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jacobin, nommé maître Sarrazin, qui était du complot, avait justement fixé l'heure de son sermon au moment où se devait faire l'attaque, et avait choisi une église à l'autre bout de la ville. La garnison et les bourgeois du parti anglais furent donc longtemps à se mettre en défense; toutefois on commença à se battre dans les rues. L'évêque était un Bourguignon nommé Jean de Fétigni; il se mit vaillamment à la tête des défenseurs de la ville; mais bientôt après il fut tué. Le bailli se sauva par-dessus les murs; et le bâtard d'Orléans étant arrivé à la tête d'une seconde embuscade, la ville fut entièrement soumise. Ce fut une grande nouvelle pour les Parisiens. Chartres n'est pas éloigné de Paris; c'était de là qu'arrivait la plus grande partie des farines, et le pain allait être encore plus cher. Tout semblait dégoûter les bourgeois de cette domination anglaise qui n'éprouvait plus que des échecs (*). »

- Les protestants assiégèrent Chartres sans succès en 1568; Henri IV la prit en 1591, après deux assauts infructueux et grâce à l'habileté du comte de Châtillon. Ce capitaine inventa, dit l'historien de Henri IV, un pont pour descendre à couvert dans le fossé et monter à l'assaut. Aussitôt que cette machine fut placée, les assiégés capitulèrent. En entrant dans la ville, le roi fut arrêté par une députation des habitants; le magistrat lui fit une longue et ennuyeuse harangue, où il établissait que la ville appartenait au roi par le droit divin et par le droit humain. Impatienté de ces longueurs, le Béarnais s'écria: Ajoutez-y: et par le droit canon. Puis, poussant son cheval, il entra dans Chartres.

CHARTREUSE (grande). Monastère célèbre par la beauté sauvage des sites qui l'entourent, par son ancienneté et par l'étendue de ses constructions, situé dans le département de l'Isère, à 24 kilomètres de Grenoble. Le désert au milieu duquel il s'élève fut

(*) De Barante, Histoire des ducs de Bourgogne.

donné par saint Hugues, évêque de cette ville, à saint Bruno, qui y fonda l'ordre des chartreux, en construisant de petits bâtiments épars, à un kilomètre de l'édifice actuellement existant. De nouvelles constructions, faites en 1132, furent, dans la suite, incendiées et rétablies à huit reprises différentes. Les bâtiments actuels datent de 1676. Les religieux qui habitaient la grande chartreuse furent dispersés en 1789; ils s'y sont réunis en partie depuis 1816. Ils sont aujourd'hui au nombre de trente. (Voyez l'article suivant.)

CHARTREUX. Célèbre ordre religieux fondé par saint Bruno, à la fin du onzième siècle. Cet homme remarquáble était à Cologne, vers l'an 1030. Il fut de bonne heure attaché par l'évêque saint Annon à l'école de la collégiale de Saint-Cunibert. Après avoir étudié ensuite à l'école de Reims, il fut fait successivement, par l'archevêque Gervais, écolâtre, puis chancelier de cet archevêché, dignité qui lui donnait la direction des écoles publiques de la ville et l'inspection sur tous les établissements d'instruction publique du diocèse. Lorsque l'usurpateur simoniaque du siége de Reims, Manassès, eut été cité au concile d'Autun, en 1077, où Bruno fut un de sés accusateurs, et lorsqu'il eut été déposé, en 1080, le chapitre de Reims voulut le remplacer par Bruno: mais celui-ci avait dès lors résolu de se consacrer entièrement à Dieu; il se retira à Saisse-Fontaine, dans le diocèse de Langres, et là, accompagné de deux amis, il se livra avec une ferveur exemplaire aux exercices de la vie monastique. Il quitta ensuite ce lieu et alla quelques années après, avec quatre compagnons, trouver saint Hugues, évêque de Grenoble, qui les conquisit, en 1084, dans le désert appelé Chartreuse, situé à 24 kilomètres de cette ville. Là, Bruno et ses compagnons, dont le nombre augmenta bientôt. formèrent un petit établissement qui prit en peu de temps de grands accroissements, et se rendit utile à la contrée environnante en créant des usines

