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tion a toujours été regardée comme nulle par tous les jurisconsultes impériaux, n'étant pas permis de disposer d'aucun fief de l'empire sans le consentement du suzerain. On était même encore si persuadé du temps de Charles-Quint de l'invalidité des droits pontificaux, que cet empereur s'empara de Plaisance lorsque le bâtard du pape Paul III, à qui son pere avait donné cette ville, y fut assassiné pour ses débauches et pour ses violences. CharlesQuint garda même Plaisance jusqu'à sa mort.

Les empereurs réclamerent toujours depuis la mouvance de Parme et de Plaisance, et enfin elle leur fut solennellement accordée au congrès de Cambrai et à celui de Soissons.

Dès que le pape Clément XIII sut que le duc de Parme don Ferdinand voulait régner comme les autres souverains, il assembla une congrégation de cardinaux qui ne manqua pas de regarder la sage administration du duc de Parme et de ses ministres comme un sacrilege. Le pape signa dans SainteMarie-Majeure, le 30 janvier 1768, un bref pontifical, dans lequel il commence par dire que Parme et Plaisance lui appartiennent, in ducatu nostro, et que le duc de Parme étant laïque et non pas prêtre, tout ce que fait son conseil est illégitime; il excommunie tous ceux qui ont eu part aux édits du duc de Parme saus exception; il défend de leur donner l'absolution en quelque cas qué ce puisse être, Ce décret, scellé de l'anneau du pêcheur, fút affiché aux basiliques de Saint-Jean-de-Latran, de Saint-Pierre, et au champ de Flore.

Un tel bref paraissait du douzieme siecle plutôt
S. DE LOUIS XV. 5.

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que de celui où nous vivons. Le ́pape et les cardinaux qui l'entraînerent dans ce piege ne savaient pas combien les esprits s'étaient éclairés dans l'Europe: le malheur de la cour de Rome était de juger du présent par le passé. Il y a des temps où un prêtre peut détrôner un souverain avec des préjugés; il y en a d'autres où il faut déguiser sa faiblesse par la condescendance. Jamais pontife ne fit une plus lourde faute: il insultait dans la personne du duc de Parme le roi d'Espague don Carlos, son oncle; Louis XV, son grand-pere, chef de la maison de Bourbon; et le roi des deux Siciles, son cousingermain.

Les papes n'avaient excommunié aucun souverain depuis l'an 1630, et c'était justement un duc de Parine, ancêtre maternel du duc régnant: il ne s'était agi que d'argent dans cette affaire. Le pape avait pris les duchés de Castro et de Ronciglione, appartenants à Odoard Farnese, duc de Parme.

En 1588 un ancêtre plus important de ce prince, le grand Henri IV, roi de France, avait été excommunié par Sixte-Quint: ce pâtre de la Marche d'Ancône, devenu pape, avait osé l'appeler « génération bâtarde et détestable de la maison de Bour<< bon. »

Telle fut long-temps la démence superstitieuse et hardie de la cour de Rome, qu'un prêtre de ce pays déclara, de la part de Dieu, le descendant de tant de rois incapable d'hériter, non seulement du royaume de S. Louis, mais même d'un seul arpent de terre.

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Cot excès d'insolence absurde n'avait point été

pani comme il devait l'être; les querelles de reli, gion et la politique ambitieuse de Philippe II soutenaient alors l'audace du Vatican: mais il vient un temps où l'on réprime enfiu ce qu'on a été forcé de tolérer, et où le faible est châtié des anciennes entreprises du fort qui n'existe plus.

Clément XIII fut bientôt puni de son peu de connaissance des affaires du monde. Le parlement de Paris commença par condamner son bref d'excommunication; mais le conseil du roi employa des armes plus réelles; l'ordre fut donné de se saisir d'Avignon et de tout le Comtat Venaissin. Les concessions faites autrefois par les rois de France de ce Comtat au siege de Rome sont enveloppées de ce nuage d'incertitudes qui couvre une grande partie de l'histoire; d'ailleurs l'aliénation d'un domaine de la couronne a toujours été réputée contraire aux lois du royaume par tous les parlements, et particulièrement par celui de Provence, dans le ressort duquel sont Avignon et le Comtat.

