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mercenaires qui ont fait de la littérature la plus lâche des professions. Il n'est pas permis au moins de consigner dans un dictionnaire des accusations criminelles, et de s'ériger en délateur sans avoir des preuves juridiques. J'ai été à portée d'examiner ces accusations contre Joseph Saurin; j'ai parlé au seigneur de la terre de Bercher dans laquelle Saurin avait été pasteur; je me suis adressé à toute la famille du seigneur de cette terre: lui et tous ses parents m'ont dit unanimement qu'ils n'avaient jamais vu la lettre imputée à Saurin; ils m'ont tous marqué la plus vive indignation contre l'abus scandaleux dont on a chargé les suppléments aux dictionnaires de Bayle et de Moréri ; et cette juste indignation qu'ils m'ont témoignée doit passer dans le cœur de tous les honnêtes gens. J'ai en main les attestations de trois pasteurs, qui avouent « qu'ils << n'ont jamais vu l'original de cette prétendue lettre << de Saurin, ni connu personne qui l'eût vue, ni ouï << dire qu'elle eût été adressée à aucun pasteur dụ « pays de Vaud, et qu'ils ne peuvent qu'improuver l'usage qu'on a fait de cette piece. »

Joseph Saurin mourut en 1737 en philosophe intrépide qui connaissait le néant de toutes les choses de ce monde, et plein du plus profond mépris pour tous ces vains préjugés, pour toutes ces disputes, pour ces opinions erronées qui surchargent d'un nouveau poids les malheurs innombrables de la vie humaine.

Joseph Saurin a laissé un fils d'un vrai mérite, auteur d'une tragédie de Spartacus, dans laquelle il y a des traits comparables à ceux de la plus grande force de Corneille.

SAUVEUR (Joseph), né à la Fleche en 1653. Il apprit sans maitre les éléments de la géométrie. Il est un des premiers qui ait calculé les avantages et les

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désavantages des jeux du hasard. Il disait que tout ce que peut un homme en mathématiques, un autre le peut aussi cela s'entend pour ceux qui se bornent à apprendre, mais non pour les inventeurs. Il avait été muet jusqu'à l'âge de sept aus. Mort en 1716.

SCARRON (Paul), fils d'un conseiller de la grand'chambre, né en 1610. Ses comédies sont plus burlesques que comiques. Son Virgile travesti n'est pardonnable qu'à un bouffon. Son Roman comique est presque le seul de ses ouvrages que les gens de goût aiment encore; mais ils ne l'aiment que comme un ouvrage gai, amusant, et médiocre. C'est ce que Boileau avait prédit. Louis XIV épousa sa veuve. Mort en 1660.

SCUDERI (George de), né au Havre-de-Grace en 1601. Favorisé du cardinal de Richelieu, il balança quelque temps la réputation de Corneille. Son nom est plus connu que ses ouvrages. Mort en 1667.

SCUDERI (Magdeleine), sœur de George, née au Havre en 1607, plus connue aujourd'hui par quelques vers agréables qui restent d'elle, que par les énormes romans de la Clélie et du Cyrus. Louis XIV lui donna une pension, et l'accueillit avec distinction. Ce fut elle qui remporta le premier prix d'éloquence fondé par l'académie. Morte en 1701.

SÉGRAIS (Jean), né à Caen en 1625. Mademoiselle l'appelle « une maniere de bel esprit » ; mais c'était en effet un très bel esprit et un véritable homme de lettres. Il fut obligé de quitter le service de cette princesse pour s'être opposé à son mariage avec le comte de Lausun. Ses églogues et sa traduction de Virgile furent estimées; mais aujourd'hui on ne les lit plus. Il est remarquable qu'on a retenu des vers de la Pharsale de Brébeuf, et aucun de l'Énéide de Ségrais. S. DE LOUIS XV. 5.

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Cependant Boileau loue Ségrais et dénigre Brébeuf, Mort en 1701.

SENAULT (Jean-François), né en 1601, général de l'oratoire.Prédicateur qui fut à l'égard du P.Bourdaloue ce que Rotrou est pour Corneille, son prédécesseur et rarement son égal. Il est compté parmi les premiers restaurateurs de l'éloquence, plutôt que dans le petit nombre des hommes véritablement éloquents. Mort en 1672.

SENECAI, né en 1643, premier valet-de-chambre de Marie-Thérese, poëte d'une imagination singuliere. Son conte du Kaïmac, à quelques endroits près, est un ouvrage distingué: c'est un exemple qui apprend qu'on peut très bien conter d'une autre maniere que La Fontaine. On peut observer que cette piece, la meilleure qu'il ait faite, est la seule qui ne se trouve pas dans son recueil. Il y a aussi dans ses Travaux d'Apollon des beautés singulieres et neuves. Mort en 1737.

