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1° Tous les passe-ports deviennent superflus; ils sont remplacés avec avantage.

2o Ni cartes, ni listes électorales, ne sont plus nécessaires. Une élection a lieu, il suffit de se présenter avec son Inscription de vie visée pour élection par l'officier de paix. Communes et départements peuvent donc s'épargner désormais la peine et la dépense de faire dresser, imprimer, rectifier, placarder, distribuer listes et cartes électorales. Fausses inscriptions et votes doubles ne peuvent avoir lieu.

3o Les livrets imposés, en France, aux ouvriers par la loi du 22 germinal 1803, formalité blessante lorsqu'elle constitue une inégalité civile, sont remplacés par une seule ligne. Cette ligne suffit. Ainsi se trouve tranchée le plus simplement du monde l'une des plus graves et des plus délicates questions de notre temps. Ainsi se trouve effacée une dernière inégalité sociale créée et maintenue par l'arbitraire administratif.

Donc :

Plus de passe-ports !

Plus de listes, ni de carles électorales!

Plus de livrets d'ouvriers!

4o La statistique acquiert un tel degré de précision, qu'il n'est pas de renseignements qu'elle ne puisse immédiatement et sûrement donner, absolument ou relativement :

Par Individus,
Par Communes,
Par Départements,

Par États.

Les sciences médicales demandent-elles à la statistique combien d'individus sont sourds, aveugles, muets, bègues, boiteux ou bossus, etc., etc.? Elle peut le leur dire, soit absolument, soit relativement.

Le crédit public lui demande-t-il combien d'individus sont riches de la fortune qu'ils ont reçue en héritage ou en dot? Combien sont riches de la fortune qu'ils ont acquise par le travail? Combien ont une épargne au-dessus ou au-dessous de telle somme fixée ? Elle peut également le lui dire, soit absolument, soit relativement.

L'industrie lui demande-t-elle combien chaque profession désignée occupe de têtes ou de bras? Elle peut non moins facilement le lui dire, soit absolument, soit relativement.

Le commerce a-t-il besoin, pour établir ses prix régulateurs, étendre ou restreindre ses approvisionnements, ses achats, ses ventes, ses débouchés, de savoir à quelles quantités s'élèvent tels produits, de quelles qualités diverses ils sont, à quels prix moyens ou relatifs ils peuvent être livrés? Elle peut très promptement le lui dire, soit absolument, soit relativement. Etc., etc.

Sans l'INSCRIPTION DE VIE, toujours délivrée au lieu de la naissance, et sur laquelle sont consignés chaque année, avec exactitude, avec certitude, tous les renseignements relatifs à l'Individu, l'État n'aura jamais que des statistiques mensongères, sans contrôle et sans preuves.

Telle ville a intérêt à exagérer le chiffre de sa population, telle autre ville, au contraire, a intérêt à le dissimuler. Que font-elles? En France, elles remplissent, à leur gré, les colonnes des tableaux envoyés par le ministre aux préfets, par les préfets aux sous-préfets, par les sous-préfets aux maires; ces tableaux sont retournés ensuite par les maires aux sous-préfets, par les sous-préfets aux préfets, par les préfets au ministre; c'est ce mouvement de va-et-vient qui s'appelle solen

nellement centralisation administrative et gouverne

ment.

Aucune preuve.

Aucun contrôle.

L'inscription universelle, au contraire, a toute la rigueur d'une comptabilité en partie double.

Tout s'y résume et s'y vérifie par la caisse.

Tout contribuable a son compte ouvert au GrandLivre de la Population, qui a pour teneurs de livres tous les percepteurs nommés et payés par l'État.

A ce compte ouvert est porté tout renseignement dont l'État a reconnu et déclaré l'utilité.

Ainsi, l'État désire savoir combien il existe :
De non-valides;

D'aliénés ;

De familles composées de tant de membres;

De ménages ayant un revenu au-dessous de.................; D'enfants de tel âge, ayant tel degré d'instruction D'hommes de vingt ans, ayant telle taille;

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Sous le régime de l'inscription universelle, rien de plus simple, l'État le saura avec autant de certitude que s'il demandait au directeur du Grand-Livre de la Dette publique combien il existe de rentiers nominatifs ayant soit plus de 500 francs, soit moins de 100 francs de rente.

Le parti qu'une vigilante administration publique

pourrait tirer d'une telle statistique tenue constamment au courant, est facile à apprécier, à quelque point de vue que l'on se place, soit qu'il s'agisse d'organiser la force armée, soit qu'il s'agisse de réformer le code pénal, soit qu'il s'agisse d'accroître la richesse nationale, soit, enfin, qu'il s'agisse de simplifier les rapports entre l'offre et la demande, le capital et le travail, la production et la consommation.

La statistique opérant ainsi avec cette certitude et cette promptitude est à la politique ce que l'astronomie est à l'astrologie, ce que l'art médical est à l'empirisme; ce que la connaissance des causes est à l'impuissance d'expliquer les effets, conséquemment de les prévenir; ce que l'ordre est au désordre, ce que la clarté du jour est à l'obscurité de la nuit.

La statistique, qui était un mensonge et une illusion, devient une vérité. Tout chiffre porte avec lui sa preuve. La preuve est ce qui en fait la valeur.

Alors la police se fait d'elle-même et sans agents; elle est destituée par la statistique; l'espionnage, qui démoralise sans éclairer *, est remplacé par l'enquête qui éclaire sans démoraliser.

*

« Faut-il des espions dans la monarchie? Ce n'est pas la pratique ordinaire des bons princes. L'espionnage serait peut-être tolérable s'il pouvait être exercé par d'honnêtes gens; mais l'infamie nécessaire de la personne peut faire juger de l'infamie de la chose. >>

MONTESQUIEU, liv. XII., ch. xxIII. «N'ajoutez aucune foi aux espions. Il y a plus d'inconvénients que d'avantages à en avoir. »

NAPOLÉON. Instructions laissées par l'Empereur des Français et roi d'Italie au prince Eugène, vice-roi. Juin 1805.

« La police va découvrir une grande conspiration qui aura, dit-on, de grandes ramifications dans la province et dans l'armée. On nomme déjà les gens qui en seront certainement, mais le travail n'est pas fait. >>

PAUL-LOUIS COURIER.

La politique cesse d'errer au gré des événements comme un vaisseau au gré des vagues, sans gouvernail et sans ancre; elle n'ignore plus de quel côté est l'écueil et de quel côté est le port; ce qu'il faut garder ou jeter de lest en certains endroits dangereux; tout ce qu'il importe de savoir, elle le sait par l'inscription universelle, qui est à Finscription maritime, cette grande pensée de Colbert, ce que serait à un gland semé en 165, le chène que deux siècles auraient vu croitre.

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