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conseiller-clerc. Avec l'autorité d'un grand âge, il conservait tout le feu de la jeunesse. Son éloquence n'avait rien d'étudié, elle était austère comme les dogmes qu'il professait, et partait d'une ame énergique. Les jeunes magistrals, toujours portés aux résolutions hardies, se ralliaient autour de ce vétéran du jansénisme. La grand'chambre, composée de vieillards auxquels l'expérience avait appris tous les dangers des combats contre la cour, opposait à cet orateur véhément l'abbé Labbé Mengui, dont l'élocution était douce, abondante et fleurie, et qui réunissait les artifices des plus subtiles molinistes à ceux des plus

verses théologiques à une vive passion pour les armes. Ce dernier penchant céda enfin à l'autre ; il prit l'habit ecclésiastique, et fut reçu conseillerclerc au parlement de Paris en 1684. Il écrivit contre les jésuites avec emportement, et se montra leur 'ennemi le plus acharné dans ses fonctions de magistrat. Il ne ménageait pas le cardinal de Fleury dont il avait été l'ami dans ses premières années. Il l'accablait d'épigrammes peu délicates, et rappelait quelquefois des intrigues galantes du prélat. Par ces discours aigres et mordans, il mit à bout sa patience. L'exil qu'il subit devint pour lui une nouvelle occa sion de déployer la fermeté de son caractère. Sa sobriété était égale à sa bienfaisance. Il mourut à Paris, en 1745, âgé de quatre-vingt-dix ans.

Mengui!

fins courtisans. Le premier président, Portail, servait la cour dont il était le pensionnaire, et craignait de blesser le corps dont il était l'organe. Joly de Fleury était encore proeureur général. Son amitié constante pour le chancelier d'Aguesseau, qui s'éloignait par degrés des jansénistes, refroidissait son zèle pour ce parti. Cependant il osa plusieurs fois s'élever contre la cour de Rome, et se rendre appelant des brefs du pape. C'était lui qui avait fait rejeter la légende de Grégoire VII (a), de cet Attila sacré.

Telle était la situation du parlement lorsque le cardinal de Fleury, après lui avoir fait enregistrer de force toutes les bulles des papes, voulut le réduire au silence. Dès le lendemain du lit de justice, l'abbé Pucelle proposa la posés par le plus noble et la plus judicieuse des protespremier. tations: c'était une déclaration qui tendait à mettre l'autorité royale à l'abri des atteintes

Articles pro

(a) Joly de Fleury obtint, en 1740, la survivance de sa charge de procureur général pour son fils aîné. Il mourut en 1756 dans sa quatre-vingt-unième année. La France a compté peu de magistrats aussi versés dans le droit public. Il exprimait des pensées fortes avec une élocution précise et lumineuse. Il n'appartient qu'aux monarchies tempérées de produire des hommes de ce mérite et de ce caractère.

de Rome. J'en vais transcrire les articles, en faisant remarquer qu'ils diffèrent très-peu de ceux que Bossuet, interprète du clergé de France, avait publiés comme maximes de l'Église Gallicane:

1o La puissance temporelle, établie directement par Dieu, est indépendante de toute autre, et nul pouvoir ne peut donner la moindre atteinte à son autorité;

2o Il n'appartient pas aux ministres de l'Église de fixer les termes que Dieu a placés entre les deux puissances; les canons de l'Église ne deviennent lois de l'État qu'autant qu'ils sont revêtus de l'autorité du souverain;

3o A la puissance temporelle seule appartient la juridiction extérieure qui a le droit de contraindre les sujets du roi ;

4o Les ministres de l'Église sont complables au roi et à la cour, sous son autorité, de tout ce qui peut blesser les lois de l'État;

5o Les ordonnances, édits, réglemens, arrêts de la cour, sous l'autorité de nos rois, seront exécutés selon leur forme et teneur.

Le présent arrêté sera lu, publié et affiché. Voilà les maximes qu'un ministre cardinal osa condamner. L'arrêté du parlement fut cassé par un arrêt du conseil. Pendant les vacances, les hostilités restèrent suspendues,

pt les avocats

se

les esprits s'échauffèrent. La déclaration que venait de faire le parlement, lui avait attaché, outre les jansénistes, les ennemis du fanatisme et les ames nobles qui ne se croient pas dispensées des vertus civiques dans une Les curés monarchie. Deux classes puissantes dans la capitale, les avocats (a) et les curés, se parlement. joignaient avec ardeur à la cause du parlement. Comme le gouvernement avait supprimé les consultations des uns et les exhortations des autres relatives aux affaires ecclésiastiques, ils avaient des injures personnelles à venger. Ils se flattaient de lasser.

joignent au

(a) Le premier mouvement des avocats eut lieu en 1730. Quarante d'entre eux avaient signé un mémoire en faveur d'un curé de l'Orléanais, appelant des ordonnances de son évêque. Quelques expressions de ce mémoire parurent tendre à relever l'autorité du parlement au détriment de celle du roi. Il fut supprimé par arrêt du conseil, et les avocats protestèrent, dans une déclaration, des sentimens de respect et de soumission dont ils étaient pénétrés pour l'autorité royale. L'année suivante, l'archevêque de Paris ayant obtenu l'évocation au grand conseil, de l'appel comme d'abus interjeté par les avocats, d'une ordonnance contre eux rendue par ce prélat, ils fermèrent leurs cabinets, et dix d'entre eux furent exilés à cette occasion.

Journal de Louis XV.

par
la constance et la vivacité de leurs atia-
ques un ministre bientôt octogénaire. Cha-
cun donnait pour excuse de sa résistance
les intérêts même du roi qu'on défendait
contre les ministres. L'esprit d'opposition
était partout, et l'esprit de rebellion n'était
nulle part.

On s'aperçut des progrès qu'avaient faits 1731. les principes d'indépendance dès la première séance du parlement à sa rentrée. Le comle de Maurepas fut chargé d'apporter à cette compagnie une lettre close du roi. On avait bien des raisons de soupçonner que le contenu en devait être fâcheux pour l'honneur et pour les droits du corps. Les chambres prirent le parti de refuser de l'ouvrir. Bientôt on leur fit dire que sa majesté leur en réitérait l'ordre formel, sous peine d'être traités en rebelles. Cette menace ne fit qu'irriter l'orgueil des magistrats. L'abbé Pucelle leur proposa d'aller se plaindre au roi de la manière dont on exécutait ses ordres; mais la cour était alors à Marly. Eh bien! faisons tous le voyage de Marly! s'écrièrent les conseillers des enquêtes. Ils répétèrent cette proposition avec tant d'emportement, que les vieux magistrats furent forcés de dire avec eux à Marly! à Marly! Ce voyage ful y avoir été

Ce corps va à Marly sans

mandé.

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