SÉVIGNE (Marie de Rabutin), femme du marquis de Sévigné, née en 1626. Ses lettres, remplies d'anecdotes, écrites avec liberté et d'un style qui peint et anime tout, sont la meilleure critique des lettres étudiées où l'on cherche l'esprit, et encore plus de ces lettres supposées, dans lesquelles on veut imiter le style épistolaire, en étalant de faux sentiments et de fausses aventures à des correspondants imaginaires. C'est dommage qu'elle manque de goût, qu'elle ne sache pas rendre justice à Racine, qu'elle égale l'oraison funebre de Turenne prononcée par Mascaron au grand chef-d'œuvre de Fléchier. Morte en 1696.

SILVA, né à Bordeaux, très célebre médecin à Paris, a fait un livre estimé sur la saignée : il était fort au-dessus de son livre. C'était un de ces méde

cins que Moliere n'eût pu ni osé rendre ridicules. Mort vers l'an 1746.

SIMON (Richard), né en 1638, de l'oratoire ; excellent critique. Son Histoire de l'origine et du progrès des revenus ecclésiastiques, son Histoire critique du Vieux Testament, etc., sont lues de tous les savants. Mort à Dieppe en 1712.

SIRMOND (Jacques), jésuite, né vers l'an 1559; l'un des plus savants et des plus aimables hommes de son temps. On sait à peine qu'il fut confesseur de Louis. XIII, parcequ'il fit à peine parler de lui dans ce poste délicat. Il fut préféré par le pape à tous les savants d'Italie pour faire la préface de la collection des conciles. Ses nombreux ouvrages furent très estimés, et sont très peu lus. Mort en 1651.

SIRMOND (Jean), neveu du précédent; historiographe de France, avec le brevet de conseiller d'état, qui était d'ordinaire attaché à la charge d'historiographe. L'un de ses principaux ouvrages est la vie du cardinal d'Amboise, qu'il ne composa que pour mettre ce ministre au-dessous du cardinal de Richelieu, son protecteur. Il fut un des premiers académiciens. Mort en 1649.

SORBIERE (Samuel), né en Danphiné en 1615; l'un de ceux qui ont porté le titre d'historiographe de France. Ami du pape Clément IX avant son exaltation; ne recevant que de faibles marques de la générosité de ce pontife, il lui écrivit : « Saint "pere, vous envoyez des manchettes à celui qui « n'a point de chemise ». Il effleura beaucoup de genres de sciences. Mort en 1670.

SUZE (la comtesse Henriette de Coligni de la), célebre dans son temps par son esprit et par ses élégies. C'est elle qui se fit catholique parceque son mari était huguenot, et qui s'en sépara, afin,

disait la reine Christine, de ne voir son mari dans ce monde-ci ni dans l'autre. Morte en 1673.

TALLEMANT (François), né à la Rochelle en 1620 second traducteur de Plutarque. Mort en 1693.

TALLEMANT (Paul), né à Paris en 1642. Quoiqu'il fût petit-fils du riche Monteron, et fils d'un maître des requêtes qui avait eu deux cent mille livres de rente de notre monnaie d'aujourd'hui, il se trouva presque sans fortune. Colbert lui fit du bien comme aux autres gens de lettres. Il a eu la principale part à l'histoire du roi par médailles. Mort en 1712.

TALON (Omer), avocat-général du parlement de Paris, a laissé des mémoires utiles, dignes d'un bon magistrat et d'un bon citoyen; mais son éloquence n'est pas encore celle du bon temps. Mort en 1652.

TARTERON, jésuite. Il a traduit les satires d'Horace, de Perse et de Juvénal, et a supprimé les obscénités grossieres, dont il est étrange que Juvénal et sur-tout Horace aient souillé leurs ouvrages. Il a ménagé en cela la jeunesse pour laquelle il croyait travailler: mais sa traduction n'est pas assez littérale pour elle; le sens est rendu, mais non pas la valeur des mots. Mort en 1720.

TERRASSON (l'abbé), né en 1669; philosophe pendant sa vie et à sa mort. Il y a de beaux morceaux dans Setos. Sa traduction de Diodore est utile son examen d'Homere passe pour être sans goût. Mort en 1750.

THIERS (Jean-Baptiste), né à Chartres en 1641. On a de lui beaucoup de dissertations. C'est lui qui écrivit contre l'inscription du couvent des cordeliers de Reims, A Dieu et à saint François, tous deux crucifiés. Mort en 1703.

THOMASSIN (Louis), de l'oratoire, né en Provence

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