Imágenes de página
PDF
ePub

LIBER PHISIONOMIE MAGISTRI MICHAELIS SCOTI.

(Sans date, in-4°.)

Michel Scott vivoit dans le XII, siècle; né en Écosse, il séjourna successivement en France, en Allemagne à la cour de l'empereur Frédéric II, et en Angleterre : les biographes disent qu'il mourut dans son pays vers l'année 1291. Scott étoit habile dans les langues, les mathématiques et la physique; ses contemporains l'accusèrent de s'être adonné à l'étude des sciences occultes, reproche souvent prodigué, dans les siècles d'ignorance, aux hommes qui appliquoient leur esprit à découvrir les phénomènes de l'astronomie et de l'histoire naturelle. Les deux ouvrages les plus connus de Michel Scott sont les Mensa philosophica et le Liber de physiognomia et de hominis procreatione; ce dernier se compose de cent deux chapitres dans lesquels l'auteur traite des principaux organes du corps humain et de leurs diverses maladies; Scott s'y montre tout à la fois anatomiste, médecin et philosophe. Ce livre a joui, pendant deux ou trois cents ans, d'une certaine popularité; peut-être offrirait-il encore aujourd'hui des observations curieuses, mais nous n'avons à le considérer ici que sous le rapport typographique. Lorsqu'on lit les savantes recherches des bibliographes sur l'origine de l'imprimerie et ses premières productions; lorsqu'on étudie les nombreuses nomenclatures des Maittaire, des Panzer, des la Serna Santander, des Hain, etc., on croiroit qu'il n'existe pas aujourd'hui un livre imprimé dans le xve siècle qui n'ait été fidèlement et scrupuleusement décrit. Cependant chaque jour apporte un volume inconnu, une rectification utile et quelquefois une lumière précieuse pour le philologue ou l'antiquaire. L'édition que nous annonçons en tête de cet article a, pour ainsi dire, échappé aux investigations des cataloguistes; nous commencerons tout d'abord par la décrire :

In-4° de 40 feuillets imprimés sur deux colonnes de 33 ou

34 lignes chacune, caractères semi-gothiques, sans chiffres ni réclames, avec signatures A-E. Chaque signature contient 8 feuillets; sur le recto du feuillet 1, on lit, en gros caractères gothiques :

LIBER PHISIONOMIE MA

GISTRI MICHAELIS SCOTI.

Le verso est blanc; la table des chapitres commence au feuillet 2 recto, colonne 1, et finit au feuillet 3 recto, colonne

2, par la sous

[merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small]

Le volume finit sur le recto du 4o et dernier feuillet, colonne 2,

ainsi :

Aliq non errabit. 2 nō erratuz

non fallet deo volente. Et hec
de phisionomia q nüc predixi
mus dicta sufficiant.

Michaelis Scoti de pcre-
atione 2 hois phisionomia
opus feliciter finit.

Les savans ont élevé de nombreux systèmes sur la découverte de l'imprimerie; ils se sont passionnés, qui pour Harlem, qui pour Mayence; entraînés par cette polémique, ils ont presque oublié l'histoire de la propagation des procédés typographiques en Europe. Cependant, quel tableau plus digne de l'attention du critique que celui de l'établissement d'un art qui a exercé une influence si puissante sur les destinées de l'esprit humain, qui a donné une direction si progressive et si sûre aux sciences, aux littératures, enfin à tout ce qui touche aux développemens de l'intelligence des peu

ples! Pour notre part, nous aimerions à suivre, jusque dans leurs moindres détours, les premiers pas de l'imprimerie naissante : que de villes, de bourgs, de monastères qui reçurent l'imprimerie à des époques rapprochées de l'invention, mais incertaines aujourd'hui ! Que de dates perdues ou fausses! On pourroit citer, à l'appui de ce que nous avançons ici, l'ancienne province de la FrancheComté, où, comme nous le verrons bientôt, a été publiée l'édition du Liber phisionomie citée plus haut.