Louis XIV était rentré deux fois dans ce domaine, l'une du temps du pape Alexandre VII, l'autre pour mortifier Innocent XI qui s'était déclaré son ennemi; et, ayant saisi ces terres comme domaine de la couronne, il les avait rendues deux fois, sans faire aucune déclaration qui pût préjudicier an droit qu'il avait de les reprendre.

Il faut savoir que, lorsque les rois de France reprennent le Comtat, c'est en vertu d'un arrêt du parlement de Provence. Le ministere de France jugea qu'il fallait faire valoir le dernier arrêt de ce parlement, qui réunit, en 1688, Avignon et le

Comtat a la couronne. Cet arrêt n'avait point été spécialement révoqué; ainsi il fut mis en exécution comme subsistant dans toute sa force.

Le comte de Rochechouart se présenta de la part du roi, le 11 juin 1768, devant Avignon, suivi de quelques troupes; il alla droit au vice-légat qui gouvernait au nom du pape et lui dit, selon l'ancien protocole usité sous Louis XIV: « Monsieur, le roi m'ordonne de remettre Avignon en sa main, « et vous êtes prié de vous retirer, »

Le premier président d'Aix, un secoud président, et huit conseillers firent publier l'arrêt de réunion. Dans le même temps toutes les cloches sonnerent, le peuple fit des feux de joie; on commença dès ce jour à insérer dans tous les actes publics: «Régnant souverain prince Louis, par la < grace de Dieu, XV du nom, roi de France et de Navarre, comte de Provence, de la ville d'Avi«gnon et du Comtat Venaissin. »

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Le roi de Naples, de son côté, vengeait sa maison et tous les souverains catholiques, en s'emparant de la ville de Bénévent et de celle de Ponte-Corvo, et en déclarant « que ces deux villes et leur terri« toire dépendent de la couronne de Naples, et qu'ils y seront réunis à perpétuité. »

On menaça aussi de se saisir de Castro et de Ronciglione, mais on se contenta de menacer; et, dans le temps même que la cour de Naples prenait Bénévent, qui appartient aux papes depuis environ sept cent trente années, elle lui payait le tribut de vassal, qui consiste en sept mille écus pendus au cou d'une haquenée. On n'osa pas s'affranchir

de cette servitude; les hommes font rarement tout ce qu'ils peuvent: elle était encore moins ancienne de dix années que les droits du pape sur Bénévent. › Cet hommage, qui n'était d'ailleurs et qui ne pouvait être qu'une simple cérémonie de piété, n'est point une véritable mouvance féodale; il fut établi par le préjugé, et il peut aisément être aboli par la raison le ministre du roi de Naples, le marquis Tannucci, l'homme le mieux instruit de 'cette jurisprudence épineuse, ne crut pas que le temps fût encore venu de secouer un joug honteux aux têtes couronnées, mais imposé par la religion.

Si on ne dépouillait pas encore les papes de tous les droits qu'ils avaient usurpés, du moins on sapait par les fondements l'édifice sur lequel la plupart de ces droits sont appuyés; on proscrivait par-tout la fameuse bulle In cocná Domini, qu'on a fulminée tous les ans à Rome sans discontinuation depuis Paul III. Un cardinal diacre la lit à la porte de Saint-Pierre le jour qu'on appelle du jeudisaint, et le pape jette un flambeau allumé dans la place publique, pour marquer au peuple chrétien que Dieu brûlera ainsi dans l'enfer quiconque violera les lois portées par la bulle In cœná Domini. C'est dans cette bulle, u°. 14, qu'on excommunie d'une excommunication majeure,

« Les chanceliers, conseillers ordinaires ou extraordinaires de quelques rois et princes que ce « puisse être, les présidents des chancelleries, con seils, parlements, comme aussi les, procureursgénéraux qui évoquent à eux les causes eccle

a

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