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firent aucunes

balêtres et autres traits; et avec ce, saillies, auxquelles ne gagnèrent pas grandement; mais, pour tant qu'ils étoient bien garnis de vivres et habillements, se tinrent grand espace. Et avec ce, leur avoit été promis par aucuns tenant la partie du dauphin, qu'ils seroient secourus si puissamment que pour les délivrer de leurs ennemis.

CHAPITRE CCLXVIII.

Comment les Dauphinois, s'assemblèrent pour lever le siége d'Araines dessusdit ; et allèrent les Bourguignons et Anglois pour les rencontrer et combattre.

Au commencement de cet an, s'assemblèrent vers Compiegne plusieurs Dauphinois, en intention d'aller secourir ceux d'Araines; de laquelle assemblée étoient capitaines de par le dauphin, c'est à savoir le seigneur de Gamache, le seigneur de Moy, Pothon de Sainte-Treille et aucuns autres, avecque environ de huit cents à mille combattants, lesquels ils menèrent tous ensemble à Pierrepont, quiest au Vidame d'Amiens. Et nonobstant qu'icelle ville fût fortifiée de haies et de fossés pleins d'eau, toutefois entrèrent-ils dedans, et s'y logèrent tous ensemble; et après livrèrent un assaut à la forteresse dudit lieu. Mais elle fut bien défendue par ceux qui l'avoient en garde. Et entre temps qu'ils

étoient logés en ladite ville de Pierrepont, furent les nouvelles portées de leur assemblée à messire Jean de Luxembourg, qui étoit à son siége devant Araines; lequel premièrement prit conseil avecque plusieurs mille combattants, pour aller au-devant desdits Dauphinois. Desquels, de la partie dudit de Luxembourg, furent les principaux messire Hue de Launoi, maître des arbalêtriers de France; messire Raoul Bouteillier, anglois; le Borgne de Fosseux, chevalier; le seigneur de Saveuse, avecque autres experts hommes d'armes, lesquels allèrent gésir à Coucy; et le lendemain très matin chevauchèrent à Moreul. Auquel lieu ouïrent certaines nouvelles que les Dauphinois leurs ennemis étoient encore en la ville de Pierrepont; pourquoi, chevauchant en moùlt belle ordonnance, se hâtèrent pour les trouver; mais les dessusdits Dauphinois, qui jà étoient avertis de la venue de leurs ennemis, montèrent à cheval; et tous ensemble, après qu'ils eurent bouté les feux en leurs logis, s'allèrent mettre en bataille dessus la ville, vers Mont-Didier. Et adonc les Bourguignons et Anglois, au plus tôt qu'ils purent, passèrent la ville pour suivre leurs ennemis, nonobstant la chaleur du feu, qui moult les empêcha; et comme les autres, se mirent en bataille contre les Dauphinois. Et furent en cette même place faits plusieurs nouveaux chevaliers de la partie de Bourgogne, c'est à savoir le Bègue de Launoi, Antoine de Rubempré, Jacques de Brimeu, Robert Fretel, Gille

de Hardecourt, Mathieu de Landas, Philippe du Bos, Jean de Beauvoir, Waleran de Frèses, Tramet de la Tramerie, et plusieurs autres. Et entre temps, y eut entre les deux parties plusieurs escarmouches, et hommes d'armes d'un côté et d'autre portés à terre, et les aucuns terriblement navrés et occis. Toutefois, durant les choses dessusdites, les Bourguignons et Anglois étant à pied, se départirent les Dauphinois tous à cheval en bonne ordonnance, mettant derrière eux de leurs meilleurs gens, par manière d'arrière-garde, et prirent leur chemin vers Compiegne.

Et adonc lesdits Bourguignons et Anglois, voyant leur partement, envoyèrent après eux le seigneur de Saveuse, atout certain nombre de gens d'armes, pour les poursuivir et faire arrêter; et les autres capitaines, tous en bataille, les suivoient vigoureusement. Nonobstant ce, s'en allèrent lesdits Dauphinois atteints de peur, et eschevèrent (évitèrent) la bataille sans grand' perte, sinon de sept à huit de leurs gens ou environ, qui, de première venue, furent mis à mort. Entre lesquels en fut un vaillant homme d'armes, nommé Brunet de Gamache; et retournèrent à Compiégne. Et de la partie de Bourgogne y fut mort un vieil haulsert, nommé le Breton d'Ailly, qui en très long temps par avant ne s'étoit entremis de guerre, et avec lui aucuns autres en petit nombre. Après lesquelles besognes retournèrent les dessusdits Bourguignons et Anglois loger à Mareuil et autres villages, et de

CHRONIQUES DE MONSTRELet.

T. IV.

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là au siége d'Araines devers messire Jean de Luxembourg; et bref ensuivant les assiégés desdites forteresses d'Araines, qui jà étoient avertis de leur secours, non ayant, espérance de plus en avoir, commencèrent à parlementer pour traiter; et en la fin, de chacune partie fut accordé, par condition qu'ils rendroient les deux forteresses en la main de messire Jean de Luxembourg, et s'en partiroient, saufs leurs corps et leurs biens, garnis de bons saufsconduits, pour aller à Compiegne, au Crotoy, Gamache, St-Valery, et autres lieux de leur obéissance, depuis Seine jusques au Crotoy: et étoient environ cent hommes d'armes et cent archers, desquels étoient les principaux messire Coquart de Cambronne, et un nommé Jean Sarpe, qui, ce conclu, rendirent les deux forteresses très bien garnies de vivres et habillements de guerre, audit de Luxembourg; lequel fit tantôt abattre l'un desdits châteaux, c'est à savoir celui de la dame d'Araines, et l'autre il pourvut de nouvelle garnison de ses gens, et en fit capitaine messire Jacques de Lievin. Et après que les dessusdits Dauphinois furent de là partis, ledit de Luxembourg, atout son ost, retourna en son châtel de Beaurevoir, puis donna congé à ses capitaines et à autres, qui avoient été avec lui; et assez tôt après messire Jacques de Harcourt et ses gens allèrent courre jusques à Auxy sur la riviere d'Authie, et en plusieurs autres lieux et villes, desquelles ils ramenèrent au Crotoy plusieurs prisonniers et autres proies.

CHAPITRE CCLXIX.

Comment Henri, roi d'Angleterre, eut l'obéissance du marché de Meaux ; et des exécutions qui furent faites à ceux de dedans, par ledit roi.

En après, le roi Henri d'Angleterre, qui, à grand EN labeur et diligence, avoit continué son siége, et encore continuoit devant le marché, et astreint les assiégés par telle manière, que grand' partie de leurs murs étoient tous crevantés et dérompus en divers lieux, les fit un certain jour sommer qu'ils se rendissent franchement en la volonté du roi de France et de lui, ou si ce ne faisoient les feroit assaillir. A laquelle sommation ne voulurent pour cette fois entendre aucunement; mais dirent qu'il n'étoit pas encore heure d'eux rendre ; et pour tant le dessusdit roi fit commencer l'assaut très puissamment, lequel dura de sept à huit heures moult cruel et ensanglanté; et y furent, tant d'un côté comme d'autre, moult d'hommes navrés et occis. Mais, nonobstant que lesdits assiégés fussent fort travaillés de résister à la puissance desdits Anglois, qui moult étoit grande, néanmoins se défendirent moult vaillamment; et combattirent tant, qu'ils n'avoient dedans ledit marché de lances, sinon en petit nombre, que toutes n'eussent été rompues

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