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il aurait eu de la réputation parmi les gens de lettres. Ce mauvais poëme lui valut beaucoup plus que l'Iliade à Homere. Chapelain fut pourtant utile par sa littérature. Ce fut lui qui corrigea les premiers vers de Racine. Il commença par être l'oracle des auteurs, et finit par en être l'opprobre. Mort en 1674.

CHAPELLE (Jean de la), receveur général des finances, auteur de quelques tragédies qui eurent du succès en leur temps. Il était un de ceux qui tâchaient d'imiter Kacine; ear Racine forma, sans le vouloir, une école comme les grands peintres. Ce fut un Raphaël qui ne fit point de Jules Romain: mais au moins ses premiers disciples écrivirent avec quelque pureté de langage ; et dans la décadence qui a suivi, on a vu de nos jours des tragédies entieres où il n'y a pas douze vers de suite dans lesquels il n'y ait des fautes grossieres. Voilà d'où l'on est tombé, et à quels excès on est parvenu après avoir eu de si grands modeles. Mort en 1723.

CHAPELLE (Claude-Emmanuel Luillier), fils naturel de François Luillier, maître des comptes. Il n'est pas vrai qu'il fut le premier qui se servit des rimes redoublées; d'Assouci s'en servait avant lui, et même avec quelque succès :

Pourquoi donc, sexe au teint de rose,
Quand la charité vous impose
La loi d'aimer votre prochain,
Pouvez-vous me haïr sans cause,
Moi qui ne vous fis jamais rien?
Ah! pour mon honneur je vois bien

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Qu'il faut vous faire quelque chose, etc.

On trouve beaucoup de rimes redoublées dans Voiture. Chapelle réussit mieux que les autres dans ce genre qui a de l'harmonie et de la grace, mais

dans lequel
il
a préféré quelquefois une abondance
stérile de rime à la pensée et au tour. Sa vie volup-
tueuse et son peu de prétention contribuerent en-
core à la célébrité de ses petits ouvrages. On sait
qu'il y a dans son Voyage de Montpellier beau-
coup de traits de Bachaumont, fils du président le
Coigneux, l'un des plus aimables hommes de son
temps. Chapelle était d'ailleurs un des meilleurs
éleves de Gassendi. Au reste il faut bien distinguer
les éloges que tant de gens de lettres ont donnés à
Chapelle et à des esprits de cette trempe, d'avec les
éloges dus aux grands maîtres. Le caractere de Cha-
pelle, de Bachaumont, du Broussin, et de toute
cette société du marais, était la facilité, la gaieté,
la liberté. On peut juger de Chapelle par cet im-
promptu que je n'ai point vu encore imprimé : il le fit
à table après que Boileau eut récité une épigramme :
Qu'avec plaisir de ton haut style

Je te vois descendre au quatrain;
Et que je t'épargnai de bile

Et d'injures au genre humain,
Quand, renversant ta cruche à l'huile,
Je te mis le verre à la main!

Mort en 1686.

CHARAS, de l'académie des sciences, le premier qui ait bien écrit sur la pharmacie ; tant il est vrai que sous Louis XIV tous les arts élargirent leur sphere! Ce pharmacien, voyageant à Madrid, fut mis dans les cachots de l'inquisition, parcequ'il était calviniste. Une prompte abjuration, et les sollicitations de l'ambassadeur de France, lui sauverent la vie et la liberté. Il s'occupa long-temps d'expériences sur les viperes, et des moyens d'empêcher les effets souvent mortels de leur morsure. Mais il se trompa

en soutenant contre Rédi que le venin des viperes n'était pas contenu dans le suc jaune qui sort de deux vésicules placées derriere les crochets de leurs mâchoires. Dans le cours de ses expériences il fut mordu plusieurs fois sans qu'il en résultât d'accidents très graves. Mort en 1698.

CHARDIN (Jean), né à Paris en 1613. Nul voyageur n'a laissé des mémoires plus curieux. Mort à Londres en 1713.

