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dins remportèrent d'abord l'avantage. Ils parvinrent à éliminer un grand nombre de montagnards, en profitant d'un article du règlement qui prescrivait le renouvellement des comités tous les deux mois. Le 22 décembre, en effet, la Convention décréta que tous ses comités seraient renouvelés par moitié et suivant la désignation au sort, avec cette particularité que les membres qui n'avaient pas assisté assidûment aux séances du comité seraient rangés au nombre des sortants. A cette époque, le personnel du comité de sûreté générale et de surveillance était ainsi composé: Bazire, Musset, Goupilleau de Montaigu, Maribou-Montaut, Rovère, Coupé, Brival, Leyris, Chabot, Vardon, Cavaignac, Duprat, Bernard, Bonnier, Duquesnoy, Ingrand, Ruamps, Audouin, Tallien, Kervélégan, Drouet, Hérault, Fauchet, Delaunay_d'Angers, Grangeneuve, Lecointe-Puyraveau, Lavicomterie, Manuel, Bordas, Laurent de Marseille. Les quinze derniers membres furent désignés comme membres sortants. Les noms de cette liste, qui diffèrent des noms de la première, sont ceux de plusieurs membres suppléants qui avaient remplacé des absents ou des démissionnaires. Le 9 janvier 1793, pendant les débats du procès, on opéra le renouvellement, et les girondins ne manquèrent pas cette occasion de se rendre maîtres du comité de sûreté générale, ainsi qu'on va le voir par les réclamations de plusieurs montagnards et par la liste des remplaçants. C'étaient Chambon, Depéret, Grangeneuve, Champeaux, Jarry, Lemaréchal, Gomaire, Dupont, Ruault, Rebecqui, Gorsas, Zangiacomi, Bordas, Estadens, JoueneLong-Champ. Plusieurs montagnards se récrièrent vainement contre ces nominations. - « Marat: C'est une conspiration... Reconnaissez-vous enfin les intrigues de la faction? - Un autre : Ce ne sera plus un comité de sûreté générale; ce sera un comité de contrerévolution. Marat: C'est Roland qui a fait la liste. Une voix: A peine y trouve-t-on deux patriotes.» Deux

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jours auparavant, pour prévenir les troubles que pourrait occasionner le procès, la Convention avait décrété que le nombre des membres du comité de sûreté générale serait doublé, c'està-dire porté à soixante. Le comité de sûreté générale avait, en outre, reçu l'autorisation de se faire remettre les pièces du procès, qui avaient été déposées au tribunal du 17 août.

Mais les montagnards ne tardèrent pas à prendre leur revanche après l'issue des débats, et ils songèrent à l'établir sur des bases nouvelles. Le 21 janvier, plusieurs membres, Fabre d'Églantine entre autres, demandèrent que le comité de sûreté générale fût à l'instant renouvelé; ils observèrent que cette institution avait été de la plus grande utilité pour la liberté lors de l'Assemblée constituante, qu'on en avait senti les avantages sous l'Assemblée législative; mais que l'organisation qui lui avait été donnée dans la Convention s'opposait à tout le bien qu'on en devait attendre; qu'un tel comité, composé de soixante membres, contraint à ne décerner de mandats d'amener que sous la signature de dix-huit membres, toujours difficiles à réunir, ne pouvait remplir son objet; que cependant les émigrés rentraient chaque jour à Paris; que les ennemis de la liberté, les royalistes, les contre-révolutionnaires, y affluaient. Ils conclurent à ce que le comité de sûreté générale ne fût plus désormais composé que de douze membres, nommés à haute voix. Cette mesure fut présentée comme étant seule capable de retenir les conspirateurs, qui ne craignaient pas de menacer les jours de ceux qui avaient voté la mort du roi. Le même jour, dans la séance du soir, le renouvellement du comité fut mis aux voix et décrété. Le lendemain 22, le président proclama les noms des douze députés qui, par le résultat du scrutin, étaient désignés pour composer le comité de sûreté générale. En voici la liste: Bazire, Lamarque, Chabot, Ruamps, Maribou-Montaut, Tallien, Legendre de Paris, Bernard de Saintes, Rovère, Ingrand, Jean De

