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déportassent de plus piller et occire, et qu'ils se préparassent pour aller mettre le siége devant Mont-le-Héry et Marcoussi, où étoient les ennemis du roi; lesquelles communes répondirent que ce feroient-ils volontiers, et qu'on leur baillât capitaine pour les conduire.

Et dedans brefs jours ensuivant, pour eschever ( éviter) les émeutes dessusdites, furent envoyés bien six mille combattants desdites communes de Paris, à Mont-leHéry; avec lesquels y alla, pour les conduire, le seigneur de Cohen et autres chevaliers, c'est à savoir messire Gaultier de Ruppes, et messire Gaultier Raillart, atout (avec) certain nombre de gens d'armes, et foison de canons et instruments de guerre, compétents à mettre siége. Lesquels chevaliers les menèrent et conduisirent audit lieu de Mont-le-Héry, et commencèrent très fortà assaillir et combattre lesdits Dauphinois, qui étoient dedans la forteresse. Mais après le partement d'iceux, le duc de Bourgogne fit prendre dedans Paris plusieurs de leurs complices, et des principaux émouveurs du commun, auxquels il fit couper les têtes, et pendre au gibet, et les aucuns noyer en Seine ; et même le dessusdit Cappeluche, bourrel de Paris, leur capitaine, eut la tête coupée és halles. Pourquoi ceux dudit siége de Mont-le-Héry, à qui ces paroles furent contées, tantôt retournèrent audit lieu de Paris, en intention de r'émouvoir le peuple; mais on leur ferma les portes au visage. Si s'en retournèrent à leur siége; auquel lieu dedans brefs

jours furent remandés, pour ce qu'entre les parties y avoit ambassadeurs, qui étoient ensemble en plus grand' douceur.

Et entre temps, le seigneur de Château-Vilain vint audit lieu de Paris devers le duc de Bourgogne; et avoit un fils avec lui, qui chevauchoit un peu devant; et en entrant à la porte Saint-Antoine, commença à crier hautement: Vive Armagnac ! mais incontinent fut par les gardes de ladite porte mis à mort, dont le seigneur de Château-Vilain fut très courroucé; mais il ne le put avoir autre.

En après, les Dauphinois, c'est à savoir le seigneur de Bosqueaux atout (avec) trois cents combattants avec lui, prirent d'emblée, au point du jour, la cité de Soissons, sur le seigneur de Longueval, qui en étoit capitaine de par le roi et le duc de Bourgogne, lequel de Longueval se sauva à grand' peine tout à pied par-dessus la muraille, et avec lui Robert de Saveuse et plusieurs autres; laquelle cité fut en la plus grande partie dévêtue de tous biens.

CHAPITRE CCV.

Comment la dauphine fut renvoyée à son mari le dauphin; du siége de Tours en Touraine, et du gouvernement qui lors se faisoit de par le roi et le duc de Bourgogne.

EN ce même temps, par le consentement du roi de France, de la reine et du duc de Bourgogne, fut renvoyée honorablement, jusques en Anjou, la femme du dauphin, qui avoit été trouvée à Paris à la prise, et lui furent délivrées à son partement, toutes ses bagues, afin que ledit dauphin fût plus enclin de venir à paix, et retourner avec le roi son père; mais ce rien n'y valut, car ceux qui le gouvernoient ne l'eussent jamais souffert, parce qu'ils savoient que s'il y retournoit, seroient destitués de leurs états et gouvernements. Et aussi vint adonc devers lui le jeune comte d'Armagnac très grandement accompagné de plusieurs nobles hommes, lequel fit grand' plainte de la cruelle mort de son père, connétable de France, et des autres seigneurs qui naguères avoient été mis à mort. Auquel comte d'Armagnac fut répondu, par le dauphin et son conseil, que de ceux qui les avoient occis, on en feroit bonne et brièvejustice en temps et en lieu. Et adonc icelui dauphin, atout (avec) grand' puissance de gens d'armes, alla mettre le siége devant la ville

de Tours en Touraine, de laquelle étoient capitaines, messire Guillaume de Rommenel, chevalier, et Charles Labbe; lesquels, dedans brefs jours, rendirent la ville au dauphin. Et mêmement se tourna ledit Charles Labbe de son parti, en faisant à lui serment; et les gens d'armes qui étoient avec lui, non veuillant faire serment, eurent sauf-conduit pour aller où bon leur sembla. Auquel lieu de Tours demeura ledit dauphin, et tout son état, par certaine espace de temps.

sants,

Et d'autre part, le duc de Bourgogne, qui avoit le roi et la reine du tout en son gouvernement, se faisoient toutes besognes ès pays à eux obéisà son plaisir. Et pour tant que par lui les aides que souloit (avoit coutume) de payer le peuple, avoient été mises jus, il causa avec le conseil du roi certains mandements contenant qu'il falloit lesdites aides payer pour secourir la ville de Rouen, laquelle étoit moult travaillée par le siége des Anglois. Et de fait furent remises sus; et avec ce fut requis aux Parisiens de prêter certaine somme de pécune pour le secours dessusdit. Lesquels s'accordèrent et prêtèrent cent mille francs, par condition que de chacune queue de vin vendue en leur ville, ils auroient douze deniers, et le recevroient par leurs mains, tant qu'ils seroient restitués de ladite somme. Et pareillement furent levées grosses aides par tous les autres pays de l'obéissance du roi, c'est à savoir en l'évêché de Beauvais, et ès bailliages d'Amiens, de Vermandois et d'ailleurs. Auxquelles

finances lever et cueillir audit bailliage d'Amiens, furent commis maître Robert-le-Jeune, avocat en parlement, et un des seigneurs de parlement du roi, et aucuns officiers pour contraindre les refusants.

CHAPITRE CCVI.

Comment les messagers furent envoyés de Rouen devers le roi pour avoir secours; de l'ambassade envoyée devers le roi Henri, et plusieurs autres matières.

EN ces propres jours fut envoyé devers le roi et son conseil, à Paris, un prêtre assez âgé, de bon entendement, par les assiégés de Rouen. Lequel venu à Paris, fit proposer par un docteur augustin, nommé Eustache de Paville, devant le roi et son grand conseil, l'état et la tribulation desdits assiégés; et prit icelui proposant son thème en disant: Domine, quid faciemus? lequel il proposa moult sagement et authentiquement. Et après qu'il eut finé sadite proposition, icelui prêtre dit au roi: «< Très excellent prince et seigneur, il m'est enjoint de les habitants de la ville de Rouen » à crier contre vous, et aussi contre vous, sire » de Bourgogne, qui avez le gouvernement du roi >> et de son royaume, le grand haro, lequel si

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