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à l'universalité de l'élection, l'aristocratie à la démocratie, et la république universelle à la monarchie séculaire.

V.

L'instruction universelle, c'est le règne exclusif de la supériorité individuelle et de l'obéissance volontaire; c'est l'autorité personnelle détrônant l'autorité traditionnelle; c'est la loi vivante succédant à la loi écrite; c'est la civilisation devenant partout l'unique constitution; c'est la force immatérielle dominant la force matérielle; c'est le pouvoir n'étant plus, de nom et de fait, que le savoir.

VI.

La justice universelle, c'est la Justice arrachée à l'esclavage de la Politique et reprenant au-dessus de celle-ci le rang qui lui appartient; c'est la condamnation de la Force sous tous ses noms : guerres et conquêtes; révolutions et dictatures; superstitions et nécessités; crimes et délits arbitraires; c'est la justice mutuelle vouant au blâme, au mépris, à l'exécration de chaque pays et de chaque siècle tout acte qui a blessé la conscience publique.

VII.

Le suffrage universel, c'est le Monde politique ayant trouvé son axe et l'ordre social ayant trouvé sa loi; c'est le droit présumé de la capacité succédant au prétendu droit de l'hérédité; c'est, partout où il y a un intérêt collectif, l'intérêt du plus grand nombre administré par l'Élu du nombre le plus grand.

VIII.

L'inscription universelle, c'est le contrôle réciproque

des hommes par les choses et des choses par les hommes; c'est l'ordre moral établi par l'ordre matériel; c'est l'ordre durable fondé sur la publicité au lieu de l'ordre précaire maintenu par la compression.

IX.

La pacification universelle, c'est le risque de guerre anéanti par l'assurance mutuelle internationale et disparaissant de lui-même comme disparaît un effet qui n'a plus de cause; c'est la rivalité des produits succédant à la rivalité des territoires, l'art de produire remplaçant l'art de détruire; c'est le progrès apportant partout la liberté et la liberté accélérant partout le progrès; c'est le prix de revient réduit de tout ce que coûte le dispendieux entretien des armées permanentes ; c'est conséquemment pour moins de travail plus de bien-être.

X.

L'assurance universelle, c'est l'association avec tous ses avantages sans les inconvénients de la communauté; c'est l'application successive de tous les progrès à l'anéantissement graduel de tous les risques; c'est le caprice destitué par le calcul; c'est l'arbitraire remplacé par l'absolu; c'est le mal traduit mathématiquement en risques dans l'ordre social comme dans l'ordre physique, le mal scruté et combattu non dans ses effets, mais dans ses causes; c'est, enfin, la répression, qui n'a jamais su inventer que des peines se réfugiant dans le passé et livrant l'avenir à la prévoyance, qui, de l'étude des probabilités, a réussi à faire une science exacte, science qui ouvre l'ère de la politique universelle, science dont les trois termes seront :

LIBERTÉ, PUBLICITÉ, UNITÉ,

La liberté mutuelle est la loi commune.

L'État, être abstrait et collectif, n'a le droit de régir et de régler que ce qui est nécessairement indivisible, conséquemment indivis, essentiellement collectif, exclusivement public.

Nul ne peut être contraint de rester dans l'indivision.
Tout ce qui est individuel est libre.
Donc :

La parole est libre.
L'imprimerie est libre.
L'enseignement est libre.

L'association est libre.

Les cultes sont libres.

Les conventions sont libres.

Les conventions sont la loi des parties.

Les codes indiquent à l'inexpérience des hommes les formules consacrées par l'expérience des siècles. Ils indiquent et ne prescrivent pas.

Le crime ou le délit commis a pour peine le crime ou le délit constaté.

Le dommage causé a pour peine le dommage réparé. Les enfants sont égaux devant la mère.

La mère est responsable du sort de ses enfants.

La maternité offrant seule la certitude nécessaire au droit de succéder, l'État ne garantit le droit de succéder qu'aux descendants et ascendants de la ligne maternelle.

La probabilité du risque règle le taux de la prime. La prime volontaire abolit l'impôt forcé.

Le payement et l'encaissement de la prime d'assurance générale sont le contrat librement et réciproquement conclu entre l'Individu souverain et l'État souverain.

Tout fonctionnaire dont un fonctionnaire supérieur n'est pas responsable est élu.

Tout fonctionnaire élu n'est responsable de ses actes que devant la justice élective et le suffrage universel.

LE DROIT CONVENTIONNEL.

Les lois devraient être des conventions faites librement entre des hommes libres. BECCARIA. Des délits et des peines.

Dans une démocratie, il n'y a lieu, en dernière analyse, ni à constitution ni à gouvernement. La politique dont on a écrit tant de volumes et qui fait la spécialité de tant de grands génies, la polítique se réduit à un simple contrat de garantie mutuelle de citoyen à citoyen, de commune à commune, de province a province, de peuple à peuple, variable dans ses articles suivant la matière, et révocable ad libitum à l'infini.

PROUDHON, Contradictions économiques.

D. Qu'est-ce que le droit conventionnel?

R. C'est le moyen nouveau d'exclure les maîtres, substitué au droit ancien de les subir, et au droit moderne de les choisir.

D. Comment une nation peut-elle agir sans gouvernement?

R. Comme la terre tourne sans roues, et comme l'homme marche sans lisières.

D. Mais une nation n'est ni un astre céleste, ni un être vivant?

R. Non; une nation est un être collectif qui agit d'après les lois qui lui sont propres.

D. Mais quelles sont ses lois?

R. Les plus simples. Pour les connaître, il suffit de

savoir distinguer ce qui est essentiellement indivisible de ce qui est essentiellement individuel, ce qui est nécessairement public de ce qui est naturellement privé.

D. Mais n'est-ce pas là précisément que la difficulté commence? Comment tracer cette ligne de démarcation sans tomber dans l'arbitraire?

R. En vous posant à vous-même les simples questions que je vous adresse: Chaque citoyen peut-il, pour défendre sa personne ou sa propriété, entretenir une armée ? — Non. Done, l'armée est l'un des membres du corps social. Ce qui est vrai pour l'armée est également vrai pour la marine qui protége le commerce national, car chaque citoyen ne peut pas entretenir une escadre. Ce qui est vrai pour l'armée et la marine est pareillement vrai pour la voie publique, car chaque citoyen ne peut posséder une fraction de route nationale, un bout de chemin communal.

D. Il est facile de limiter ainsi ce qui est indivisible, mais est-il aussi facile de limiter ce qui est individuel?

R. Tout aussi facile et par le même moyen, en continuant de vous poser à vous-même ces simples questions: Chaque citoyen, être pensant, a-t-il le droit d'avoir une croyance religieuse, scientifique, politique, littéraire ou artistique, sans que l'État, être nonpensant, intervienne et la règle?- Assurément. Done, la liberté de croire, de penser, de parler, d'apprendre ou d'enseigner est l'une des facultés de l'Être individuel, faculté que n'a aucun droit de limiter l'Être collectif.

D. Ne pouvez-vous préciser plus nettement votre pensée?

R. L'Être collectif est celui qui fait et possède ce que ne peut pas faire et posséder l'Être individuel; l'Etre individuel est celui qui fait et possède ce que ne peut pas faire et posséder l'Être collectif. En conséquence

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