bry, Duhem. Cette fois, le triomphe de la Montagne n'était pas douteux; ce qui ne ressortait pas moins, c'était l'influence qu'avait eue Danton sur la plus grande partie de ces nominations; la majorité des voix lui appartenait évidemment dans le nouveau comité. Le 28 janvier, Buzot, l'un des chefs de la Gironde, attaqua ce nouveau comité. « Vous devez, dit-il, rapporter ce funeste décret, par lequel vous avez ordonné que le comité de sûreté générale serait composé de douze membres, décret qui a été rendu dans une malheureuse circonstance dont on a su profiter, et qui a été exécuté dans une séance du soir, où il ne se trouvait presque personne. » Mais l'assemblée, quoique beaucoup plus nombreuse ce jour-là, passa à l'ordre du jour sur la proposition de Buzot.

Ce comité de sûreté générale, en grande partie dirigé par Bazire et Chabot, amis de Danton et de Fabre d'Églantine, fut conservé, sauf quel ques modifications, pendant plus de huit mois; on ne le changea que vers le milieu du mois de septembre 1793. La plupart de ses opérations furent l'objet des attaques des Girondins. Il servit le plus souvent la politique de Danton, lequel était entré, le 26 mars, dans le comité de défense générale et de salut public, et qui, le 7 avril, fut également compris parmi les membres du premier comité, qui porta exclusivement le nom de comité de salut public (voyez l'article précédent). Le 9 avril, trois jours après l'établissement du comité de salut public, le comité de sûreté générale demanda, à cause de la multitude d'affaires dont il était chargé, une augmentation de quatre membres et le remplacement de Ruamps et Maribou-Montaut, envoyés en mission. En conséquence, la Convention nomma Cavaignac, Brival, Lanot, Carrier, Leyris et Maure, pour faire partie du comité de sûreté générale, dont le personnel se trouva ainsi de seize membres, au lieu de douze. Ce renfort lui permit de seconder plus activement l'opposition de la Montagne contre la commission des douze, créée

par les girondins, et qui resta en fonctions depuis le 18 jusqu'au 31 mai. Le 24, le comité de sûreté générale dénonça à la Convention les abus d'autorité que s'était permis cette commission fameuse, à laquelle nous avons consacré un article spécial.

Après la révolution du 31 mai, le comité de sûreté générale, aussi bien que le comité de salut public du 6 avril, commença à devenir l'objet des attaques de la Montagne. Ces attaques redoublèrent lorsque, le 11 juillet, la Convention eut élu les premiers membres de ce second comité de salut public, auquel l'histoire a conservé le nom de grand. Une foule de voix répétaient que le comité de sûreté générale aurait dû être renouvelé depuis longtemps. De plus, la mésintelligence s'était glissée parmi ses membres. L'un des plus récents, Maure, crut, avant de partir en mission, devoir avertir l'Assemblée nationale que le comité de sûreté générale, dont il ne suspectait cependant pas le civisme, était d'une grande négligence. << Peu de comités, dit-il, ont autant << de besogne, et peu travaillent moins << que celui-là. Des femmes assiégent << toute la journée son antichambre, << comme chez les ci-devant grands. » Le 13 août on lui avait déjà adjoint Dartigoyte, Michaud du Doubs, Bernard de Saintes, Jay de Sainte-Foi, Dupuis de Rhône-et-Loire, Moïse Bayle; le 9 septembre, sur la proposition de Drouet, appuyée par Maure, la Convention décréta qu'il serait renouvelé et réduit à neuf membres. Le 11, en effet, elle nomma Panis, Lavicomterie, Guffroi, Chabot, Alquier, Lejeune de l'Indre, Bazire, Garnier de Saintes, Julien de Toulouse. Mais ce comité où figuraient encore des dantonistes ne pouvait convenir au comité de salut public; aussi n'eut-il même pas le temps de s'installer. Deux jours après sa nomination, le 13 septembre; la Convention décréta que tous les comités seraient renouvelés intégralement et recréés sur des listes présentées par le comité de salut public. En conséquence, le lendemain 14, un

