SCENE V. PIRRHUS, HERMIONE, PHOENIX. Vo PIRRHUS. ous ne m'attendiez pas, Madame, & je voi bien Que mon abord ici trouble votre entretien. Que je vous ai promis la foi, que je lui vouë, que yens Nos deux peres fans nous formerent ces liens, Et fans confulter ni mon choix ni le vôtre, Nous fumes fans amour engagés l'un à l'autre. Mais c'eft affez pour moi que je me sois sou mis , Par mes Ambaffadeurs mon cœur vous fut Eût Eût déja prévenu le pouvoir de vos yeux; Mais cet amour l'emporte; & par un coup fu Nous jurer, malgré nous, un amour immortel. Après cela, Madame, éclatez contre un Ttaî tre, Qui l'eft avec douleur, & qui pourtant veut l'être. Pour moi, loin de contraindre un fi jufte cour roux, Il me foulagera peut-être autant que vous. Donnez-moi tous les noms deftinés aux par jures; Je crains votre filence, & non pas vos injures: Et mon cœur foulevant mille fecrets témoins, M'en dira d'autant plus que vous m'en direz moins. HER HERMIONE. Seigneur, dans cet aveu dépouillé d'artifice, J'aime à voir que du moins vous vous rendiez Et justice, que voulant bien rompre un nœud si so lemnel, Vous vous abandonniez au crime en criminel, Eft-il juste après tout, qu'un conquérant s'abaiffe Sous la fervile loi de garder fa promeffe? Non, non, la perfidie a dequoi vous tenter, Et vous ne me cherchez que pour vous en vanter. Quoi, fans que ni ferment, ni devoir vous retienne, Rechercher une Grecque, amant d'une Tro yenne? Me quitter, me reprendre, & retourner en cor De la fille d'Hélène, à la Veuve d'Hector? Couronner tour à tour l'efclave & la Prin ceffe, Immoler Troye aux Grecs, au fils d'Hector la Gréce, Tout cela part d'un cœur toujours maître de foi, D'un D'un Héros qui n'eft point efclave de fa foi. Pour plaire à votre Epoufe, il vous faudroit peut-être Prodiguer les doux noms de parjure, & de traître. Vous veniez de mon front obferver la pâleur Pour aller dans fes bras rire de ma douleur. Pleurante après fon char vous voulez qu'on me voye. Mais, Seigneur, en un jour ce feroit trop de joye. Et fans chercher ailleurs des titres empruntés, Ne vous fuffit-il pas de ceux que vous portez? Du vieux pere d'Hector la valeur abatuë Aux pieds de fa famille, expirante à fa vuë, Tandis que dans fon fein votre bras enfoncé Cherche un refte de fang que l'âge avoit glacé, Dans des ruiffeaux de fang Troye ardente plongée, De votre propre main Polixène égorgée Aux yeux de tous les Grecs indignés contre vous, Que peut-on refufer à ces généreux coups ? PIRRHUS. Madame, je fçai trop à quels excès de rage La La vengeance d'Hélène emporta mon coura ge. Je puis me plaindre à vous du fang que j'ai verfé. Mais enfin je confens d'oublier le paffé. се De mes heureux foupirs m'aprenne l'inno cence. Mon cœur, je le voi bien, trop prompt à se gêner, Devoit mieux vous connoître, & mieux s'éxa miner. Mes remords vous faifoient une injure mor telle, Il faut fe croire aimé, pour le croire infidel le. Vous ne prétendiez point m'arrêter dans vos fers. J'ai craint de vous trahir, peut-être je vous fers. Nos cœurs n'étoient point faits dépendans l'un de l'autre. Je fuivois mon devoir, & vous cédiez au vô tre. Rien ne vous engageoit à m'aimer en effet. HER |