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tionnaires publics et agents civils et militaires, sur lesquels il exerce sa surveillance.

«Il peut les traduire au tribunal révolutionnaire, en se concertant avec le comité de sûreté générale.

« Article 2. La trésorerie nationale lui ouvrira, pour dépenses secrètes et extraordinaires, un crédit de dix millions; les crédits précédemment ou verts et non employés sont supprimés.»

Cette fois, l'institution était ramenée aux proportions que lui avaient toujours rêvées les représentants de la nation. Ils avaient besoin d'une grande force pour achever de détruire la coalition; cette force, ils la trouvaient dans leur comité de salut public, auquel ils ne refusaient aucun genre de ressource pour vaincre; les thermidoriens n'avaient pas oublié l'argent. Mais, autant ils désiraient qu'il fût irrésistible à la frontière, autant ils exigeaient qu'il demeurât sans puissance à l'intérieur; aussi, pour prévenir la résurrection d'une dictature, d'un triumvirat ou même d'un tribunat, ils s'empressèrent de décréter que toutes les délibérations du nouveau comité seraient toujours signées de sept membres au moins, présents à la délibération; quant aux dangers du fédéralisme administratif, personne ne paraissait s'en préoccuper. L'organisation du 18 fructidor avait enfin résolu le problème; on avait trouvé ce que le seul besoin d'improviser la foudre avait fait chercher si longtemps, mais en vain : une immense machine de guerre, et pas de gouvernement.

Non contents encore de tous ces succès, les thermidoriens voulurent faire le procès à l'ancien comité dans la personne de plusieurs de ses membres. Dès le 11 fructidor, un mois après la chute de Robespierre, Lecointre de Versailles avait dénoncé Billaud-Varennes, Collot-d'Herbois et Barrère, ainsi que Vadier, Amar et Vouland, du comité de sûreté générale; mais cette accusation avait été repoussée par l'immense majorité de la Convention et déclarée calomnieuse. Cependant, après plusieurs autres tenta

tives inutiles, la réaction, renforcée par la rentrée des soixante - treize girondins, finit par arriver à son but. Le 12 ventôse an III (mars 1795), la Convention décréta d'arrestation Billaud-Varennes, Collot d'Herbois, Barrère et Vadier, et peu de jours après l'insurrection populaire du mois de prairial, ils furent condamnés à la déportation. L'un des principaux chefs d'accusation était qu'ils avaient réduit la Convention à un état d'oppression; ce qui n'était pas tout à fait inexact, mais ce qui ne faisait honneur ni à l'aptitude gouvernementale de la représentation ni à son courage. Ce fameux procès eut surtout pour conséquence de prouver que dans le comité, ce n'était pas Robespierre qui avait constamment poussé aux mesures impitoyables, et que pour l'ambition, aussi bien que pour la cruauté, Billaud-Varennes n'avait point eu d'égal.

A partir du 15 germinal an III (avril 1794), le nombre des membres du comité de salut public fut porté à seize, eirconstance qui n'était guère propre à lui rendre l'homogénéité et F'influence qu'il avait perdues. Déjà depuis le 15 ventôse (mars) de la même année, Carnot avait cessé d'être réélu; le royalisme avait déjà assez d'ascendant pour l'éloigner des fonctions qu'il avait si glorieusement remplies. Du reste, à part le mois de vendémiaire où le sort l'avait désigné comme membre sortant, il resta chargé de la direction des affaires de la guerre depuis le mois d'août 1793 jusqu'au mois de mars 1795, c'est-à-dire pendant l'époque où l'armée républicaine étonna le monde par des prodiges. Il eut pour successeur un certain Aubry, royaliste déguisé, qui poursuivit de sa haine le général Bonaparte, et dont l'incapacité est devenue proverbiale. Lindet fut également remplacé aux subsistances par Boissy-d'Anglas, que le peuple surnomma Boissy-Famine. Il en fut pour tout le reste à peu près comme pour la guerre et pour les subsistances; aussi, lorsque le Directoire prit en main les rênes du gouvernement, il trouva l'État dénué de ressources.

On nous saura gré sans doute de ne pas être entré dans l'examen détaillé des opérations de cette foule de comités de salut public qui se succédèrent du 9 thermidor jusqu'au 4 brumaire an IV (26 octobre 1795), époque où la Convention déclara sa mission terminée. Cependant, avant de finir, il est nécessaire de dire un mot sur la commission de cinq membres, qui fut instituée le 30 vendémiaire an IV (22 octobre 1796), pour prendre des mesures de salut public contre les royalistes, lesquels commençaient à oublier la leçon qu'ils avaient reçue le 13 vendémiaire. La Convention désigna Tallien, Dubois - Crancé, Florent Guyot, Roux de la Marne et Pons de Verdun, pour composer cette commission de salut public. On craignit un moment que Tallien ne mît cette circonstance à profit pour s'emparer de la dictature, dont il semblait avoir quelquefois caressé la chimère; mais, soit qu'il manquât d'audace, soit qu'on eût mis des obstacles suffisants à son essor, il n'en fut rien. La commission des cinq se borna à faire décréter par la Convention des mesures de précaution contre les royalistes émigrés ou parents d'émigrés. Cette fois encore les conventionnels en furent quittes pour la peur; mais le Directoire, ce fils de leur œuvre, allait bientôt avoir affaire au général Bonaparte.