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et en exploitant des mines. En 1089, pape Urbain II appela Bruno auprès de lui, et celui-ci, après avoir refusé tous les honneurs dont on voulait le combler, alla, en 1094, fonder une seconde chartreuse dans la solitude della Torre, au diocèse de Squillace, en Calabre; il y mourut le 6 octobre 1101. Léon X autorisa les chartreux à célébrer un office propre en son honneur office qui fut étendu à toute l'Église par Grégoire X, en 1623. Cinquante ans après la fondation de la chartreuse de Grenoble, Pierre le Vénérable faisait le tableau suivant du genre de vie adopté par les disciples de Bruno : « Ils sont les plus pauvres de tous les moines; la vue seule de leur extérieur effraye. Ils portent un rude cilice, affligent leur chair par des jeûnes presque continuels, et ne mangent que du pain de son en maladie comme en santé. Ils ne connaissent pas l'usage de la viande, et ne mangent du poisson que quand on leur en donne. Les dimanches et les jeudis ils vivent d'oeufs et de fromage des herbes bouillies font leur nourriture les mardis et les samedis. Les autres jours de la semaine, ils vivent de pain et d'eau. Ils ne font par jour qu'un seul repas, excepté dans les octaves de Noël, de l'Epiphanie, de Pâques, de la Pentecôte et de quelques autres fêtes. La prière, la lecture et le travail des mains, qui consiste principalement à copier des livres, sont leur Occupation ordinaire. Ils récitent les petites heures de l'office divin dans leurs cellules, lorsqu'ils entendent sonner la cloche, mais ils s'assemblent à l'église pour chanter vêpres et matines; ils disent la messe les dimanches et fêtes. » Bruno n'avait pas donné de règle particulière à ses disciples; ce fut seulement en 1228 que le cinquième général de l'ordre, Guigues, rédigea les usages et les coutumes qui s'étaient, de génération en génération, conservés depuis leur fondateur. Des additions et des modifications y furent faites par plusieurs chapitres généraux, et enfin il en résulta ce qu'on appelle la règle des Char

treux, imprimée en 1581, réimprimée cent ans plus tard, et confirmée en 1682 par Innocent XI. Cet ordre, regardé comme le modèle de la vie contemplative, a eu cela de particulier, qu'il n'eut jamais besoin de réforme. Il a donné à l'Église six cardinaux, deux patriarches, quinze archevêques et quarante-neuf évêques, et conservait encore, au siècle dernier, plusieurs rites anciens dans la célébration de la messe. Au milieu du dixhuitième siècle il possédait, dans les différents États catholiques de l'Europe, cent soixante et douze maisons, divisées en seize provinces, dont chacune avait deux visiteurs. Au nombre de ces maisons figuraient quatre couvents de femmes, qui devaient être fort anciens, car, dans les statuts, rédigés en 1368, il fut défendu de recevoir à l'avenir, ou d'incorporer à l'ordre de nouveaux couvents de filles. Martin, onzième général de la société, donna pour devise à l'ordre un globe, surmonté d'une croix, avec ces mots : « Stat crux, dum volvitur orbis. » Ce fut le pape Jules II qui ordonna que toutes les maisons de l'ordre obéiraient au prieur de la grande Chartreuse, c'est-à-dire de la Chartreuse de Grenoble. C'était dans le petit cloître du couvent des chartreux, à Paris, que se trouvaient les admirables peintures de le Sueur, représentant la vie de saint Bruno, peintures qui se trouvent actuellement au musée du Louvre. V. CHARTREUSE (grande).

CHASLES (L.), député d'Eure-etLoir à la Convention nationale, était chanoine de Chartres avant la révolution, dont il embrassa subitement les principes avec une grande ardeur. Il prit place parmi les montagnards; mais il tomba bientôt dans les excès les plus révoltants, et lui, ancien ministre de la religion catholique, il n'eut pas honte de se joindre à Hébert pour lever l'étendard de l'athéisme, et fut envoyé en 1793 à l'armée du Nord en qualité de commissaire. Rappelé à plusieurs reprises par la Convention, il s'excusa longtemps, prétextant une blessure qu'il avait reçue à Hondschoote, et

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reparut enfin dans l'assemblée, où il continua de manifester ses anciens principes. Ayant été signalé, le 1er avril 1795, comme l'un des chefs de la conspiration jacobine, il fut d'abord enfermé au château de Ham, puis amnistié par la loi du 4 brumaire an IV, et admis aux Invalides. Mais exilé ensuite, comme tous les ex-conventionnels, à vingt lieues de la capitale, il vécut depuis obscur et oublié. Chasles est mort en 1826, laissånt en manuscrits des Mémoires sur la révolution.

