LES AVANTURES DE TELEMAQUE, FILS D'ULYSSE. PAR FRANCOIS DE SALIGNAC, DE LA Précepteur des ENFANS de FRANCE, & depuis Avec un petit DICTIONAIRE NOUVELLE EDITION. Enrichie de Figures en taille-douce. A LONDRES, APPROBATION. AI lu par ordre de Monfeigneur le Chan-' celier cet ouvrage qui a pour titre, Les' Avantures de Télémaque, avec une Préface· qui en découvre toutes les beautez; & j'ai cru· qu'il ne méritoit pas feulement d'être imprimé, mais encore d'être traduit dans toutes les lan gues que parlent, ou qu'entendent les peuples qui afpirent à être heureux. Ce poëme épique,' quoiqu'en profe, met notre nation en état de n'avoir rien à envier de ce côté-là aux Grecs, & aux Romains. La fable qu'on y expofe ne Je termine point à amufer notre curiofité, & à flatter notre orgueil, Les récits, les defcriptions, les liaifons, & les graces du difcours, éblouiffent l'imagination fans l'égarer: les réflexions & les converfations les plus longues paroiffent toujours trop courtes à l'esprit, qu'elles n'éclairent pas moins qu'elles l'enchantent. Entre tant de caractéres d'hommes fi différens que l'on y trouve, il n'y en a aucun qui ne grave dans le cœur des lecteurs, l'horreur du vice, ou l'amour de la vertu. Les myftéres de la politique la plus faine & la plus fure y font dévoilez. Les paffions n'y préJentent qu'un joug auffi bonteux que funefte. Les devoirs n'y montrent que des attraits, qui les rendent auffi aimables que faciles. Avec Télémaque on apprend à s'attacher inviolable A 2 ment ment à la religion, dans la mauvaije comme dans la bonne fortune; à aimer jan pére, & fa patrie; à étre Rai, citoyen, ami, efclave mime fi le fort le veut. Avec Mentor on decient bientit jufte, bumain, patient, fincére, diferet, & modefte. Il ne parle paint qu'il ne plafe, qu'il n'intérese, qu'il ne remue, qu'il ne perfuade. On ne peut l'écouter qu'avec admiration; on ne Padmire point, que l'on ne fente qu'on l'aime encore davantage. Trop beureufe la nation pour qui cet ouvrage pourra farmer quelque jour un Télémaque, & un Menter! A Paris, de prémier Juin 1716. DE SACY. DIS 1 *DISCOURS DE LA POESIE EPIQUE, E T DE L'EXCELLENCE DE DU POEME TELEMAQUE. I l'on pouvoit goûter la vérité toute Origine & S'nue, elle n'auroit pas befoin pour fe fin de la po faire aimer, des ornemens que lui prête ëfie. l'imagination: mais fa lumiére pure & délicate ne flatte pas affez ce qu'il y a de fenfible en l'homme; elle demande une attention qui gêne trop fon inconftance naturelle. Pour l'inftruire, il faut lui donner non feulement des idées pures qui l'éclairent, mais encore des images fenfibles qui le frappent & qui l'arrêtent dans une vûe fixe de la vérité. Voilà la fource de l'éloquence, de la poëfie, & de toutes les fciences qui font du reffort de l'imagination. C'eft la foibleffe de l'homme, qui rend ces fciences néceffaires. La beauté fimple & immuable de la vertu ne le touche pas toûjours; il ne fuffit point de lui montrer la vérité, il faut la peindre aimable (a). *Cc difcours a été revu, changé & enrichi en plufieurs endroits, fur des corrections envoyées par Mr. Ramfay, qui en eft l'auteur. (a) Omne tulit pun&tam, qui mifcuit atile dulci ; Leftorem delectando, pariterque monends. A 3 HOR, ART. Port. Nous |