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UNIQUE POLITIQUE

14 août 1870.

La guerre contre la Prusse a eu de mauvais débuts. En écrivant ces lignes, nous sommes sous l'impression cruelle que nous causent les malheurs arrivés à notre pays. S'il y avait, en ce moment, pour des cœurs français, un soulagement possible à la douleur de voir le territoire violé, l'étranger vainqueur, nous le pourrions trouver dans la conscience de n'avoir pas encouragé la politique qui amène ces triomphes. Mais nous ne voulons pas de cette amère consolation. Les malheurs qui nous frappent ne sont point d'ailleurs irréparables; le premier sentiment comme le premier devoir est de travailler à les réparer. Il serait oiseux même de récriminer contre les hommes qui ont conduit les préliminaires de l'entreprise militaire dirigée contre une nation voisine; pour nous surtout, cet examen du passé, cette critique rétrospective seraient superflus. Comme tout ce que nous avions à dire, nous l'avons dit en temps opportun, nous sommes dispensés aujourd'hui de nous associer aux paroles dures de ceux qui ne faisaient qu'approuver ce que nous blâmions. Nous connaissons assez bien l'esprit des nations, et particulièrement celui de la nation française, pour n'être point étonnés des disgrâces qui suivent les premières déceptions de cette guerre; elles atteindraient même plus haut qu'elles n'ont porté jusqu'à présent, elles s'étendraient davantage qu'il ne faudrait y voir que l'effet d'une réaction naturelle et d'une injustice dont aucun peuple, mis en présence des fautes qu'il a lui-même encouragées, ne s'est jamais préservé. La légende du bouc émissaire ne s'applique pas seulement au peuple juif; sous des allégories différentes, et

lin organisait dans l'ombre la candidature provocatrice d'un prince prus

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Quelles que soient les calomnies inventées par le chancelier fédéral, nous sommes sans crainte: il a perdu le droit d'être cru. La conscience de l'Europe et l'histoire diront que la Prusse a cherché la guerre actuelle en infligeant à la France, préoccupée du développement de ses institutions politiques, un outrage qu'aucune nation fière et courageuse n'aurait pu accepter sans mériter le mépris des peuples.

Agréez, etc.

GRAMONT.

Cependant tous ces documents, toutes ces dénégations n'ont pas convaincu les hommes politiques de l'Angleterre. A la Chambre des communes, M. Disraéli demande au cabinet quelles mesures il compte prendre pour mettre la Belgique à l'abri des convoitises du voisin. On discute d'abord les moyens armés. M. Gladstone aff..me que les forces militaires de l'Angleterre sont suffisantes pour parer aux événements; que, d'ailleurs, les armements vont se faire, et, pour cela, il sollicite un crédit de 2 millions de livres, qui est voté. Mais il assure avoir pris d'autres précautions encore pour faire maintenir les stipulations du traité de 1839 par celles mêmes des deux puissances qui sont en ce moment engagées dans la guerre. En effet, il a proposé à ces deux puissances de signer avec le gouvernement britannique un engagement spécial ayant pour effet non de renouveler les garanties de 1839, mais de les corroborer par une convention qui mettrait les forces de l'Angleterre dans la balance du côté opposé à celle des deux puissances qui violerait la neutralité belge.

Ce projet de traité, soumis à la Prusse, a été aussitôt consenti par elle et signé. Le gouvernement français a eu quelques hésitations: tout en adhérant, en principe, il a fait quelques réserves de détail. Aujourd'hui, la convention est également signée par la France. On en connaît déjà le texte. Cette solution montre clairement que, depuis la publication du fameux « projet de traité,» malgré la lettre de M. Benedetti, malgré la déclaration de M. le duc de Gramont, malgré les démentis du Journal officiel et les accusations portées contre les « mensonges » de M. de Bismark par la presse officieuse, on ne croit plus à Londres à notre parole, à notre désintéressement, à notre amour platonique pour la Belgique. On veut des garanties, et l'Angleterre n'en a pas trouvé de meilleure que de nous menacer de son épée. Tel est un des résultats les moins funestes de cette guerre si légèrement entreprise.

ALPHONSE DE CALONNE

CHRONIQUE POLITIQUE

14 août 1870.

