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man dois, Tournai et sénéchaussées de Ponthieu avecque les ressorts et enclavement des dessusdits pays. Auquel maître Philippe fut baillé un scel ou étoit gravé l'image de la reine, étant droite, ayant les deux bras tendant vers terre; et au droit lez étoit un écu des armes de France, et au sénestre avoit un écu parti des armes de France et de Bavière, et si étoit écrit autour: « C'est le scel des » causes, souverainetés et appellations pour le roi.»> Et fut ordonné icelui conseil, que par dudit scel on scelleroit de cire vermeille, et que les lettres et mandements se feroient au nom de la reine par la manière qui s'ensuit :

Ysabelle, par la grâce de Dieu, reine de France; ayant, pour l'occupation de monseigneur le roi, le gouvernement et administration de ce royaume, par l'octroi irrévocable à nous sur ce fait par mondit seigneur et son conseil. >>

Par le moyen duquel scel et mandement devant dit, ledit maître Philippe assembla grand nombre de pécunes; et pareillement fut ordonné, outre l'eau de Seine, pour les pays obéissant à la reine et au duc de Bourgogne, un autre chancelier.

CHAPITRE CLXXXVII.

Comment messire Élyon de Jacqueville fut tiré hors de l'église NotreDame de Chartres, par Hector de Saveuse et ses complices qui le navrèrent à mort.

EN ces jours, le duc de Bourgogne étant dedans Chartres, en son hôtel, derrière Notre-Dame, se mut dissension entre messire Élyon de Jacqueville, chevalier, et Hector de Saveuse, et tant qu'en la présence dudit duc iceux dirent l'un à l'autre plusieurs hautaines paroles. Pourquoi ledit Hector, de ce non content, dedans brefs jours ensuivant, assembla aucuns de ses amis jusques à douze ou à seize hommes de fait, entre lesquels étoient son cousin-germain, c'est à savoir le seigneur de Crevecœur et son frère le Bon de Saveuse, Hues de Bours et un haussaire nommé Jean de Vaux; par lequel, et en la plus grand' partie, les deux dessusdits étoient en haine l'un contre l'autre ; car par avant ledit Jacqueville avoit détroussé icelui Jean, lequel étoit parent audit Hector; et avecque eux aucuns autres, jusques au nombre dessusdit, qui tous ensemble un certain jour vinrent de fait appensé (prémédité) dedans l'église Notre Dame de Chartres; auquel lieu ils rencontrèrent et trouvèrent ledit Jacqueville, qui venoit de l'hôtel dudit duc de Bourgogne.

Et incontinent parla ledit Hector et ses gens, en disant «< Jacqueville, tu m'as autrefois injurié et : » fait déplaisir, dont tu seras puni? » Et sans délai fut pris par iceux et porté hors et traîné hors de ladite église ; et très inhumainement fut battu et découpé, jà-soit-ce qu'en ce faisant pria moult de fois et piteusement merci audit Hector, en lui offrant grand' somme de pécunes. Mais ce rien n'y valut, car ils le laissèrent comme mort; et sans délai se départirent de ladite ville et s'en allèrent en un village oû les gens dudit Hector étoient logés, à deux lieues de la ville de Chartres.

Et après le département d'icelui Hector, Jacqueville, en tel état qu'il étoit, se fit porter par ses gens devant ledit duc de Bourgogne, auquel il fit piteuse complainte, disant que pour le bien et loyaument servir, il étoit mis en ce point; et adonc lui voyant ce, eut au cœur si grand' tristesse que plus ne pouvoit. Pour quoi soudainement s'arma et monta à cheval, accompagné de ses gens en petit nombre, et chevaucha par la ville, cuidant trouver ledit Hector et ses complices; mais il fut tantôt averti qu'ils étoient partis de la ville.

Et aussi assez tôt vinrent devers ledit duc plusieurs seigneurs, lesquels le rapaisèrent au mieux qu'ils purent; c'est à savoir, nessire Jean de Luxembourg, le sire de Fosseux, le maréchal de Bourgogne et plusieurs autres. Toutefois il fit prendre et arrêter aucunes bagues et chevaux dudit Hector, et après s'en retourna en son hôtel; et là,

par notables médecins, fit visiter ledit Jacqueville; mais ce rien n'y valut, car dedans les trois jours ensuivant il trépassa. Et comme plusieurs tenoient véritablement, si icelui Hector eût été trouvé, ledit duc l'eût fait mourir vilainement, et en son vivant ne lui voulut oncques pardonner; ainçois ( mais ) par plusieurs fois dit qu'une fois lui et ses complices il détruiroit, combien que dedans brefs jours ensuivant ledit Hector, tellement quellement, fut réconcilié avecque ledit duc pour les grands affaires que de présent il avoit de lui et de

ses gens.

CHAPITRE CLXXXVIII.

Comment le duc de Bourgogne alla atout (avec) sa puissance vers Paris, pour y vouloir entrer, et depuis mena la reine à Troyes, et autres matières.

APRÈS toutes ces besognes, ledit duc de Bourgogne, avecque toute sa puissance, se partit de la ville de Chartres, et par Mont-le-Héry s'en alla vers Paris, en intention d'entrer dedans la ville par certains moyens qu'il avoit avec aucuns des Parisiens ses favorisants. Et pour faire l'entreprise envoya Hector de Saveuse Philippe son frère, le sire de Saures, Louis de Wargnies et plusieurs autres ca

pitaines, jusques au nombre de six mille combattants, vers la porte de Louvel de Châtillon, assez près de Saint-Marcel; mais, par avant leur venue, la chose fut accusée au connétable par un pelletier de Paris; lequel connétable tantôt mit grand' quantité de ses gens à ladite porte, et en plusieurs autres lieux dedans. Pourquoi ledit Hector, venu à la porte pour entrer dedans, fut très durement rebouté lui et ses gens, et mêmement fut blessé en la tête d'un vireton; et adonc voyant que leur entreprise étoit accusée, entrèrent dedans Saint-Marcel, et là se logèrent, attendant le duc de Bourgogne, leur seigneur. Et adonc ledit connétable fit saillir de trois à quatre cents de ses gens hors de Paris par la porte Saint-Marcel, lesquels vigoureusement envahirent lesdits Bourguignons, et en prirent et tuèrent aucuns; mais sans délai iceux criant à l'arme, s'assemblèrent; et incontinent, de grand courage, allèrent contre les dessusdits, et tellement les combattirent, que par force ils rentrèrent dedans leur ville, et rescouyrent (délivrèrent) aucuns de leurs gens pris par iceux. A laquelle besogne Jean, premier né du seigneur de Flavy, se porta très vaillamment atout l'étendard dudit Hector de Saveuse, que lui-même prit et porta assez près de la porte de Paris, dont grandement fut par ledit duc recommandé quand il vint à sa connoissance; et eurent aucuns des favorisants au duc de Bourgogne, les têtes coupées dedans Paris. Si étoit icelui duc en bataille atout sa puissance à

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