Tableau des membres de la Convention nationale qui ont composé le comité de salut public (*).

1793.

COMITÉ DE DÉfense générale ET DE SALUT PUBLIC, OU COMMISSION, DE SALUT PUBLIC.

26 mars. Dubois-Crancé, Pétion, Gensonné, Guyton - Morveau, Robespierre l'aîné, Barbaroux, Ruhl, Vergniaud, Fabred'Églantine, Buzot, Delmas, Guadet, Condorcet, Bréard, Camus, Prieur de la

(*) Ce tableau et celui des membres du comité de sûreté générale, que nous donnerons p. 376, ont été dressés par nous d'après le Moniteur et les procès-verbaux de la Convention. C'est un travail entièrement neuf qui nous a coûté de longues et pénibles recherches. Nous pouvons en garantir l'exactitude.

Marne, Camille Desmoulins, Barrère, Quinette, Cambacérès, Jean Debry, Danton, Sieyes, Lasource, Isnard.

COMITÉ DE SALUT PUBLIC.

7 avril. Barrère, Delmas, Bréard, Danton, Robert-Lindet, Treilhard, GuytonMorveau, Lacroix d'Eure-et-Loir, Cambon. II mai. Les mêmes membres.

12 juin. Les mêmes, excepté Treilhard et Robert-Lindet, qui sont remplacés par Gasparin et Jean Bon-Saint-André.

10 juillet. Jean Bon-Saint-André, Barrère, Gasparin, Couthon, Hérault - Séchelles, Thuriot, Prieur de la Marne, SaintJust, Robert-Lindet.

27 juillet. Gasparin donne sa démission pour cause de maladie. Il est remplacé par Robespierre.

13 août. Les mêmes.

14 aout. Adjonction de Carnot et de Prieur de la Côte-d'Or.

6 septembre. Adjonction de Billaud-Varennes, Collot-d'Herbois, Danton et Granet. Danton refuse, et le lendemain Granet écrit à l'Assemblée pour donner sa démission et demander son remplacement. L'Assemblée passe à l'ordre du jour; cependant Granet n'en persévère pas moins dans son refus.

II septembre. Le comité est prorogé pour

un mois.

A la fin du même mois, Thuriot donne aussi sa démission. Le comité se trouve alors composé de douze membres, savoir: Jean Bon-Saint-André, Barrère, Hérault-Séchelles, Prieur de la Marne, Saint-Just, RobertLindel, Robespierre, Prieur de la Côte-d'Or, Carnot, Billaud-Varennes et Collot-d'Herbois.

25 septembre. Briez est adjoint au comité par un décret rapporté le même jour.

11 octobre (20 vendémiaire an 11). Les mêmes membres.

12 novembre (22 brumaire). Les mêmes membres.

13 décembre (23 frimaire). Les mêmes membres.

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Marne, envoyés en mission dans les départements, ne rentrèrent qu'après le 9 thermidor.

11 avril (22 germinal). Les mêmes. 11 mai (22 floréal). Les mêmes. 16 juin (22 prairial). Les mêmes. 10 juillet (22 messidor). Les mêmes. 28 juillet (10 thermidor). Mort de Robespierre, Saint-Just et Couthon.

31 juillet (13 thermidor). Jean Bon-SaintAndré et Prieur de la Marne sont considérés comme démissionnaires en vertu d'une décision du 11 thermidor. En conséquence, six nouveaux membres viennent compléter le comité; ce sont Laloi, Eschasseriaux, Bréard, Thuriot, Treilhard et Tallien.

1er septembre (15 fructidor). Fourcroy, Cochon, Delmas, Merlin de Douai, Eschasseriaux l'aîné, Bréard, Laloi, Thuriot, Treilhard, Prieur de la Côte-d'Or, Carnot, Robert-Lindet.

6 octobre (15 vendémiaire an 111).

Prieur de la Marne.

Richard.

Guyton-Morveau.

Foureroy.

Cochon.

Membres sortants.

Robert-Lindet.
Carnot.

Prieur de la Côte-d'Or.

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Chazal.

Boissy-d'Anglas.
André Dumont.
Dubois-Crancé.

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Delmas.

Lacombe.

Merlin de Douai.

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Berlier.

Merlin de Douai.

Letourneur de la Manche.

Sieyes.

Rewbel.

Boissy-d'Anglas.

Louvet.

Jean Debry.

Lesage d'Eure-et-Loir,

COMITÉ DE SURETÉ GÉNÉRALE. C'est celui qui, après le comité de salut public, joua le rôle le plus important sous la Convention. Il n'était que la continuation du comité de surveillance, formé sous l'Assemblée législative, lequel avait pris sa source dans le comité des recherces ou dans celui des rapports, créés l'un et l'autre par la Constituante, le 28 juillet 1789 (voyez plus haut).

