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le traité du Pruth (a) offrait encore un humiliant témoignage. La czarine s'aida de l'Au

(a) Pierre-le-Grand avait fait en 1711 une campagne très-malheureuse contre les Turcs; il était entré sans précaution dans les provinces de la Moldavie et de la Valachie; toutes les forces ottomanes s'ébranlèrent pour l'accabler. Il se vit obligé de résister avec 37,000 combattans à une armée que quelques historiens portent à 250,000 hommes ; il était déjà cerné de toutes parts, lorsque pour échapper au sort que lui-même avait fait subir à Charles XII à Pultawa, il tenta de s'échapper dans la nuit; au point du jour il fut atteint par une grande partie de l'armée turque. La bataille s'engagea sur les bords du Pruth. Pierre fit de vains efforts pour repasser ce fleuve; mais les Turcs ne réussirent point à forcer son camp. Après le massacre affreux qui eut lieu dans cette journée, Pierre restait toujours enfermé. Catherine, qu'il avait déjà épousée secrètement, et qui l'avait suivi dans cette expédition, releva son courage abattu. On prétend qu'elle alla trouver le grand-visir dans sa tente, et qu'elle le séduisit par des présens considérables. Celui-ci, qui ne se regardait pas comme certain du succès d'une attaque nouvelle, conclut avec le Czar un traité par lequel les Russes rendaient le territoire d'Azof et faisaient démolir plusieurs forteresses. Ce traité contenait un article qui faisait honneur à la politique et à la générosité ottomane: les Turcs y prenaient la Pologne sous leur

triche dans les efforts qu'elle allait faire, de concert avec Thamas-Kouli-Kan, contre la Turquie. Le cabinet de Vienne entra dans cette ligue avec le plus vif empressement. Il lui semblait que la destinée lui offrait une riche compensation des sacrifices Mortlu qu'il venait de faire en Italie. Mais Eugène gène. n'était plus; ce héros avait succombé, à 20 avril. l'âge de 73 ans (a), à ses glorieuses fatigues.

prince Eu

1736

protection et le Czar s'engageait à retirer ses troupes des frontières de cette république.

(a) François Eugène de Savoie naquit à Paris en 1663; il était arrière-petit-fils de Charles Emmanuel duc de Savoie, par son père le comte de Soissons; et par sa mère, Olympe Mancini, petitneveu du cardinal Mazarin. On sait combien il en coûta ǎ Louis XIV pour n'avoir pas discerné le mérite de l'abbé de Carignan (c'était le nom qu'Eugène portait dans sa jeunesse ), à qui d'abord il refusa une abbaye et ensuite un régiment; et de quelle manière Eugène vérifia les paroles qu'il prononça en quittant la France, où Louvois annonçait qu'il ne rentrerait plus. J'y rentrerai un jour en dépit de Louvois et même de son maître. La première victoire éclatante qu'il remporta au service de l'Empereur, fut celle de Zehnta, contre les Turcs, qui procura à l'Autriche la paix glorieuse de Carlowitz. Ilest inutile de rappeler ici ses nombreux exploits pen

Jamais un empire ne sentit davantage le videt que produit la mort d'un grand homme. A la vérité, son génie militaire avait paru un peu affaibli dans la campagne où il vit prendre Philipsbourg par les Français; mais il servait encore l'Autriche par ses conseils et par sa renommée. Des ministres et des généraux pleins d'orgueil et dépourvus de talens avaient pris sa place. Persuadés que la Russie et la Perse porteraient les plus grands coups à la Turquie, ils commencèrent avec

dant la guerre de la succession; sa haine contre Louis XIV était si vive, qu'elle éclata quelquefois par des traits peu généreux. Lorsque ce monarque était humilié par de sanglantes défaites, Eugène faisait chanter les prologues de Quinault, et disait à des prisonniers français: Vous voyez, Messieurs, combien j'aime à entendre les louanges de votre maître. On rapporte de lui une foule de mots qui annoncent un esprit distingué autant qu'une grande âme. Ses rares qualités n'étaient ternies par aucun genre de faiblesse; il était aussi propre aux soins du gouver nement qu'à la guerre. La maison d'Autriche décroissait depuis près d'un siècle, lorsqu'il en releva la fortune et la gloire. Les malheurs qu'elle éprouva immédiatement après la perte de ce grand général, manifestèrent ce que peuvent le génie et le nom d'un seul homme. Il avait soixante-treize ans quand il mourut. On lui fit les plus magnifiques obsèques.

au lieu de

les Russes,

1 Indostan.

de faibles moyens une entreprise qui avait pour but la chute de l'empire ottoman.

Le comte de Munnich, qui était alors pour la Russie ce que le prince Eugène avait été pour l'Autriche, avait mis beaucoup de vigueur et d'activité dans ses préparatifs. Mais tous les obstacles semblèrent réunis pour arrêter ses progrès; il s'avançait à peine dans la Crimée, qu'il se vit joué Thamas, par Thamas - Kouli - Kan. Ce conquérant seconder barbare, dont la dissimulation égalait l'auva soumettre dace, avait demandé à Munnich un train d'artillerie, des ingénieurs et des officiers capables de discipliner ses troupes. Aussitôt qu'il eut reçu ce secours, il abandonna la guerre dont il avait été le principal moteur. Il consacra toutes ses ressources à l'exécution d'un projet qu'il avait dès long-tems médité, et osa suivre la route qu'Alexandre s'était ouverte pour pénétrer dans l'Inde. Il traverse d'immenses déserts avec une armée à laquelle il a communiqué sa patience, son courage et son avidité. Il est déjà dans les États du GrandMogol; il s'empare du Caboulistan, boulevard de cet empire; défait des armées trois fois supérieures en nombre à la sienne; passe l'Indus en leur présence et les culbute

encore une fois; il soumet l'Indostan et le royaume de Lahor, marche à Delhy et fait prisonnier dans son palais un stupide em- 1739. pereur qui n'a point encore combattu. Il s'abreuve de sang, il se gorge de trésors, et reprend la route de ses Etats après s'être fait céder de vastes provinces, et après avoir imposé un tribut annuel de soixantedix millions à l'empereur qu'il voulait bien laisser languir sur le trône de Tamerlan.

Succès des

Russes,

et d'Oczakow.

Munich, privé de la puissante diversion qu'il attendait de la Perse, eut encore à re- prise d'Azof pousser, cent mille Tartares que la Turquie avait armés pour sa défense. C'était une entreprise difficile que de chasser de la Crimée ce peuple belliqueux. Quoique Munnich ne parvînt pas à soumettre tout entier ce pays qui devait un jour accroître la puissance de la Russie, il porta ses armes jusqu'à Azof, et s'empara des bouches du Don; il frappa un coup plus décisif, en assiégeant et en prenant un des boulevards les plus importans de la Turquie, Oczacow (a).

(a) C'est à ce siége qu'on vit les effets les plus étonnans de la discipline que Munnich avait imposée à un peuple guerrier, superstitieux, exalté dans l'esclavage. Il y avait dans son camp plusieurs maladies, suite de l'intempérance ou prétextées par le

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