La guerre contre la Prusse a eu de mauvais débuts. En écrivant ces lignes, nous sommes sous l'impression cruelle que nous causent les malheurs arrivés à notre pays. S'il y avait, en ce moment, pour des cœurs français, un soulagement possible à la douleur de voir le territoire violé, l'étranger vainqueur, nous le pourrions trouver dans la conscience de n'avoir pas encouragé la politique qui amène ces triomphes. Mais nous ne voulons pas de cette amère consolation. Les malheurs qui nous frappent ne sont point d'ailleurs irréparables; le premier sentiment comme le premier devoir est de travailler à les réparer. Il serait oiseux même de récriminer contre les hommes qui ont conduit les préliminaires de l'entreprise militaire dirigée contre une nation voisine; pour nous surtout, cet examen du passé, cette critique rétrospective seraient superflus. Comme tout ce que nous avions à dire, nous l'avons dit en temps opportun, nous sommes dispensés aujourd'hui de nous associer aux paroles dures de ceux qui ne faisaient qu'approuver ce que nous blâmions. Nous connaissons assez bien l'esprit des nations, et particulièrement celui de la nation française, pour n'être point étonnés des disgrâces qui suivent les premières déceptions de cette guerre; elles atteindraient même plus haut qu'elles n'ont porté jusqu'à présent, elles s'étendraient davantage qu'il ne faudrait y voir que l'effet d'une réaction naturelle et d'une injustice dont aucun peuple, mis en présence des fautes qu'il a lui-même encouragées, ne s'est jamais préservé. La légende du bouc émissaire ne s'applique pas seulement au peuple juif; sous des allégories différentes, et

quelquefois sans allégorie, elle est de tradition chez tous les peuples. Ce n'est pas que, dans les événements qui se produisent, nous soyons d'avis qu'il n'y ait pas pour les maîtres du gouvernement de lourdes responsabilités; on n'en connaît pas bien encore la mesure. L'histoire se chargera de les faire ressortir; c'est affaire à elle de donner à chacun sa part. Nous verrions, quant à nous, à devancer aujourd'hui ses jugements, des inconvénients qui pourraient augmenter nos ruines. Ce qui importe, quand on se met en présence de ces ruines, c'est de les réparer lorsqu'il en est temps encore. Le plus pressé est là, et il y faut courir par les sentiers les plus directs, avec la promptitude et le courage dont une nation comme la nôtre est encore susceptible.

Il faut d'abord se bien pénétrer de la situation, se la remettre sous les yeux, la juger dans ses détails et dans son ensemble. Remontons d'un mois le cours des événements. C'est dans la séance du Corps législatif du 15 juillet que la guerre fût annoncée au pays comme résolue; on se rappelle en quels termes les ministres s'exprimèrent pour démontrer comment l'affaire du Prince Hohenzollern, la manière dont il avait accepté, puis refusé le trône d'Espagne, les allées et venues de notre ambassadeur et finalement ses rapports avec le roi de Prusse, à Ems, constituaient pour la France une somme de dommages et d'injures qui demandaient de sanglantes réparations. Aussitôt, on se mit sous les armes, et, de part et d'autre, l'armée s'organis". La nôtre alla ranger ses neuf corps le long de la frontière de l'Est et du Nord-Est. On lui donna le titre d'armée du Rhin, beaucoup moins en vue du but où elle tendait que des positions. qu'elle occupait. Les huit corps, tous commandés par des chefs dont on ne pouvait contester ni la capacité ni la bravoure, obéissaient à l'impulsion unique qu'ils recevaient du quartier impérial dont le siége était à Metz, On avait entouré les mouvements de l'armée du plus profond mystère; les journaux avaient ordre de garder le silence sur ce qu'ils savaient et sur ce qu'ils ne savaient pas. Le major général éloignait la publicité; on ignorait encore toutes les raisons qu'il avait de la redouter. L'Empereur avait dit, en ouvrant la campagne, qu'elle serait longue, pénible; c'est tout ce que le pays et l'armée connaissaient de ses projets ; l'un et l'autre étaient résignés à subir les conditions d'une entreprise dont le but final devait être la victoire. On se préparait joyeusement à des délais et à des sacrifices que, dans leur illusion, quelques personnes pensaient pouvoir éviter. Cependant, nous n'en savions pas plus long sur l'ennemi que sur notre pauvre armée ; c'est à peine si l'on s'inquiétait de ses forces et de ses moyens d'attaque. Nous allions à cette guerre avec cette confiance allègre que nous apportons dans toutes nos entreprises, pas soucieux des obstacles et du danger: convaincus qu'il ne nous en coûterait pas plus de vaincre les Prussiens sur le Rhin qu'il ne nous en avait coûté de vaincre les Russes en Crimée et les Autrichiens en Italie. Le hasard lui-même se rendit complice de ces illusions; le premier fait d'armes de la campagne tourna à notre avantage. C'était à Sarrebruck; en quelques heures, l'artillerie française délogea les Prussiens de cette position et l'on fit des mitrailleuses une expérience qui parut concluante.

