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la tête; dont aucuns François furent assez joyeux, pource qu'il avoit rendu la place dessusdite par convoitise d'avoir argent, au préjudice du roi de France.

CHAPITRE CXC.

Comment messire Jacques de Harcourt épousa la fille du comte de Tancarville; de la détrousse de Philippe de Saveuse; et du connétable qui mit le siége à Senlis.

En ce temps messire Jacques de Harcourt épousa la seule fille du seigneur de Tancarville, duquel, avec toutes les seigneuries, il eut le gouvernement, et mit garnison de ses gens en toutes ses villes et forteresses contre les Anglois.

Esquels jours Philippe de Saveuse, étant en garnison avec son frère Hector en la ville de Beauvais, se partit un certain jour, atout six vingts combattants ou environ, pour aller courre vers le comté de Clermont, comme il avoit accoutumé de faire par plusieurs fois ; et à son retour passa devant un châtel nommé Breuille, dedans lequel étoient assemblés plusieurs des gens du comte d'Armagnac, qui soudainement saillirent à étendard déployé sur ledit Philippe et ses gens ; lesquels, voyants si grand' puissance furent tantôt mis en desroy (désordre); et ne fut pas en la puissance de

lui de les retenir, et finablement les chassèrent jusques assez près de Beauvais, et en prirent la plus grand' partie, et aussi en tuèrent aucuns. Pourquoi le dessusdit Philippe de Saveuse ayant au cœur très grand deuil, se retrahit (retira) audit lieu de Beauvais ; et dedans bress jours, après qu'il eut une partie de ses gens, il s'en alla à Gournay, en Normandie, où il fut ordonné capitaine de la ville par le consentement des habitants d'icelle.

Et aussi ledit Hector eut dissension avec ledit commun de Beauvais, pourquoi il fallut qu'il s'en partît dedans brefs jours ensuivant.

Et lors, environ la Chandeleur ensuivant, le roi Charles, accompagné du comte d'Armagnac son connétable, et de grand nombre de gens de Paris, vint de Paris à Creil, où il fut par plusieurs jours; et pource que ses gens passèrent assez près de Senlis, la garnison qui y étoit, de ledit duc de Bourgogne, saillit sur eux, et en prit plusieurs et en tua; dont ledit connétable fut grandement troublé.

par

Et dedans brefs jours ensuivant, ledit connétable assiégea de par le roi ladite ville de Senlis, et fit dresser contre les portes et murailles plusieurs gros engins, dont les assiégés furent moult travaillés ; et lors ils envoyèrent devers messire Jean de Luxembourg et le seigneur de Fosseux certains messages, eux requérants que pour le bien et entretennement du duc de Bourgogne, ils voulsissent faire secours audit lieu de Senlis. Lesquels seigneurs dessusdits,

par la délibération de Philippe, comte de Charrolois, seul fils du duc de Bourgogne, et par les seigneurs de son conseil, assemblèrent à grand' puissance, et vinrent à Pontoise, et de là chevauchèrent vers Senlis, ayant volonté de lever ledit siége; mais ils furent avertis que leurs ennemis étoient en trop grand nombre, pourquoi ils envoyèrent dedans ladite ville cent combattants ou environ, lesquels entrèrent par une porte où il n'avoit logé nul des gens du connétable. Par lesquels fut mandé auxdits assiégés qu'ils fissent bonne chère, et que brièvement, sans point de faute, auroient bon secours; et lesdits de Luxembourg et de Fosseux atout leurs gens d'armes, par Pontoise et Beauvais s'en retournèrent en Picardie pour cette fois, sans autre chose faire.

Et d'autre partie, messire Jean Tanneguy du Châtel, prévôt de Paris, prit la ville de Chevreuse; et déjà avoit assiégé le châtel, quand hâtivement il fut mandé par le roi et le connétable pour venir audit siége de Senlis; pourquoi, laissant partie de ses gens en ladite ville de Chevreuse, vint audit siége, où il trouva le roi et ledit connétable.

CHAPITRE CXCI.

Comment le roi de France envoya ses ambassadeurs à Montereau-FautYonne, pour l'union de l'église, et comment ceux de Rouen se rendirent Bourguignons.

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EN après, le roi Charles et son connétable envoyèrent leurs ambassadeurs à Montereau où faut Yonne c'est à savoir l'archevêque de Reims, les évêques de Paris, et de Clermont en Auvergne, Jean de Harcourt, comte d'Aumale; messire Mansart d'Esne, et messire Regnault de Merqueques, chevaliers; maître Guérard Marchet, le juge maître Jean de l'Olive, et autres, jusques au nombre de seize notables personnes , pour être et convenir avec les ambassadeurs, afin de traiter paix entre icelles parties. Et furent envoyés de par ladite reine et le duc de Bourgogne, à Bray-sur-Seine, c'est à savoir, l'archevêque de Sens, frère à messire Charles de Savoisy; les évêques de Langres et d'Arras, messire Jean de la Trimouille, seigneur de Jonvelle; le seigneur de Courcelles, messire Jacques de Courte-jambe, Coppin de Vielville, maître Pierre Cohen, depuis évêque de Beauvais ; Jean le

I. Où l'Yonne se jette dans la Seine.

Clerc depuis chancelier de France, Gilles de Clamecy, maître Thierry le Roi, Jean le Mercier, Jacques Branlart, et maître Baude des Bordes, lesquels ambassadeurs dessusdits avoient chacun, de son adverse partie, bon et sûr sauf-conduit.

Et eux venus aux villes dessusdites, c'est à savoir à Montereau et Bray, avisèrent d'un commun accord de convenir ensemble, et à certains jours nommés, en un village nommé la Tombe, qui étoit à mi-voie des deux villes. Auquel lieu fut ordonné, pour la sûreté des deux parties, ayant certain nombre de gens d'armes, le seigneur de la Trimouille. Et dura cette ambassade par l'espace de deux mois ou environ, souvent les deux parties ayant recours devers leurs seigneurs, envoyant les réponses de leur adverse partie, chacun en droit soi, sur l'espérance de mener la besogne à bonne conclusion.

Et adonc, en ces mêmes temps, fut mise l'union par toute l'universelle église. Car, après que pape Martin fut pontifié, il fit mettre hors de prison le pape Jean, lequel se mit du tout en sa merci et obéissance, et ledit pape Martin le reçut à ce bé nignement, et le fit cardinal · mais il mourut dedans brefs jours ensuivant.

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En outre, en ces propres jours, les bourgeois et citoyens de la ville de Rouen, qui moult étoient

1. Il fut fait doyen des cardinaux

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