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lage de détails lugubres et de spectacles grossièrement épouvantables, qui passent encore, auprès des clergés catholiques du Midi, pour des moyens de propagande chrétienne. Mais quels que soient, d'ailleurs, les sentiments manifestés par lui dans quelques passages à l'égard de certains simulacres du culte, il n'en est pas moins bien difficile de nier que l'esprit qui souffle à travers la plupart de ses œuvres, et notamment à travers celle-ci, est le même que celui qui anime les plus belles pages de l'Evangile. J'ai montré plus haut quelle part les femmes qui l'avaient entouré depuis son enfance avaient prise au développement de son génie : or, toutes ces femmes n'avaient-elles pas puisé elles-mêmes dans l'Evangile toute la substance de leur être? Certes, je suis tout disposé à croire qu'il y a eu, dans l'antiquité, des maris affectueux et de chastes épouses: où, cependant, y trouverais-je célébrée cette douce et irrésistible supériorité que sa faiblesse même donne à la femme, pour venir à bout des tâches les plus délicates et les plus ingrates de la vie morale? Sans doute, le paganisme eût pu faire mieux s'il eût duré, mais le fait est qu'il n'a pas duré, et que le christianisme a pris sa place; il était même grand temps qu'il la prît. Rendons à chacun ce qui lui appartient, ce quelqu'un-là, ou plutôt ce quelque chose-là, serait-il le christianisme. Ce qu'il y a d'incontestable pour l'historien impartial, c'est qu'auparavant il n'y avait, soit en théorie, soit en pratique, pas plus d'égalité entre les sexes qu'entre les hommes. Voilà pourquoi Mme de Staël et M. Ampère n'ont fait que rendre hommage à une vérité évidente, en signalant le côté non pas seulement moderne, mais tout chrétien, de ce drame. Voilà aussi comment Goethe a pu laisser à l'Allemagne féminine du dix-neuvième siècle un type éternel et suprême de perfection idéale qui pourrait même, un jour à venir, être utile ailleurs. Si jamais, en effet, quelque peuple venait à perdre son vieux respect chevaleresque pour l'éternel féminin, à force de le voir autour de lui perpétuellement compromis par les ridicules d'une frivolité malsaine, il pourrait retrouver encore dans la pièce allemande l'étoile mystérieuse peu peu disparue, et y rapprendre le respect du sexe clément et bon par excellence.

A. LEGRELLE.

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Quelle que soit l'issue de la guerre qui commence entre la France et l'Allemagne, nous ne voudrions pas avoir une part de responsabilité, si petite fût-elle, dans les événements qui l'ont amenée. Les pages de cette Revue portent témoignage des efforts que nous avons faits pour effacer les malentendus entre les deux grandes nations, pour dissiper les inquiétudes qui avaient un moment frappé les esprits en France à la suite des transformations opérées en Allemagne par la guerre de 1866, et finalement pour éteindre ces passions jalouses qu'un essaim d'écrivains étrangers avaient allumées chez nous et ne cessaient d'y entretenir en nous représentant comme les véritables vaincus de Sadowa.

Nous avons échoué dans cette tâche que la susceptibilité du caractère français rendait difficile. Nous ne saurions nous consoler d'y avoir apporté trop peu d'énergie peut-être, trop peu de force persuasive certainement, quand nous voyons les deux peuples épuiser l'un contre l'autre, pour s'entre-détruire, toutes les ressources que le courage, l'intelligence et la science leur mettaient dans les mains pour accomplir l'œuvre d'humanité et de civilisation. La cause de la paix était pourtant la bonne cause, malgré que nous l'ayons perdue, et elle s'impose avec tant d'autorité que chacun des antagonistes, afin de se faire pardonner de la troubler, la proclame comme but de ses efforts. Nous ne cesserons donc de la défendre.

