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d'un honnête homme, ennemi de l'intrigue et de la flaterie, sévere jusqu'au pédantisme. Il avoue qu'il avertissait la reine que sa familiarité avec le cardinal Mazarin diminuait le respect des grands et des peuples pour elle. Il y a dans ses mémoires une anecdote sur l'enfance de Louis XIV, qui rendrait la mémoire du cardinal Mazarin exécrable s'il avait été coupable du crime honteux que la Porte semble lui imputer. Il paraît que la Porte fut trop scrupuleux et trop mauvais physicien ; il ne savait pas qu'il y a des tempéraments fort avancés. Il devait sur-tout se taire; il se perdit pour avoir parlé, et pour avoir attribué à la débauche un accident fort naturel.

Pux (Pierre du), fils de Claude du Puy, conseiller au parlement, très savant homme, naquit en 1583. La science de Pierre du Puy fut utile à l'état. Il travailla plus que personne à l'inventaire des chartres et aux recherches des droits du roi sur plusieurs états. Il débrouilla, autant qu'on le peut, la loi salique; et défendit les libertés de l'église gallicane en prouvant qu'elles ne sont qu'une partie des anciens droits des anciennes églises. Il résulte de son histoire des templiers qu'il y avait quelques coupables dans cet ordre; mais la condamnation de l'ordre entier et le supplice de tant de chevaliers furent une des plus horribles injustices qu'on ait jamais commises. Mort en 1651.

PUY-SECUR (le maréchal de ). Il nous a laissé Art de la guerre, comme Boileau a donné l'Art poétique.

QUESNEL (Pasquier), né en 1634, de l'oratoire. Il a été malheureux en ce qu'il s'est vu le sujet d'une grande division parmi ses compatriotes: d'ailleurs il a vécu pauvre et dans l'exil. Ses

mœurs étaient séveres, comme celles de tous ceux qui ne sont occupés que de disputes: trente pages changées et adoucies dans son livre auraient épargné des querelles à sa patrie; mais il eût été moins célébre. Mort en 1719.

QUIEN (Michel le), né en 1661, dominicain; homme très savant. Il a beaucoup travaillé sur les églises d'Orient et sur celle d'Angleterre : il a sur-tout écrit contre le Courayer sur la validité des évêques anglicans: mais les Anglais ne font pas plus de cas de ces disputes que les Turcs n'en font des dissertations sur l'église grecque. Mort en 1733.

QUINAULT (Philippe), né à Paris en 1635, auditeur des comptes, célebre par ses belles poésies lyriques, et par la douceur qu'il opposa aux satires très injustes de Boileau. Quinault était dans son genre très supérieur à Lulli; on le lira toujours; et Lulli, à son récitatif près, ne peut plus être chanté cependant on croyait du temps de Quinault qu'il devait à Lulli sa réputation. Le temps apprécie tout. Il eut part, comme les autres grands hommes, aux récompenses que donna Louis XIV, mais une part médiocre; les grandes graces furent pour Lulli. Mort en 1688.

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N. B. Il est rapporté dans les Anecdotes littéraires que Boileau étant à la salle de l'opéra de Versailles, dit à l'officier qui plaçait : « Monsieur, mettez-moi dans un endroit où je n'entende point les paroles: j'estime fort la musique de Lulli, mais je méprise souverainement les vers de Quinault. »

Il n'y a nulle apparence que Boileau ait dit cette grosièreté: s'il s'était borné à dire, Mettezmoi dans un endroit où je n'entende que la musique, cela n'eût été que plaisant, mais n'eût pas

été moins injuste. On a surpassé prodigieusement Lulli dans tout ce qui n'est pas récitatif; mais personne n'a jamais égalé Quinault.

QUINCY ( le marquis de ), lieutenant général d'artillerie, auteur de l'Histoire militaire de Louis XIV. Il entre dans de grands détails, utiles pour ceux qui veulent suivre dans leur lecture les opérations d'une campagne. Ces détails pourraient fournir des exemples, s'il y avait des cas pareils, mais il ne s'en trouve jamais ni dans les affaires, ni dans la guerre ; les ressemblances sont toujours imparfaites, les différences toujours grandes. La conduite de la guerre est comme les jeux d'adresse, qu'on n'apprend que par l'usage; et les tours d'action sont quelquefois des jeux de hasard.

QUINTINIE (Jean la), né près de Poitiers en 1626. Il a créé l'art de la culture des arbres, et celui de les transplanter: ses préceptes ont été suivis de toute l'Europe, et ses talents récompensés magnifiquement par Louis XIV. Mort vers 1700.

