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lui attira les hommages de Charles IX et du duc d'Anjou, depuis Henri III, dont elle fut la maîtresse pendant plusieurs années; ce prince lui adressa, par l'entremise de Desportes, le rimeur de la cour, une foule de sonnets qui roulent tous sur sa beauté, et en particulier sur sa blonde chevelure. Devenu roi de France, Henri III, s'unissant à Louise de Vaudemont, bien que, d'après le malicieux Talleinand des Réaux, il eût eu quelque envie d'épouser sa favorite, proposa la main de la belle Châteauneuf au comte de Brienne, simple cadet de famille; celui-ci, néanmoins, refusa un mariage qui le déshonorait en lui assurant la faveur du roi, et il fut forcé de quitter la cour. Cependant mademoiselle de Châteauneuf craignait peu les charmes de la jeune reine; elle se crut même assez sûre de sa puissance pour oser braver cette princesse dans un bal; et le roi se vit forcé de la punir de cette insolence en l'eloignant de la cour. Par dépit, et peut-être par amour, elle épousa un Florentin nommé Antinotti, qu'elle poignarda dans un accès de jalousie. L'ancien amour du roi la fit absoudre de ce crime, et, plus tard, après avoir, suivant Tallemand des Réaux, refusé la main du prince de Transylvanie, qui avait envoyé demander une fille de la cour de France, elle épousa Philippe Altoviti, capitaine de galère, que Henri III créa baron de Castellane. Ce second mari périt encore de mort violente; il fut assassiné par Henri d'Angoulême, grand prieur de France, contre lequel il avait conspiré. Depuis cette époque (1586), T'histoire perd la trace de mademoiselle de Châteauneuf, et l'on ne sait même pas la date précise de șa mort.

CHATEAU-NEUF ou VAL DE Bargis, ancienne châtellenie du Nivernais, aujourd'hui département de la Nièvre, à 24 kil. de Nevers. La population de ce lieu est aujourd'hui de 2,057 habi

tants.

peindre mademoiselle de Châteauneuf sur un trône et lui humilié devant elle qui lui mettait le pied sur la gorge.» (Tallemand des Réaux.)

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CHATEAU-NEUf de Bonafos (monnaie de). - Les monnaies d'Alby sont les mêmes que celle de Château-Neuf de Bonafos. Nous avons donc cru devoir les réunir pour en faire le sujet d'un seul article. On ne connaît qu'un seul triens mérovingien d'Alby: c'est une petite pièce d'or, sur laquelle on lit ALBIVIENSE autour d'un profil droit, et DOMINO MONITARIO autour d'une croix à branches égales. Aucun denier carlovingien appartenant à cette ville n'a encore été retrouvé; il faut descendre jusqu'au temps de la féodalité pour retrouver quelques traces de la monnaie de cette ville. Elle semble avoir appartenu tout entière, à cette époque, au comte de Toulouse. Plus tard, elle fut divisée entre trois possesseurs, le comte de Toulouse, l'évêque d'Alby, et le seigneur de Bonafos, qui firent, vers le milieu du treizième siècle, un accord par lequel ils convinrent que la monnaie d'Alby nommée Raymondine serait frappée à frais et à bénéfices communs, dans le château de Bonafos. Il existe en effet d'anciens deniers sortis de l'atelier monétaire établi en vertu de cette convention, et qui présentent au côté droit la légende RAIMVNDVS, dans le champ un monogramme que nous n'avons pu lire sur les pièces que nous avons eues entre les mains, et au revers,

le mot ALBIECI, autour d'une croix; c'est sans doute ce type dégénéré qui a donné naissance à l'empreinte publiée par Duby (Supplément, pl. x, n° 14). Cette empreinte a été longtemps regardée comme inexplicable; nous y avons cependant reconnu les mots Raymundus et Albie cinitas, RAMVIVID et ALBIECI. La croix grecque du revers y est restée, mais le monogramme s'est changé en quatre petits piliers dont les deux supérieurs accostent une crosse. A la fin du douzième ou au commencement du treizième siècle, Sicard d'Alamon changea cette monnaie et la ramena à une meilleure empreinte. On y vit alors, d'un côté, une croix avec les mots ALBIENSIS, et de l'autre côté, les quatre petits piliers réunis en

croix et cantonnés, au troisième canton, d'une crosse; autour, on lisait la légende R. BONAFOS, dont la première lettre, R, est un souvenir de l'ancienne légende RAIMVNDVS.

