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contre un prince puissant, qui le fit tuer. Ce conte est faux.

VERTOT (René-Aubert), né en Normandie en 1655; historien agréable et élégant. Mort en 1735. VICHARD DE SAINT-RÉAL (César), né à Chambéri, mais élevé en France. Son histoire de la Conjuration de Venise est un chef-d'œuvre: sa Vie de Jésus-Christ est bien différente. Mort en 1692.

Villars de Montfaucon ( l'abbé de ), né en 1635; | célebre par le Comte de Gabalis: c'est une partie de l'ancienne mythologie des Perses. L'auteur fut tué, en 1675, d'un coup de pistolet. On dit que les sylphes l'avaient assassiné pour avoir révélé leurs mysteres.

VILLARS (le maréchal, duc de), né en 1652. Le premier tome des mémoires qui portent son nom est entièrement de lui. Il savait par cœur les beaux endroits de Corneille, de Racine et de Moliere. Je lui ai entendu dire un jour à un homme d'état fort célebre, qui était étonné qu'il sût tant de vers de comédie, « J'en ai moins joué que vous, mais j'en « sais davantage ». Mort en 1734.

VILLEDIEU (madame de). Ses romans lui firent de la réputation. Au reste on est bien éloigné de vouloir donner ici quelque prix à tous ces romans dont la France a été et est encore inondée; ils ont presque tous été, excepté Zaïde, des productions d'esprits faibles qui écrivent avec facilité des choses indignes d'être lues par les esprits solides : ils sont même pour la plupart dénués d'imagination ; et il y en a plus dans quatre pages de l'Arioste que dans tous ces insipides écrits qui gâtent le goût des jeunes gens. Morte en 1683.

VILLIERS (Pierre de), né à Cognac en 1648, jésuite. Il cultiva les lettres, comme tous ceux qui sont sortis de cet ordre. Ses sermons, et son poëme sur l'art de prêcher, eurent de son temps quelque

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réputation. Ses stances sur la solitude sont fort audessus de celles de Saint-Amant, qu'on avait tant vantées, mais ne sont pas encore tout-à-fait dignes d'un siecle si au-dessus de celui de Saint-Amant. Mort en 1728.

VOITURE (Vincent), né à Amiens en 1598. C est le premier qui fut en France ce qu'on appelle un bel esprit. Il n'eut guere que ce mérite dans ses écrits, sur lesquels on ne peut se former le goût; mais ce mérite était alors très rare. On a de lui de très jolis vers, mais en petit nombre. Ceux qu'il fit pour la reine Anne d'Autriche, et qu'on n'imprima pas dans son recueil, sont un monument de cette liberté galante qui régnait à la cour de cette reine, dont les frondeurs lasserent la douceur et la bonté.

Je pensais si le cardinal,
J'entends celui de la Vallette,
Pouvait voir l'éclat sans égal

Dans lequel maintenant vous ête;

(1)

J'entends celui de la beauté;
Car auprès je n'estime guere,
Cela soit dit sans vous déplaire,
Tout l'éclat de la majesté.

Il fit aussi des vers italiens et espagnols avec suc. cès. Mort en 1648.

(1) Alors on était dans l'usage de retrancher dans les vers les lettres finales qui incommodaient; vous éte pour vous étes. C'est ainsi qu'en usent les Italiens et les Anglais. La poésie française est trop gênée, et très sou→ vent trop prosaïque.

Ce n'est pas la peine de pousser plus loin ce catalogue. On y voit un petit nombre de grands genies, un assez grand d'imitateurs, et on pourrait donner une liste beaucoup plus longue des savants. Il sera difficile désormais qu'il s'éleve des génies nouveaux, à moins que d'autres mœurs, une autre sorte de gouvernement, ne donnent un tour nouveau aux esprits. Il sera impossible qu'il se forme des savants universels, parceque chaque science est devenue immense. Il faudra nécessairement que chacun se réduise à cultiver une petite partie du vaste champ que le siecle de Louis XIV a défriché.

ARTISTES CÉLEBRES.

MUSICIENS.