RACINE (Jean), né à la Ferté-Milon en 1639, élevé à Port-Royal. Il portait encore l'habit ecclésiastique quand il fit la tragédie de Théagène, qu'il présenta à Moliere, et celle des Freres ennemis, dont Moliere lui donna le sujet. Il est intitulé prieur de l'Épinai dans le privilege de l'Andromaque. Louis XIV fut sensible à son extrême mérite. Il lui donna une charge de gentilhomme ordinaire, le nomma quelquefois des voyages de Marly, le fit coucher dans sa chambre dans une de ses maladies, et le combla de gratifications: cependant Racine mourut de chagrin ou de crainte de lui avoir déplu. Il n'était pas aussi philosophe que grand poëte. On lui a rendu justice fort tard. Nous avons été touchés, dit SaintS. DE LOUIS XV. 5,

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« Évremond, de Mariamne, de Sophonisbe, d'Alcionée, d'Andromaque, et de Britannicus ». C'est ainsi qu'on mettait non seulement la mauvaise Sophonisbe de Corneille, mais encore les impertinentes pieces d'Alcionée et de Mariamne à côté de ces chefs-d'œuvre immortels. L'or est confondu avec la boue pendant la vie des artistes, et la mort les sépare.

Il est à remarquer que Racine ayant consulté Corneille sur sa tragédie d'Alexandre, Corneille Ini conseilla de ne plus faire de tragédies, et lui dit qu'il n'avait nul talent pour ce genre d'écrire. N'oublions pas qu'il écrivit contre les jansenistes et qu'il se fit ensuite janséniste. Mort en 1699. RACINE (Louis), fils de l'immortel Jean Racine, a marché sur les traces de son pere, mais dans un sentier plus étroit et moins fait pour les muses. Il entendait la mécanique des vers aussi bien que son pere, mais il n'en avait ni l'ame ni les graces. Il manquait d'ailleurs d'invention et d'imagination. Janséniste comme son pere, il ne fit des vers que pour le jansénisme. On en trouve de très beaux dans le poëme de la Grace, et dans celui de la Religion; ouvrage trop didactique et trop monotone, copié des pensées de Pascal, mais rempli de beaux détails, tels que ces vers du chant second, dans lequel il traduit Lucrece pour le réfuter :

Cet esprit, ô mortel! qui vous rend si jaloux,

N'est qu'un feu qui s'allume et s'éteint avec vous.
Quand par d'affreux sillons l'implacable vieillesse
A sur un front hideux imprimé la tristesse ;

Que, dans un corps courbé sous un amas de jours,
Le sang, comme à regret, semble achever son cours;
Lorsqu'en des yeux couverts d'un lugubre nuage
Il n'entre des objets qu'une infidele image;

Qu'en débris chaque jour le corps tombe et périt;
En ruines aussi je vois tomber l'esprit.

L'ame mourante alors, flambeau sans nourriture,
Jette par intervalle une lueur obscure.

Triste destin de l'homme! il arrive au tombeau,
Plus faible, plus enfant qu'il ne l'est au berceau.
La mort du coup fatal sappe enfin l'édifice :
Dans un dernier soupir achevant son supplice,
Lorsque, vide de sang, le cœur reste glacé,
Son ame s'évapore, et tout l'homme est passé.
Il s'éleve quelquefois dans ce poëme contre le Tout
est bien des lords Shaftesbury et Bolingbroké,
si bien mis en vers par Pope.

Sans doute qu'à ces mots, des bords de la Tamise,
Quelque abstrait raisonneur, qui ne se plaint de rier,
Dans son flegme anglican répondra: Tout est bien.

Racine, en qualité de janséniste, croyait que presque tout est mal depuis long-temps; il accuse Pope d'irréligion. Pope était fils d'un papiste ; c'est ainsi qu'on appelle en Angleterre les catholiques romains. Pope, élevé dans cette religion, qu'il tourne quelquefois en ridicule dans ses épîtres, ne voulut cependant pas la quitter, quoiqu'il fût philosophe, ou plutôt parcequ'il était assez philosophe pour croire que ce n'était pas la peine de changer. Il fut très piqué des accusations de Louis Racine. Ramsay entreprit de les concilier. C'était un Écossais du clan des Ramsay, et qui en avait pris le nom, suivant l'usage de ce pays. Il était venu en France après avoir essayé du presbytérianisme, de l'église anglicane et du quakrisme, et s'était attaché à l'illustre Fénélon, dont il a depuis écrit la vie. C'est lui qui est l'auteur des Voyages de Cyrus, très faible imitation du Télémaque. Il imagina d'écrire à Louis

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