CHATEAU-NEUF DE GADAGNE, ancienne seigneurie avec titre de duché, dans le comtat Venaissin, à 8 kil. d'Avignon. Ce lieu, dont la population est aujourd'hui de 1,100 hab., était possédé, au dix-septième siècle, par l'une des plus illustres familles du pays. Voy. GALLÉAN (famille de).

CHATEAU-NEUF DE GALAURE, ancienne baronnie du Dauphiné, aujourd'hui département de la Drôme, à 16 kil. de Romans.

CHATEAU-NEUF LE ROUGE, ancienne seigneurie de Provence, aujourd'hui département des Bouchesdu-Rhône, érigée en marquisat en

1723.

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CHATEAUNEUF-RANDON petite ville de l'ancien Gévaudan, aujourd'hui chef-lieu de canton du département de la Lozère, à 24 kil. de Mende, célèbre par le siége qu'y soutinrent les Anglais en 1380, contre du Guesclin, général des armées de Charles V. Ce fut devant cette place que mourut le connétable, en donnant aux capitaines qui l'entouraient ce conseil, qu'il avait toujours suivi lui-même: « Qu'en quelque pays qu'ils fissent la « guerre, les gens d'église, les femmes, << les enfants et le pauvre peuple n'é<< taient pas leurs ennemis. >>

Le gouverneur de Randon avait capitulé avec du Guesclin, et promis de se rendre dans quinze jours, s'il ne recevait pas de secours. Lorsque ce temps fut écoulé, le maréchal de Sancerre s'avança sur les bords du fossé de la ville assiégée, et somma le gouverneur de se rendre; il répondit qu'il avait donné sa parole à du Guesclin, et qu'il ne se rendrait qu'à lui. Sancerre avoua alors que le connétable était mort: << Eh bien, reprit le gouverneur, je porterai les clefs de la ville sur son << tombeau. >> Sancerre revint tout préparer pour cette cérémonie extraordinaire. On ôta de la tente du héros tout ce qu'elle renfermait de lugubre; son

«

cercueil fut placé sur une table couverte de fleurs; puis le gouverneur de la ville assiégée sortit de la place à la tête de sa garnison, traversa l'armée au bruit des trompettes, et arriva dans la tente du connétable: les principaux officiers de l'armée, debout et silencieux, y étaient rassemblés. Le gouverneur se mit à genoux devant le corps du connétable, et déposa sur son cercueil les clefs de la place et son épée. Un modeste monument a été élevé en 1820.au hameau de la Bitarelle sur le théâtre de cet événement.

CHATEAUNEUF-SUR-CHARENTE, Castrum novum, Neocastrum, ancienne châtellenie de l'Anjou, aujourd'hui chef-lieu de canton du département de la Charente, à 12 kil. de Cognac, érigée en comté en 1644. Charles V la prit sur les Anglais après un long siége, en 1380. C'est entre cette ville et celle de Jarnac que se donna, en 1569, la fameuse bataille connue sous le nom de Jarnac, et où les calvinistes furent battus. (Voy. JARNAC.) La population de Châteauneuf-sur-Charente est aujourd'hui de 2,350 habitants.

an

CHATEAUNEUF-SUR- CHER cienne seigneurie du Berry, aujourd'hui département du Cher, à 16 kil. de Bourges, érigée en marquisat en 1681, en faveur de Colbert. Cette ville, dont la population est aujourd'hui de 2,019 habitants, possédait autrefois une riche collégiale.

au

CHATEAUNEUF-SUR-LOIRE, ancienne seigneurie de l'Orléanais, jourd'hui département du Loiret, à 17 kil. d'Orléans, érigée en marquisat en 1671, en faveur de Balthasar Phelipeaux, secrétaire d'État, et aïeul de Louis Phelipeaux, comte de Pontchartrain, qui fut chancelier de France, de 1699 à 1714.

CHATEAUNEUF-SUR-SARTHE, ancienne seigneurie de l'Anjou, aujourd'hui département de Maine-et-Loire, à 16 kilomètres d'Angers, érigée en baronnie en 1584.

