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TÉLEMA QUE,

FILS D'ULYSSE,

Par feu Meffire FRANÇOIS DE SALIGNAC
DE LA MOTTE-FENELON, Précepteur de
Meffeigneurs les Enfants de France, & depuis
Archevêque - Duc de Cambray, Prince du
Saint-Empire Romain, &c.

NOUVELLE ÉDITION

ENRICHIE DE FIGURES EN TAILLE-DOUCE,

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A MAESTRICHT,
Chez J. E. DUFOUR & PH. Roux, Imprimeurs-

Libraires affociés.

M. DCC. LXXXII

17820

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ruce 63r

I 1910

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fie.

I l'on pouvoit 'goûter la vérité toute Origine &
nue, elle n'auroit pas befoin, pour fe fin de la Poé-
faire aimer, des ornements que lui prête
l'imagination mais fa lumiere pure &
délicate ne flatte pas affez ce qu'il y a de

fenfible en l'homme; elle demande une attention qui gêne trop fon inconftance naturelle. Pour l'inftruire, il faut lui donner non-feulement des idées pures qui l'éclairent, mais encore des images fenfibles qui l'arrêtent dans une vue fixe de la vérité. Voilà la fource de l'Eloquence, de la Poéfie, & de toutes les Sciences qui font du reffort de l'imagination. C'eft la foibleffe de l'homme qui rend ces Sciences néceffaires. La beauté fimple & immuable de la vertu ne le touche pas toujours; il ne fuffit point de lui montrer la vérité, il faut la peindre aimable (a),

(a) Omne tulit punctum, qui miscuit utile dulci; Lectorem delec tando, pariterque monendo. HoR. ART. POET.

a

from Sire.

Nous examinerons le Poëme de Télemaque-felon ces deux vues, d'inftruire & de plaire, & nous tâcherons de faire voir que l'Auteur a inftruit plus que les Anciens, par la fublimité de fa morale, & qu'il a plu autant qu'eux en imitant toutes leurs beautés. Deux fortes Il y a deux manieres d'inftruire les hommes pour de Poéfies les rendre bons. La premiere, en leur montrant la héroïques, difformité du vice, & fes fuites funeftes : c'eft le deffein principal de la Tragédie. La feconde, en leur découvrant la beauté de la vertu, & fa fin heureuse: c'eft le caractere propre à l'Epopée, ou Poëme Epique. Les paffions qui appartiennent à l'une, fout la terreur & la pitié. Celles qui conviennent à l'autre font l'admiration & l'amour. Dans l'une, les Acteurs parlent; dans l'autre, le Poëte fait la narration.

Définition

On peut définir le Poëme Epique, Une Fable ra& divifion contée par un Poëte, pour exciter l'admiration & infde la Poéfie Epique. pirer l'amour de la vertu, en nous représentant l'action d'un Héros favorifé du Ciel, qui exécute un grand deffein malgré tous les obftacles qui s'y oppofent. Il y a donc trois chofes dans l'Epopée, l'Action, la Morale & la Poéfie.

que.

I. DE L'ACTION ÉPIQUE.

Qualités de L'Action doit être grande, une, entiere, merveil l'Action Epi- leufe, & d'une certaine durée. Télemaque a toutes ces qualités. Comparons-le avec les deux modeles de la Poéfie Epique, Homere & Virgile, & nous en ferons convaincus.

Deffein de

Nous ne parlerons que de l'Odyffée, dont le plan l'Odyffée. a plus de conformité avec celui de Télémaque. Dans ce Poëme, Homere introduit un Roi fage revenant d'une guerre étrangere, où il avoit donné des preuves éclatantes de la prudence & de fa valeur; des tempêtes l'arrêtent en chemin, & le jettent dans divers pays, dont il apprend les mœurs, les loix, la politique. De-là naiffent naturellement une infinité d'incidents & de périls. Mais fachant combien fon abfence caufoit de défordre dans fon Royaume, il fur-. monte tous ces obftacles, méprife tous les plaifirs de la vie; l'immortalité même ne le touche point : il renonce à tout, pour foulager fon peuple, & revoir fa famille.

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