La Franche-Comté, voisine de l'Allemagne, ne pouvoit manquer de jouir promptement des bienfaits de l'art typographique; aussi compte-t-elle, pendant le xv siècle, trois imprimeries dans ses trois villes principales: Salins, Besançon et Dôle. Panzer n'a indiqué, dans ses Annales typographici (1), que les imprimeries de Besançon et de Dôle; il n'a pas connu la plus ancienne, celle de Salins, et il assigne une fausse date à celle de Dôle. La Serna Santander (2), Petit-Radel (3), etc., ont copié Panzer, sans rien ajouter. Ces erreurs et ces omissions doivent d'autant plus nous étonner, que le père Laire avait publié en 1785 un mémoire détaillé sur les premières productions des presses franc-comtoises (4).

En 1485, Jean Desprels, Benoît Bigot et Claude Baudrand, imprimoient un missel à l'usage de l'église de Besançon; ce livre, par son élégante exécution, a mérité les éloges du père Laire. En 1486, l'imprimerie s'établissait à Besançon : cette ville vit paraître successivement, pendant les années 1487 et 1488, 1o Speculum aureum animæ peccatricis a quodam Carthusiensi editum. Canones poenitentiales. Tractatus brevis de horis canonicis dicendis. Tractatus de arte bene moriendi,in-fol. II°. Codex constitutionum ecclesiæ Bisuntina, editus a Carolo de Novo-Castro, archiepiscopo Bisuntino. Speculum sacerdotum missam celebrare volentium, a B. Bonaventura editum. Historia horrenda de Udone, archiepiscopo Magdeburgensi. Speculum ecclesiæ domini Hugonis primi, cardinalis ordinis prædicatorum, in-fol. III. Regimen sanitatis, cum Tractatu epidemia seu

(1) Tom. 1, pag. 203 ct. 376.

(1) Dictionnaire bibliographique choisi du xve siècle. 1805-1807, 3 vol. in-8, tom. 1, pag. 423 et 433.

(3) Recherches sur les bibliothèques anciennes et modernes. 1819, in-8, pag. 206.

(4) Dissertation sur l'origine et les progrès de l'imprimerie en FrancheComté pendant le xy siècle. Dole, Xavier Joly, 1985, in-8.

pestilentia, una cum commentariis Arnaldi de Villanova, medico, in-4. IVo. Liber de pestilentia et liber Michaelis Scoti de phisiognomia, in-4. Vo. Roderici de Zamora episcopi speculum vitæ humanæ, in-4. VI. Speculum artis bene moriendi. Opusculum de horis canonicis dicendis sive cantandis. Opusculum quod speculum aureum anima peccatricis inscribitur. Speculum conversionis peccatorum Dyonisii de Levivis, alias Richel Carthusiani, in-4. VII. Opusculum, quod Speculum sacerdotum dicitur, editum a sancto Augustino de honestate et dignitate eorum. Historia horrenda Udonis, archiepiscopi Magdeburgensis, in-4. L'artiste qui publiait ces divers ouvrages y mettoit quelquefois l'indication de l'année et de la ville, mais jamais son nom; heureusement le père Laire possédoit un exemplaire du Codex constitutionum ecclesiæ Bisuntinæ, à la fin duquel l'imprimeur, qui s'appeloit Jean Contet, avoit ajouté sa signature et son chiffre. Le 1er mai 1490, un artiste, venu d'Allemagne et nommé Pierre Metlinger ou Betlinger, le même qui, plus tard, porta l'imprimerie à Dijon, publioit à Dôle les Ordonnances du comté de Bourgogne, in-4. Enfin, deux années après, en 1492, paraissoit aussi à Dôle un traité sur les maladies épidémiques, composé par Jean Héberlin, médecin, qui professoit avec éclat dans l'université de cette ville. Telle est, d'après le père Laire, la liste des productions typographiques de la Franche-Comté, pendant le xve siècle : elle se compose principalement de livres de dévotion, de jurisprudence et de médecine; trois de ces ouvrages seulement furent publiés à Salins et à Dôle, c'est à Besançon que l'imprimerie fut la plus active; il est étonnant que Jean Contet ait pu éditer cette longue série de petits livres dans le court espace de deux années.

