Imágenes de página
PDF
ePub

quel fut crié Noël! par les carrefours où il passoit, et s'en alla loger à l'hôtel de l'Évêque, et là séjourna par huit jours entiers. Si étoient les gens d'armes logés au pays à l'environ, qui fort en fut travaillé, jà-soit-ce que le pays fût très abondamment pourvu de tous biens; auquel lieu vinrent aucuns bourgeois de la ville de Gournay en Normandie, envoyés de par les gouverneur et les habitants, lesquels se mirent en son obéisssance, promettant de tenir son parti; et à ce les reçut bénignement, et leur fit faire serment d'être bons et loyaux envers le roi et lui, ce qu'ils accordèrent libéralement. Et par ainsi leur quitta gabelles, subsides et impositions, comme il fit ès autres bonnes villes du roi, qui se mirent en son obéissance. Et entre temps, Hector et Philippe de Saveuse, messire Elyon de Jacqueville, et aucuns autres capitaines allèrent courre devant Beaumontsur-Oise, cuidant gagner le passage; mais il fut bien défendu par les gens du connétable, qui étoient dedans. Pourquoi iceux s'en retournèrent en la ville de Chambly-le-Haubergier; en laquelle, tant és églises come ailleurs par la ville, ils prirent biens sans nombre, et après retournèrent à Beauvais devers le duc leur seigneur, qui de rechel envoya, aucun peu dé jours ensuivant, grand' partie de ses gens loger audit lieu de Chambly et ès villages à l'environ.

Et tôt après, ledit duc, partant de Beauvais, les suivit à (avec) toute sa puissance, qui étoit moult

grande; et selon l'estimation des gens à ce connoissant; quand tous ses gens étoient assemblés, il pouvoit avoir bien soixante mille chevaux. Et lors, par le moyen et pourchas d'un gentilhomme nommé Charles de Mouy, fut tant traité que le seigneur de l'Ile-Adam se rendit du parti du duc de Bourgogne; et avec ce, mit et bailla sa ville et passage en la main de Jean de Fosseux, et d'Hector et Philippe de Saveuse, lesquels, pour la garder, mirent certain nombre de leurs gens. Pour laquelle besogne, quand ce vint à la connoissance du duc Jean de Bourgogne, il en fut très joyeux, tant pour ledit passage, comine pour icelui seigneur qui s'étoit tourné de son parti.

y

Et d'autre part, messire Jean de Luxembourg alla passer l'eau d'Oise atout (avec) grand nombre de gens d'armes qu'il avoit, par Pressy, à (avec) aucuns petits bateaux ; et firent ses gens, en la plus grand partie, nager leurs chevaux outre ladite rivière, et se logea en un village assez près ; et le lendemain, atout (avec) une partie de ses gens, alla courre devant la ville de Senlis dedans laquelle étoit messire Robert d'Esne, commis de par le roi, bailli d'icelle ville de Senlis, atout (avec) soixante combattants ou environ. Lequel fit saillir ses gens tous de pied à l'encontre dudit de Luxembourg et de ses gens, et y eut grand escarmouche. Toutefois la plus grand' partie du commun de ladite ville n'étoit pas bien content, de ce que ledit messire Robert d'Esne menoit guerre aux gens du duc de Bourgogne ; et

pour tant, la nuit ensuivant, après que messire Jean de Luxembourg fut retrait, ledit commun prit ledit messire Robert d'Esne et tous ses gens, et après qu'ils en eurent tué huit ou dix, le mirent en prison; mais, par le moyen d'aucuns des plus notables, il fut mis hors de la ville avec tous ses gens et leurs bagues. Duquel lieu s'en alla au Mont-Epiloy; et le lendemain, très matin, fut messire Jean de Luxembourg mandé de ceux de Senlis ; lesquels, pour et au nom du duc de Bourgogne, lui baillèrent obéissance, et entra dedans à son plaisir ; et là, reçut le serment d'eux pour le roi et le duc de Bourgogne, promettant qu'ils seroient bons et loyaux; et avec ce, fit Troullart de Montcaurel, nouvel bailli de Senlis,et aucuns autres officiers tels que bon lui sembla. Après lesquelles besognes, ledit de Luxembourg retourna devers ledit duc de Bourgogne.