CHATEAU-PORCIEN, Castrum Porcianum, ou Castrum Porcinctum, ancienne principauté de Champagne,

aujourd'hui chef-lieu de canton du département des Ardennes, à 7 kilomètres de Rethel. La ville de ChâteauPorcien est mentionnée dans le testament de saint Remy, archevêque de Reims; mais elle devait exister bien antérieurement à cette époque, puisqu'on a découvert sur une montagne, au nord-est de cette ville, d'anciennes fondations de murs, des puits, des pavés et des médailles romaines. Château-Porcien, situé sur la rive droite de l'Aisne, est dominé par un rocher escarpé sur lequel on aperçoit encore les ruines d'un château fort, bâti dans le quinzième siècle, qui soutint, au dix-septième siècle, quatre siéges en peu de temps. Tombé au pouvoir des Espagnols en 1650, il fut repris la même année par les Français, qui le perdirent encore en 1652, mais le recouvrèrent en 1653.

Cette ville ne fut d'abord qu'une simple seigneurie qui relevait du comté de Sainte-Menehould, et que Raoul de Château-Porcien vendit, en 1263, à Thibaut, roi de Navarre et comte de Champagne, en échange de revenus que ce prince lui assigna à Fismes; puis elle passa avec la Champagne à Philippe le Bel, qui l'érigea en comté, en 1303, en l'échangeant avec Gaucher II de Châtillon, contre la terre de Châtillon-sur-Marne. Depuis, elle passa dans la famille des ducs d'Orléans, et en 1439, dans celle des seigneurs de Renty, qui la possédaient lorsque Charles IX, en 1561, l'érigea en principauté. Après avoir appartenu aux ducs de Nevers, elle fut acquise, en 1659, par le cardinal Mazarin, et passa enfin aux ducs d'Aiguillon.

CHATEAU-REGNARD ou RENARD, Castrum Vulpinum, petite ville du Gâtinais orléanais, aujourd'hui du département du Loiret, doit son origine à un château fort construit par Regnard le Vieux, comte de Sens, vers le milieu du dixième siècle. Louis le Gros détruisit ce château en 1230; mais Robert, comte de Joigny, le fit reconstruire et l'entoura de fortes murailles flanquées de tours, dont il existe encore quelques restes assez bien con

servés. Il fut démoli, en 1627, par ordre de Louis XIII. La seigneurie de Château-Regnard appartenait, en 1569, à l'amiral de Coligny, après la mort duquel elle passa dans la maison de Nassau-Orange. Cette ville compte aujourd'hui 2,988 habitants.

CHATEAU-REGNAULT OU RENAUD, Castrum Reginaldi, petite ville de l'ancienne Champagne, aujourd'hui du département des Ardennes, à 12 kilomètres de Mézières. C'était autrefois une principauté souveraine dont le chef-lieu était Monttharmé. La ville fut bâtie en 1230, par Hugues, comte de Rethel, et elle appartint successivement aux comtes de Rethel et aux ducs de Clèves. En 1629, Louis XIII en acquit la souveraineté en échange de Pont-sur-Seine, propriété de la princesse douairière de Conti. Louis XIV en fit raser le château, qui était trèsfort. La population de Château-Regnault n'est plus aujourd'hui que de 600 habitants.

CHATEAU-REGNAULT (monnaie de). - On a plusieurs pièces frappées dans cette ville, à l'effigie de François de Conti, qui posséda la seigneurie de Château-Regnault au commencement du dix-septième siècle. Ces pièces sont de tous métaux et trop peu intéressantes pour que nous nous arrêtions à les décrire.

CHATEAU-REGNAULT, petite ville de l'ancienne Touraine, aujourd'hui chef-lieu de canton du département d'Indre-et-Loire, à vingt-huit kilomètres de Tours, fut bâtie au commencement du douzième siècle par Geoffroy, seigneur de Château-Gonthier, qui lui donna le nom de l'un de ses fils. La seigneurie de Château-Regnault changea ensuite plusieurs fois de maîtres; elle fut érigée en marquisat en 1620. Cette ville compte aujourd'hui 2,468 habitants.

CHATEAU-RENAUD (François-Louis Rousselet, comte, puis marquis de), l'un des plus grands marins que la France ait produits, naquit en 1637. Il servit d'abord dans les armées de terre, et se distingua sous les ordres de Turenne, à la bataille des Dunes et

aux siéges de Dunkerque et de BerqueSaint-Vinan.