Notre édition du Liber phisionomie ne porte aucune indication de ville, d'année ni d'imprimeur, mais les caractères sont ceux dont se servoit Jean Contet (1); aussi le père Laire a-t-il compté ce

(1) C'est seulement au xvie siècle que les typographes eurent un caractère composé de deux lettres pour figurer la diphthongue latine æ; auparavant ils mettoient partout un e simple. Dans le Liber phisionomie, Jean Contet a ajouté une espèce de cédille retournée sous la lettre e toutes les fois qu'elle représente la diphtongue æ. Nous pensions d'abord que l'artiste bisontin étoit l'auteur de cette amélioration philologique; mais nous avons remarqué le même signe dans quelques éditions d'imprimeurs vénitiens, notamment dans les Tabula astronomica Alfontii regis Castellæ, in-4 publié à Venise en 1483, par Erhardus Ratdolt. Malheureusement, nous ne pouvons pas vérifier si Jean Contet a employé la cédille dans plusieurs de ses ouvrages; nous

livre au nombre de ceux qui furent publiés par cet artiste : mais, en lisant la dissertation du savant bibliographe, on voit bientôt qu'il doutait de l'existence d'une édition qu'il ne connoissoit qu'imparfaitement ; il range sous un même article le Liber de per filentia et le Liber Michaelis Scoti de phisiognomia, à la fin duquel, dit-il, on lit: Impress. Bisuntii anno Domini milles.CCCCLXXXVII(1). Le Liber de pestilentia et le Liber phisionomie sont deux ouvrages. publiés, à la vérité, par le même imprimeur, mais séparément, et le dernier ne porte aucune date. L'erreur du père Laire vient de ce qu'il n'avoit jamais vu le Liber phisionomie, et qu'il n'en a parlé que d'après une indication très-incomplète de Maittaire (2),. lequel reproduit littéralement un article du catalogue de la bibliothèque du baron de Hohendorf, ainsi conçu : Liber phisiognomia, Mich. Scoti. Liber de pestilentia. Bisuntiæ 1487 (3); enfin Panzer et Hain, soupçonnant sans doute quelque erreur, ont gardé le silence. Toutes ces petites confusions disparaissent maintenant que nous avons décrit le volume: le Liber phisionomie n'a aucune souscription, il fut imprimé à Besançon, par Jean Contet, en 1487 ou 1488; nous adoptons de préférence cette dernière date (4).

Hain indique 10 éditions toutes plus ou moins communes de l'ouvrage de Michel Scott, la première datée est de l'année 1477; celle de Jean Contet peut passer pour un livre rarissime; elle manque à la bibliothèque de Besançon, et nous n'en connoissons que deux exem

n'avons vu de cet imprimeur que le Regimen sanitatis et le Tractatus de pestilentia, tous deux datés de l'année 1487, et tous deux exécutés avec les mêmes caractères que le Liber phisionomie, mais n'ayant pas, comme ce dernier, la cédille pour indiquer la diphthongue æ. Or cette cédille, qui paroît avoir été adoptée par Jean Contet dans le cours de sa courte carrière typographique, ne seroit-elle pas un moyen de fixer approximativement la date des publications non datées de cet artiste, et ne pourroit-on pas supposer que les ouvrages de l'imprimeur bisontin où manque la cédille sont de l'année 1487, tandis que ceux où se trouve la cédille sont de l'année 1488? Nous soumettons cette induction bibliologique à M. Weiss: le savant bibliothécaire de la ville de Besançon a sous la main les ouvrages de Jean Contet ; il a voué sa vie à toutes les gloires de son pays; qui mieux que lui pourroit nous donner de précieux renseignemens sur les fondateurs de l'imprimerie en Franche-Comté?

(1) Dissertation citée, pag. 37.

(2) Annales typographici, tom. 1, pag. 491, 2e édit.

(3) Bibliotheca Hohendorfiana, 1720, in-8, 2o partie, pag 27, n° 259. (4) Voir la note de la page 70.

« AnteriorContinuar »