Notre sollicitude doit s'appliquer en ce moment à rendre promptement son retour possible. Au milieu des catastrophes qui se préparent, il semble que la dignité autant que les intérêts de la patrie commandent à tout honnête homme d'atténuer dans la mesure de ses forces les conséquences de la guerre. S'il s'inspire d'un sentiment élevé, il ne fera pas de blessures inutiles et s'étudiera au contraire à guérir celles qui ne peuvent être évitées. La guerre est assez funeste par elle-même, elle entraîne assez de malheurs après elle sans que l'on y ajoute l'amertume de l'injure et de la calomnie. Loin d'envenimer un débat qui n'a pu trouver la solution que nous aurions souhaitée, nous voudrions laisser reposer en ce moment toute discussion sur la responsabilité qui incombe à chacun des deux gouvernements dans la lutte actuelle. L'heure n'est pas venue de dégager cette responsabilité avec une certitude absolue, évidente, des éléments, d'ailleurs incomplets, qui sont en notre possession. Tout ce que nous pouvons faire c'est de les réunir dans dans leur ordre logique et de les présenter simplement au lecteur, en attendant que l'histoire vienne porter son jugement sur les causes qui ont amené une si violente perturbation dans la marche de la civilisation au XIXe siècle.

Le premier document que nous rencontrons est la déclaration faite à la séance du Corps législatif, le 6 juillet, par M. le duc de Gramont, ministre des affaires étrangères, en réponse à la demande d'interpellation déposée par un membre de la majorité.

Je viens répondre à l'interpellation qui a été déposée hier par l'honorable M. Cochery.

Il est vrai que le maréchal Prim a offert au prince Léopold de Hohenzollern la couronne d'Espagne et que ce dernier l'a acceptée. Mais le peuple espaguol ne s'est point encore prononcé, et nous ne connaissons point encore les détails vrais d'une négociation qui nous a été cachée.

Aussi une discussion ne saurait-elle aboutir maintenant à aucun résultat pratique; nous vous prions, messieurs, de l'ajourner.

Nous n'avons cessé de témoigner nos sympathies à la nation espagnole, et d'éviter tout ce qui aurait pu avoir les apparences d'une immixtion quelconque dans les affaires intérieures d'une noble et grande nation en exercice de sa souveraineté; nous ne sommes pas sortis, à l'égard des

divers prétendants au trône, de la plus stricte neutralité, et nous n'avons jamais témoigné pour aucun d'eux ni préférence ni éloignement.

Nous persisterons dans cette conduite; mais nous ne croyons pas que le respect des droits d'un peuple voisin nous oblige à souffrir qu'une puissance étrangère, en plaçant un de ses princes sur le trône de CharlesQuint, puisse déranger à notre détriment l'équilibre actuel des forces en en Europe et mettre en péril les intérêts et l'honneur de la France.

Cette éventualité, nous en avons le ferme espoir, ne se réalisera

pas.

Pour l'empêcher, nous comptons à la fois sur la sagesse du peuple allemand et sur l'amitié du peuple espagnol.

S'il en était autrement, forts de votre appui, Messieurs, et de celui de la nation, nous saurions remplir notre devoir sans hésitation et sans faiblesse.

Le 7, le gouvernement espagnol envoie à son représentant à Paris une dépêche rédigée en vue d'expliquer les motifs qui l'ont amené à présenter la candidature du prince Léopold de Hohenzollern aux Cortès constituantes.

Monsieur l'ambassadeur,

Votre Excellence connaît les importantes déclarations qui ont été faites au sein des Cortès constituantes, le 11 juin dernier, par Son Exc. M. le président du conseil des ministres. En exposant aux représentants de la nation espagnole les démarches jusqu'alors infructueuses qui avaient été faites dans le but de trouver un candidat au trône qu'ils ont relevé en vertu de leur incontestable souveraineté, le président du conseil leur manifesta que le gouvernement provisoire d'abord, puis le pouvoir exécutif, et plus tard le gouvernement de S. A. le Régent l'avaient honoré d'une confiance illimitée, l'autorisant à faire toutes les démarches et à entreprendre toutes les négociations nécessaires dans le but d'obtenir dans une question d'une aussi haute importance un résultat satisfaisant.