CHASSE. César et Arrien rapportent que les Gaulois aimaient la chasse avec passion, qu'ils s'y faisaient aider par des chiens hardis et vigoureux, nés dans leur pays ou importés de l'île de Bretagne, et que pour qu'elle leur plût, il fallait qu'elle fût environnée de dangers et offrit une image de la guerre. Aussi la poursuite de l'urus, espèce de taureau sauvage de forte taille et d'une grande férocité, que nourrissaient leurs forêts, et dont l'espèce a disparu, était-elle l'exercice auquel ils se livraient le plus volontiers, quand ils n'étaient pas entraînés au loin par une expédition militaire. Il paraît que sous la domination des Romains cette passion fut réprimée par les édits impériaux; car lorsque les Francs, déterminés chasseurs, comme tous les peuples d'origine germanique, arriverent dans la Gaule, la chasse n'y était plus guère qu'un métier pratiqué par les soldats des frontières, d'après les ordres et pour le profit des pourvoyeurs de la table des empereurs. Quand la cour avait besoin de gibier, le maître du sacré palais écrivait aux ducs qui commandaient dans les provinces limitrophes, et ceux-ci détachaient des troupes légères appelées indifféremment sagittarii ou venatores, pour en abattre la quantité nécessaire.

Comme la chasse n'était point très en usage chez les Gallo-Romains, et qu'elle était, en quelque sorte, abandonnée aux soldats, lorsque les peuplades étrangères eurent pris pied dans la Gaule, les possesseurs du sol virent sans peine leurs vainqueurs se l'attribuer exclusivement, et la défendre au

bas clergé, aux diacres, aux prêtres, aux abbés, aux évêques; prohibition dont les deux dernières classes surent bien s'affranchir quand les membres qui les composaient furent devenus des seigneurs suzerains.

La chasse se divisait déjà en vénerie et en fauconnerie, et pour qu'elle fût productive, elle était soumise à des règlements très-sévères. On ne pouvait prendre ou mettre à mort des bêtes fauves qu'avec la permission du roi. Un urus que Gontran, roi d'Orléans et de Bourgogne, trouva tué dans une de ses forêts, fut la cause du premier duel judiciaire dont il soit fait mention dans notre histoire. La loi salique. frappe d'une amende quiconque tuera ou volera le cerf que les chiens d'un autre auront réduit. Celui qui vole un chien de chasse est condamné à payer quinze sous; si le chien est dressé, l'amende monte à quarante sous. Chez les Bourguignons, la punition était moins sévère, et l'amende ne s'élevait qu'à sept sous, dont cinq revenaient au propriétaire de l'animal dérobé; mais aussi le larron était condamné à baiser le derrière du chien.

En même temps, il était enjoint aux juges de faire garder avec le gibier les forêts il se retirait, de nourrir les chiens qu'on leur recommandait, de tenir les fauconneries royales bien fournies de faucons et d'éperviers, et d'exiger avec soin les redevances qui devaient être payées en oiseaux de cette espèce. Dans chaque métairie du roi, il devait y avoir des oiseleurs et des gens qui sussent faire des filets pour toute espèce de chasse.

Au reste, si les premiers rois de France donnaient une attention si particulière à la chasse, c'est qu'elle était pour eux un revenu beaucoup plus qu'un divertissement. Ses produits, quels qu'ils fussent, étaient servis sur leur table et contribuaient à la nourriture des officiers de leur maison.

La chasse et les soins que réclamait la garde du gibier avaient donné lieu à la création d'une administration si nombreuse, qu'elle équivalait à une armée. Il existait des veneurs et des

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