autre comité de sûreté générale, formé de douze membres, fut composé ainsi qu'il suit Vadier, Panis, Le Bas, Boucher-Saint-Sauveur, David, Guffroy, Lavicomterie, Amar, Ruhl, Lebon, Voulland et Moïse Bayle. Ce fut un coup terrible pour Danton, qui aurait cependant bien dû prévoir que le nouveau comité de salut public, où il avait pour la seconde fois (6 septembre) refusé d'entrer, ne pourrait pas tolérer un comité de sûreté générale soumis à un autre ascendant que le sien. Danton avait rêvé, sans doute, un rôle de médiateur, et compté le remplir avec l'assistance de quelques généraux et de plusieurs membres du conseil des ministres; mais il s'était abusé sur son degré de puissance, et il s'était mis gratuitement dans une position critique qui allait lui devenir funeste, en lui faisant commettre des fautes. Le 14 octobre, la Convention porta de douze à seize le nombre des membres du comité de sûreté générale, par l'adjonction de Dubarran, Laloi, Jagot, Louis du Bas-Rhin. Ce nombre varia encore dans la suite.

On a vu que lorsque la Convention proclama le gouvernement révolutionnaire, elle confirma le comité de sûreté générale dans ses fonctions de haute surveillance sur les personnes. Il n'abusa que trop de ses pouvoirs pendant la terreur; plusieurs de ses membres étaient d'une cruauté qui passe toute croyance. Nous ne reviendrons pas ici sur le portrait qu'en a tracé dans ses Mémoires Sénart, l'un des agents de ce comité (*). Du reste, pour ce qui concerne la politique, le comité de sûreté générale répondit aux désirs de la Convention. Après le 9 thermidor, la Convention, qui se montra si sévère pour l'ancien comité de salut public, ne rechercha en rien la conduite des membres du comité de sûreté générale. Un seul, Vadier, fut enveloppé dans la condamnation de Billaud-Varennes, Collot-d'Herbois et

(*) Voyez les ANNALES, t. II, p. 317 et suiv. et les Mémoires de Sénart, pag. 145153.

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Barrère; encore fut-il puni plutôt pour avoir défendu les principes politiques de ses coaccusés que pour sa conduite dans le sein du comité. Mais Voulland, mais Amar en furent quittes pour une première attaque, qui échoua, et Louis du Bas-Rhin ne fut même pas inquiété.

La cause de cette préférence est bien simple; chargé par la Convention, quoique d'une manière indirecte, de contre-balancer le comité de salut public, le comité de sûreté générale ne se soumit à son ascendant que tant que la Convention lui en donna l'exemple. Lorsque la division eut éclaté parmi les membres du grand comité, et qu'il vit la Convention disposée à lui reprendre les pouvoirs qu'elle lui avait délégués, il fit cause commune avec elle et entretint des intelligences avec les thermidoriens. Ce qui l'indisposait surtout contre Robespierre, Saint-Just et Couthon, c'était le bureau de police qu'avait institué le comité de salut public, et dont les triumvirs avaient accepté la direction. Il comprit que le but du comité de salut public était de le supplanter, et il n'épargna rien pour le diviser. Quand la mésintelligence s'y fut introduite, il se rangea du côté des membres qui formaient la majorité; mais ce n'était pas d'eux qu'il recevait le mot d'ordre, il allait le chercher sur les bancs de la Convention. Nous n'avons pas besoin de dire que Le Bas n'entrait pour rien dans ces intrigues, dont il devait être l'une des victimes; David y était étranger aussi; mais quelle action pouvaient avoir sur leurs collègues ces deux hommes, mal soutenus et presque isolés? Les menées du comité de sûreté générale contribuèrent pour beaucoup au succès de la journée du 9 thermidor; ce furent ses membres influents, Vadier, Amar, Voulland, qui portèrent le dernier coup Robespierre, par une calomnie dont ils riaient eux-mêmes ils le dépeignirent comme un royaliste qui conspirait pour les Bourbons, et ils ajoutèrent qu'on avait trouvé chez lui des preuves de sa trahison. Cette impudente fausseté me

trouva créance que dans les faubourgs et que pour quelques instants; mais c'était tout ce que demandaient les inventeurs. Quand on reconnut qu'ils avaient menti, il n'était plus temps de réparer l'erreur.

