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Relativement aux risques sociaux, toute la question se réduit donc à donner au précepte évangélique la rigueur incontestée d'un axiome géométrique.

Ayant pris pour point de départ de mes travaux les suppositions que je viens d'énoncer sommairement, je me suis demandé s'il était possible de concevoir et de fonder une société qui, réduisant tout mathématiquement à des risques judicieusement prévus et à des probabilités exactement calculées, aurait pour unique pivot l'assurance universelle?

Je me suis demandé si une société tournant sur ce pivot comme la terre tourne sur son axe, vaudrait moins que la société qui repose sur une distinction arbitraire entre le bien et le mal, distinction arbitraire, puisqu'elle a varié et qu'elle varie encore selon la diversité des temps et des pays, des religions et des lois?

On peut contester que la guerre et la conquête soient un mal, mais peut-on contester que la guerre et la conquête soient un risque?

On remarquera que, respectant toutes les croyances, quoiqu'elles se contredisent, je n'attaque aucune des religions qui se pratiquent.

Chacune d'elles affirmant que les autres sont des impostures, ou pour le moins des erreurs, dans l'impuissance de les mettre d'accord, j'ai entrepris de me passer d'elles. J'ai éludé ainsi la difficulté, que je ne savais comment vaincre.

Je ne dis pas que ce soient les religions qui aient tort.

Je ne prétends pas que ce soit moi qui aie raison. Deux mille quatre cents ans avant moi, Bias avait posé en principe qu'on doit s'abstenir de toute recherche sur l'essence de la Divinité.

S'il y a un Créateur;

Si ce divin Créateur est le souverain juge;

Si l'immatérialité de l'âme peut se démontrer;

Si moralement le bien et le mal ne sont pas relatifs d'individu à individu, de nation à nation, de siècle à siècle;

Si moralement le bien et le mal sont absolus, c'està-dire indépendants de l'éducation, du temps et de l'espace;

S'ils ont une sanction éternelle;

Si cette sanction est le lien d'une vie se rattachant à une autre vie, comme les anneaux d'une chaîne sans fin;

Mon souhait le plus ardent et ma prière de chaque jour sont que la religion qui est la vérité anéantisse, par l'éclat de l'évidence, toutes les religions qui sont l'erreur; que cette religion soit la loi éternelle et universelle, rendant inutile toute autre loi; que la science succède à l'ignorance en la dissipant comme la clarté du jour dissipe l'obscurité de la nuit; qu'enfin le règne de la justice sur la terre arrive et soit le règne de la paix entre tous les hommes et entre tous les peuples. aucun n'essayant de faire à l'autre ce qu'il ne voudrait pas qu'un autre lui fit.

LIVRE DEUXIÈME.

liers ont un meilleur esprit, parce qu'on n'a pas à souffrir de dures nécessités. Mais la guerre, qui détruit l'aisance journalière de la vie, donne des leçons de violence et rend conformes à l'àpreté des temps les mœurs de la plupart des citoyens.

THUCYDIDE.

Antigonus le vieil répondit un jour à quelque sophiste qui lui présentoit et dédioit un traité qu'il avoit composé de la Justice: «Tu es un sot, mon ami, qui me viens prêcher la justice là où tu vois que je bats les villes d'autrui. »

PLUTARQUE.

Un seul meurtre fait un scélérat, des milliers de meurtres font un héros.

ÉRASME.

Les hommes sont tous frères et ils s'entre-déchirent. Les bêtes farouches sont moins cruelles qu'eux. Les lions ne font point la guerre aux lions, ni les tigres aux tigres; ils n'attaquent que les animaux d'espèce différente. L'homme seul, malgré sa raison, fait ce que les animaux sans raison ne firent jamais.

FÉNELON.

Tel est le droit de la guerre parmi les peuples savants, humains et polis de l'Europe. On ne se borne pas à faire à son ennemi tout le mal dont on peut retirer du profit, mais on compte pour un profit tout le mal qu'on peut lui faire en pure perte.

J.-J. ROUSSEAU.

Quand il est question de juger si on doit faire la guerre et tuer tant d'hommes, c'est un homme seul qui en juge, et encore intéressé.

PASCAL.

Ne faudra-t-il pas signer la paix après la guerre ? Que ne le fait-on tout d'un coup?

VOLTAIRE.

Un voleur de grand chemin qui commet des vols en troupe est aussi voleur que quand il vole seul, et une nation qui fait une guerre injuste n'est qu'une grande bande. Quand vous aurez employé votre peuple à piller les Hollandais, est-il étrange que, mettant un terme à ce brigandage, ils continuent chez eux le même métier et se volent les uns les autres ?

FRANKLIN,

C'est la faiblesse qui appelle la guerre; une résistance générale serait la paix universelle.

MIRABEAU.

Les guerres injustes naissent du défaut d'une garantie commune et prouvent sa nécessité.

ANCILLON.

Et il s'établira de peuple à peuple un équilibre de force qui, les contenant tous dans l'exercice de leurs droits réciproques, fera cesser leurs barbares usages de guerre et soumettra à des voies civiles le jugement de leurs contestations.

VOLNEY.

Qu'est-ce que la guerre? Un métier de barbare, où tout l'art consiste à être le plus fort sur un point donné.

NAPOLÉON, 6 septembre 1812.

LA PACIFICATION UNIVERSELLE.

La guerre est un risque.

Ce risque n'existe pas par lui-même, comme le risque de naufrage ou d'incendie; il n'existe que parce que l'homme l'a créé.

Il équivaut, en moyenne, à trois dixièmes de la dépense ordinaire des Etats.

Qu'y a-t-il à faire pour l'écarter ou l'anéantir?

Ce qu'il y a de plus simple: s'assurer contre lui.
Comment?

En proposant à toutes les nations qui fléchissent sous le poids de la paix armée de contracter entre elles une assurance spéciale contre le risque de guerre territoriale et maritime.

La France prend cette initiative et donne l'exemple. Elle appelle à s'unir successivement à elle contre le risque de guerre tous les Etats qui aspirent à pouvoir réduire et à finir par éteindre l'exorbitante dépense de leurs armées permanentes.

Plus le nombre des Etats qui seront parties contrac-tantes tendra à grossir, plus le risque tendra à s'affaiblir; par suite, plus la prime à payer sera faible.

De faible qu'elle serait relativement, elle deviendrait

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