Sous la Convention, le comité de sûreté générale occupa un rang excep tionnel: dénué d'attributions gouvernementales, il devint cependant l'un des principaux rouages du gouvernement révolutionnaire, par la puissance dont la Convention se plut toujours à l'investir, pour qu'il exerçât sur les personnes une police vigilante. Nous avons dit, dans l'article précédent, qu'il était considéré par la Convention comme un contre-poids qu'elle opposait au comité de salut public, et comme une censure permanente prête à frapper ceux qui, soit par ambition, soit par amour du bien public, essayeraient d'augmenter la somme de pouvoir concédée avec tant de peine au gouvernement. Nous l'avons prouvé en citant la loi du 14 frimaire an 11 (4 décembre 1793), qui statuait sur l'organisation du gouver nement révolutionnaire. L'article II (section II), après avoir déterminé les attributions du comité de salut public, ajoute: « et, pour tout ce qui est relatif aux personnes et à la police intérieure, cette inspection particulière appartient au comité de sûreté générale de la Convention, conformément au décret du 17 septembre dernier. » Ce

décret du 17 septembre est mieux connu sous le nom de loi des suspects; il avait été présenté par le comité de législation, l'un des trois principaux comités de gouvernement. Aux ter mes de l'article 9 de la loi du 14 frimaire (même section), le comité de sûreté générale devait diriger les opérations des districts, auxquels était exclusivement attribuée la surveillance de l'exécution des lois révolutionnaires, et des mesures de gouvernement, de sûreté générale et de salut public dans les départements. Cet article est ainsi conçu: << Néanmoins, afin qu'à Paris l'action de la police n'éprouve aucune entrave, les comités révolutionnaires continueront de correspondre directement et sans aucun intermédiaire avec le comité de sûreté générale de la Convention, conformément au décret du 17 septembre dernier. »

On le voit, dans ces temps de crise et de défiance, le comité de sûreté générale était, à part le mystère, quelque chose de semblable au conseil des dix de Venise; sous ses coups se trouvaient placées la liberté et la vie de tous les citoyens. Il exerça cette magistrature terrible avec une rigueur excessive, et c'est aux membres qui en composaient la majorité qu'il faut surtout demander compte du sang des innombrables victimes de la terreur. Par un insigne privilége, refusé au comité de salut public, la Convention permit au comité de sûreté générale de se choisir un président, pour introduire quelque unité dans ses délibérations. Pendant les mois les plus orageux de l'année 1793, c'était Vadier qui avait le titre de président du comité; plusieurs lettres de l'accusateur public, FouquierTinville, lui sont adressées sous ce couvert.

Dès le 21 septembre 1792, second jour de son installation, la Convention s'occupa du comité de sûreté générale (*). Le comité alors existant ayant

(*) Le 30 mai 1792, l'Assemblée législative avait décrété que le comité de surveillance, formé sous la Constituante, porterait

été convoqué à l'ouverture de la séance, un membre fit observer qu'il se trouvait sans pouvoirs, par la dissolution de l'Assemblée législative qui l'avait créé. Mais comme tous les membres du comité avaient été choisis par les électeurs pour faire partie de la Convention, celle-ci les maintint dans leurs fonctions, et elle décréta que les divers comités et commissions existants sous l'Assemblée législative seraient provisoirement conservés.

Cependant le comité provisoire de sûreté générale ne fut remplacé que vers le milieu du mois d'octobre 1792. Jusqu'à cette époque, la Convention lui renvoya un grand nombre d'affaires. Le 2 octobre, elle l'avait autorisé à se faire rendre compte de toutes les arrestations politiques qui avaient eu lieu dans toute la république depuis le 10 août; du reste, il ne s'occupait guère que des questions qui lui étaient renvoyées. Enfin, le 17 octobre, eut lieu l'installation d'un comité définitif composé de trente membres, conformément à une décision du 2 du même mois. Voici la liste des membres élus: Fauchet, Bazire, Gorsas, Goupilleau de Montaigu, Grégoire, Lecointe-Puyraveau, Gossuin, Maribou-Montaut (Louis), Rovère, Delaunay d'Angers, Ruamps, Chénier, Kervélégan, Couppé, Bréard, Ingrand, Saladin, Musset, Bordas Alquier, Brival, Hérault, Duquesnoy, Leyris, Audouin, Laurent de Marseille, Niou, Chabot, Lavicomterie, Salle. C'était un mélange de montagnards et de girondins dans des proportions à peu près égales. Mais lorsque la division se fut prononcée avec plus de force entre la Gironde et la Montagne, chacun des deux partis ajouta une plus grande importance à s'emparer de ce comité par des nominations faites dans son sens. Vers la fin du mois de décembre, quelques jours avant l'ouverture des débats relatifs au jugement du roi, les giron

le nom de comité de sûreté générale; depuis lors, il fut alternativement désigné par Î'une ou l'autre de ces dénominations, souvent par toutes les deux à la fois.

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