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du pain dans l'alimentation des travailleurs. Avec autant de bestiaux et beaucoup de fourrages, on aurait assez de fumier pour fumer les terres labourées par la machine à vapeur. Dans l'un comme dans l'autre système, agriculture à l'eau froide et agriculture à l'eau chaude, la préemption universelle est impérieusement nécessaire. Sans elle pas d'application possible.

Le progrès agricole, tel que je l'entrevois, exige que la terre soit une marchandise et se vende au cours comme s'achète le coton. D'abord le prix de la terre s'élèverait rapidement parce qu'elle serait plus demandée qu'offerte, puis elle ne tarderait pas à être plus offerte que demandée par suite de l'impossibilité où serait le cultivateur et sa paire de bœufs de lutter contre la machine aux narines de feu, si elle permettait de vendre avec profit les céréales, la betterave, la pomme de terre, etc., seulement à 1 % de moins. Lorsqu'on a assisté aux progrès qu'a faits, depuis vingt années, la fabrication du sucre indigène, on peut tout prévoir et il ne faut douter de rien.

Quoi qu'il en soit, quoi qu'il en puisse être de la préemption universelle appliquée au progrès agricole, ce que l'on ne contestera pas, ce que l'on ne saurait contester, ce sont les avantages qu'elle offrirait appliquée au progrès industriel.

Combien d'inventeurs qui étouffent l'invention à laquelle ils ont donné le jour parce qu'ils s'en exagèrent l'importance, la valeur ! L'accès de fièvre qui est utile pour mettre au monde une invention est ce qu'il y a ensuite de plus nuisible pour l'exploiter. Le préempteur, n'ayant pas les mêmes raisons d'aveugle enthousiasme que l'auteur, en devient le correctif salutaire autant que nécessaire. Tenterait-on de m'objecter que l'inventeur saura toujours mettre son invention à un assez haut prix pour la rendre inaccessible au préemp

teur? Si cette objection m'était faite, j'y répondrais: Le taux de l'assurance à payer étant proportionnel au montant de la valeur déclarée, l'objection tombe d'elle-même. Ainsi, on le voit, l'impôt transformé en assurance devient l'inflexible régulateur de toutes les valeurs.

La même observation s'applique avec la même justesse à l'auteur qui estime son œuvre trop haut ou qui l'exploite mal. Il n'est ni plus ni moins propriétaire de son livre que le propriétaire ne l'est de sa terre. On peut les exproprier tous les deux et s'approprier terre et livre aux mêmes conditions: payement préalable de la valeur déclarée et le dixième en sus.

Le payement du dixième en sus, on le remarquera, constitue un privilége au profit des valeurs préemptées relativement aux autres marchandises qui s'achètent au cours du marché ou de la bourse.

Ce privilége doit être considéré comme une transition; cette transition constituant un privilége, les propriétaires assujettis à la préemption, loin d'être fondés à se plaindre, n'auront qu'à s'applaudir d'avoir été l'objet d'une telle exception et qu'à se hâter d'en profiter. Je me résume:

La préemption universelle est ce qui permet de proclamer et de réaliser la propriété universelle.

Or, la propriété universelle, c'est le salaire à son taux le plus élevé et l'alimentation à son taux le plus bas; c'est la consommation et la production s'aidant réciproquement comme s'aident les deux seaux qui servent à tirer de l'eau d'un puits, l'un descendant pour s'emplir toutes les fois que l'autre monte pour se vider; c'est le travail occupant toutes les têtes et faisant mouvoir tous les bras; c'est le travail sans chômage; c'est plus que tout cela encore, c'est le bienêtre universel.

LIVRE DIXIÈME.

dans une foule de questions.

Ecclésiaste.

Pour atteindre la vérité, il faut une fois dans sa vie se défaire de toutes les opinions qu'on a reçues, et reconstruire de nouveau tout le système de ses connaissances.

DESCARTES.

Puisque la nature n'a mis aucune différence entre ses enfants, puisqu'elle me donne à moi comme à vous le même droit à ses faveurs; puisque nous avons tous la même raison, les mêmes sens, les mêmes organes; puisqu'elle n'a point créé des maîtres, des sujets, des esclaves; des princes, des nobles, des roturiers; des riches, des pauvres; comment les lois politiques qui ne doivent être que le développement des lois naturelles pourraient-elles sans danger établir une différence choquante et cruelle entre les hommes. Pourquoi la loi qui doit satisfaire la raison pour produire le bien la révolterait-elle sans produire le mal?

CONDILLAC.

Que la politique imite la nature. Si le travail qu'elle nous impose n'est pas proportionné à nos forces, si l'espérance qui le ferait entreprendre avec joie est trompée, s'il ne peut pas suffire à nos besoins, il devient insupportable et ne peut être que l'occupation ou le chàtiment d'un esclave.

MABLY. Entretiens de Phocion.

L'étude de la physiologie du cerveau nous montre les bornes et l'étendue du règne moral et intellectuel de l'homme. Elle nous montre une immense disproportion entre les facultés éminentes et nous entraîne vers ce résultat que, partout où les hommes se font gouverner par la multitude, où les règlements, les décisions, les lois sont l'œuvre de la pluralité des votes, c'est la médiocrité qui l'emporte sur le génie.

GALL. Sur les fonctions du cerveau, t. 11, p. 50.

Il y a une science des quantités qui force l'assentiment, exclut l'arbitraire, repousse toute utopie; une science des phénomènes physiques qui ne repose que sur l'observation des faits; il doit exister aussi une science de la société absolue, rigoureuse, baséc sur la nature de l'homme et de ses facultés et sur leurs rapports, science qu'il ne faut pas inventer, mais découvrir.

J.-P. NOHDUORP. Ehenamid.

Il n'y a de vraies révolutions que les révolutions d'idées.

JOUFFROY, De la destinée humaine.

La destinée humaine donne une heure par siècle à l'humanité pour se régénérer cette heure, c'est une révolution, et les hommes la perdent à s'entre-déchirer; ils donnent à la vengeance l'heure donnée par Dieu à la régénération et au progrès.

LAMARTINE. Voyage en Orient.

Toutes les heures perdues dans l'époque où nous vivons sont une perte irréparable.

LE PREMIER CONSUL au ministre Decrès,

L'AUTONOMIE UNIVERSELLE.

D'où vient que les astres se meuvent en pleine liberté sans se rencontrer ni se heurter jamais? C'est que chacun d'eux se meut dans son orbite sans en pouvoir sortir. Cet ordre astronomique est ce qui constitue l'équilibre universel. C'est un équilibre pareil que j'ai cherché à créer dans l'ordre politique. Pour y parvenir, je me suis appliqué à restituer premièrement à la puissance individuelle sa plénitude; deuxièmement, à la puissance communale son indépendance; troisièmement, à la puissance nationale son unité; quatrièmement, à la puissance corporative son action; cinquièmement et enfin, à la puissance judiciaire sa suprématie. Chacune de ces puissances se fait contre-poids; mais aucune d'elles n'a de limites autres que celles qui lui sont propres, comme il est propre, selon l'observation de Montesquieu, à tous les rayons d'un cercle d'être égaux entre eux.

Partout où j'ai trouvé une limite arbitraire, je l'ai effacée; partout où j'ai trouvé une limite naturelle, je l'ai conservée. Je n'ai voulu d'aucune pondération factice. L'autonomie universelle, voilà quel a été mon but. L'ai-je atteint? ai-je découvert toutes ses lois? n'en ai-je transgressé aucune? C'est ce qu'à défaut de l'ap

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