Il entra dans la marine en 1661, en qualité d'enseigne de va sseau, et se distingua en 1664, dans une descente opérée sur les côtes d'Afrique par l'armée navale aux ordres du duc de Beaufort. Nommé capitaine de vaisseau en 1672, il fut envoyé contre les pirates barbaresques; il s'empara avec un seul vaisseau de cinq de ces corsaires. Il fut promu l'année suivante au grade de contre-amiral, et fut chargé d'aller croiser avec cinq vaisseaux dans les mers du Nord. A peine y était-il arrivé, qu'il aperçut un convoi de cent trente bâtiments marchands, escorté par l'amiral hollandais Ruyter, avec huit vaisseaux de guerre. Quoique inférieur en forces, Château-Renaud n'hésita pas à commencer l'attaque; le convoi fut dispersé trois vaisseaux hollandais coulèrent bas, et les autres furent forcés de chercher un asile sur les côtes d'Angleterre.

Il commandait une escadre de six vaisseaux lorsqu'il fut rencontré, sur les côtes d'Espagne, au commencement de l'année 1677, par l'amiral hollandais Evertsen, avec une flotte de seize vaisseaux de ligne et de neuf brûlots. Château-Renaud voulut d'abord éviter le combat, mais forcé ensuite de l'accepter, il soutint l'attaque avec tant de bravoure, et manœuvra avec tant d'habileté, que l'armée hollandaise, après avoir perdu trois vaisseaux, fut forcée de se réfugier en désordre dans le port de Cadix, et de retourner ensuite en Hollande pour réparer ses avaries.

Château-Renaud prit part au bombardement d'Alger, qui eut lieu en 1688; il fut promu l'année suivante au grade de lieutenant général des armées navales, et fut chargé de porter en Irlande les secours que la cour de France envoyait à Jacques II. Il partit de Brest le 6 mai 1689, avec vingt-quatre vaisseaux, deux frégates et six brûlots, arriva, le 12, sur les côtes d'Irlande, et opéra heureusement le débarquement des troupes et des munitions qu'il était chargé de transporter, mal

gré les efforts d'une flotte anglaise de vingt-huit voiles, qui vint l'attaquer, et qu'il mit en fuite. Le 18, il rentra à Brest avec sept navires hollandais qu'il avait capturés dans sa route.

Il commandait l'avant-garde de l'armée de Tourville, dans le combat livré par cette armée, le 10 juillet 1690, à la hauteur de Bévéziers, à la flotte combinée des Hollandais et des Anglais. Chargé de combattre l'avantgarde de l'armée ennemie, commandée par l'amiral hollandais Evertsen, il parvint à l'envelopper et à la séparer du corps de bataille, et il la combattit avec tant de vigueur, que la destructruction de la plus grande partie des vaisseaux qui composaient cette escadre décida du succès de la journée.

Lors de la guerre de la succession d'Espagne, Château-Renaud fut nommé capitaine général de l'Océan par Philippe V, roi d'Espagne, en 1701, et par Louis XIV, vice amiral du Levant, à la mort de Tourville. Il passa ensuite dans les Indes occidentales, pour défendre les établissements espagnols contre les entreprises des Anglais et des Hollandais, et ramena en Europe la flotte du Mexique. Informé que l'armée combinée d'Angleterre et de Hollande l'attendait sur les côtes d'Espagne avec des forces supérieures aux siennes, il voulait relâcher dans un port de France, mais l'amiral espagnol, don Manuel de Velasco, s'y opposa, et voulut aller aborder à Vigo en Galice; il causa ainsi le désastre de la flotte, dont six vaisseaux et neuf galions tombèrent au pouvoir des alliés, après que Château-Renaud eut ordonné lui-même qu'on en brulât sept et qu'on fit échouer les autres, pour ravir cette riche proie à l'ennemi. Château-Renaud reçut le bâton de maréchal de France en 1703. A l'époque de sa mort, arrivée en 1716, il était lieutenant général et gouverneur de la province de Bretagne.

