Imágenes de página
PDF
ePub

cependant de récompenser ce prétendu rival de Xénophon; il l'accueillit avec froideur, et l'envoya dans son gouvernement de Metz. Le maréchal régnait dans cette province, entouré d'un cortège de panégyristes et d'admirateurs. Bientôt il fut employé dans de nouvelles négociations. Le Les maré- maréchal de Maillebois avait été disgracié et de Broglie, pour s'être si lentement approché de Prague

Maillebois

Saxe.

et pour s'en être si honteusement éloigné. Le vieux maréchal de Broglie était puni par l'exil, de son inconcevable répugnance pour les batailles et pour le séjour des armées françaises en Allemagne. Ce général, en d'autres tems, s'était montré plus actif et plus heureux, mais la jalousie lui avait Le comte de fait sacrifier sa propre gloire. Le comte de Saxe s'offrait seul, entre tous les généraux, comme propre à ranimer l'ardeur des troupes et à conduire de grandes entre1744. prises. Il venait de recevoir le bâton de maréchal. Quoique la nature lui eût donné tout ce qui peut séduire le peuple et les cours, c'était un homme dont il n'était pas aisé d'apprécier tout le mérite. Lorsqu'il était condamné au repos, il concevait et developpait avec feu des projets qui, malgré leur vaste étendue, pouvaient être re

Mars.

gardés comme ceux d'un aventurier; mais à mesure qu'il approchait d'un événement, cette effervescence se calmait, les res sources qu'il indiquait étaient sûres, et ne s'offraient à personne. Il avait fait une étude particulière du caractère des soldats français, et pressentait les grandes choses qu'ils pourraient un jour exécuter (a). Vif, gai, plein de franchise, il ne parut jamais un étranger au milieu des Français. La gloire qu'il acquit parmi nous est toute nationale. On voulut entendre à Versailles les plans qu'il avait souvent développés dans des con

[ocr errors]

(a) On lit dans les œuvres du comte de Guibert, un passage très-curieux, dans lequel il résume toutes les idées du maréchal de Saxe, relativement à une nouvelle organisation du système militaire de la France. On y voit que ce grand guerrier avait conçu tout le parti que des généraux habiles pourraient un jour tirer de l'agilité, de la vivacité et du coup-d'œil des soldats français. Il songeait à les débarrasser de tout cet attirail qui gênait leurs mouvemens et traînait toutes les campagnes en longueur. Ce système est indiqué dans un ouvrage que Maurice de Saxe composa en 1732, et intitula modestement Mes Réveries. L'exécution en fut alors contrariée par l'opposition unanime des chefs, et ne put avoir lieu, même après que d'éclatantes victoires eurent mérité au comte de Saxe une influence qui semblait devoir écarter tous les obstacles.

Le but de la

guerre est

seils de guerre. La duchesse de Châteauroux fut portée à l'admiration pour le fils de la comtesse de Konigsmarck. Le duc de Richelieu devint son partisan, n'osant être son rival. Le roi, qui s'était trop habitué à la pusillanimité d'un vieillard, se sentit ranimé par la confiance du héros

saxon.

L'hiver de 1743 à 1744 fut employé à de enia arrêté, grands préparatifs. Tous les plans qui furent arrêtés, étaient imposans. La France, depuis la guerre de 1672, n'avait pas fait de mouvemens d'une si grande étendue. On donna enfin un but positif à la guerre, la conquête des Pays-Bas autrichiens fut l'opération principale qu'on eut en vue. On employa divers moyens pour déguiser cette entreprise et pour en assurer le succès; on fit en sorte que l'Autriche fût de nouveau inquiétée dans le centre de sa domination. Voltaire est On eut recours au roi de Prusse pour ralprès du roi lumer la guerre dans la Bohême et dans la Moravie, et pour menacer Vienne. Déjà Voltaire avait été envoyé vers ce prince, qui ne cessait d'appeler auprès de lui le poète le plus fait pour charmer son esprit et pour célébrer sa gloire. On se serait bien gardé de revêtir d'un caractère diplomatique un

envoyé au

de Prusse.

1

de ce monar

homme qui n'avait que des titres littéraires. Frédéric le reçut avec des honneurs que depuis long-tems les monarques n'accordaient plus au talent; mais il affecta de ne donner qu'une attention légère aux insinuations politiques d'un Français qui ne pouvait garantir aucune promesse faite au nom du roi de France. Le cabinet de Versailles, après une si faible tentative, se servit de moyens plus directs. Louis XV parut conduire lui-même cette, négociation; mais c'était un politique habile, Chavigny, l'un des amis de la duchesse de Châteauroux, qui en était en effet chargé. Frédéric était Dispositions sérieusement alarmé des victoires et des que. progrès de l'Autriche; il ne doutait pas que les armées de cette puissance, soit qu'elles fussent arrêtées devant les forteresses de l'Alsace et de la Flandre, soit qu'elles parvinssent à humilier et à désoler la France, ne fussent bientôt prêtes à retomber sur la Silésie. Il avait intercepté une correspondance entre la reine de Hongrie et le roi d'Angleterre, dans laquelle il était insulté et menacé. Une paix de deux ans avait accru ses moyens ; de nouvelles possessions pouvaient être le prix d'une seconde entreprise; il ne voulait pas que l'Europe

Espagne.

Ses succès en

perdît le souvenir de la gloire qu'il avait acquise dans la première; enfin, il ne voyait pour lui-même qu'un moyen de salut, c'était de se montrer toujours redoutable. Voilà les motifs qui le rapprochaient de la France; il l'avait abandonnée avec une précipitation qu'on pouvait accuser de perfidie; lorsqu'il se déclara de nouveau pour elle, sa conduite eut toutes les apparences de la générosité (a).

Il restait un allié précieux au cabinet de Amérique Versailles, c'était le roi d'Espagne. Sans gleterre. le concours de cette puissance, comment défier les forces navales de l'Angleterre?

contre l'An

(a) M. le maréchal de Schmettau avait été envoyé par le roi de Prusse auprès de Louis XV, tant pour rendre compte des mouvemens de l'armée française, , que pour presser le roi très-chrétien de remplir ses engagemens en poursuivant jusqu'en Bavière les troupes de la reine lorsqu'elles repassaient le Rhin. Schmettau apprit à Louis XV que le roi de Prusse entrerait en campagne le 17 d'août, et qu'il employerait cent mille hommes à la diversion qu'il allait faire en faveur de l'Alsace. Ce maréchal mit tout en usage pour donner aux armées françaises plus d'activité et de vigueur, et peut-être y serait-il parvenu, si Louis XV ne fût pas tombé malade à Metz.

OEuvres de Frédéric II, Histoire de mon temps.

« AnteriorContinuar »