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tres avoient conclu de prendre la reine et luimême, comme tantôt bien notoirement apparut en tant qu'il touche la reine; car ils prirent et empoignèrent et emportèrent tous ses biens au déshonneur du roi, d'elle et de toute leur génération. Il est vrai aussi que quand le duc de Bourgogne étoit à Lagny, le duc de Bretagne fut en grand péril à Paris; et convint qu'il s'en partit, pource qu'il proeuroit la paix du royaume. En outre, dit le comte de Hainaut, en jurant comme dessus, que que certainement il tenoit que si les Anglois étoient à un lez (côté) des portes de Paris, et le duc de Bourgogne fût à l'autre lez à une des portes, ils lairroient ainçois (plutôt) entrer les Anglois ens (dedans) que le duc de Bourgogne. Et toutes les choses dessusdites dit le comte de Hainaut en la présence de madame de Hainaut, monseigneur de Charrolois, monseigneur de Saint-Pol, le trésorier de Hainaut, Jean Bâtard, maître Eustache de Lactre, monseigneur de ChampDivers et plusieurs autres.

» Aussi, il y a bien apparu qu'ils n'ont nulle volonté de bien faire ; car nouvellement ils ont fait ardoir les lettres-patentes du duc de Bourgogne, en le palais à Paris ; par lesquelles le duc de Bourgogne offroit paix à tous ceux qui, avec lui, la vouloient avoir, comme ci-dessus est touché ; laquelle chose leur fut et est une pauvre vengeance et grand' foiblesse de cœur d'eux cuider venger d'ardoir un peu de parchemin.

» Item et finablement, afin que chacun sache la

volonté et intention du duc de Bourgogne, il fait savoir à tous, et signifie qu'il persévèrera en son bon propos, et ne le délaissera jusques à ce qu'il aura eu grand conseil avec le roi, et lui aura fait démontrer au long les iniquités, tyrannies, cruautés et inhumanités ci-dessus déclarées, la désolation du royaume et les manières qu'il convient tenir pour la réparation d'icelles, tellement et tant que le roi et tous les bons loyaux prud'hommes de son royaume en devront être contents. Et combien que le duc de Bourgogne, par ses lettres-patentes, ait offert paix à tous, comme dit est, et que ceux d'entour le rei ne l'aient pas reçu à ce, mais aient persévéré en leur rigueur, néanmoins le duc de Bourgogne veuillant, en cette partie, laisser toute rigueur et vengeance, pour le bien du royaume, qui tant a besoin de paix, de confort et d'aide, il est prêt et appareillé de vouloir paix à tous, selon la teneur de ces lettres. >>

Après qu'à tous les articles dessusdits au duc de Bourgogne, de par le roi, par le seigneur de Chauny, comme dit est, icelui duc eut répondu de sa personne et fait répondre par son conseil, selon la teneur de chacun article, comme dessus est écrit, ledit seigneur de Chauny, prenant congé audit duc de Bourgogne, s'en retourna à Paris devers le roi, portant par écrit les dessusdites réponses.

CHAPITRE CLXXXI.

Comment le dessusdit seigneur de Chauny retourna à Paris de son ambassade, et fut accusé par le conseil royal; et la provision qui fut mise contre le duc de Bourgogne.

APRÈS ce que ledit seigneur de Chauny fut retourné à Paris devers le roi et son grand conseil, avoit été baillée par son clerc, à aucuns de ses amis, la copie des instructions et réponses dessusdites, et aussi de toute icelle ambassade. Laquelle chose fut par iceux publiée plus avant qu'il n'appartenoit, tant qu'aucuns du grand conseil du roi en eurent la connoissance; pourquoi il advint que quand ledit sire de Chauny eut audience de par le roi et devers son grand conseil, pour faire la réponse de ladite ambassade, qu'en plein conseil lui fut dit : «< Sire » de Chauny, vous vous démontrez bien du conseil » du roi, tel que vous êtes, comme il appert par >> les instructions qui vous ont été baillées de par le roi, et aussi par la réponse du duc de Bour» gogne, dont en voici la copie; lesquelles vous » avez baillées, non pas pour le bien du roi, en plusieurs lieux, tant à Amiens, Paris comme >> ailleurs, à aucuns de vos connus et amis. Si >> soient vues derechef lesdites instructions et les

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>> main, contre cette copie. » Lesquelles choses furent relues sans rien ôter ni ajouter, et furent trouvées véritables; dont le sire de Chauny fut grandement confus. Mais en la fin, il s'en excusa par son clerc, disant que sans congé il avoit baillé icelles copies, lequel clerc se rendit fugitif. Toutefois ledit sire de Chauny, pour cette cause, fut mené prisonnier en la bastille Saint-Antoine; auquel lieu fut par long espace de temps, jusques à la prise de Paris; car iceux gouverneurs du roi étoient moult déplaisants de ce que les réponses dudit duc de Bourgogne avoient été vues en tant de lieux. Et quelque semblant qu'ils montrassent, moult doutoient icelui duc et sa puissance, par ce pareillement que moult étoient avertis que la plus grand' partie des bonnes villes et du commun du royaume lui étoient favorables, et aussi plusieurs grands seigneurs et autres nobles.

Et encore, quand ils furent acertenés, par les réponses dessusdites, que pas ne se désisteroit de son entreprise, mais iroit à grand' puissance vers Paris, sur intention d'y entrer, et aller devers le roi, furent en plus grand doute que par avant ; car bien savoient que s'il venoit à son entente (but), seroient tous déboutés du gouvernement du roi, et la plus grand' partie punis criminellement. Néanmoins, pour y obvier et eux entretenir, firent écrire lettres, de par le roi, aux bonnes villes, que pas ne reçussent ni baillassent obéissance andit duc de Bourgogne ni à ses gens ; et avec ce mirent

garnison par tous les passages, et autres lieux nécessaires; et mêmement le connétable remanda ses gens d'armes, d'armes, des frontières de Normandie, à venir devers lui à Paris, pour lui fortifier.

Et par ainsi le roi d'Angleterre, qui étoit descendu an pays, comme dit est, à grand' puissance, eut plus bel avantage à faire sa conquête sans avoir quelque danger; et par le moyen des divisions dessus déclarées, peu trouva qui contre lui fit grand' résistance.

CHAPITRE CLXXXII.

Comment le duc de Bourgogne passa outre atout (avec) sa puissance vers Paris; et se mirent en son obéissance plusieurs villes et forteresses, où il mit capitaines et gouverneurs.

APRÈS que le duc de Bourgogne eut par aucuns jours séjourné en la ville d'Amiens, et aussi commis au gouvernement de ses pays de Picardie, en y délaissant pour principal chef son seul fils le comte de Charrolois, accompagné de notable conseil pour le conduire, se partit dudit lieu d'Amiens en retournant à Corbie, et de là s'en alla à Montdidier. Durant lequel temps la dame du Châtel-deMouy promit que plus ne souffriroit que ses gens fissent guerre au pays dudit duc.

En la compagnie duquel allèrent audit lieu de

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