CHATEAUROUX, chef-lieu du département de l'Indre, est une ville fort ancienne, et doit son nom et son origine à un château fort construit vers le milieu du dixième siècle, par Raoul

de Déols, surnommé le Large, c'està-dire le Libéral. Des habitations se groupèrent peu à peu autour de ce château, et formèrent dans le siècle suivant une ville qui prit le nom de Castrum Radulphi, d'où vint le nom moderne de Châteauroux. Cette ville, qui tomba plus tard au pouvoir de Philippe-Auguste, et fut par lui réunie au Berry, était, dans l'origine, possédée par les princes de Déols, issus, suivant l'opinion la plus commune, de la famille des ducs d'Auvergne. La seigneurie de Châteauroux fut érigée en comté le 16 juillet 1497, par Charles VIII, en faveur d'André de Chauvigny, vicomte de Brosse. Plus tard, elle passa dans la famille des princes de Condé, et fut érigée en duché-pairie par lettres de mai 1616, en faveur de Henri II de Bourbon, prince de Condé. En 1736, Louis XV en fit l'acquisition et la donna à sa maîtresse Marie-Anne de Mailly-Nesle, qu'il créa duchesse de Châteauroux. Après la mort de cette femme, en 1744, ce duché retourna au domaine royal.

La ville de Châteauroux était, avant la révolution, le chef-lieu d'une élection. Elle possède aujourd'hui des tribunaux de première instance et de commerce, une chambre consultative des arts et manufactures, et une société d'agriculture. On y compte 11,587 habitants. C'est la patrie du général Bertrand.

CHATEAUROUX (monnaies de). Voy.

DÉOLS.

CHATEAUROUX (Marie-Anne, duchesse de), sortie de l'illustre famille de Nesle, épousa en 1734 le marquis de la Tournelle, dont elle devint veuve à l'âge de vingt-trois ans. Belle, aimable et spirituelle, madame de la Tournelle se trouva jetée, dans l'âge des passions, au milieu d'une cour dissolue. Elle était ambiteuse : l'exemple de ses trois sœurs, mesdames de Mailly, de Vintimille du Luc, et de Lauraguais, qui tour à tour étaient devenues les maîtresses de Louis XV, l'enhardit à briguer le même honneur. Peut-être une plus noble ambition l'anima-t-elle; toujours est-il qu'elle

parvint, ce qui n'était pas difficile, à se faire aimer de Louis XV, et que, différant adroitement sa défaite, puis, accordant ou refusant habilement ses faveurs, elle ne tarda pas à prendre un empire absolu sur ce prince et sur le royaume. Madame de Châteauroux n'était pas une femme aimante, et ce vice de son cœur contribua puissamment à sa fortune elle stipula d'abord le renvoi de sa sœur, madame de Mailly, puis se fit nommer dame du palais de la reine, et duchesse de Châteauroux, avec le brevet d'une pension de 80,000 livres. On ne voit jusque-là dans sa conduite qu'une ambition vulgaire, égoïste et personnelle; mais son âme forte et élevée tendait plus haut: elle voulait non-seulement qu'on lui pardonnât son titre de favorite, mais encore que la France bénît son nom et que l'histoire lui attribuât la grandeur de son royal amant. Par malheur, Louis XV était fort au-dessous d'elle, et ce fut à grand' peine qu'elle parvint à l'arracher quelques instants à sa voluptueuse mollesse, pour l'entraîner à la tête des armées de Flandre et d'Alsace. Elle y était parvenue et se sentait heureuse, lorsque le monarque tomba malade à Metz, et sur le point de mourir, consentit, pour recevoir l'extrême-onction, que la peur lui faisait désirer, au renvoi de sa favorite. Madame de Châteauroux reçut l'ordre de partir immédiatement, et elle s'y préparait avec fermeté, lorsqu'elle se rappela que, venue dans la voiture du roi, elle n'en avait pas une à elle pour s'en aller. Dans les cours, une personne disgraciée est traitée comme on traite, en Orient, les pestiférés; chacun craint la contagion de sa disgrâce, et on s'éloigne sans pitié. On ne doit donc pas trop s'étonner de voir citer comme un trait de courage l'acte du maréchal de Belle-Isle, qui osa prêter sa voiture à la favorite en disgrâce. Assaillie d'injures et de menaces par le peuple des campagnes, de tout temps ennemi des favorites, elle traversa quatre-vingts lieues de pays au milieu des outrages et des malédictions, se rendit à Paris et s'y cacha,

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