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l'effet d'un discours si emporté. « Taisez» vous, nourrice, dit-elle, vous ferez mou» rir le roi.- Què m'importe qu'il meure, reprit cette femme : qu'il meure, ce n'est qu'un homme de moins; au lieu que, abandonne le gouvernement, ses peuplès, » ses enfans, son royaume sont perdus. »

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s'il

La reine voyait Philippe ébranlé. Elle crut devoir s'aider des instances du maréchal de Tessé, ambassadeur de France à Madrid. Celui-ci vint trouver le roi; et, reproduisant les alarmes qui s'étaient offertes à l'imagination fougueuse de la nourrice, il représenta que les seigneurs castillans, dont le roi avait déjà éprouvé l'ingratitude, pouvaient, dans une minorité, se liguer contre les descendans de Louis XIV, rompre tout pacte avec la France, et troubler les deux royaumes par des guerres cruelles. Tout ce qui rappelait à Philippe sa première patrie, rendait quelque énergie à son ame; mais des prêtres seuls pouvaient bannir de son esprit les terreurs que d'autres prêtres y avaient jetées. Le nonce du pape, Aldobrandin, Le nonce du vint lever tous ses scrupules. Philippe dé- scrupules de clara, le 5 septembre 1724, qu'il reprenait la couronne en propriété. La reine, le marquis et la marquise de Grimaldo régnèrent

pape lève les

Philippe v. Il remonte sur le trône.

au lieu d'une commission qui, sans doute, n'avait pas, sans des desseins coupables, fait parler des prêtres imposteurs. La pusillanimité religieuse que le roi venait de montrer affaiblissait encore la monarchie espagnole. 1725. Le duc de Bourbon ne craignit pas de Avril lui faire le plus sanglant outrage, en renvoyant l'infante dont la main était promise à Louis XV.

l'infante et

Renvoi de Les bons Français étaient affligés de voir mariage du leur jeune roi, à un âge où il pouvait affermir la paix du royaume en lui donnant un dauphin, retenu par un lien que le régent avait formé, dans le dessein de le laisser encore long-temps sans postérité. L'infante n'avait que six ans, Louis en avait près de quinze. Le duc de Bourbon, depuis son ministère, avait conçu une vive inimitié contre le duc d'Orléans, fils du régent. Il voyait avec inquiétude un parti considérable se ranger autour du premier prince du sang, et l'engager, malgré sa timidité et son apathie naturelles, dans quelques actes d'opposition. Il se regardait comme perdu si le roi mourait sans enfans, et ne pouvait supporter l'idée de voir son rival monter sur le trône. Une maladie peu grave, dont Louis fut atteint, redoubla les alarmes

de M. le duc. Il vint dans la nuit s'informer plusieurs fois de sa santé. On l'entendit se dire à lui-même : Je n'y serai plus pris; s'il guérit, je le marierai. La marquise de Prie et Duverney, depuis long-temps, l'exhortaient à prendre cette résolution, Le maréchal de Villars, attaché de cœur au sang de Louis XIV, ne cessait de représenter la nécessité de marier le roi avec une princesse qui pût bientôt combler l'espoir des Français. Il en avait souvent parlé au jeune monarque, avec une franchise militaire (a).

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Le duc de Bourbon avait songé d'abord à unir le roi avec une de ses sœurs, mademoi

(a) « Le roi ne tourne point encore ses beaux et jeunes regards sur aucun objet. Les dames sont toujours prêtes, et l'on ne peut pas dire le roi ne l'est pas, puisqu'il est plus fort et plus avancé à quatorze ans et demi que tout autre jeune homme à dix-huit...... J'ai parlé très-fortement à Sa Majesté dans le conseil sur l'extrême importance aux rois de s'assurer une postérité dont dépendent souvent la tranquillité de leurs États et leur propre conservation. « Vous devez, sire, d'autant plus y songer, que » Dieu donne à vos peuples la consolation de vous »voir si fort à quatorze ans et demi, qu'il ne tient » qu'à vous de nous donner bientôt un dauphin. >>>

Journal de Villars.

Premiere idée de M. le

duc.

Il destinait au roi l'une

selle de Vermandois. Un prince, qui aurait eu l'assurance et la fermeté nécessaires aux ambitieux, se serait invariablement arrêté à ce choix. La maison de Condé aurait ainsi régné long-temps sous le nom d'un roi dont l'esprit et le caractère tardaient à se développer. Mais le duc de Bourbon, en décelant ses vues pour l'avenir, avait à craindre les murmures de la nation dont il savait n'être point aimé, la jalousie secrète de l'évêque de Fréjus, enfin l'opposition déclarée du duc d'Orléans et de son parti. Ces obstacles étaient de nature à effrayer un homme qui avait toujours montré plus d'orgueil que de résolution.

Mademoiselle de Vermandois l'emportait de ses sœurs en beauté sur toutes les princesses qui pouvaient aspirer à un mariage aussi illustre. Élevée dès l'âge le plus tendre dans un couvent, elle avait été préservée des séductions de la cour. Son éducation n'avait pas été négligée; son esprit était juste et fin; son caractère altier, mais sincère. Madame de Prie voulut juger cette princesse par ellemême. Elle se fit présenter à elle sous un nom supposé; et, dans un long entretien, elle lui fit pressentir la brillante destinée qui l'attendait. Mademoiselle de Vermandois,

habituée à maîtriser ses mouvemens, ne témoigna ni joie ni surprise. La marquise en conclut qu'il y aurait peu à compter sur sa reconnaissance. Elle engagea ensuite la conversation de manière à s'assurer de ce qui l'intéressait particulièrement, de l'opinion que la princesse avait d'elle. A peine lui eut-elle nommé la marquise de Prie avec quelques mots d'éloge, que mademoiselle de Vermandois l'interrompit vivement, et s'expliqua sur la maîtresse de son frère avec l'horreur qu'inspire le vice à une jeune personne fière et religieuse. Elle plaignit M. le duc de supporter un joug aussi honteux. Elle alla jusqu'à dire que si elle devenait reine, elle mettrait au nombre de ses devoirs d'éloigner cette femme de la cour. La marquise eut peine à contenir sa fureur. Elle prit brusquement congé de la princesse, et, en s'éloignant, elle dit : Va, tu ne seras jamais reine.

Paris Du

verney l'en

Quel que fût son empire sur son amant, elle craignit de lui faire part de l'épreuve détourne. qu'elle venait de faire. Elle chargea Pâris Duverney de détourner le prince d'un choix qui, en la perdant, perdrait aussi ses protégés. Duverney, alarmé pour lui-même, se hâta de seconder le ressentiment de la mar

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