Voici quelle était la composition du comité de sûreté générale à l'époque du 9 thermidor: Vadier, Amar, Voulland, Jagot, Louis du Bas-Rhin, David, Le Bas, Moïse Bayle, Lavicomterie, Élie-Lacoste, Dubarran, Ruhl. Ils se divisaient en trois partis principaux correspondant aux trois partis qui s'étaient formés dans le comité de salut public. D'un côté, Vadier, Amar, Voulland, Jagot et Louis du BasRhin représentaient le même système d'exagération et de terreur que le triumvirat dont Billaud - Varennes était le chef; aussi les nommait-on tantôt les gens révolutionnaires et tantôt les gens d'expédition. De l'autre, David et Le Bas défendaient les mêmes idées d'unité gouvernementale que le triumvirat dirigé par Robes pierre; on les désignait sous les noms d'écouteurs ou de gens de la haute main. Enfin, Moïse Bayle, Lavicomterie, Élie-Lacoste, Dubarrau, formaient un parti neutre, comme le triumvirat composé de Carnot, Robert-Lindet et Prieur de la Côted'Or; on les nommait, pour cette raison, les gens d'examen, ou encore les gens de contre-poids.

Après la chute de Robespierre, les thermidoriens voulurent entrer dans le comité de sûreté générale aussi bien que dans le comité de salut public. Le 13 thermidor, ce dernier comité avait été renouvelé par moitié; le lendemain, 14, la Convention renouvela également le comité de sûreté générale. Bien qu'il n'y eût qu'une place vacante, par suite de la mort de Le Bas, la Convention élimina Jagot, David, Lavicomterie, et, augmentant le nombre des membres du comité, réduit depuis quelques mois à douze, nomma pour en faire partie avec les huit membres conservés, Bernard de Saintes, Merlin de Thionville, Goupilleau, André Dumont, Legendre et Jean Debry.

Jean Debry ayant fait accepter sa démission par l'Assemblée, la Convention décida que pour cette fois le comité ne serait composé que de treize membres.

A partir de cette époque, le comité de sûreté générale perdit beaucoup de son ancienne influence. Ne craignant plus rien du comité de salut public, ni des autres comités qu'elle avait à dessein rendus indépendants les uns des autres, la Convention en revint à son ancien désir, qui était de gouverner par elle-même. Le 15 fructidor, le nombre des membres du comité de sûreté générale fut porté à seize, et depuis lors, tous les mois, on renouvela les comités par quart, Voici comment ses attributions furent fixées par la loi du 18 fructidor an II (4 septembre 1794), qui régla définitivement la réorganisation des comités : « Titre I, art. 3. Le comité de sûreté générale à la police générale de la république ; il décerne des mandats d'amener ou d'arrêt contre les citoyens et les remet en liberté, ou les traduit au tribunal révolutionnaire.

« Les délibérations, pour arrêter ou mettre en liberté, doivent être prises au moins par cing de ses membres; ses arrêtés, pour traduire au tribunal révolutionnaire, doivent être pris au nombre de neuf au moins.

<< 4. Lorsqu'il met en arrestation des fonctionnaires publics, il en prévient, dans les 24 heures, les comités qui ont la surveillance sur eux.

<< 5. Il a particulièrement et immédiatement la police de Paris.

« Il requiert la force armée pour l'exécution de ses arrêtés.

« 6. La trésorerie nationale tient à sa disposition 300,000 livres pour dépenses extraordinaires ou secrètes. » Une belle mission était réservée au comité, c'était de diriger la mise en liberté des suspects; mais si, pendant la terreur, il avait encombré les prisons avec une injustice souvent révoltante, il ne les désemplit pas avec beaucoup plus d'équité. Plusieurs de ses membres ne purent se justifier de

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