Muni de ces pleins pouvoirs, le maréchal Prim avait, dans l'accomplissement de sa difficile mission, outre sa haute représentation politique personnelle, l'autorité morale de tout le gouvernement, la force que donne l'unité d'opinions et d'action et la garantie de la plus absolue réserve. On était donc autorisé à espérer que, malgré le malheureux résultat de ses premières démarches, il pourrait vaincre toute espèce de difficultés et parviendrait à proposer à ses collègues du gouvernement et à présenter à l'approbation des Cortès constituantes un candidat digne de ceindre la couronne d'Espagne, et en même temps pouvant être accepté par tous les hommes du grand parti monarchique libéral. Le gouvernement avait cette confiance, qui n'a pas été trompée, et aujourd'hui il a la satisfaction d'annoncer à Votre Excellence par mon entremise que le conseil des ministres réuni à la Granja le 4 courant, sous la présidence de S. A. le Régent, a

désigné le prince Léopold de Hohenzollern-Sigmaringen comme candidat au trône d'Espagne.

Les conditions toutes favorables dans lesquelles se trouve ce prince et le bon accueil que sa désignation a rencontré dans l'opinion publique du pays, donnent au gouvernement l'agréable espérance que son candidat sera bientôt nommé roi par les Cortès avec une grande majorité, et qu'ainsi se terminera la glorieuse période constituante commencée en septembre 1868.

Dès hier, aussitôt qu'il fut possible de sortir de la réserve que conseillait jusqu'à ce jour la prudence, je m'empressai de télégraphier à Votre Excellence la résolution du gouvernement et les dispositions qu'il allait immédiatement adopter pour la soumettre à l'approbation des Cortès, en se conformant strictement aux préceptes du Code fondamental de la nation et aux règles établies par la loi sur l'élection du monarque. Tout en prévenant Votre Excellence de communiquer cette nouvelle au gouvernement....... je vous donnais quelques indications sur la vraie signification politique de cet événement, qui ne doit en rien affecter nos relations avec les autres puissances, malgré la grande influence qu'il est destiné à exercer sur l'avenir de la nation espagnole.

La situation créée par la révolution de septembre, qui a changé d'une façon aussi radicale les conditions politiques de notre pays, a pu se soutenir sans difficulté sous une forme provisoire jusqu'au moment où les Cortès ont voté la Constitution monarchique du pays. Mais, dès ce moment, le provisoire était un danger, parce qu'il laissait sans la puissaate sanction des faits l'idée qui s'était révélée comme l'inspiration du peuple espagnol.

Si le gouvernement ne trouvait pas le moyen de réaliser cette idée, ses ennemis recouvraient naturellement des forces en face de ce provisoire qui laissait la porte ouverte à toute sorte d'espérances insensées. Il en résultait une situation difficile qu'on n'a pu traverser que grâce aux constants efforts du gouvernement et à la sagesse de l'immense majorité des Espagnols. Digne d'admiration, sans nul doute, est le spectacle donné au monde entier par notre patrie en traversant une période de deux ans au milieu d'une tranquillité dont on ne trouve pas d'exemple dans des circonstances analogues, même dans l'histoire des peuples qui se croient les plus civilisés.

Néanmoins, l'opinion publique, tant en Espagne qu'à l'étranger, réclamait impérieusement la fin de cette situation. A l'intérieur, on était ardemment désireux de couronner l'œuvre de la révolution, et, à l'extérieur, les gouvernements amis ont maintes fois exprimé, comme Votre Excellence a sans doute eu occasion de l'observer, les vœux qu'ils faisaient pour la consolidation dans notre pays d'une situation définitive, qui écartât les craintes de futures complications.

Tel est l'heureux succès que le gouvernement espagnol a aujourd'hui l'honneur de porter à la connaissance du gouvernement... par l'entremise de Votre Excellence, et je ne doute pas qu'il sera accueilli par cette cour avec la plus vive satisfaction. Les cordiales relations qui, par bon

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