Nous ne fimes que des pertes insignifiantes; l'Empereur et le prince Impérial, après leur déjeuner, étaient venus de Metz assister à cette petite escarmouche qui fut l'objet d'un bulletin officiel et que tout le monde à Paris accepta comme un heureux présage. Ce n'était, hélas! qu'un présage trompeur. Pendant que nous avions tous les yeux fixés sur le point de la frontière Nord-Est, où les premiers coups de canon avaient retenti, l'ennemi fit tout d'un coup une pointe sur un autre point de notre frontière; avec le corps de troupes placé sous les ordres du général Steinmetz formant le centre de l'armée Prussienne, il arrive inopinément à Wissembourg, où il rencontre une résistance désespérée, mais insuffisante. C'est là que huit mille Français ont soutenu le choc de plus de cinquante mille Prussiens, et qu'ils les ont tenus en échec pendant plusieurs heures. Ce fut, au dire de ceux des nôtres qui ont survécu à ce combat et qui nous en ont fait le récit, une de ces luttes héroïques, telles que Thucydide aimait à les transmettre à la postérité. Les cavaliers se jetaient tête baissée dans les carrés ennemis ; les fantassins avec leurs chassepots et les artilleurs avec leurs canons jonchaient la terre de cadavres ; les tirailleurs allaient dans la fumée et traversaient la mitraille comme le brouillard, massacrant les canoniers sur leurs pièces et se frayant des issues à travers des remparts de baïonnettes; ils semblaient plus soucieux de mourir que de vaincre. On raconte que lorsqu'il vit sa vaillante troupe décimée et hors d'état de résister au flot toujours grossissant des Prussiens, le général Douay, dont le cheval avait eu déjà la tête brisée par un éclat d'obus, alla droit à la balle qui devait lui donner la mort. Il tomba sur ce glorieux champ de bataille.

C'est le 5 août que les Prussiens avaient fait avancer leurs avant-gardes jusqu'à Wissembourg. Le territoire mal gardé de ce côté était violé. Le lendemain, il le fut bien davantage; par l'issue qu'il venait de se faire, l'ennemi déborda en masses compactes; il y eut une bataille qui dura toute la journée et à laquelle prirent part, d'un côté le corps d'armée du général Frossard et de l'autre côté le corps d'armée du maréchal MacMahon. Le premier fut battu à Forback et le second à Worth. Là encore nous avons combattu dans les conditions d'inégalité les plus notoires; tout était contre nous, tout, jusqu'à l'insuffisance des munitions et jusqu'au télégraphe qui, grâce à une dépêche mal transmise empêcha le général de Failly de venir à notre secours. Jusqu'à midi cependant, nos troupes du corps Mac-Mahon avaient tenu bon; mais vers le déclin du jour l'ennemi renouvelant toujours ses forces, malgré nos vigoureux retours offensifs, il fallut céder au torrent de Prussiens que le prince Frédéric-Guillaume jetait sur nous. Notre armée opéra une retraite convenable sur Saverne. Pendant ce temps le corps du général Frossard battu par le général de Steinmetz était encore plus malheureux; non-seulement il laissait reprendre Sarrebruck, mais l'ennemi pouvait, le lendemain, s'installer à Forbach et pousser assez avant pour couper en deux notre armée. Nos pertes en hommes, en canons, en mitrailleuses sont considérables; on ne connait pas encore le nombre des morts de cette journée; mais la France sait que l'ennemi nous a pris deux aigles à Worth. Elle

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