom de Reem. Or, le Reem est l'Oryx: rien n'obligeait les Grecs à trouver le Monocéros de Clésias dans le Reem de l'Écriture.

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L'objet important pour nous, dit saint Augustin (In psalmum CII, à propos de l'aigle,

qui, disait-on, brise contre la pierre l'extré«mité de son bec devenu trop long), est de con« sidérer la signification d'un fait et non d'en dis«cuter l'authenticité. »

Cette habitude de considérer en toutes choses, non le signe, mais le symbole, non la lettre, mais l'esprit, contractée dès les premiers siècles par les plus illustres docteurs de l'Église, et recueillie par leurs successeurs, se retrouvera dans toutes les parties dont se compose la zoologie mystique, et en général dans tout ce qui devra constituer la symbolique du christianisme.

II.

Dès l'époque où les Origène, les saint Basile, les Eustathe et les saint Ambroise composaient leurs belles homélies sur l'œuvre des six jours, un ouvrage d'un ordre moins élevé, mais par cela même plus populaire et plus répandu peutêtre, semble avoir été généralement adopté comme le résumé des connaissances en histoire naturelle les plus utiles à l'instruction religieuse des premiers chrétiens. Il a pour titre Physiologus, le Physiologue. Était-ce le titre d'un traité particulier composé par quelque Père de l'Église, ou dési

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