LA musique française, du moins la vocale, n'a été jusqu'ici du goût d'aucune autre nation. Elle ne pouvait l'être, parceque la prosodie française est différente de toutes celles de l'Europe. Nous appuyons toujours sur la derniere syllabe; et toutes les autres nations pesent sur la pénultieme ou sur l'antépénultieme, ainsi que les Italiens. Notre langue est la seule qui ait des mots terminés par des e muets, et ces e, qui ne sont pas prononcés dans la déclamation ordinaire, le sont dans la déclamation notée, et le sont d'une maniere uniforme, gloi-reu, victoi-reu, barbari-eu, furi-eu...... Voilà ce qui rend la plupart de nos airs et notre récitatif insupportables à quiconque n'y est pas accoutumé. Le climat refuse encore aux voix la légèreté que donne celui d'Italie; nous n'avons point l'habitude qu'on a eue long-temps chez le pape et dans les autres

cours italiennes de priver les hommes de leur virilité pour leur donner une voix plus belle que celle des femmes tout cela, joint à la lenteur de notre chant, qui fait un étrange contraste avec la vivacité de notre nation, rendra toujours la musique française propre pour les seuls Français.

Malgré toutes ces raisons, les étrangers qui ont été long-temps en France conviennent que nos musiciens ont fait des chefs-d'œuvre en ajustant leurs airs à nos paroles, et que cette déclamation notée a souvent une expression admirable; mais elle ne l'a que pour des oreilles très accoutumées, et il faut une exécution parfaite; il faut des acteurs : en Italie il ne faut que des chanteurs.

La musique instrumentale s'est ressentie un peu de la monotonie et de la lenteur qu'on reproche à la vocale; mais plusieurs de nos symphonies, et sur-tout nos airs de danse, ont trouvé plus d'applaudissements chez les autres nations. On les exécute dans beaucoup d'opéra italiens: il n'y en a presque jamais d'autres chez un roi qui entretient un des meilleurs opéra de l'Europe, et qui, parmi ses autres talents singuliers, a cultivé avec un très grand soin celui de la musique.

LULLI (Jean-Baptiste), né à Florence en 1633, amené en France à l'âge de quatorze ans, et ne sachant encore que jouer du violon, fut le pere de la vraie musique en France. Il sut accommoder son art au génie de la langue; c'était l'unique moyen de réussir. Il est à remarquer qu'alors la musique italienne ne s'éloignait pas de la gravité et de la noble simplicité que nous admirons encore dans les récitatifs de Lulli.

Rien ne ressemble plus à ces récitatifs que le fameux motet de Luigi, chanté en Italie avec tant de S. DE LOUIS xv. - 5.

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succès dans le dix-septieme siecle, et qui commence ainsi :

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Il faut bien observer que dans cette musique de pure déclamation, qui est la mélopée des anciens, c'est principalement la beauté naturelle des paroles qui produit la beauté du chant: on ne peut bien déclamer que ce qui mérite de l'être. C'est à quoi on se méprit beaucoup du temps de Quinault et de Lulli. Les poëtes étaient jaloux du poëte, et ne l'étaient pas du musicien. Boileau reproche à Quinault

ces lieux communs de morale lubrique,

Que Lulli réchauffa des sons de sa musique.

Les passions tendres, que Quinault exprimait si bien, étaient sous sa plume la peinture vraie du cœur humain bien plus qu'une morale lubrique. Quinault, par sa diction, échauffait encore plus la musique que l'art de Lulli n'échauffait ses paroles. Il fallait ces deux hommes et des acteurs, pour faire de quelques scenes d'Atis, d'Armide et de Roland, un spectacle tel que ni l'antiquité ni aucun peuple contemporain n'en connut. Les airs détachés, les ariettes, ne répondirent pas à la perfection de ces grandes scenes. Ces airs, ces petites chansons, étaient dans le goût de nos noëls; ils ressemblaient aux barcaroles de Venise : c'était tout ce qu'on voulait alors. Plus cette musique était faible, plus on la retenait aisément : mais le récitatif est si beau, que Rameau n'a jamais pu l'égaler. Il me faut des chanteurs, disait-il, et à Lulli des acteurs. Rameau a enchanté les oreilles, Lulli enchantait l'ame; e'est

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