CHAPITRE CLXXXIII.

Comment le duc de Bourgogne fit passer ses gens à l'Ile-Adam; et assiégea et conquit Beaumont et Pontoise, et de là alla loger à l'Arbre-Sec, et autres matières.

En après, le duc de Bourgogne fit refaire le pont de l'Ile-Adam, par lequel passèrent grand' partie de ses gens, que conduisoient les seigneurs de Fosseux, de Vergy, de Savense et de Wargnies,

lesquels se logèrent à pleins champs, et sous les haies et buissons, à une lieue près dudit passage. Et le lendemain très matin se délogèrent, et puis tous en belle bataille chevauchèrent jusques à Beaumont-sur-Oise, et là se logèrent dedans la ville et tout autour du châtel, nonobstant la défense de ceux de dedans ; et messire Jennet de Poix, atout (avec) quatre cents combattants sous son étendard, s'en alla loger en un village à une lieue près, en tirant vers Paris, et là se fortifia et tint tant que l'ost se délogea. Et ledit duc de Bourgogne, par l'autre côté de l'eau, se logea en ses tentes à plein champ, et tantôt fit asseoir ses gros engins pour jeter audit châtel de Beaumont par-dessus la rivière d'Oise. Lesquels engins furent continués tant et par telle manière, que ledit châtel fut grandement dommagé en plusieurs parties. Pourquoi les assiégés, voyants qu'ils étoient en péril d'être pris de force, se rendirent à la volonté dudit duc de Bourgogne, et furent trouvés dedans cinquante-deux personnes desquelles y en eut neuf qui eurent les têtes coupées, et furent pendus à un arbre, par les aisselles, et les autres furent depuis délivrés par finances, au moins la plus grand' partie; et le seigneur de Vergy, qui étoit maréchal de l'ost, à cause de son office, eut tous les biens qui furent trouvés dedans ledit châtel ; et après, le duc de Bourgogne fit refournir ledit châtel de vivres, et le bailla à un gentilhomme de Bourgogne, nommé Jean de Torsenay.

Apres laquelle prise, icelui duc fit partir son avant-garde qui étoit outre l'eau au côté vers Paris, et alla loger devers Pontoise, en l'abbaye de Maubuisson et autres lieux, devant icelle ville; et le duc se logea à l'autre côté, par-devers Beauvais ; et par ainsi fut tantôt du tout fort environnée. Et saillirent de première venue ceux de dedans contre leursdits adversaires; mais tantôt furent reboutés dedans. Et bref ensuivant, ledit duc fit asseoir ses gros engins devant les portes de Pontoise; et avec ce, fit commencer à faire plusieurs apparaux (appareils) pour iceux prendre et subjuguer. Mais quand les assiégés aperçurent lesdits apparaux, ils commencèrent à parlementer. Et finablement, en dedans les cinq jours ensuivant, rendirent ladite ville en la main du duc de Bourgogne, par condition qu'ils s'en allèrent, saufs leurs corps et leurs biens. Et si promirent qu'ils ne s'armeroient pas à l'encontre de lui jusques au jour de Noël ensuivant; laquelle chose ils n'entretinrent pas; car eux venus et arrivés à Paris, ils commencèrent à mener guerre comme devant. Et étoient dedans ladite ville trois capitaines ayant étendards; c'est à savoir le bâtard de Sainte-Terre, Tromagon et Marigon, natifs du pays de Gascogne; lesquels, comme dit est, se partirent tous ensemble sous le sauf-conduit dudit duc de Bourgogne, et s'en allèrent par le pont de Meulan à Paris.

Et après leur partement, ledit duc à (avec) privée mesgnie (suite) entra dedans ladite ville pour la

« AnteriorContinuar »