CHARLEVAL (Jean Faucon DE RIS), l'un de ceux qui acquirent de la célébrité par la délicatesse de leur esprit, sans se livrer trop au public. La fameuse conversation du maréchal d'Hocquincourt et du P. Canaye, imprimée dans les œuvres de SaintEvremond, est de Charleval, jusqu'à la petite dissertation sur le jansénisme et sur le molinisme, que Saint-Évremoud y a ajoutée. Le style de cette fin est très différent de celui du commencement. Feu M. de Caumartin, le conseiller d'état, avait l'écrit de Charleval de la main de l'auteur. On trouve. dans le Moréri que le président de Ris, neveu de Charleval, ne voulut pas faire imprimer les ouvrages de son oncle, de peur que « le nom d'auteur peut-être ne fût une tache dans sa famille ». Il faut être d'un état et d'un esprit bien abject pour avancer une telle idée dans le siecle où nous sommes; et c'eût été dans un homme de robe un orgueil digne des temps militaires et barbares, où l'on abandonnait l'étude purement à la robe, par mépris pour la robe et pour l'étude. Mort en 1693.

CHARPENTIER (François), né à Paris en 1620, académicien utile. On a de lui une traduction de la Cyropédie. Il soutint vivement l'opinion que les inscriptions des monuments publics de France doivent être en français. En effet c'est dégrader une

langue qu'on parle dans toute l'Europe que de ne pas s'en servir; c'est aller contre son but que de parler à tout le public dans une langue que les trois quarts au moins de ce public n'entendent pas. Il y a une espece de barbarie à latiniser des noms français que la postérité méconnaîtrait; et les noms de Rocroi et de Fontenoi font un plus grand effet que les noms de Rocrosium et de Fonteniacum. Mort en 1702.

LA CHASTRE (Edme, marquis de), a laissé des mémoires. Mort en 1645.

CHAULIEU (Guillaume), né en Normandie en 1639, connu par ses poésies négligées, et par les beautés hardies et voluptueuses qui s'y trouvent. La plupart respirent la liberté, le plaisir, et une philosophie au-dessus des préjugés; tel était son caractere. Il vécut dans les délices, et mourut avec intrépidité en 1720.

Les vers qu'on cite le plus de lui sont la piece intitulée la Goutte, qui commence ainsi :

Le destructeur impitoyable

Et des marbres et de l'airain.

mais sur-tout l'épître sur la mort du marquis de la Fare :

Plus j'approche du terme, et moins je le redoute;
Sur des principes sûrs mon esprit affermi,
Content, persuadé, ne connaît plus le doute :
Des suites de ma fin je n'ai jamais frémi.
Exempt des préjugés, j'affronte l'imposture
Des vaines superstitions,

Et me ris des préventions

De ces faibles esprits dont la triste censure
Fait un crime à la créature

De l'usage des biens que lui fit son auteur.

Une autre épître au même fit encore plus de bruit; elle commence ainsi :

J'ai vu de près le Stix, j'ai vu les Euménides; Déja venaient frapper mes oreilles timides Les affreux cris du chien de l'empire des morts : Et les noires vapeurs, et les brûlants transports, Allaient de ma raison offusquer la lumiere. C'est lors que j'ai senti mon ame tout entiere, Se ramenant en soi, faire un dernier effort Pour braver les horreurs que l'on joint à la mort. Ma raison m'a montré, tant qu'elle a pu paraître, Que rien n'est en effet de ce qui ne peut être; Que ces fantômes vains sont enfants de la peur, Qu'une faible nourrice imprime en notre cœur, Lorsque des loups-garoux, qu'elle-même elle pense, De démons, et d'enfer, elle endort notre enfance. Ces pieces ne sont pas châtiées ; ce sont des statues de Michel-Ange ébauchées. Le stoïcisme de ces sentiments ne lui attira point dé persécution; car, quoiqu'abbé il était ignoré des théologiens, et ne vivait qu'avec ses amis. Il n'aurait tenu qu'à lui de mettre la derniere main à ses ouvrages, mais il ne savait pas corriger. On a imprimé de lui trop de bagatelles insipides de société: c'est le mauvais goût et l'avarice des éditeurs qui en est cause. Les préfaces qui sont à la tête du recueil sont de ces gens obscurs qui croient être de bonne compagnie en imprimant toutes les fadaises d'un homme de bonne compagnie.

CHEMINAIS, jésuite. On l'appelait le Racine des prédicateurs, et Bourdaloue le Corneille. Mort en 1689.

CHERON (Elisabeth), née à Paris en 1648, céle bre par la musique, la peinture, et les vers, et plus connue sous son nom que sous celui de son mari, le sieur le Hay. Morte en 1711.

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